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Dossier : 2002-4629(IT)I

ENTRE :

JOCELYNE RICHARD,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu le 22 octobre 2003 à Shawinigan (Québec)

Devant : L'honorable juge Paul Bédard

Comparutions :

Avocat de l'appelante :

Me François Rioux

Avocate de l'intimée :

Me Julie David

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JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, dont l'avis est daté du 22 janvier 2002 et porte le numéro 19135, est rejeté selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de janvier 2004.

« Paul Bédard »

Juge Bédard


Référence : 2003CCI790

Date : 20040112

Dossier : 2002-4629(IT)I

ENTRE :

JOCELYNE RICHARD,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bédard, C.C.I.

[1]      Il s'agit d'un appel, interjeté selon le régime de la procédure informelle, d'une cotisation établie à l'égard de l'appelante en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ).

[2]      Lorsqu'il a établi l'avis de cotisation faisant l'objet du présent litige, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) s'est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes énoncées au paragraphe 3 de la Réponse à l'avis d'appel :

a)          Jérôme Légaré est l'époux de l'appelante depuis 1964.

b)          Quant à l'état matrimonial du couple, il n'existait à la date du transfert aucune demande en séparation, en nullité de mariage ou en divorce.

c)          En 1999, Jérôme Légaré détenait avec Marc Richard une entreprise exploitée sous la raison sociale « Les Concepts Remise Décora » (ci-après l'entreprise).

d)          Suite à une vérification, il s'est avéré que l'entreprise n'avait pas effectué ses remises de déductions à la source pour une partie de l'année 1998 et pour l'année 1999.

e)          En date du 12 juillet 2000, une cotisation pour défaut de remettre, au montant de 8 648,15 $ a conséquemment été émise à l'appelante.

f)           Marc Richard, l'un des propriétaires, a fait une cession de ses biens en date du 7 novembre 2000.

g)          Le 5/9/2000, M. Légaré a contracté une hypothèque de 15 000 $ sur sa résidence familiale située au 905, boul. St-Alexis, St-Louis-de-France (Québec) G8T 1B7.

h)          L'appelante a consenti à ce que l'immeuble soit grevé de l'hypothèque et a donc agi à titre d'intervenante.

i)           Le 7/12/2000, Jérôme Légaré a vendu ledit immeuble à l'appelante pour un montant de 3 837,13 $ lequel représentait le solde en capital de l'obligation hypothécaire de Monsieur à cette date.

j)           La juste valeur marchande de l'immeuble, à la date du transfert, a été établie à 40 000 $.

k)          En date du 22 janvier 2002, la dette fiscale de Jérôme Légaré s'élevait à 5 674,30 $.

l)           Cette dette représentait les retenues à la source non versées.

m)         Le Ministre a confirmé l'avis de cotisation puisque la juste valeur marchande du bien au moment du transfert, 40 000 $, excédait la contrepartie de 3 837,13 $ donnée pour le bien.

[3]      Les arguments présentés par l'avocat de l'appelante portent sur les sujets suivants :

i)         la créance de l'appelante envers son conjoint en vertu des dispositions du Code civil du Québec sur le patrimoine familial. L'avocat de l'appelante soutient que l'appelante a une créance envers son conjoint correspondant à 50 % de la juste valeur marchande de la résidence familiale lors de son transfert et que la somme de 17 500 $ doit ainsi faire partie de la contrepartie donnée par l'appelante lors du transfert;

ii)        la juste valeur marchande de la résidence familiale lors de son transfert à l'appelante. L'avocat de l'appelante soutient que la juste valeur marchande de la résidence familiale est de 35 000 $ lors de son transfert et non pas de 40 000 $ comme l'allègue le ministre;

iii)       la contrepartie donnée par l'appelante lors de l'acquisition de la résidence familiale. L'avocat de l'appelante était d'avis que la somme de 15 000 $ doit être comprise dans la contrepartie donnée par l'appelante lors de l'acquisition de la résidence familiale puisque cette dernière était alors grevée d'une hypothèque du même montant. Par contre, le ministre allègue dans la Réponse à l'avis d'appel que monsieur Jérôme Légaré a vendu la résidence familiale à l'appelante pour un montant de 3 837,13 $, lequel représentait le solde du capital de l'obligation hypothécaire de monsieur Légaré à cette date.

