Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2002-2354(EI)

ENTRE :

GORDON LAWRENCE SCOTT,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Gordon Lawrence Scott (2002-2356(CPP)) les 6 et 7 février 2003 à Victoria (Colombie-Britannique)

Devant : L'honorable juge D. W. Rowe

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocat de l'intimé :

Me Victor Caux

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel est rejeté et les cotisations établies par le ministre sont confirmées conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Sidney (Colombie-Britannique) ce 21e jour de mars 2003.

« D. W. Rowe »

Juge suppléant Rowe, C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2004.

Daniel E. Renaud, traducteur


Référence : 2003CCI120

Date : 20030321

Dossier : 2002-2354(EI)

ENTRE :

GORDON LAWRENCE SCOTT,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge suppléant Rowe, C.C.I.

[1]      L'appelant a interjeté appel à l'encontre de deux décisions distinctes - toutes deux datées du 28 mars 2002 - dans lesquelles le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a confirmé, en application des dispositions pertinentes de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ) et du Régime de pensions du Canada (le « Régime » ), respectivement des cotisations antérieures émises le 3 octobre 2001 pour des contributions au Régime de pensions du Canada (RPC) et des cotisations d'assurance-emploi (a.-e.) émises à l'égard de certains travailleurs - dont les noms sont énumérés dans l'annexe « A » desdites décisions - puisque ces derniers étaient employés de Gordon Lawrence Scott aux termes d'un contrat de louage de services. L'appelant a interjeté un appel distinct, 2002-2356(CPP), à l'encontre de la décision concernant le Régime. L'appelant, qui a comparu pour son propre compte, et l'avocat de l'intimé ont convenu que les deux appels devraient être entendus ensemble.

[2]      L'appelant, Gordon Lawrence Scott (M. Scott), a indiqué dans son témoignage qu'il résidait à Victoria, en Colombie-Britannique et était le propriétaire unique d'une entreprise qu'il exploitait sur l'île de Vancouver et dans le Lower Mainland. Depuis 30 ans il vend une foule de produits sous diverses appellations commerciales. Pendant la période visée, il avait embauché des individus pour faire la vente de téléphones cellulaires et accessoires de ceux-ci, ainsi que des systèmes de sécurité à domicile. En 1998 et 1999, M. Scott avait passé un contrat avec Rogers AT & T (Rogers) et avec Price Alarms Ltd. (Price) pour vendre leurs produits. M. Scott a affirmé avoir eu recours à diverses stratégies dans l'exploitation de son entreprise. Selon une stratégie de vente, il faisait appel à plusieurs vendeurs itinérants; selon une autre, il installait un kiosque dans un centre commercial ou louait une stalle lors d'une foire commerciale ou d'un autre événement public. Étant donné le succès remporté par la stratégie des kiosques dans un centre commercial, M. Scott a décidé d'étendre son exploitation aux centres commerciaux en louant des locaux pour commerce de détail; l'offre de ces magasins était composée de téléphones cellulaires et d'accessoires, ainsi que de systèmes de sécurité à domicile. Selon l'emplacement du point de vente au détail, différentes appellations commerciales étaient exploitées mais celles-ci étaient toutes possédées et exploitées par l'appelant en sa qualité de propriétaire unique. En raison des modes de fonctionnement empruntés par M. Scott pendant les 30 années d'exploitation de son entreprise, ce dernier a indiqué qu'il ne lui avait jamais été nécessaire de congédier quiconque : soit les employés découvraient rapidement ne pas être doués pour la vente, soit ils étaient insatisfaits de la somme gagnée à simple commission. Pendant cette période, il a toujours monté des kiosques lors d'expositions tout en faisant appel à une stratégie de vente externe afin de faire connaître ses divers produits du public. Aucun employé n'a eu droit aux avantages sociaux qui découlent normalement d'un emploi, ni reçu la garantie d'une rémunération minimale. M. Scott a affirmé qu'aucun employé ne s'était jamais plaint de son statut d'entrepreneur indépendant. M. Scott s'est dit surpris de recevoir, le 28 mars 2002, la décision confirmant les cotisations émises par le ministre le 3 octobre 2001, car il avait préalablement reçu une lettre, pièce A-1 datée du 28 septembre 2001, à l'intention de [traduction] « Gordon Lawrence Scott, exploitant de West Shore Cellular » dans laquelle le ministre annulait les cotisations antérieures émises à ce nom. M. Scott a indiqué qu'il n'avait exploité qu'un point de vente sous ce nom. En ce qui a trait aux opérations quotidiennes, M. Scott a indiqué qu'il n'exerçait aucun contrôle ni aucune supervision sur ses employés. Les magasins situés dans des centres commerciaux étaient dotés de deux employés à temps plein et un employé à temps partiel. Ceux-ci s'occupaient de leur propre horaire de travail. Les produits de Rogers y étaient présentés et les personnes intéressées pouvaient également se procurer un système de sécurité à domicile de Price. Les téléphones cellulaires (cellulaires) étaient, soit distribués gratuitement dans le cadre d'un contrat global de services, soit vendus pour une somme symbolique variant selon le type de téléphone choisi et la nature des services de téléphonie cellulaire fournis pendant une période donnée, c'est-à-dire une, deux ou trois années. Les magasins situés dans les centres commerciaux vendaient également des casques d'écoute, des adaptateurs pour allume-cigar d'auto, des étuis et d'autres accessoires que M. Scott obtenait en consignation de fournisseurs divers. La commission payée par Rogers ou Price à l'appelant était fonction de la valeur du contrat auquel s'était engagé le client; M. Scott gardait cependant le produit de la vente des accessoires de téléphone. Quant à Price, l'appelant n'était responsable que de la vente de contrats de services liés aux systèmes de sécurité; Price s'occupait de toutes les autres transactions avec le client, telles l'installation et la facturation subséquente. M. Scott a affirmé que sa participation dans les transactions avec Rogers et Price se limitait à la simple [traduction] « paperasserie » visant à initier les contrats entre ces firmes et leurs éventuels clients. Pendant la période visée, M. Scott exploitait cinq magasins et, dans chacun de ceux-ci, trois ou quatre employés assuraient le service aux clients. Il communiquait avec ses travailleurs par téléphone et son entreprise n'était dotée, ni d'une structure organisationnelle, ni d'une hiérarchie conventionnelle. M. Scott a indiqué qu'il avait conclu des ententes avec la direction des centres commerciaux pour la location de locaux pour commerce de détail dans le but de faire la vente de contrats de services de téléphones cellulaires et d'accessoires téléphoniques, ou bien de système de sécurité. Au départ, il avait réussi à louer les locaux au mois. Ces locaux étaient dotés d'un bureau, de mobilier connexe et d'appareils téléphoniques loués, lesquels étaient branchés sur une ligne desservant également un système de paiement direct (Interac) fourni par une institution financière. À d'autres occasions, M. Scott obtenait des organisateurs de foires commerciales ou d'expositions un espace pour aménager un présentoir afin de démontrer les produits offerts aux clients. M. Scott a indiqué que les employés achetaient leurs propres téléphones cellulaires pour en démontrer les caractéristiques et pour communiquer avec leurs collègues de travail. Ils utilisaient leurs propres véhicules pour faire de la vente porte-à-porte, pour faire la promotion de vente à d'autres endroits, ou pour se rendre à des réunions ou à des événements auxquels participeraient d'éventuels clients d'un service de téléphone cellulaire. M. Scott et Rogers partageaient à parts égales les frais engagés pour participer à ces expositions. En ce qui a trait aux revenus générés, M. Scott a indiqué qu'il recevait une commission de Rogers ou de Price pour les ventes réalisées pendant une période donnée. M. Scott accordait alors 50 p. 100 de la somme globale ainsi reçue aux travailleurs ayant vendu des articles particuliers et des contrats de services de téléphone cellulaire. Les travailleurs étaient payés par chèque émis la troisième semaine du mois suivant, afin de permettre le calcul des annulations et des contre-passations d'effets. M. Scott a indiqué que les travailleurs avaient une certaine marge de manoeuvre dans la détermination des prix des téléphones cellulaires, étant donné qu'ils pouvaient réduire le coût initial ou inclure certains accessoires afin de rendre l'achat plus alléchant pour l'acheteur éventuel. Le vendeur faisant appel à cette tactique de vente devait défrayer, au prix coûtant, toute marchandise ainsi utilisée. La structure de commission imposée à M. Scott et à ses travailleurs exigeait qu'un client, conformément aux dispositions du contrat de services de téléphone cellulaire, ait acquitté les frais de services mensuels pendant une période minimale de six mois. Tout manquement survenant avant l'expiration de ce délai était imputé à M. Scott et, en fin de compte, au vendeur du contrat en question. M. Scott a indiqué qu'il tentait d'obtenir au moins 50 $ pour chaque téléphone cellulaire et chaque contrat de services vendus, et partageait à parts égales avec le vendeur toute commission, dont le montant augmentait en raison de la durée supplémentaire du contrat de services. Pendant la période visée, certains clients qui s'étaient liés par un contrat de services d'une durée de un ou deux ans ont reçu leurs téléphones gratuitement. Par la suite, compte tenu de l'amélioration technologique du produit et de l'augmentation concomitante de son prix, les clients devaient normalement payer pour obtenir leurs téléphones. M. Scott a indiqué que bien que Rogers s'occupe de la vérification de crédit d'éventuels clients, certains travailleurs avaient tout de même perdu une partie de leurs commissions en raison de manquements ultérieurs de clients dans le délai prescrit de six mois. Environ 12 p. 100 de toutes les ventes faisaient l'objet d'annulation, de défaut de paiement ou de révision du calcul des commissions payables; ces variations étaient calculées par Rogers et, conformément aux dispositions contractuelles, la somme en question était déduite du montant payable à M. Scott qui, à son tour, mettait les données comptables fournies par Rogers à la disposition des vendeurs touchés, dont les chèques de commission étaient réduits dudit montant. M. Scott a indiqué que son entreprise ne dépendait pas d'un travailleur particulier et n'était pas non plus, pour plusieurs vendeurs, leur seule source de revenu. Rogers s'occupait de fournir aux vendeurs la formation nécessaire et absorbait les coûts liés à celle-ci. Une formation supplémentaire était fournie par les représentants des fabricants de téléphones cellulaires, qui en absorbaient également les coûts. La durée de la formation était limitée à quelques heures, consacrées principalement à l'apprentissage de méthodes d'explication du fonctionnement de nouveaux téléphones à un client éventuel, qui devait composer avec la désuétude et l'obsolescence de son téléphone encore relativement neuf. De l'avis de M. Scott, les travailleurs voulaient posséder des téléphones cellulaires neufs afin de rester à la fine pointe de la technologie, et ils voulaient les utiliser pour en démontrer et en enseigner le fonctionnement dans le cadre d'une tentative de vente. Le coût d'un programme de publicité était partagé à parts égales entre Rogers et M. Scott; Rogers et Price fournissaient sans frais du matériel promotionnel et publicitaire aux travailleurs. Pendant les années 1998 et 1999, la majeure partie des revenus de M. Scott était dérivée de la vente de téléphones cellulaires et des contrats de services de Rogers; auparavant, la vente de systèmes de sécurité Price pour les domiciles et les petites entreprises avait été une composante importante de son entreprise.

