Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2002-1525(IT)I

ENTRE :

VICTOR E. CORMIER,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

_______________________________________________________________

Appels entendus le 16 décembre 2002 à Bathurst (Nouveau-Brunswick)

Devant : L'honorable juge François Angers

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :

Me Stéphanie Côté

_______________________________________________________________

JUGEMENT

Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard des années d'imposition 1999 et 2000 sont rejetés, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Edmundston (Nouveau-Brunswick), ce 24e jour de février 2003.

« François Angers »

J.C.C.I.


Référence : 2003CCI61

Date : 20030224

Dossier : 2002-1525(IT)I

ENTRE :

VICTOR E. CORMIER,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Angers, C.C.I.

[1]      L'appelant interjette appel à l'encontre des avis de cotisation pour les années d'imposition 1999 et 2000 par lesquels le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a rejeté les déductions au montant de 3 160,43 $ pour l'année 1999 et de 1 797,17 $ pour l'année 2000 que l'appelant avait réclamées à titre de frais afférents à l'usage d'un véhicule tout-terrain, d'une motoneige et d'une roulotte dans l'exercice de ses fonctions pour son employeur.

[2]      Les hypothèses de faits sur lesquelles le ministre s'est fondé pour confirmer les nouvelles cotisations pour les années d'imposition en litige ont été admises ou niées par l'appelant tel qu'indiqué à la fin de chaque énoncé et sont :

a)     au cours des années d'imposition 1999 et 2000 (les « années en litige » ), l'appelant était un employé de CJB Forestry Plus Ltd. ( « CJB Forestry » ) en tant que technicien forestier; (admis)

b)    les tâches de l'appelant consistaient à faire la vérification en forêt des chantiers de reforestation et à les marquer pour les replanter ou les éclaircir; l'appelant enregistrait sur ordinateur les données sur l'état des plantations et des routes ainsi que leurs emplacements exact; (admis)

c)     les formulaires prescrits T2200, dûment remplis par CJB Forestry pour chacune des années en litige et soumis par l'appelant attestaient:

i)      que l'appelant devait encourir des dépenses dans l'exercice des fonctions de son emploi;

ii)     qu'il devait travailler à différents endroits;

iii)    que ses périodes d'emploi étaient de mai à novembre 1999 et de juin à novembre 2000;

iv)    qu'il recevait une allocation fixe;

v)     qu'il n'avait pas à rester au moins douze heures à l'extérieur; et

vi)    qu'il devait utiliser une partie du domicile pour travailler et devait acheter des fournitures utilisées directement dans l'accomplissement des fonctions de son emploi sans recevoir de remboursement;

(admis)

d)    les déductions réclamées par l'appelant pour frais afférents à l'usage d'un véhicule tout terrain, d'une motoneige et d'une roulotte consistent aux montants suivants:

1999

véhicule tout terrain

motoneige

roulotte

carburant

312,00 $

0,00 $

0,00 $

entretien

212,30 $

0,00 $

979,81 $

prime d'assurance

0,00 $

0,00 $

72,00 $

immatriculation

16,00 $

23,00 $

23,00 $

amortissement

220,50 $

102,90 $

1 275 00 $

total

760,80 $

125,90 $

2 349,81 $

utilisation pour le travail

90 %

100 %

100 %

684,72 $

125,90 $

2 349,81 $

total réclamé

3 160,43 $

2000

véhicule tout terrain

motoneige

roulotte

carburant

276,00 $

0,00 $

0,00 $

entretien

338,27 $

0,00 $

31,48 $

prime d'assurance

0,00 $

0,00 $

72,00 $

immatriculation

16,00 $

0,00 $

23,00 $

amortissement

154,35 $

72,03 $

892,50 $

total

784,62 $

72,03 $

1 018,98 $

utilisation pour le travail

90 %

100 %

100 %

706,16 $

72,03 $

1 018,98 $

total réclamé

1 797,17 $

(admis)

e)     l'appelant n'a pas travaillé en hiver et ne se servait pas de sa motoneige pendant les années en litige; (admis)

f)     la motoneige n'est pas un véhicule mû par un moteur, conçu ou aménagé pour circuler sur les voies publiques et dans les rues; (admis)

g)     la motoneige est un bien en capital et son achat et son usage sont des frais personnels ou de subsistance; (nié)

