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Dossier : 2004-4367(IT)I

ENTRE :

PASCAL PILON,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 23 février 2005 à Montréal (Québec)

 

Devant : L'honorable juge François Angers

 

Comparutions :

 

Représentant de l'appelant :

Horst Grein

 

Avocat de l'intimée :

Me Benoit Mandeville

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JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 2001 est accueilli en partie et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, le tout selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

 

Signé à Edmundston (Nouveau-Brunswick), ce 17e jour de mars 2005.

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 


 

 

 

Référence : 2005CCI197

Date : 20050317

Dossier : 2004-4367(IT)I

 

ENTRE :

PASCAL PILON,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Angers

 

[1]     L’appelant interjette appel d’une cotisation à l’égard de son année d’imposition 2001. Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a ajouté dans le calcul du revenu de l’appelant une somme de 32 597 $ à titre de revenus d’entreprise nets non déclarés. En raison de cette omission, le ministre a imposé à l’appelant une pénalité de 2 211 $ pour faute lourde en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). La somme de 32 597 $ est le total des revenus d’entreprise non déclarés de 30 159 $ et des dépenses refusées par le ministre de 2 438 $. Ce montant de 2 438 $ est lui-même constitué d’une somme de 2 400 $ qui aurait été déboursée pour des frais d’entreposage pendant la période du 1er janvier au 30 juin 2001 et d’une somme de 38 $ qui aurait été déboursée pour des frais de remorquage de voiture et que l’intimée accepte maintenant au paragraphe 8 de la Réponse à l’avis d’appel.

 

[2]     Durant l’année d’imposition en question, l’appelant exploitait une entreprise dans le domaine de l’installation de câbles sous la raison sociale de « Méga Câble Enr. ». Le 1er octobre 2001, il a constitué en société par actions la 9108-7593 Québec Inc. (9108) dont les activités économiques consistaient à prendre la relève de l’appelant dans l’exploitation de son entreprise. L’appelant est l’unique actionnaire et administrateur de la 9108. Il est également le président de cette société. La 9108 a continué d’exploiter l’entreprise sous la raison sociale de « Méga Câble Enr. »

 

[3]     Lors d’une vérification auprès des sociétés faisant affaire avec l’appelant, de nombreux chèques faits à l’ordre de Méga Câble Enr. ont été examinés. Cet examen a révélé que les chèques portaient tous une date antérieure au 30 septembre 2001. La valeur totale de ces chèques, 30 159 $, ajoutée par le ministre aux revenus de l’appelant. Ce dernier reconnaît qu’il s’agit de revenus d’entreprise, mais fait valoir qu’il s’agit de revenus gagnés et déclarés par la 9108.

 

[4]     L’appelant a également admis qu’il n’a pas donné suite à une demande du ministre de lui fournir une déclaration de revenus de la 9108 pour l’exercice financier commençant en 2001, de remettre une feuille de travail faisant une ventilation des revenus déclarés par la 9108 et de ceux déclarés par l’appelant à l’égard de l’exercice financier commençant en 2001 et de l’année d’imposition en question et, finalement, de fournir le compte bancaire de la 9108 ainsi que le bail pour la location de l’espace d’entreposage.

 

[5]     À l’audience, l’appelant, par l’entremise de son comptable, a déposé un reçu et une note signée par Alain Leblanc, de St-Colomban, qui attestait avoir loué à l’appelant un local de 14 pieds par 14 pieds pour la période de janvier 2001 à juin 2001 pour la somme de 2 400 $. L’appelant a, de plus, déposé en preuve l’avis de cotisation de monsieur Leblanc déclarant ce revenu de location. L’appelant a témoigné que ce local a servi à entreposer uniquement que du stock et des matériaux servant à son entreprise et à son métier. Il a nié y avoir entreposé des effets personnels. L’appelant a témoigné de façon franche et spontanée à cette question et j’accepte sa version voulant qu’il ait effectivement loué ce local pour les fins de son entreprise. J’admets donc la dépense de location de 2 400 $.

 

[6]     L’appelant a déposé en preuve un état des revenus et des dépenses de la 9108 pour l’année se terminant le 30 septembre 2002. Ce document, tout comme la première déclaration des revenus de la 9108, ont pris énormément de temps à être préparés. En fait, la première déclaration de revenus de la 9108 a été reçue à l’Agence du revenu le 8 octobre 2004. Selon l’appelant, ce retard est attribuable aux difficultés qu’a connues le comptable à classifier la documentation de l’appelant qui la lui avait remis dans un sac de plastique bien plein. L’appelant a avoué ne rien comprendre à l’impôt et a déclaré qu’il se fie à son comptable pour s’en occuper. Il ne connaît pas la date de la déclaration de revenus de la 9108 et dit avoir constitué une société parce que c’est ce que lui suggérait son comptable.

 

[7]     L’appelant reconnaît que les chèques portent une date antérieure à la date de constitution de la 9108, mais ajoute qu’ils étaient faits à l’ordre de Méga Câble Enr. et qu’il s’est fié au comptable pour sa déclaration de revenus de 2001. De son côté, le comptable dit s’être fié sur le feuillet T-5018 établi par S.S. Communication enr. et faisant état des paiements contractuels faits à la 9108 pour la période se terminant le 31 août 2001, soit un mois avant la constitution, pour attribuer ces revenus à la 9108. Le montant indiqué sur le feuillet T-5018 est de 33 158,66 $.