[3]      Lors du contre-interrogatoire, l'avocat de l'intimé a demandé à M. Scott de se référer à une lettre de décision, la pièce R-1 datée du 28 mars 2002, à laquelle était jointe une feuille énumérant les noms des travailleurs pendant la période visée. M. Scott a indiqué qu'il avait exploité son entreprise dans cinq magasins à Victoria, Duncan et Nanaimo; certains étaient situés dans des centres commerciaux, d'autres avaient pignon sur rue. M. Scott a indiqué que les travailleurs étaient affectés à divers endroits, notamment lorsque l'un d'entre eux était malade ou ne pouvait pas être présent pour son quart de travail. De plus, les travailleurs s'occupaient de répartir entre eux les quarts de travail et affichaient l'horaire dans leur milieu de travail. Aucun travailleur n'avait conclu de contrat avec Rogers et les primes de rendement accordées lorsqu'un certain volume de ventes était réalisé étaient payées par Rogers à M. Scott. Selon la nature de la prime reçue de Rogers, celle-ci était, soit partagée à parts égales avec le vendeur, soit, à l'occasion, versée entièrement au travailleur par M. Scott. Conformément aux clauses des baux, les magasins situés dans des centres commerciaux devaient respecter des heures d'ouverture particulières et donc, être dotés en personnel en conséquence. En 2001, les travailleurs d'un magasin situé dans un centre commercial de Nanaimo avaient débrayé; afin de continuer les affaires, M. Scott les avait remplacés dès le lendemain. M. Scott plaçait des annonces publicitaires dans les journaux pour générer de l'intérêt dans les activités de son entreprise. Il préférait s'associer avec des personnes possédant une expérience de la vente même si, de son propre aveu, une personne n'avait pas besoin de [traduction] « beaucoup de talent pour aller dans un centre d'achats distribuer gratuitement un téléphone » . M. Scott a reconnu qu'une certaine connaissance du produit était nécessaire et qu'un travailleur devait posséder les aptitudes nécessaires pour remplir le contrat de vente et la documentation connexe. Il était permis aux travailleurs de vendre des téléphones d'occasion dont ils étaient propriétaires sans en partager le profit avec M. Scott même si la transaction avait pris place dans les locaux qu'il louait. Rogers accordait à chaque vendeur 700 minutes de temps d'antenne gratuit chaque mois; mais le travailleur devait d'abord s'acheter un téléphone cellulaire au prix coûtant et en défrayer les droits de permis et la taxe sur les produits et services (TPS); il devait également accepter la responsabilité de tout appel interurbain facturé ultérieurement à son compte. Si un client manquait à ses obligations avant l'expiration du délai de six mois du contrat de services, un vendeur pouvait se voir retirer sa commission. Tous les travailleurs recevaient la même commission, soit environ 75 $ pour chaque vente d'un téléphone et d'un contrat. M. Scott a indiqué qu'aucun vendeur n'avait jamais demandé une part plus importante de la commission payée par Rogers, ni mis en doute la période de rémunération, le mode de paiement ou les contre-passations d'effets, aussi appelées recouvrements, imputées conformément à l'état de rapprochement préparé par Rogers dans lequel chaque client était individuellement identifié par son numéro de téléphone. Au plus tard cinq jours après avoir reçu le chèque de commission de Rogers, M. Scott versait à chaque vendeur la moitié qui lui revenait pour la vente d'un contrat de services ou d'accessoires. Comme aucun vendeur ne gagnait plus de 30 000 $ par année pour la prestation de ses services et, par conséquent, n'était pas tenu de s'inscrire, M. Scott n'avait jamais reçu de facture pour la TPS. M. Scott n'avait jamais remis de feuillet T4A à ses travailleurs, mais il tenait un registre des paiements effectués en conservant les chèques oblitérés; et remettait ceux-ci à l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC), de même que la liste des noms de tous les travailleurs pendant la période visée. La somme versée à chaque travailleur était fondée sur la facture mensuelle que celui-ci présentait à M. Scott; dans cette facture, chaque vendeur détaillait ses activités de vente pour le mois et émumérait les biens qu'il avait donnés gratuitement à ses clients. Environ 90 p. 100 de toutes les ventes étaient réglées par le système Interac. M. Scott a affirmé qu'aucun des magasins n'était dirigé par un gérant désigné, et que le vendeur chargé de préparer l'horaire de travail ne pouvait forcer ses collègues à respecter cet horaire. Les travailleurs du magasin de Nanaimo s'occupaient des transactions bancaires et Satnam Dhillon exploitait le magasin de Duncan. M. Scott a identifié une lettre - pièce R-2 - adressée à Glen Foster, vérificateur de la TPS pour l'ADRC, dans laquelle il avait identifié certaines personnes comme ayant été ses associés à un certain moment en 1999. Étaient nommés dans cette lettre, à titre d'ex-associés: MM. Matt Powell et Derek Langdon dans divers magasins connus sous l'appellation de West Shore Cellular, Lance Bedard dans Duncan Cellular, Mark Coté dans Nanaimo Cellular et Mike Fabbro dans Nanaimo Cellular South. Ces personnes avaient été les associés de M. Scott sur la base d'un partage par moitié - 50/50 - du solde restant après l'acquittement des dépenses liées à l'exploitation d'un commerce de détail particulier et le versement des commissions redevables aux travailleurs. On a montré à M. Scott une carte professionnelle - pièce R-3 - que celui-ci à décrite comme étant un outil de point de vente typique de ceux qui sont fournis aux travailleurs par les fournisseurs de services de téléphone cellulaires. On a présenté à M. Scott une autre carte professionnelle - pièce R-4 - sur laquelle Derek Langdon était qualifié de directeur de West Shore Cellular. M. Scott a expliqué que Langdon avait été co-propriétaire de cette entreprise vers la fin de 1999, mais n'avait auparavant été qu'un simple vendeur. M. Scott a précisé qu'il ne voyait aucun inconvénient à ce qu'un travailleur utilise un titre ou une description quelconque de ses fonctions, puisqu'il avait toujours estimé que chacun de ces travailleurs exploitait sa propre entreprise. Alors qu'il envisageait de constituer son entreprise en personne morale, M. Scott avait élaboré, pendant l'année 2000 un contrat de vendeur indépendant - pièce R-5; cependant, comme la majorité des travailleurs offraient leurs services selon une entente orale pendant la période visée, ce document n'avait pas été utilisé en 1998 et 1999. Bien que M. Scott ait conclu une fois avec un travailleur une entente par laquelle il consentait à verser une rémunération mensuelle minimale de 1 500 $ - ce qui s'était produit après 1999 - aucun travailleur, dans les années visées par les présents appels n'avait jamais reçu une rémunération minimale garantie en échange de la prestation de ses services.

[4]      M. Evan Ross a témoigné qu'il était directeur d'un magasin de vente au détail Rogers à Victoria. En juin 1999, il a commencé à travailler avec M. Scott; il a alors organisé ses propres activités de vente, y compris le porte-à-porte, et a participé à des expositions et à des foires commerciales. Il a aussi travaillé dans les locaux loués par M. Scott dans un centre commercial; afin de respecter les exigences de la direction du centre commercial, lui et ses collègues de travail ont dû s'en tenir à un horaire. M. Ross a indiqué qu'il n'était pas supervisé pendant ses activités de vente et qu'il était libre de prendre ses pauses lorsque bon lui semblait. Il a indiqué qu'il lui avait fallu débourser ses propres frais et vendre du produit afin de gagner un revenu. Il avait travaillé au magasin de West Shore Cellular situé à l'intérieur du Canwest Mall à Langdon, une municipalité de l'agglomération urbaine de Victoria. À ce magasin, les travailleurs coordonnaient leurs propres horaires de travail. M. Ross a également indiqué qu'il était libre de mener des activités de vente dans d'autres magasins. Rogers fournissait des brochures mais M. Ross achetait des fournitures, tels des stylos, a acheté un cellulaire et en a payé les droits de permis ainsi que la TPS, et a accepté la responsabilité de payer pour tout appel interurbain facturé ultérieurement à son compte. À l'occasion, suivant son instinct, il donnait simplement un cellulaire à un client dans l'attente que cette personne allait lui référer des connaissances, ce qui allait lui permettre de vendre plusieurs téléphones en même temps que des contrats de services. M. Ross a indiqué qu'il préférait s'entretenir directement avec ses propres clients de questions liées à la vente mais qu'il restait disposer à aider les autres clients en quête de réponses.