h)     l'appelant choisissait de passer la nuit dans sa roulotte 2 ou 3 fois par semaine plutôt que de retourner chez lui; (admis)

i)      l'appelant n'était pas dans l'impossibilité de retourner chez lui à cause de la distance entre sa résidence et son travail; (nié)

j)     les frais afférents à l'achat et à l'utilisation de la roulotte sont des frais personnels ou de subsistance; (nié)

k)    l'appelant choisissait de se servir de son véhicule tout terrain au lieu de son camion à certains endroits; (admis)

l)      l'utilisation du véhicule tout terrain n'était pas nécessaire à l'appelant pour accomplir les fonctions de son emploi; (nié)

m)    les frais afférents à l'usage d'un véhicule tout terrain, d'une motoneige et d'une roulotte dont l'appelant s'est prévalu ne constituaient pas des dépenses d'emploi déductibles. (nié)

Le Ministre se fonde aussi maintenant sur les conclusions ou hypothèses de fait suivantes:

a)     le véhicule tout terrain n'est pas un véhicule mû par un moteur, conçu ou aménagé pour circuler sur les voies publiques et dans les rues; (admis)

b) le véhicule tout terrain est un bien en capital et son achat et son usage sont des frais personnels ou de subsistance. (nié)

[3]      En tant que technicien forestier, l'appelant doit circuler en forêt pour exécuter son travail, qui consiste à faire des inventaires et à recueillir des données qu'il transmet par la suite à son employeur après les avoir préparées à l'aide de son ordinateur et soumises au ministère provincial des Ressources naturelles. Il doit donc voyager, à l'occasion, jusqu'à une heure et demie de sa résidence.

[4]      Il reçoit cependant de son employeur une allocation pour ces dépenses. En 1999, il a reçu la somme de 5 200 $, et en l'an 2000, il a reçu 2 645 $.

[5]      Pour faciliter son travail, l'appelant transporte avec lui dans son camion un véhicule tout-terrain. Il utilise ce véhicule pour mieux circuler dans les endroits à accès difficile et pour ainsi épargner du temps. Il a déposé en preuve une série de photos permettant d'apprécier certaines difficultés de parcours que présente la circulation en forêt. L'appelant explique qu'il est rémunéré selon son rendement et non à un taux horaire de sorte que pour rentabiliser son travail, il se doit de trouver des moyens pour épargner du temps et augmenter son rendement. Il a acheté son véhicule tout-terrain en 1986 pour ses loisirs au coût de 3 000 $. En 1994, il a commencé à l'utiliser pour son travail.

[6]      Pour ce qui est de la roulotte, il s'en sert pour dormir en forêt lorsqu'il doit se rendre à une grande distance de sa résidence. Il y dormait deux à trois fois par semaine et l'installait habituellement près de l'endroit où il effectuait son travail. Dans d'autres cas, il l'installait près des roulottes des autres travailleurs. Il déclare utiliser la roulotte à 100 pour cent pour son travail.

[7]      Quant à la motoneige, il reconnaît ne pas l'avoir utilisée durant les deux années d'imposition en litige. Il s'en est toutefois servi auparavant pour son travail et il tient à la garder en cas de besoin.

[8]      Selon l'appelant, ces trois véhicules étaient indispensables pour effectuer son travail efficacement et rapidement et il les utilisait uniquement pour gagner sa vie. Il reconnaît avoir reçu des allocations pour ses déplacements, mais il dit que les montants reçus étaient insuffisants. L'appelant a produit deux lettres qu'il a fait parvenir au Bureau d'examen fiscal (A-2 et A-3) expliquant l'utilisation qu'il faisait des trois véhicules en question et une attestation de son employeur affirmant qu'il avait besoin de ces véhicules pour accomplir son travail.

[9]      L'intimée a fait témoigner madame Catherine Elizabeth Chopin, agente des appels à l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Son enquête a révélé que l'employeur de l'appelant n'exigeait pas que ce dernier ait une roulotte en forêt pour faciliter son travail. Selon l'employeur, la distance la plus longue que l'appelant avait à parcourir était de 124 km et il faisait lui-même un aller-retour chaque jour. L'employeur n'exigeait pas non plus que l'appelant passe ses nuits en forêt, et l'appelant avait lui-même demandé d'aller aux endroits les plus éloignés. La période de travail pendant laquelle il était nécessaire d'aller aux régions les plus éloignées était d'une semaine à deux semaines et demie par saison. Les autres employés qui effectuaient le même travail retournaient chez eux tous les soirs. Selon l'employeur, s'il avait été nécessaire que l'appelant passe la nuit en forêt, ses frais auraient été remboursés.