 

[8]     La question en litige est donc de déterminer à qui sont attribuables les revenus de 30 159 $. Il ne fait donc aucun doute que les montants en question ont été payés avant la constitution de la 9108 en société. En fait, selon le feuillet T‑5018, ils ont été payés jusqu’au 31 août 2001 puisque ce document fait état des paiements contractuels entre S.S. Communication enr. et la 9108. La difficulté réside toutefois dans le fait que la 9108 n’est née que le 1er octobre 2001 et que S.S. Communication enr. ne pouvait contracter avec une entité non existante et lui effectuer des paiements avant cette date. Je n’ai non plus aucune preuve que ce contrat de sous-traitance a été conclu au nom de la société 9108 ou pour son compte avant sa création et qu’il aurait été ratifié après sa constitution. Le fait que les chèques étaient payables à Méga Câble Enr. et que la 9108 a exploité une entreprise sous cette même raison sociale après sa constitution ne fait pas en sorte que les revenus antérieurs puissent lui être attribuables. Il s’agit de deux entités légales distinctes ayant exploité une entreprise sous la même raison sociale mais à des époques différentes. Cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas de situations où il est possible que des opérations antérieures à la constitution d’une société puissent être comptabilisées par la société (voir Bulletin d’interprétation IT-454), mais, en l’espèce, aucune preuve pouvant justifier cela n’a été présentée.

 

[9]     En l’espèce, l’appelant a constitué une société sur les recommandations de son comptable et a simplement poursuivi ses activités après le 1er octobre 2001. Tous les revenus produits par l’appelant avant cette date, selon la preuve, lui appartient donc. Les revenus payés par S.S. Communication enr. ont été versés au moins un mois avant la constitution de la société. La preuve ne révèle pas que l’appelant avait l’intention de constituer une société aux fins de ses obligations contractuelles avec S.S. Communication enr. ou qu’il y a eu ratification de contrats par la 9108.

 

La pénalité

 

[10]    L’intimé impose une pénalité en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi qui se lit comme suit :

 

Faux énoncés ou omissions.  Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse (appelé « déclaration » au présent article) rempli, produit ou présenté, selon le cas, pour une année d’imposition pour l’application de la présente loi, ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d’une pénalité égale, sans être inférieure à 100$, à 50 % du total des montants suivants :

 

[11]    La faute lourde se représente comme un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui correspond à une action délibérée, une indifférence au respect de la Loi. (Voir Venne c. Canada, [1984] A.C.F. no 314 (Q.L.) 84 DTC 6247).

 

[12]    L’ancien juge en chef Couture de cette cour affirmait dans l’affaire Morin c. M.R.N., 88 DTC 1592, aux pages 1593 et 1594 :

 

Pour échapper aux pénalités prévues aux dispositions du paragraphe 163(2) de la Loi, il est nécessaire, à mon avis, que l’attitude et le comportement général du contribuable soient tels qu’aucun doute quant à sa bonne foi et sa crédibilité ne puissent être sérieusement entretenus et cela pendant toute la période couverte par la cotisation […].

 

[13]    Il incombe à l’intimée de faire la preuve, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant a fait un faux énoncé ou une omission sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde. L’avocat de l’intimée invoque le fait que le revenu en question n’a pas été déclaré par l’appelant et que ce faux énoncé constitue une faute lourde parce que l’appelant ne s’est pas interrogé sur cette question et s’est fié à son comptable. Il n’a pas fourni non plus les pièces justificatives visant la 9108 qui ont été demandées à l’étape de l’opposition.

 

[14]    Il est vrai en l’espèce que le revenu provenant de S.S. Communication enr. n’a pas été déclaré par l’appelant, mais il l’a été par la 9108. L’explication fournie par le comptable de l’appelant à l’effet qu’il s’est fié sur le feuillet T‑5018 pour attribuer ce revenu à la 9108 semble justifier sa décision. Il ne fait aucun doute que l’appelant semble complètement perdu devant les complexités que représentent la tenue de livres et surtout la préparation de déclarations de revenus. À mon avis, il ne s’agit pas ici d’un cas de faute lourde ou d’action délibérée de sa part. Même s’il ne s’est pas posé de questions sur les retards du comptable à produire les états financiers et la déclaration de revenus de la 9108, cela ne remet pas en question sa bonne foi durant la période couverte par la cotisation à son égard et son droit de se demander à qui sont attribuables ces revenus. À mon avis, les circonstances en l’espèce ne justifient pas l’imposition d’une pénalité.

 

[15]    L’appel est accueilli en partie et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation.

 

 

Signé à Edmundston (Nouveau-Brunswick), ce 17e jour de mars 2005.

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 


RÉFÉRENCE :                                  2005CCI197

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2004-4367(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Pascal Pilon et La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 23 février2005

 

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :       L'honorable juge François Angers

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 17 mars 2005

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l'appelant :

Horst Grein

 

Avocat de l'intimée :

Me Benoit Mandeville

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant:

 

                   Nom :                            

 

                   Étude :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Ontario

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