[5]      Lors du contre-interrogatoire, M. Ross a indiqué qu'il avait travaillé pour M. Scott de juin 1999 à août 2001. Il travaille actuellement dans un magasin exploité par Rogers dont les employés sont ceux de Radio Shack. Il connaissait M. Scott depuis un bon nombre d'années et était au courant, dès son embauche, qu'il allait travailler à titre d'entrepreneur indépendant, être rémunéré par commission sans aucune garantie de rémunération et qu'aucune retenue à la source ne serait prélevée sur ses chèques de paie. Il ne s'est pas inscrit à la TPS, étant donné que son revenu annuel n'excédait pas 30 000 $ et qu'il n'avait aucun permis d'affaires pour la vente de téléphones et d'accessoires. Précédemment, il avait travaillé comme gestionnaire dans l'industrie alimentaire. Chaque mois, il tenait un registre des ventes qu'il avait réalisées, y compris les détails comme les dates d'activation, les plans de forfaits, les numéros de téléphone cellulaire et les accessoires donnés gratuitement aux clients afin de conclure une vente. M. Ross recevait 50 p. 100 de toute commission découlant de ses ventes et versée à M. Scott par Rogers. Il n'avait jamais réclamé une part plus importante de la commission. Il avait vu, de temps à autre, ses commissions réduites par les recouvrements effectués en raison du manquement d'un client mais un tel recouvrement n'avait jamais excédé la commission gagnée initialement sur cette vente. L'ordinateur du commerce de détail ou centre commercial servait à produire une facture qui pouvait service à réclamer à l'appelant la part de 50 p. 100 des commissions que celui-ci devait à chaque travailleur. Rogers assurait la formation et l'enseignement liés aux renseignements techniques, aux techniques de ventes et à l'explication aux acheteurs des prix des divers plans de services offerts à ces dernières. Les accessoires des téléphones étaient en consignation et M. Ross n'avait pas à défrayer à M. Scott le loyer ni les frais généraux. Il a indiqué que l'horaire de travail structuré établi pour le magasin situé dans le centre commercial visait à respecter l'entente convenue entre M. Scott et la direction du centre commercial quant aux heures d'ouverture et de fermeture. En ce qui concerne l'ensemble de ses ventes, M. Ross a estimé qu'il réalisait 60 p. 100 de ses ventes à l'intérieur du magasin situé dans le centre commercial; le reste était réalisé ailleurs, notamment dans les foires commerciales. Rogers lui fournissait des cartes professionnelles et lui accordait 700 minutes de temps d'antenne gratuitement chaque mois. Il achetait, au prix coûtant, un cellulaire chaque année. Pendant sa relation de travail, il ne relevait pas de M. Scott mais deux personnes, MM. Matt Powell et Derek Langdon, qui travaillaient également au magasin de West Shore Cellular. M. Ross savait que Langdon avait été l'associé de M. Scott. De temps à autre, par simple politesse, M. Ross lui a indiqué qu'il lui avait fallu trouver quelqu'un pour le remplacer. Il n'y avait que trois ou quatre travailleurs; le magasin était ouvert jusqu'à 21 h seulement deux soirs par semaine, mais était ouvert également le dimanche. M. Ross a indiqué que si l'un de ses clients s'arrêtait au magasin pour lui parler en son absence, l'un de ses collègues au magasin donnait au client le numéro de cellulaire à composer pour le joindre. M. Ross avait lui-même défrayé les frais d'adhésion à la Chambre de commerce (la Chambre); et pour participer à des expositions ou d'autres événements du genre, il avait défrayé les coûts de location d'un espace, soit 25 $ ou 50 $, afin de monter une table destinée à offrir ses produits à la vente au public. Une réunion de gens d'affaires avait été organisée par la Chambre et M. Ross avait payé lui-même son droit d'entrée. À l'occasion, M. Ross travaillait dans un kiosque Rogers lors d'une foire ou d'une exposition et en défrayait les coûts, mais il tentait normalement de s'associer avec un autre vendeur avec lequel partager les dépenses. Parfois, les commissions de ces ventes s'avéraient insuffisantes pour défrayer les coûts, mais cette approche constituait tout de même une méthode efficace pour promouvoir le produit et vendre certains accessoires présentés. Les revenus de la vente d'accessoires téléphoniques étaient partagés à parts égales avec M. Scott, mais M. Ross était entièrement responsable des pertes découlant de l'endommagement ou du vol d'accessoires.

[6]      M. Christopher Balanko a témoigné qu'il était un associé aux ventes et avait été employé par Radio Shack à diverses reprises pendant une période de trois ou quatre années. Chez Radio Shack, il relevait de surveillants et travaillait dans une organisation hiérarchisée. M. Balanko a indiqué qu'il avait, après avoir entendu parlé de l'entreprise de M. Scott, communiqué avec ce dernier et initié une relation de travail dans le but de vendre des téléphones et des accessoires à simple commission. Chez Radio Shack, le prix de chaque article était fixe et saisi par l'ordinateur. M. Balanko a indiqué que sa familiarité avec le domaine de la vente des téléphones cellulaires l'avait incité à se lancer dans la vente, et qu'il avait acheté son propre cellulaire et loué un véhicule. À l'occasion, il avait vendu un cellulaire à un client en deçà du prix coûtant, en espérant que celui-ci lui réfèrerait d'éventuels clients, ce même s'il devait parfois mettre près d'une année avant de voir cette tactique porter fruit. Pendant la période visée, lorsqu'un client s'engageait dans un contrat de services d'une durée de un an, le téléphone lui était donné gratuitement ou au coût maximal de 50 $. Cependant, lorsqu'un client manquait à ses obligations et ne rétrocédait pas le téléphone, le recouvrement était effectué à même les autres commissions de vente gagnées. M. Balanko avait travaillé au magasin situé sur la rue Douglas à Victoria. Il avait également travaillé aux magasins situés dans les centres commerciaux Canwest et Tillicum. Pendant cette relation de travail, M. Balanko exploitait, en qualité du propriétaire unique, sa propre entreprise, Chris Computer Sales & Service, qu'il disait être composée d'un élément informatique qu'il exploitait de concert avec ses propres activités liées à la vente de téléphones unique.

[7]      Lors du contre-interrogatoire, M. Balanko a affirmé qu'il avait exploité son entreprise d'informatique en parallèle, pendant qu'il était à l'emploi de Radio Shack. Il a estimé que, pendant la période visée, de 50 p. 100 à 60 p. 100 de ses ventes provenaient de points de vente au détail; plus tôt dans sa carrière de vendeur, environ 90 p. 100 de ses ventes étaient réalisées sans recours à un magasin au détail fixe. À un certain moment, M. Balanko avait exigé sans succès de M. Scott une commission supérieure à 50 p. 100. M. Balanko tenait, tout comme M. Scott, un registre des ventes; en cas de désaccord, chacun pouvait se référer à sa propre documentation afin de résoudre le différend. Rogers tenait des séminaires et fournissait la paperasserie administrative; M. Balanko défrayait lui-même le coût de ses fournitures de bureau et avait acheté un téléphone cellulaire au coût de 250 $. Pendant qu'il travaillait avec MM. Matt Powell ou Derek Langdon, M. Balanko a indiqué qu'il ne considérait ni l'un ni l'autre comme son directeur et qu'il lui arrivait, lorsqu'il travaillait seul au magasin de la rue Douglas, de fermer le magasin plus tôt que prévu. Il n'était pas loisible aux travailleurs des magasins situés dans des centres commerciaux de faire ainsi, puisqu'il leur fallait respecter les heures d'affaires fixées dans le bail. Même si les garanties étaient offertes aux clients par les fabricants de téléphones cellulaires, M. Balanko a indiqué qu'il considérait comme siens les clients avec lesquels il transigeait. Il s'était procuré des étuis spéciaux pour téléphones qu'il vendait à ses clients, dont il gardait pour lui l'entièreté du produit de vente.

[8]      Lors du réinterrogatoire mené par M. Scott, M. Balanko a reconnu avoir reçu les renseignements pertinents sur les contre-passations effectuées en raison du manquement de certains clients, notamment leurs numéros de téléphone, et avoir communiqué avec ces derniers pour les convaincre de ne pas mettre fin au contrat de services car il souhaitait ne pas avoir à subir les contrecoups des contre-passations déduites d'éventuelles commissions.

[9]      M. Jason Little a témoigné qu'il était un associé aux ventes et qu'il savait, lorsqu'il avait initié une relation de travail avec M. Scott, qu'il n'y avait ni territoire de vente ni heures de travail fixes. Il travaillait au magasin de la rue Douglas, au West Shore Cellular de Tillicum et dans un petit espace situé à l'intérieur d'un magasin Costco. Il s'était également rendu dans l'état de Washington pour y effectuer une campagne de vente, et avait alors défrayé ses dépenses. Il a indiqué qu'il n'avait pas été supervisé par M. Scott et qu'il avait décidé lui-même de vendre des téléphones au Rodeo professionnel de Luxton. À l'occasion, il vendait un cellulaire en deçà du prix coûtant et voyait ses commissions réduites par les contre-passations effectuées en raison de manquements. Il avait travaillé avec M. Scott du 26 janvier 1997 à décembre 1998, et à nouveau depuis janvier 2000.

[10]     Lors du contre-interrogatoire, M. Little a indiqué que, comme il venait de compléter un cours offert par le gouvernement provincial sur la vente au détail, sa curiosité avait été piquée lorsqu'il avait entendu parler de l'entreprise de M. Scott. Pendant toute sa période d'emploi, il était satisfait du partage à parts égales de la commission et il avait reçu les renseignements pertinents sur les contre-passations effectuées que Rogers avait fournis à M. Scott. Il connaissait le coût de chaque téléphone et réduisait parfois le prix de 20 $ afin de conclure une vente. Sur ses déclarations de revenus il déclarait ses revenus à titre de travailleur indépendant. Il a estimé que de 35 p. 100 à 40 p. 100 de ses ventes étaient réalisées ailleurs que dans les points de vente et a affirmé avoir dû défrayer lui-même les coûts des formulaires d'affaires, des stylos et des crayons, ainsi que ceux associés à l'utilisation de son véhicule. Il avait acheté un téléphone Nokia pour la somme de 299 $ et l'avait remplacé tous les six mois afin de rester au courant des innovations technologiques. Il considérait les clients comme siens et était prêt, peu importe le magasin dans lequel il travaillait, à répondre sans être rémunéré à toute question qui lui était posée.

[11]     M. Satnam Dhillon a témoigné qu'il avait commencé à travailler pour l'appelant en 1998 dans un magasin de détail de Duncan, en Colombie-Britannique, et qu'il savait que la vente de téléphone cellulaire, qu'elle soit faite dans ce magasin ou ailleurs, notamment dans la communauté indo-canadienne du grand Vancouver, constituait un travail indépendant. M. Dhillon a indiqué que lorsqu'il travaillait au magasin de Duncan, il prenait ses pauses quand bon lui semblait et se rendait à Vancouver pour faire la livraison de téléphones qu'il avait vendus à des clients qui y habitaient. Il avait donné des téléphones à certains clients, en espérant que ceux-ci lui réfèreraient d'éventuels clients, mais il avait acheté ses propres téléphones. Il se sentait libre de générer d'autres revenus et, comme il n'y avait que deux personnes affectées au petit magasin de Duncan et que le magasin n'était pas situé dans un centre commercial, il n'était pas tenu par un horaire de travail fixe.