[4]      Les dispositions du paragraphe 160(1) de la Loi prévoient essentiellement que lorsqu'une personne transfert un bien à son époux ou épouse, le bénéficiaire et l'auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement des dettes fiscales de l'auteur du transfert jusqu'à concurrence du moins élevé des montants suivants :

i)         l'excédent de la juste valeur marchande du bien au moment du transfert sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée pour ce bien,

ii)        le total des montants dont chacun représente un montant que l'auteur du transfert doit payer en vertu de la Loi au cours de l'année d'imposition dans laquelle le bien a été transféré ou d'une année d'imposition antérieure ou pour une de ces années.

Analyse

[5]      Avec la plus grande déférence pour l'opinion contraire, les dispositions du Code civil du Québec traitant du patrimoine familial doivent s'interpréter de la façon suivante :

i)         Le patrimoine familial est composé des biens énumérés aux paragraphes 1 et 2 de l'article 415 du C.c.Q. Il comprend notamment les résidences de la famille et les meubles qui garnissent ou ornent les résidences et qui servent à l'usage du ménage.

ii)        L'article 416 du C.c.Q. prévoit qu'en cas de séparation de corps, de dissolution ou de nullité du mariage, la valeur du patrimoine familial des époux, déduction faite des dettes contractées pour l'acquisition, l'amélioration, l'entretien ou la conservation des biens qui les constituent, est divisée à parts égales, entre les époux ou entre l'époux survivant et les héritiers, selon le cas.

iii)       Le droit des conjoints sur le patrimoine familial n'est pas un droit réel emportant un droit de propriété, mais constitue au contraire un droit de créance général et personnel qui prend naissance ou prend effet au moment qui donne droit au partage du patrimoine. Par conséquent, l'appelante ne peut prétendre qu'elle avait un droit de créance envers son conjoint au moment du transfert de la résidence familiale puisqu'à ce moment aucun des événements visés à l'article 416 du C.c.Q. donnant naissance au droit de créance ne s'était encore produit. Je suis donc d'avis que l'appelante a tort de prétendre que son droit de créance fait partie de la contrepartie donnée lors de son acquisition de la résidence.

[6]      Quant aux objections soulevées par l'avocat de l'appelante concernant la juste valeur marchande de la résidence familiale lors du transfert et concernant la somme de 15 000 $ qui, dit-il, doit faire partie de la contrepartie donnée par l'appelante lors de l'acquisition de la résidence familiale, je ne vois pas l'utilité de les analyser et de statuer à leur égard. En effet, même si je donne raison à l'appelante sur ces deux questions, il n'en demeure pas moins que la juste valeur marchande de la résidence lors du transfert, soit 35 000 $, excédait de 20 000 $ la contrepartie donnée par l'appelante, soit suffisamment pour la rendre solidairement responsable de la dette fiscale de 5 674,30 $ de son conjoint.

[7]      L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de janvier 2004.

« Paul Bédard »

Juge Bédard


RÉFÉRENCE :

2003CCI790

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-4629(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Jocelyne Richard et M.R.N.

LIEU DE L'AUDIENCE :

Shawinigan (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 22 octobre 2003

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

L'honorable juge Paul Bédard

DATE DU JUGEMENT :

Le 12 janvier 2004

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :

Me François Rioux

Pour l'intimée :

Me Julie David

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER:

Pour l'appelante :

Nom :

Me François Rioux

Étude :

Brunet, Rioux

Cap-de-la-Madeleine (Québec)

Pour l'intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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