[10]     L'enquête de madame Chopin a révélé également que l'employeur n'exigeait pas que ses employés aient ou utilisent un véhicule tout-terrain. L'embauche d'un employé ne dépendait pas de la possession d'un véhicule tout-terrain, mais les employés étaient libres d'en utiliser un.

[11]     La déclaration de revenus de l'appelant pour l'année d'imposition 2000 comprend la formule T2200 dûment complétée par l'employeur. La formule confirme les conditions de travail de l'appelant et le fait qu'il ait reçu une allocation pour ses frais de déplacement. Ces renseignements sont repris à l'alinéa c) de la Réponse à l'avis d'appel, dont l'appelant a admis l'exactitude.

[12]     Même s'il semble y avoir certaines contradictions dans la preuve relativement aux conditions de travail de l'employé, il me paraît évident que l'utilisation d'un véhicule tout-terrain, d'une motoneige et d'une roulotte en forêt n'est pas un prérequis à l'obtention de l'emploi et que l'emploi de l'appelant n'était pas en péril s'il n'avait pas possédé ces véhicules. Il s'agit plutôt ici d'une situation où l'appelant a choisi d'effectuer son travail avec l'aide de ces véhicules afin de faciliter son travail et d'épargner du temps et des efforts. Il n'était pas tenu, en vertu de son contrat d'emploi, de les posséder et d'en assumer les dépenses. Son emploi entraînait des déplacements; l'employeur de l'appelant lui remboursait les frais liés à ces déplacements, et donc nécessaires à l'exécution de son travail, sous forme d'allocation de déplacement.

[13]     L'alinéa 8(1)h) de la Loi permet à un contribuable de déduire les frais de déplacement qu'il a été tenu d'acquitter en vertu de son contrat d'emploi (sauf les frais afférents à un véhicule à moteur) au cours de l'année. En l'espèce, je conclus que l'appelant n'était pas tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter les dépenses qu'il a réclamées et je conclus qu'il les a engagées par choix.

[14]     Maintenant, l'appelant peut-il déduire les frais engagés pour le véhicule tout-terrain et la motoneige en vertu de l'alinéa 8(1)j) de la Loi? L'article 248(1) donne la définition suivante des termes « véhicule à moteur » :

Véhicule mû par un moteur, conçu ou aménagé pour circuler sur les voies publiques et dans les rues, à l'exclusion des trolleybus et des véhicules conçus ou aménagés pour fonctionner exclusivement sur rails.

[15]     Au Nouveau-Brunswick, où cette cause a été entendue, la Loi sur les véhicules tout-terrain, chapitre A-7.11 des Lois révisées du Nouveau-Brunswick, définit un véhicule tout-terrain comme étant un véhicule « conçu et adapté pour l'usage hors route » et une motoneige comme un « véhicule autopropulsé destiné à être conduit exclusivement sur la neige ou la glace » . Il est évident que ces deux véhicules n'ont pas été conçus pour circuler sur les voies publiques et dans les rues de sorte qu'ils sont exclus de la définition de « véhicule à moteur » prévue par la Loi.


[16]     Les frais afférents à l'usage d'un véhicule tout-terrain, d'une motoneige et d'une roulotte aux montants de 3 160,43 $ et 1 797,17 $ pour les années d'imposition 1999 et 2000 respectivement ne sont pas déductibles. Les appels sont rejetés et la décision du ministre est confirmée.

Signé à Edmundston (Nouveau-Brunswick), ce 24e jour de février 2003.

« François Angers »

J.C.C.I.


RÉFÉRENCE :

2003CCI61

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-1525(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :

VICTOR E. CORMIER

et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Bathurst (Nouveau-Brunswick)

DATE DE L'AUDIENCE

16 décembre 2002

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

L'honorable juge François Angers

DATE DU JUGEMENT :

24 février 2003

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Pour l'intimée :

Me Stéphanie Côté

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER:

Pour l'appelant :

Nom :

Étude :

Pour l'intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.