[12]     Lors du contre-interrogatoire, M. Dhillon a indiqué qu'il connaissait M. Scott depuis 1996. Avant cette date, M. Dhillon avait travaillé à temps partiel dans un magasin d'habillement au détail. Il n'avait pas fait enregistrer de nom commercial pour la vente de téléphones cellulaires dans le cadre de sa relation de travail avec M. Scott. Il ne lui avait pas été nécessaire d'obtenir l'autorisation préalable de M. Scott pour réduire le prix d'un téléphone; si un téléphone était vendu à 30 $ en deçà du prix coûtant, la perte était partagée à parts égales avec M. Scott. M. Dhillon a indiqué qu'il considérait le magasin de Duncan comme son propre bureau, même s'il n'avait pas investi dans ces locaux. Il achetait cependant ses propres fournitures et se payait les téléphones cellulaires les plus dispendieux, de 600 $ à 800 $, dans le but de posséder la plus récente technologie. La formation était assurée, sans frais, par Rogers et les fabricants tenaient aussi des séminaires afin de présenter leurs produits nouveaux. M. Dhillon a indiqué qu'il ne se souvenait pas d'avoir dit à un enquêteur de l'ADRC qu'il avait été le directeur du magasin de Duncan. Il a reconnu qu'il n'avait pas vendu de contrats de services de téléphone cellulaire autres que ceux de Rogers. Il a estimé que 70 p. 100 des ventes avaient été effectuées au magasin, mais a indiqué que d'autres ventes avaient été générées en faisant parvenir par télécopieur du matériel publicitaire à d'éventuels acheteurs dans la communauté indo-canadienne. Il gagnait environ 50 $ pour chaque contrat conclu et, s'il devait se rendre à Vancouver pour remettre un téléphone, il logeait chez des parents afin de réduire les coûts associés au déplacement. Comme les revenus continus découlant d'un contrat particulier de services de téléphone particuliers pouvaient dépasser les 200 $ par mois, la réduction du coût d'achat du téléphone s'avérait parfois une stratégie de vente profitable. Lorsqu'un téléphone moins dispendieux répondait aux besoins du client, il pouvait lui être donné gratuitement si le client était prêt à s'engager à un contrat de services d'une durée de deux années. M. Dhillon a indiqué qu'il s'était engagé à vendre tout téléphone cellulaire en deçà du prix de vente de ses concurrents et qu'il avait vendu, à prix réduit, un téléphone à un chauffeur de taxi dans l'espoir que d'autres chauffeurs de taxi seraient intéressés à se procurer un produit comparable.

[13]     Mme Aimee Quaife a été citée à comparaître comme témoin par l'avocat de l'intimé. Elle a indiqué qu'elle était étudiante au Camosun College et qu'elle avait commencé à travailler en juin 1998 au magasin Nanaimo Cellular and Alarms (Nanaimo Cellular) situé dans le centre commercial Woodgrove. À l'origine, elle occupait le poste d'associée aux ventes; plus tard, elle a été promue au poste de surveillante et enfin, à celui de gestionnaire adjointe. Les gestionnaires des magasins étaient M. Mark Coté (M. Coté), dans un premier temps, puis M. Gilbert Weekes. L'horaire de travail, que l'on s'assurait d'afficher dans l'arrière-boutique, était préparé au début par les gestionnaires et plus tard, par Mme Quaife ou Mme Kathy Peters. Les travailleurs devaient être au travail selon l'horaire établi. Après qu'on l'aie référée à l'annexe « A » - pièce jointe à la lettre figurant en pièce R-1 -, Mme Quaife a identifié plusieurs personnes dont les noms figuraient sur cette liste comme ses collègues de travail pendant la période visée. Mme Quaife a affirmé que Mme Monica Armour avait commencé à travailler au magasin pendant la période des Fêtes de 1998 et avait assuré la présence à une table qui avait été montée de l'autre côté du centre commercial dans le but de produire des revenus supplémentaires. Mme Mary Coté, l'épouse de Mark Coté, s'occupait d'organiser la paperasse. M. Kevin Hesketh avait travaillé dans le magasin et à la table. Mme Kathryn Kashmere, qui était également surveillante, avait travaillé dans le magasin. M. David Krypak avait brièvement travaillé dans le magasin de Nanaimo, mais il avait été congédié par M. Coté en raison de son absentéisme et de son manque de ponctualité. M. Lawrence Lavalle, congédié par M. Coté parce qu'il faisait la promotion des produits Amway tandis qu'il tentait de vendre des téléphones cellulaires et des accessoires aux clients, avait travaillé dans le magasin. Mme Quaife a indiqué que Mme Niki MacGregor, Mme Terri McNaughton, Mme Colleen Minifie, Mme Rebekah Norton, M. Gilbert Weekes, Mme Darcie Yarrow et Mme Jill Walsh avaient tous travaillé dans le magasin de Nanaimo. Certaines personnes, dont Mme Christi-Lee Chemko, Mme Lindsey Doolittle, M. Nicholas Karpinksy, M. Guy Landry, M. Branden Shortt, M. Dean Simpson et Mme Lucinda Thomson, avaient travaillé dans le magasin en 1999 alors qu'ils n'y avaient pas travaillé en 1998. Mme Quaife a indiqué qu'elle avait été responsable de la confection de l'horaire de travail et que les ventes étaient inscrites sur un calendrier affiché en arrière-boutique. M. Scott téléphonait quotidiennement pour s'enquérir des ventes. Les travailleurs devaient, selon le code vestimentaire prescrit, être vêtus convenablement, c'est-à-dire ne pas porter de jeans. Mme Quaife était également chargée du service à la clientèle, préparait les rapports d'entretien des téléphones défectueux et expédiait ces derniers à Victoria pour inspection et réparation. Vers la fin de sa relation de travail avec M. Scott, elle s'occupait de préparer la paie, du marchandisage des produits, de l'apposition des étiquettes de prix et du nettoyage, et elle accomplissait toute autre tâche nécessaire au bon fonctionnement du magasin. En fin de journée, l'argent et les chèques étaient placés dans une enveloppe qui était ensuite remise à M. Coté, lequel allait sans doute déposer la somme appropriée. Une ou deux fois, Mme Quaife est allée elle-même effectuer le dépôt à la banque; la machine de débit était également débranchée quotidiennement en fin de journée. Elle n'avait pas eu à débourser elle-même pour ses cartes professionnelles ni les fournitures qui lui étaient nécessaires à son travail dans le magasin. Pendant qu'elle avait travaillé au magasin, elle avait reçu sans frais quatre ou cinq téléphones cellulaires de M. Coté. Comme elle était rémunérée à commission, elle avait signalé à M. Coté son désir de participer à une foire commerciale à Nanaimo afin de vendre davantage. Il s'était montré favorable à sa demande et les dépenses liées à sa participation à la foire avaient été défrayées par Nanaimo Cellular. M. Coté avait également défrayé les coûts d'adhésion de Mmes Quaife et Kashmere à l'organisation des femmes d'affaires de Nanaimo. Mme Quaife a indiqué qu'avec Kathryn Kashmere, elles avaient décidé d'essayer de vendre des téléphones dans la région de Port Hardy, située à l'extrémité nord de l'île de Vancouver, et que M. Coté leur avait obtenu un permis d'affaires de quatre jours et avait défrayé leurs coûts d'hébergement, d'essence et de repas. Mme Quaife a indiqué qu'elle ne s'était jamais crue entrepreneur indépendant et croyait qu'il lui était interdit de travailler pour un employeur autre que Nanaimo Cellular. Lors de son embauche, après son entrevue avec M. Coté et M. Scott, il n'avait jamais été question du syntagme « entrepreneur indépendant » , même si elle savait qu'elle allait être rémunérée exclusivement à simple commission. Au départ, elle recevait un chèque de paie de Nanaimo Cellular signé de la main de M. Coté. Plus tard, M. Scott avait signé les chèques. Pour Mme Quaife, étant donné les nombreux détails à préciser lors de la vente d'un téléphone cellulaire ou d'un contrat de services, l'utilisation d'un formulaire spécial d'enregistrement des ventes était pratique courante dans l'industrie du téléphone cellulaire. Promue au poste de gestionnaire adjointe, elle avait été payée 500 $ par mois en sus de la moitié qui lui revenait des commissions découlant de la vente de téléphones. Auparavant, un travailleur pouvait obtenir le 5e jour du mois une avance de paie d'un montant maximal de 500 $ et recevait par la suite un chèque de paie réduit du montant avancé, le 20e jour de chaque mois. Cependant, M. Scott avait supprimé les avances. La formation reçue au Coast Bastion Hotel de Victoria avait été donnée gratuitement par Rogers. M. Scott ou M. Coté avait défrayé les coûts d'hébergement et de repas de Mme Quaife et d'une de ses collègues. Mme Quaife a indiqué que, pendant qu'elle travaillait dans le magasin, il lui était impossible d'embaucher une autre personne pour accomplir ses tâches et qu'elle ne pouvait prendre ses pauses que si quelqu'un d'autre était en mesure d'assumer la responsabilité du magasin. Les contre-passations de commissions gagnées étaient détaillées dans des télécopies envoyées par M. Scott. Comme la contre-passation était calculée en fonction du montant total du contrat de services, elle savait qu'il était possible que celui-ci excède parfois la commission précédemment gagnée, qui, elle, était partagée en parts égales. Le prix d'un téléphone était fonction du genre de contrat de services choisi par le client. Si le contrat générait un minimum de 50 $ chaque mois pendant sa durée, le téléphone pouvait être donné au client. Cependant, si le contrat ne générait que 20 $ par mois, le téléphone était alors vendu au client pour la somme de 100 $. Mme Quaife a indiqué qu'après être devenue gestionnaire adjointe, elle avait suffisamment compris les rouages de l'industrie pour pouvoir, à l'occasion, réduire le prix d'un téléphone tout en réalisant un profit. Tant qu'un profit pouvait être réalisé, il était permis à un vendeur de réduire, à sa discrétion, le prix d'un téléphone afin d'en conclure la vente. Mme Quaife a indiqué qu'elle avait reçu la directive de ne jamais laisser le magasin sans surveillance; toute dérogation à cette règle pourrait entraîner l'imposition d'une amende de 5 000 $ à M. Scott par la direction du centre commercial. Une fois, comme l'employé désigné était incommodé, Mme Niki MacGregor avait dû, bien qu'elle ait était en congé ce jour là, se rendre rapidement sur les lieux pour ouvrir le magasin. Mme Quaife a indiqué que les travailleurs savaient bel et bien que si le magasin n'était pas ouvert tel que le prévoyait l'horaire, quelqu'un allait prendre son emploi.

[14]     Lors du contre-interrogatoire mené par M. Scott, Mme Aimee Quaife a indiqué qu'elle avait compris - au début - que M. Coté était copropriétaire du magasin bien qu'elle l'ait considéré également comme gestionnaire de Nanaimo Cellular. En 1999, elle avait accepté le poste de gestionnaire adjointe et recevait 500 $ par mois. Elle n'avait pas eu à défrayer le coût des téléphones cellulaires qui lui avaient été donnés, les droits de permis, les impôts, ni aucun contrat de services s'y rattachant, parce que Rogers accordait 750 minutes de temps d'antenne gratuit chaque mois, ce qui a plus tard été augmenté à 1 500 minutes. Tout produit offert gratuitement à la clientèle devait être inscrit sur un registre et le coût en était partagé à égalité entre Nanaimo Cellular et elle-même. Elle a aussi reconnu que le code vestimentaire visait à encourager les travailleurs à se vêtir en professionnels, de façon à favoriser la vente, et n'était pas appliqué de façon stricte. Elle a aussi reconnu que certains employés avaient quitté de leur propre gré et postulé ailleurs.

[15]     En réponse aux questions qui lui ont été posées par la Cour, Mme Quaife a décrit le magasin de vente au détail comme étant d'une superficie de trois cent à quatre cent pieds carrés, et équipé de deux bureaux, d'un tiroir-caisse, d'une machine à débit et d'un ordinateur. L'arrière-boutique servait de bureau au gestionnaire et d'entrepôt des téléphones et des accessoires. Le magasin était doté de panneaux à trous pour des crochets et de présentoirs pour faire la mise en marché des produits. Les vendeurs pouvaient gagner une commission de 50 p. 100 en vendant des casques d'écoute, des prises sur allume-cigare d'auto et d'autres accessoires.

[16]     Mme Kathryn Peters, anciennement Kashmere, a témoigné qu'elle avait travaillé pour M. Scott de juin 1998 à juin 1999 dans le magasin situé dans le centre d'achat Woodgrove de Nanaimo. Elle avait répondu à une annonce dans un journal et passé une entrevue avec M. Coté avant d'être embauchée à titre de vendeuse adjointe à simple commission. Plus tard, elle avait été promue au poste de gestionnaire adjointe et chargée de l'ouverture et de la fermeture du magasin, de l'expédition et de la réception et des marchandises, et de la tenue des locaux. Encore plus tard, avec Mme Aimee Quaife, elles se sont toutes deux occupées d'établir l'horaire de travail de tous les travailleurs du magasin. En fin de journée, le volume des ventes quotidiennes était communiqué à M. Coté ou à M. Scott. Mme Peters s'occupait de la paie et préparait parfois les dépôts que M. Coté allait faire à la banque. En ce qui a trait à ses activités de vente, Mme Peters a indiqué qu'on lui avait fourni les outils et les fournitures nécessaires pour accomplir son travail, y compris les copies imprimées des contrats de services de téléphone cellulaire de Rogers; on lui avait également donné gratuitement un téléphone cellulaire. Elle recevait mensuellement la somme de 500 $ pour accomplir ses tâches de gestionnaire, à laquelle somme venaient s'additionner les commissions de 50 p. 100 découlant de la vente de téléphones. Elle préparait également une liste sur laquelle figuraient toutes les ventes et le nom du vendeur responsable de chaque vente. M. Coté préparait les chèques de paie en fonction de ces renseignements. Mme Peters a indiqué qu'elle croyait fournir ses services à titre individuel et qu'elle s'était assurée, pendant la période où elle travaillait avec Mme Quaife, que le magasin était toujours doté en personnel. Elle a dit se rappeler que M. Lavalle avait été congédié par M. Coté en raison de ses activités de vente de produits Amway, et que trois ou quatre autres travailleurs avaient mis fin à leur emploi pour diverses raisons.

[17]     Lors du contre-interrogatoire mené par l'appelant, Mme Kathryn Peters a indiqué qu'on lui avait dit que M. Coté était l'associé en affaires de M. Scott, en plus d'être le gestionnaire du magasin. Elle a reconnu que l'horaire de travail pouvait être modifié au besoin; comme elle ne voyait M. Scott qu'une fois par mois, elle suivait les directives que lui donnait le gestionnaire. Mme Peters a indiqué qu'elle s'était identifiée, lors de son entretien du 15 février 2002 avec le vérificateur de l'ADRC, comme vendeuse à commission et non comme entrepreneur indépendant.

[18]     M. Russell Lyon a témoigné qu'il était vérificateur au service de l'ADRC. À la suite d'un indice donné par un vérificateur de la TPS, il avait procédé à une vérification de la conformité des modalités d'emploi dans le cadre des activités de l'entreprise exploitée par l'appelant. Même si M. Scott avait déclaré une importante masse salariale, aucun compte de paie pour les retenues à la source n'existait auprès de l'ADRC. M. Lyon avait communiqué avec M. Scott et obtenu la liste des travailleurs pendant la période visée, ainsi que les photocopies des chèques oblitérés. M. Scott avait alors indiqué que tous les travailleurs étaient des travailleurs autonomes qui se livraient à la vente sans être supervisés. Certains travailleurs énumérés n'étaient pas identifiés par leur numéro d'assurance sociale (NAS) et M. Lyon avait tenté de repérer plusieurs personnes en consultant l'annuaire téléphonique. Somme toute, M. Scott avait remis sept ou huit boîtes de documents non classés, y compris du courrier non ouvert, mais n'avait pas remis de grand livre général ou d'autre livre comptable. Même si M. Scott n'avait pas émis de feuillets T4A, M. Lyon avait conclu que l'entreprise exploitée par l'appelant était constituée de cinq magasins, dont quatre étaient dirigés par une personne désignée comme gestionnaire. Les travailleurs n'avaient aucune dépense à engager pour l'exploitation des magasins, où s'effectuaient la majorité des ventes. M. Lyon a indiqué qu'il s'était entretenu avec huit des travailleurs nommés sur la liste et s'était rendu à Nanaimo afin d'interroger Mme Quaife, Mme MacGregor et M. Coté. Il s'était également entretenu au magasin de Duncan avec M. Dhillon, et avait eu une discussion avec M. Mike Fabbro. Comme il avait compris que M. Fabbro était l'associé de M. Scott dans le magasin de Harbour Park, M. Lyon n'avait pas répertorié M. Fabbro au nombre des employés pour les fins de la vérification de conformité. M. Lyon a indiqué qu'il avait réussi, au cours de son enquête, à départager les personnes qui travaillaient dans les magasins de celles qui n'y travaillaient pas et devaient se servir de leur seule initiative pour vendre. M. Lyon a indiqué qu'il s'était entretenu avec M. Dhillon, qui s'était présenté comme le gestionnaire du magasin. Pendant leur entretien, M. Dhillon avait indiqué que toutes les ventes étaient réalisées dans le magasin et qu'il ne croyait pas être un entrepreneur indépendant fournissant de services à M. Scott. M. Lyon a indiqué qu'après avoir examiné les renseignements recueillis pendant l'enquête, il en était arrivé à la conclusion que les travailleurs des magasins étaient bel et bien des employés de M. Scott. De nombreux travailleurs nommés sur la liste étaient jeunes et mobiles; aucune de leurs adresses n'avait été fournie. Aucun d'entre eux ne s'était inscrit pour la TPS, ne s'était procuré un permis d'affaires, ou ne possédait de raison sociale enregistrée. M. Lyon a indiqué que l'associé de M. Scott dans West Shore Cellular avait, à un certain moment, téléphoné à l'ADRC dans le but d'ouvrir auprès de celle-ci un compte de paie pour les retenues à la source. Cependant, M. Scott avait communiqué de nouveau avec l'ADRC et indiqué qu'il n'y avait pas lieu d'ouvrir un tel compte, puisque tous les travailleurs étaient des entrepreneurs indépendants. M. Lyon a indiqué que selon ce qui lui avait été dit par M. Scott, la norme de l'industrie de la vente de services de téléphonie cellulaire était de considérer les vendeurs comme des entrepreneurs indépendants. Afin de vérifier les dires de M. Scott, M. Lyon avait communiqué avec les autres fournisseurs de téléphones cellulaires qui exploitaient des kiosques dans les centres commerciaux. Il avait découvert que ces travailleurs étaient considérés comme des employés, tandis que les vendeurs itinérants étaient des entrepreneurs indépendants. M. Lyon a dit avoir indiqué à M. Scott, pendant la vérification, que tous les travailleurs des magasins devaient, selon toute vraisemblance, être considérés comme des employés. Les ventes totales réalisées par la structure commerciale de l'entreprise de M. Scott dépassaient un million de dollars par année et continuaient d'augmenter.

[19]     Lors du contre-interrogatoire mené par l'appelant, M. Russell Lyon a indiqué qu'il avait vendu des téléphones cellulaires et du temps d'antenne, et avait exploité avec un associé un club vidéo lorsqu'il avait 18 ans. Il connaissait les modalités de la location d'équipement et de la participation à des expositions et des événements publics, et il avait loué un local dans un centre commercial à Nanaimo. Il avait cependant été expulsé par la direction du centre commercial pour avoir dérogé aux dispositions du bail précisant les heures d'ouverture et de fermeture. M. Lyon a indiqué que M. Scott avait identifié, sur l'état des résultats qu'il avait joint à sa déclaration de revenus, les sommes payées aux travailleurs comme étant des [traduction] « salaires » . M. Lyon a indiqué qu'il n'avait pas regroupé tous les travailleurs dans une seule catégorie comme l'avait laissé entendre M. Scott, mais qu'il s'était plutôt assuré de ne pas considérer comme employés aux fins de son rapport de vérification les personnes qui étaient, soit des associés de M. Scott, soit des vendeurs dont les ventes avaient été réalisées uniquement ailleurs que dans les magasins. M. Lyon a indiqué qu'il s'était entretenu avec MM. Derek Langdon, Guy Landry et Nicholas Karpinsky. M. Lyon a indiqué qu'il avait conclu, après s'être entretenu avec divers travailleurs, que tous ceux-ci étaient d'opinion qu'il s'avérait très difficile pour eux de gagner leur vie exclusivement sur les ventes externes. M. Lyon a indiqué que M. Dhillon, au cours de leur conversation, n'avait pas signalé ses activités de vente dans la région de Vancouver; au contraire, il avait clairement affirmé que presque toutes les ventes étaient réalisées dans le magasin. M. Lyon a précisé que seuls les travailleurs dans les magasins avaient été retenus pour l'avis de cotisation.

[20]     M. Jeffrey Derrick a indiqué qu'il était agent principal des appels de l'ADRC et était au service de l'ADRC depuis les 21 dernières années. Les premières cotisations avaient été annulées car elles avaient été émises au nom de l'appelant, sous la raison sociale de West Coast Cellular. M. Scott était alors représenté par un avocat, lequel avait indiqué que M. Scott exploitait son entreprise à titre de propriétaire unique. Pour cette raison, de nouvelles cotisations avaient été émises, comme l'indiquait la lettre - pièce A-1 - envoyée à M. Scott le 28 septembre 2001, qui ratifiait ces nouvelles cotisations. M. Derrick a indiqué qu'il s'était assuré qu'aucun feuillet T4A n'avait été émis et qu'il avait expédié un questionnaire à 20 travailleurs. De ce nombre, il avait reçu 13 réponses et s'était entretenu avec 11 ou 12 d'entre eux, parmi lesquels quatre ou cinq avaient indiqué être des entrepreneurs indépendants. Certains travailleurs avaient reçu des cartes professionnelles sur lesquelles apparaissait un titre quelconque de direction. Aucun d'entre eux n'a jamais mentionné avoir vendu des produits pour Price, l'entreprise de systèmes de sécurité à domicile. Tous les travailleurs avaient déclaré avoir reçu une commission de 50 p. 100 du profit réalisé sur chaque vente de téléphone, de services ou d'accessoire. M. Derrick s'était assuré qu'aucun employé ne devait débourser, ni une partie du loyer, ni aucun frais connexe imputable à la location du magasin et de ses équipements, et qu'aucun travailleur n'était inscrit à la TPS, même si certains d'entre eux avaient déclaré avoir gagné des revenus à titre d'entrepreneurs indépendants. Certains avaient signalé qu'il leur était possible de travailler selon leur gré. M. Derrick a indiqué que le raisonnement de M. Scott était, dès le départ, que tous les travailleurs, soit environ une trentaine, étaient des entrepreneurs indépendants, peu importe que leurs activités de ventes aient été réalisées dans le point de vente au détail dont il était propriétaire ou ailleurs au gré de l'initiative de chacun.

[21]     Lors du contre-interrogatoire, M. Jeffrey Derrick a reconnu que M. Christopher Balanko lui avait indiqué qu'une part importante des ventes avait été réalisée à l'externe, mais n'avait jamais fourni de précisions plus amples.

[22]     L'appelant a affirmé que les cotisations étaient viciées parce que le ministre n'avait pas bien tenu compte que les méthodes commerciales appliquées étaient conformes à la pratique normale dans le secteur des ventes de téléphones cellulaires, et parce que chaque travailleur avait fourni ses services dans le cadre de l'exploitation de sa propre entreprise dans le cadre de laquelle il ne gagnait des revenus que par la vente à simple commission. Il a admis que la preuve avait établi que l'exploitation de Nanaimo Cellular était quelque peu différente de celle des autres magasins de la région de Victoria. L'appelant a souligné l'existence d'un risque de perte de revenu de commission, en raison des contre-passations de commissions et de l'obligation imposée aux vendeurs de défrayer les dépenses découlant de leurs activités de vente externes. De plus, l'appelant a affirmé que M. Coté devait être exclu de la cotisation, étant donné qu'il avait été son associé à un certain moment pendant la période visée, comme devaient l'être également MM. Powell, Langdon et Bédard, qui avaient été eux aussi associés ou mandataires communs et avec qui il avait partagé les profits de certains magasins de détail de la région de Victoria.

[23]     L'avocat de l'intimé a avisé la Cour que M. Mike Fabbro avait été exclu de la cotisation parce les agents de l'ADRC avaient été convaincus qu'il n'était pas un employé; l'examen de certains baux avait permis de conclure qu'il entretenait une quelconque association avec M. Scott. L'avocat de l'intimé a fait valoir que les cotisations émises par le ministre devaient être confirmées parce que la preuve avait établi que les travailleurs n'exploitaient pas des entreprises pour leur propre compte. Au contraire, ils travaillaient dans des magasins de détail qui appartenaient à l'appelant, n'étaient pas tenus de fournir les outils ni l'équipement pour l'exploitation, et n'avaient pas à investir une somme importante. En examinant l'ensemble de la preuve, l'avocat de l'intimé a affirmé que les travailleurs étaient des commis-vendeurs ou des vendeurs à commission qui travaillaient conformément à un contrat de services avec M. Scott.

[24]     Dans un arrêt récent, 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] C.S.C. 59 (274 N.R. 366) (Sagaz), la Cour suprême du Canada a été saisie d'une affaire de responsabilité du fait d'autrui et a dû, en examinant diverses questions connexes, se pencher sur les caractéristiques d'un entrepreneur indépendant. Le juge Major, qui a prononcé le jugement de la cour, a examiné l'évolution de la jurisprudence en ce qui concerne l'importance de la différence entre un employé et un entrepreneur indépendant en matière de responsabilité du fait d'autrui. Après avoir cité les motifs du juge d'appel MacGuigan dans l'arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 553 ([1986] 2 C.T.C. 200) et les renvois que fait ce dernier au critère d'organisation énoncé par le lord juge Denning - et à la synthèse du juge Cooke - dans Market Investigations, Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732, le juge Major déclare, aux paragraphes 45 à 48 inclusivement, ce qui suit :

Enfin, un critère se rapportant à l'entreprise elle-même est apparu. Flannigan [...] ( « Enterprise control: The servant-independent contractor distinction » (1987), 37 U.T.L.J. 25, à la p. 29) énonce le [traduction] « critère de l'entreprise » selon lequel l'employeur doit être tenu responsable du fait d'autrui pour les raisons suivantes : (1) il contrôle les activités du travailleur, (2) il est en mesure de réduire les risques de perte, (3) il tire profit des activités du travailleur, (4) le coût véritable d'un bien ou d'un service devrait être assumé par l'entreprise qui l'offre. Pour Flannigan, chaque justification a trait à la régulation du risque pris par l'employeur, et le contrôle est donc toujours l'élément crucial puisque c'est la capacité de contrôler l'entreprise qui permet à l'employeur de prendre des risques. Le juge La Forest a lui aussi formulé un « critère du risque de l'entreprise » dans l'opinion dissidente qu'il a exposée relativement au pourvoi incident dans l'arrêt London Drugs. Il a écrit, à la p. 339, que « [l]a responsabilité du fait d'autrui a pour fonction plus générale de transférer à l'entreprise elle-même les risques créés par l'activité à laquelle se livrent ses mandataires. »

À mon avis, aucun critère universel ne permet de déterminer, de façon concluante, si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant. Lord Denning a affirmé, dans l'arrêt Stevenson Jordan, [...] ([1952] 1 The Times L.R. 101), qu'il peut être impossible d'établir une définition précise de la distinction (p. 111) et, de la même façon, Fleming signale que [traduction] « devant les nombreuses variables des relations de travail en constante mutation, aucun critère ne semble permettre d'apporter une réponse toujours claire et acceptable » (p. 416). Je partage en outre l'opinion du juge MacGuigan lorsqu'il affirme - en citant Atiyah, [...] (Vicarious Liability in the Law of Torts. Londres, Butterworths, 1967), p. 38, dans l'arrêt Wiebe Door, p. 563 - qu'il faut toujours déterminer quelle relation globale les parties entretiennent entre elles :

[traduction]

[N]ous doutons fortement qu'il soit encore utile de chercher à établir un critère unique permettant d'identifier les contrats de louage de services [...] La meilleure chose à faire est d'étudier tous les facteurs qui ont été considérés dans ces causes comme des facteurs influant sur la nature du lien unissant les parties. De toute évidence, ces facteurs ne s'appliquent pas dans tous les cas et n'ont pas toujours la même importance. De la même façon, il n'est pas possible de trouver une formule magique permettant de déterminer quels facteurs devraient être tenus pour déterminants dans une situation donnée.

Bien qu'aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l'employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s'il engage lui-même ses assistants, quelle est l'étendue de ses risques financiers, jusqu'à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu'à quel point il peut tirer profit de l'exécution de ses tâches.

Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n'y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l'affaire.

[25]     J'examinerai les faits en fonction des indices énoncés dans le jugement du juge Major dans l'arrêt Sagaz.

Le degré de contrôle

[26]     L'appelant reconnaît que la preuve a établi que le magasin de Nanaimo n'était pas exploité de la même manière que les points de vente au détail situés dans l'agglomération urbaine de Victoria. Bien que la preuve n'ait pas clairement établi si M. Coté était l'associé de M. Scott pendant la période visée, il n'existe aucun doute que la premier avait agi à titre de gestionnaire du magasin de Nanaimo Cellular situé dans le centre d'achats Woodgrove. Les témoignages de Mme Quaife et de Mme Peters ont démontré la structure commerciale de l'entreprise et les politiques mises en oeuvre dans le cadre de la vente de téléphones cellulaires, d'accessoires et de contrats de services. Les travailleurs devaient respecter l'horaire préparé à l'origine par M. Coté. Plus tard, Mmes Quaife et Peters recevaient chacune, en sus des commissions qui découlaient de leurs activités de vente individuelles, la somme de 500 $ chaque mois à titre de gestionnaires adjointes, pour l'accomplissement de nombreuses tâches nécessaires à la bonne gestion du magasin, dont la préparation du livre de paie et des listes utilisées pour le calcul des commissions dues aux travailleurs. La preuve a établi que d'autres travailleurs du magasin de Nanaimo Cellular suivaient les consignes données par M. Coté ou par le délégué de celui-ci, et faisaient l'objet d'une certaine surveillance dans l'exercice de leurs activités de vente dans le magasin de détail. Un travailleur avait été congédié par M. Coté en raison de son manque répétitif d'assiduité. Un autre travailleur, qui avait à maintes reprises tenté de vendre des produits Amway aux clients du magasin alors que ceux-ci cherchaient plutôt à obtenir des renseignements sur les téléphones cellulaires, avait été remercié en raison de l'apparence de conflit d'intérêts. Les travailleurs devaient assurer en personne la prestation de leurs services et étaient traités comme de simples commis de vente au détail; leur traitement était comparable à celui accordé par les autres magasins situés dans le centre commercial, à l'exception du mode de rémunération des vendeurs sans fonction de gestion, qui était, entièrement, à simple commission.

[27]     Les travailleurs de la région de Victoria, même s'ils travaillaient dans des magasins situés dans des centres commerciaux, semblaient jouir d'une plus grande liberté pour choisir eux-mêmes leurs horaires de travail. Dans leurs témoignages respectifs, MM. Ross, Little et Balanko ont indiqué qu'ils avaient réalisé des ventes à la fois dans le magasin aménagé par l'appelant et ailleurs, et chacun d'eux avait volontairement agi de sa propre initiative dans le but de vendre ou de promouvoir des produits. La participation à des expositions ou à des foires commerciales, et les déplacements à l'intérieur et à l'extérieur de l'agglomération urbaine de Victoria, pour vendre des téléphones cellulaires et des contrats de services, semblent avoir été laissé à la discrétion de ces travailleurs. Cependant, les magasins situés dans les différents centres commerciaux devaient en tout temps être dotés en personnel afin de respecter les exigences des baux de locaux. Et les travailleurs étaient laissés libres de convenir entre eux leurs horaires de travail, en autant que les heures d'ouvertures prévues par le bail de chaque magasin soient respectées. Le magasin de la rue Douglas n'était pas assujetti à des règles de fonctionnement aussi strictes et pouvait être fermé plus tôt si l'achalandage était insuffisant un jour donné. M. Satnam Dhillon a témoigné qu'il avait travaillé, comme MM. Ross, Little et Balanko, à titre d'entrepreneur indépendant et qu'il exploitait sa propre entreprise au magasin de la rue Duncan. Cette qualification va à l'encontre des déclarations faites en entrevue à M. Russell Lyon, le vérificateur de l'ADRC, à qui M. Dhillon s'était présenté comme le gestionnaire d'une entreprise de deux personnes et avait indiqué qu'il n'était pas un entrepreneur indépendant. Selon M. Lyon, M. Dhillon avait alors affirmé que toutes les ventes de téléphones cellulaires étaient réalisées dans le magasin. Cependant, lors de son témoignage, M. Dhillon a décrit certaines activités de vente menées dans le Lower Mainland. Il est possible que ces dernières n'aient pas été réalisées pendant la période visée dans les présents appels; il est également possible que M. Dhillon, inspiré par une évaluation rétrospective, ait décidé de reformuler l'opinion qu'il avait exprimée à l'origine sur la nature de la relation de travail entre M. Scott et lui.

La dotation en outillage ou l'embauche d'assistants

[28]     En qui concerne les travailleurs du magasin de Nanaimo, Mmes Quaife et Peters ont toutes deux témoigné qu'elles avaient chacune reçu gratuitement de Rogers un téléphone cellulaire, de même qu'un temps d'antenne mensuel suffisant. Elles n'ont pas eu à débourser les droits de permis ni la TPS, et tous les meubles, les fournitures et le matériel nécessaires au bon fonctionnement du magasin étaient fournis directement ou indirectement par M. Scott, dans le cadre de la structure commerciale générale de son entreprise. La preuve a établi que les travailleurs étaient obligés d'exercer personnellement la prestation de leurs services, mois n'étaient pas obligés de s'outiller ni de s'équiper davantage ni d'embaucher des assistants pour accomplir leurs activités permanentes, de vente dans le magasin.

[29]     Les travailleurs de la région de Victoria, de même que M. Dhillon à Duncan, ont dû acheter au prix coûtant leurs propres téléphones cellulaires, défrayer les droits de permis et la TPS, et débourser certaines dépenses supplémentaires liées à leurs activités de vente autres que celles menées dans le magasin même. MM. Ross, Little et Balanko ont avancé chacun son estimation de la fraction des ventes réalisée tant à l'intérieur qu'a l'extérieur du magasin. Il ressort clairement de ces estimations que la majeure partie des ventes ont été réalisées dans les magasins de détail. Ces travailleurs ont choisi d'utiliser leurs véhicules personnels dans le cadre de leurs activités de vente, mais aucun outil ni équipement n'était nécessaire, à part quelques fournitures de bureau secondaires. Les ventes réalisées dans les magasins utilisaient uniquement l'équipement, les meubles, les présentoirs, les caisses enregistreuses, les machines à débit, les téléphones et les lignes téléphoniques, le matériel promotionnel, la paperasse et tout le matériel connexe qu'avait fourni M. Scott pour l'exploitation d'un magasin de vente au détail. M. Ross a engagé certaines dépenses afin de participer à des foires commerciales, des expositions ou d'autres événements publics, mais a réussi à partager celles-ci avec des collègues. La documentation nécessaire à la vente et le matériel promotionnel ont été fourni par Rogers, et le profit découlant de la vente d'accessoires était partagé à parts égales entre M. Scott et le vendeur.

L'envergure des risques financiers et le niveau d'endossement des mises de fonds et de la gestion

[30]     Selon la preuve, les travailleurs du magasin de Nanaimo n'avaient, ni pris de risque financier, ni endossé d'obligation de mise de fonds dans l'exploitation de l'entreprise. Les fonctions de gestion exercées par Mmes Quaife ou Peters étaient rémunérées au tarif mensuel de 500 $ sans égard au pourcentage du profit global ou bien au volume des ventes. La preuve ne permet pas de conclure que les travailleurs de ce magasin étaient obligés de se procurer un téléphone cellulaire ou d'investir une somme quelconque afin de gagner un revenu. Clairement, aucun travailleur n'était contraint d'assumer quelque risque financier lié à l'aménagement et à l'entretien du magasin de détail, y compris le loyer mensuel du local et les frais connexes, les lignes de téléphoniques, les meubles et tout autre équipement connexe. L'obligation de défrayer toute pénalité imposée par la direction d'un centre commercial en raison de la violation des dispositions du bail relevait uniquement de M. Scott.

[31]     M. Satnam Dhillon, à Duncan, et les travailleurs de la région de Victoria n'avaient pris aucun risque financier concernant l'exploitation des magasins de vente au détail. Nul d'entre eux n'était co-signataire des baux, ni responsable de l'équipement dans ces magasins ou des produits qui y étaient offerts à la vente. M. Scott avait obtenu les accessoires en consignation et était le principal responsable de leur remboursement. La seule fonction de gestion qui leur incombait collectivement consistait à s'assurer entre eux que leurs magasins respectifs soient ouverts aux heures prévues. Étant donné que les travailleurs étaient tous rémunérés à simple commission, il était raisonnable de s'attendre à ce qu'ils prennent eux-mêmes en main l'établissement de leur propre horaire de travail. Selon la pièce R-2, une lettre acheminée par M. Scott à M. Glen Foster de Revenu Canada, divers personnes ont été identifiées comme anciens associés détenant, en 1999, [traduction] « une procuration sur les revenus et les dépenses » . Visiblement, ces individus étaient responsables de la gestion des locaux décrit comme West Shore Cellular, Duncan Cellular, Nanaimo Cellular et Nanaimo Cellular South.

[32]     Il a été également question des contre-passations de commissions gagnées par tous les travailleurs. Foncièrement, une commission était versée après la vente d'un téléphone ou d'un contrat de services, sous réserve de la réalisation de conditions résolutoires, y compris le versement régulier par un client des paiements mensuels nécessaires pendant une période de six mois. En cas de manquement de la part d'un client, la commission réputée avoir été gagnée était annulée et le montant ad hoc était déduit des commissions à venir. Bien que la preuve ait porté à une certaine confusion, je conclus qu'un travailleur ne pouvait en aucun cas risquer de perdre un montant supérieur à la commission initiale. Les profits des ventes étaient partagés à parts égales entre le travailleur responsable de la vente et M. Scott. De même, Rogers pouvait effectuer, conformément à un état de rapprochement préparé par son personnel, des contre-passations à même les primes qu'elle versait à M. Scott. Comme elle ne pouvait désormais plus être comprise dans le calcul des commissions gagnées, M. Scott, au moyen des renseignements fournis, déduisait alors la somme déjà versée au travailleur pour le contrat résolu. La preuve a établi également que chaque contrat, du moins en théorie, pouvait mener à la perte complète de commissions, mais sur 100 ventes il est peu probable qu'une perte importante de commission se produise et, de toute façon, une telle perte ne serait jamais supérieure à la commission d'origine. Mmes Quaife et Peters croyaient qu'on leur avait imputé le montant total de la contre-passation, mais elles ont, selon toute vraisemblance, mal interprété les renseignements présentés sur la liste transmise par M. Scott et ont encaissé seulement la perte de leur commission d'origine résultant du partage à parts égales avec M. Scott.

La possibilité de tirer profit de l'exécution des tâches

[33]     Tous les travailleurs, peu importe leur lieu de travail, étaient rémunérés à simple commission, dont le calcul était fondé sur le partage à parts égales avec M. Scott du profit découlant de la vente d'un produit particulier, d'un contrat de services ou d'accessoires, peu importe que la vente ait été réalisée dans l'un des magasins de vente au détail ou ailleurs. Selon certains indices, un ou plusieurs travailleurs pouvaient vendre de leur propre gré des téléphones d'occasion ou des accessoires sans autorisation de M. Scott; cependant, cette activité ne représentait pas une fraction importante de leurs ventes. Un travailleur pouvait se mériter une commission plus importante s'il réussissait à vendre un téléphone à prix fort, c'est-à-dire sans être contraint d'offrir un rabais sur le téléphone ou des accessoires gratuits pour en conclure la vente. Étant donné que l'agrément de crédit des utilisateurs potentiels était à la seule discrétion de Rogers, les travailleurs ne disposaient d'aucun moyen pour minimiser les risques de contre-passation éventuelle de commission en refusant de présenter les demandes formulées par les clients. Les travailleurs qui se livraient à des ventes externes pouvaient prêter attention aux coûts de réalisation de revenus de vente et adopter leur comportement en conséquence. L'éventail des prix de vente en magasin était plus resserré, afin de dégagerun plus grand profit, mais ces ventes n'imposaient aux travailleurs aucune dépense connexe à défrayer.

[34]     Dans la décision Ivanov c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [2000] A.C.I. no 236, j'ai conclu que le travailleur était un entrepreneur indépendant quand il se livrait à la vente de services de téléphone interurbain en se présentant chez les gens à domicile. C'était là une situation où avait été signé un contrat qui qualifiait M. Ivanov d'entrepreneur indépendant. Aux paragraphes 19 et suivants, je fais les commentaires suivants :

19.        Suivant le conseil de ne pas perdre de vue la forêt, j'aborde de nouveau la question de l'intégration, une des quatre parties intégrantes du critère unique appliqué dans le contexte de l'ensemble des éléments qui entraient dans le cadre des opérations. Si j'envisage la question du point de vue de l'appelant, il allait - comme tous les représentants commerciaux depuis cent ans - à la rencontre du public, cherchant à faire bonne impression pour gagner ce qu'il pouvait en commissions et payant ses propres dépenses. Il pouvait quitter le secteur de vente quand bon lui semblait, et s'y rendre quand il voulait se remettre à faire de la vente. Quant à Bartel, elle était une entreprise de promotion qui s'occupait de la commercialisation de divers produits qu'elle vendait à différents endroits au moyen de diverses stratégies de vente, notamment la vente en consignation par des représentants. S'il s'était écoulé une longue période sans que l'appelant ne réalise de ventes, il n'y aurait guère eu d'utilité à lui donner un secteur de vente alors qu'un autre représentant aurait pu être plus productif. Compte tenu des circonstances de sa relation de travail avec Bartel, l'appelant était simplement accessoire et n'avait pas été intégré dans l'organisation de Bartel. L'appelant était évidemment du même avis puisque, lorsqu'il a décidé de partir, il a simplement informé David Siradze de son intention, puis a démissionné pour ne jamais revenir. On ne s'attendrait pas à un tel comportement de la part d'une personne qui exerce une fonction intégrée aux activités de son employeur.

20.        Quant à l'effet à donner au contrat (pièce A-1), il est clair que ce que les parties pensaient être la nature de leur relation ne changera pas la réalité. Dans Le ministre du Revenu national c. Emily Standing, C.A.F., no A-857-90, 29 septembre 1992, le juge Stone a dit ce qui suit à la page 2 (147 N.R. 238, aux pages 239 et 240) :

[...] Rien dans la jurisprudence ne permet d'avancer l'existence d'une telle relation du simple fait que les parties ont choisi de la définir ainsi sans égards aux circonstances entourantes appréciées en fonction du critère de l'arrêt Wiebe Door. [...]

21.        Cependant, il importe d'examiner si, au cours de leur relation, les parties se sont comportées comme leur contrat le prévoyait ou s'il ressort d'un examen objectif que le document censé établir certaines obligations contractuelles mutuelles est inconciliable avec la conduite observée des parties et ou représente simplement un instrument servant à revêtir d'une apparence entrepreneuriale une situation où il s'agit de toute évidence d'un emploi. En l'espèce, l'interprétation donnée par l'appelant, après le fait, de son comportement durant la courte période pendant laquelle il a travaillé comme représentant de Bartel, et des motifs de ce comportement, n'est pas étayée par d'autre preuve. Il n'a pas eu le comportement de quelqu'un qui, à l'époque, croyait qu'il était un employé qui pouvait réellement faire l'objet d'une évaluation du rendement, de mesures disciplinaires et de contrôle.

22.        Compte tenu de toute la preuve, je conclus que l'appelant n'exerçait pas un emploi assurable chez Bartel en vertu d'un contrat de louage de services durant la période qui, d'après la preuve, a débuté le 16 mars 1998 et s'est terminée le 25 mai 1998. À l'exception de cette modification, la décision du ministre est bien fondée.

[35]     Dans la décision Frontier Business Centre Ltd. c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [1998] A.C.I. no 388, qui a été rendue le 20 mai 1998 par l'honorable juge Bowman, tel était alors son titre, de la Cour canadienne de l'impôt, deux représentants de commerce ont été considérés comme des entrepreneurs indépendants alors qu'ils vendaient du matériel agricole neuf et d'occasion. Le juge Bowman a conclu qu'ils n'avaient pas d'heures fixes, qu'ils travaillaient à domicile et qu'ils n'étaient pas tenus d'atteindre des quotas de vente, ni même de vendre quoi que ce soit. En fait, on les dissuadait de se rendre au bureau du payeur, car celui-ci voulait réaliser la vente lui-même sans avoir à payer de commission. Les travailleurs payaient eux-mêmes leurs dépenses dans un premier temps, n'obtenant ensuite un remboursement que grâce à leur commission, 30 p. 100 du profit net, une fois la vente réalisée. Ils étaient libres d'engager des assistants à leurs frais, et ils choisissaient les ventes qu'ils essaieraient de réaliser. Une différence importante entre ces faits et la situation en l'espèce est que ces représentants de commerce pouvaient fixer le prix de vente du matériel et qu'ils avaient toute latitude pour établir le montant à déduire de la facture lors des ventes avec reprise, ce qui influait directement sur leur part du profit net. M. le juge Bowman a estimé qu'aucun contrôle n'était exercé sur leur activité génératrice de revenu et qu'il n'y avait pas de territoire assigné. En outre, il a conclu que les travailleurs n'étaient pas intégrés à l'organisation même si, dans l'ensemble, les services qu'ils fournissaient avaient un effet sur les bénéfices réalisés par Frontier Business Centre Ltd.

[36]     Dans l'affaire Randy Fatt c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [2001] A.C.I. no 239, je me suis penché sur le cas d'un travailleur qui faisait la vente à des entreprises d'installations de téléphones publics. Le travailleur travaillait tout seul; il faisait parvenir les contrats conclus au fournisseur de services téléphoniques et était rémunéré en fonction de ces contrats. Le travailleur en question était un vendeur expérimenté et il avait choisi de fournir ses services conformément à une entente qui lui permettait d'agir à titre d'entrepreneur exploitant une entreprise à son propre compte. Tout comme c'est le cas en l'espèce, le travailleur a voulu par la suite ne pas tenir compte de la conduite des parties après l'entente et tenter d'obtenir simplement la modification de son statut uniquement parce qu'il souhaitait que la Cour dise qu'il était un employé qui, depuis le début, avait en réalité fourni ses services en vertu d'un contrat de louage de services.

[37]     Dans l'affaire Lazowksi c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [2002] A.C.I. no 517, j'ai traité de l'appel d'une personne qui avait travaillé à titre de solliciteur pour le Western Canada Wilderness Committee. J'ai déclaré ce qui suit vers le milieu du paragraphe 18 :

[...] Je constate que monsieur Thiessen a exercé très peu de contrôle sur les activités de vente de l'appelant, et le contrôle qu'il y avait était généralement réactif en ce sens qu'il s'agissait de résoudre un problème particulier plutôt que d'être un contrôle actif dans le sens d'un contrôle plus général et continu. L'appelant se présentait au bureau du WCWC principalement soit pour obtenir de la documentation supplémentaire, qu'il utilisait pour s'aider à faire des ventes, soit pour remettre les feuilles de grand livre toutes les deux semaines, afin qu'il puisse être rémunéré en fonction des ventes qu'il avait consignées. L'appelant, qui est un vendeur expérimenté, était motivé à fonctionner de sa propre manière. Il choisissait de commencer à solliciter plus tôt que les autres solliciteurs et utilisait son propre véhicule pour se rendre à un lieu précis dans un secteur désigné. Les activités de collecte de fonds du WCWC ne constituaient qu'une partie des activités globales qu'il exerçait dans la poursuite de son objectif, qui était de faire avancer la cause de la protection de l'environnement. Dans le cadre de la campagne de financement, on sollicitait des fonds de porte en porte et des adhésions de la même façon. D'autres adhésions étaient vendues par l'entremise du siège social à Vancouver ou du bureau de Winnipeg, et d'autres revenus provenaient de ventes de produits à deux points de vente au détail, de même que de subventions du gouvernement, de sociétés, de fondations privées et de membres du public. Même les activités de collecte de fonds qui se faisaient de porte en porte ne s'exerçaient pas toutes de la même manière. Monsieur Thiessen sollicitait tout seul en sa qualité de directeur de campagne. De plus, on avait retenu les services d'une entreprise privée pour faire de la sollicitation dans certains secteurs de l'agglomération de Winnipeg. Cela venait s'ajouter aux services que fournissaient l'appelant et l'équipe de quatre à huit solliciteurs qu'un représentant du WCWC conduisait jusqu'à leurs secteurs assignés puis les ramenait. Dans cette situation d'ensemble, l'appelant a joué son rôle en fournissant, indépendamment, des services de sollicitation de la manière qu'il jugeait appropriée, et le revenu qu'il gagnait tenait uniquement à ses propres efforts.

[38]     Après avoir longuement examiné les faits pertinents dans les appels en l'espèce et étudié la jurisprudence applicable, je dois répondre à la question centrale - telle que l'a formulée le juge Major, au paragraphe 47 du jugement qu'il a prononcé dans Sagaz, précité - de savoir « si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte » .

[39]     Sans perdre de vue que la question doit être abordée depuis le point de vue du travailleur, cette perspective doit être analysée de façon objective. En l'espèce, M. Dhillon souhaite être reconnu comme ayant été entrepreneur indépendant pendant la période visée. MM. Ross, Little et Balanko se considèrent également comme entrepreneurs indépendants se livrant à la vente d'un produit spécialisé dans un secteur en constante évolution. Eu égard aux autres travailleurs nommés dans l'annexe A de la lettre de décision - pièce R-1 - qui vient confirmer les cotisations préalablement émises pour les années 1998 et 1999, il n'y a guère d'éléments de preuve, certes aucun, qui puisse me permettre de conclure que les travailleurs de Nanaimo se considéraient autrement que comme des employés de l'appelant, dirigés et supervisés par M. Coté. Certains éléments laissent croire que ce dernier puisse avoir été, à un certain moment, l'un des associés de M. Scott. Cependant, la preuve est insuffisante pour me permettre de conclure si cette association avait pris fin avant 1999. En l'absence de renseignement précis à cet égard, il s'avère difficile de ne pas inclure M. Coté dans les cotisations, puisque celui-ci était probablement un employé doté d'un pouvoir discrétionnaire absolu dans l'exploitation de Nanaimo Cellular. Dans l'ensemble, la preuve était insuffisante pour me permettre de conclure à l'exploitation de deux entités distinctes, l'une exploitée par M. Scott, et l'autre par les travailleurs qui assuraient, par la prestation de leurs services, la vente de téléphones principalement dans un magasin, mais également ailleurs. Les locaux de vente au détail avaient été loués et entièrement aménagés par M. Scott. Les produits offerts avaient été obtenus par M. Scott en vertu d'un contrat avec Rogers. Les travailleurs ne pouvaient vendre un téléphone ou un contrat de services avec Rogers que par l'intermédiaire de la structure commerciale de l'entreprise constituée par M. Scott. L'emplacement et l'appellation des magasins relevaient de la seule décision de M. Scott, même si certains magasins étaient dirigés par une personne désignée comme gestionnaire, ou par un associé, à différents moments pendant 1998 et 1999. Comme le nom de M. Mike Fabbro figurait supposément sur le bail du magasin de Nanaimo Cellular South, ce dernier a été exclu des cotisations émises à l'encontre de M. Scott, comme l'ont été les vendeurs qui se livraient exclusivement à la vente externe. À l'exception de l'affirmation ambiguë contenue dans la lettre déposée sous la cote R-2, l'appelant n'a présenté aucune preuve pour étayer sa prétention que MM. Powell, Langdon, Bedard et Coté devraient également être reconnus comme ses associés. Eu égard aux autres travailleurs, comme les faits n'appuient pas leur reconnaissance à titre d'entrepreneurs indépendants, les parties ne peuvent pas s'arroger une telle qualité et prétendre que celle-ci est de nature à lier le ministre.

[40]     Nombre de vendeurs rémunérés à simple commission sont tout de même des employés. En outre, il n'est pas inhabituel que ces personnes aient à défrayer toutes les dépenses liées aux activités de vente, comme condition d'embauche. Dans de tels cas, certaines dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu prévoient que les dépenses engagées dans le but de produire des revenus de vente sont déductibles du revenu. La jouissance d'une certaine latitude dans l'horaire de travail, ou la capacité d'influer sur l'établissement de celui-ci, de travailler à temps partiel ou d'être rémunéré entièrement ou partiellement à commission ou payé à la pièce ne constituent pas en soit, sans plus, des motifs qui permettent du conclure qu'un employé a été transformé en entrepreneur indépendant.

[41]     Il incombe à l'appelant d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que les cotisations émises par le ministre devraient être annulées ou modifiées. L'appelant n'a présenté aucune preuve relativement à nombre de travailleurs nommés, et il n'a guère eu de contacts personnels, n'était-ce peut-être qu'une fois par mois, avec les travailleurs des magasins de Nanaimo. Comme il s'en remettait plutôt à MM. Coté et Fabbro pour assurer la gestion de ces magasins de vente au détail, il doit être lié par ceux-ci, notamment en ce qui a trait aux relations avec les travailleurs de ces magasins. Dans l'ensemble, la preuve est insuffisante pour me permettre de tirer une conclusion différente de la ratification des décisions du ministre datées du 28 mars 2002, dans lesquelles ce dernier confirmait les cotisations antérieures en application de la Loi et du Régime.

[42]     En conséquence, les deux appels sont rejetés.

Signé à Sidney (Colombie-Britannique) ce 21e jour de mars 2003.

« D. W. Rowe »

Juge suppléant Rowe, C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2004.

Daniel E. Renaud, traducteur

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.