Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Référence : 2004CCI39

Date : 20040112

Dossier : 2003-1460(IT)I

ENTRE :

IAN CHAPPELL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

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Pour l'appelant : L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée : Me Eric Sherbert

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MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l'audience

à Toronto (Ontario), le 24 novembre 2003.)

Le juge Miller

[1]      L'appelant, Ian Chappell, interjette le présent appel sous le régime de la procédure informelle de la Cour à l'encontre de la décision du ministre du Revenu national, de refuser sa déduction de paiements de pension alimentaire versés à Elizabeth Chappell en 1999, au montant de 20 000 $. Il interjette appel aussi à l'encontre de la pénalité pour production tardive et des intérêts en souffrance.

[2]      Les faits sont simples. M. Chappell et son épouse se sont séparés en janvier 1997 en raison de l'échec du mariage. M. Chappell, de son plein gré, a versé des paiements de pension alimentaire à sa femme tout au long des années 1997, 1998 et 1999. En 2000, il s'est rendu compte qu'il avait besoin d'une entente écrite pour assurer la déductibilité de ses versements. Une entente a été rédigée en décembre 2000, que Mme Chappell n'a pas signée jusqu'au 23 mai 2001; M. Chappell l'a signée le 31 mai 2001. Il y a eu un échange de correspondance entre les avocats de M. et de Mme Chappell à la fin de 2000, dans lequel l'avocat de M. Chappell, Me Allen, a demandé à Mme Chappell l'exécution de cette entente.

[3]      L'avocate de Mme Chappell, Mme Herman, a laissé entendre le 13 décembre que Mme Chappell n'était pas disposée à signer. Je vais simplement lire quelques phrases d'une lettre de Mme Herman, datée du 13 décembre :

[traduction]

[...] Ma cliente n'est pas prête à signer aucun document en ce moment. Elle désire régler toutes les affaires dans leur ensemble. Si nous parvenons à résoudre beaucoup des questions qui se trouvent en suspens au moyen d'un accord de séparation, cet accord pourra refléter tous les paiements de pension alimentaire versés par votre client en 1999 et, par conséquent, il ne sera pas nécessaire de prendre d'autres mesures.

M. Chappell a fait remarquer que sa femme souffre de problèmes émotifs et mentaux, raison pour laquelle elle a besoin de soins médicaux et, en fait, elle a été hospitalisée pendant une partie de 2000. Elle éprouve des difficultés à prendre des décisions. M. Chappell ne voulait pas insister et intenter un recours, vers la fin de 2000, par peur de l'effet que cela pourrait avoir sur Mme Chappell.

[4]      Pour que M. Chappell soit admissible à la déduction relative au montant de pension alimentaire, en vertu de l'alinéa 60b), les versements doivent être visés par la définition prévue au paragraphe 56.1(4) des montants de pension alimentaire. Très brièvement, un montant de pension alimentaire est un montant payable ou à recevoir à titre d'allocation périodique pour subvenir aux besoins du bénéficiaire, des enfants du bénéficiaire, ou à la fois du bénéficiaire et de ses enfants, si le bénéficiaire peut utiliser le montant à sa discrétion et le bénéficiaire est le conjoint ou l'ancien conjoint du payeur et vit séparé de celui-ci pour cause d'échec de leur mariage et le montant est à recevoir aux termes de l'ordonnance d'un tribunal compétent ou d'un accord écrit.

[5]      Pour qu'il soit déductible en 1999, il doit y avoir eu un accord écrit, exécuté au plus tard vers la fin de 2000. Cela est exigé par la formulation du paragraphe 60.1(3) qui stipule ceci :

60.1(3) Pour l'application du présent article et de l'article 60, lorsqu'un accord écrit [...] établi à un moment d'une année d'imposition, prévoit qu'un montant payé avant ce moment et au cours de l'année ou de l'année d'imposition précédente est considéré comme payé et reçu au titre de l'accord ou de l'ordonnance, les présomptions suivantes s'appliquent :

a)           le montant est réputé avoir été payé au titre de l'accord ou de l'ordonnance; [...]

[6]      Donc, la question est simplement de savoir s'il y avait un accord écrit exécuté entre M. et Mme Chappell en 2000. On ne peut pas considérer que l'accord écrit signé en mai 2001, quoique rédigé en décembre 2000, ait été conclu en 2000. L'accord écrit a été conclu au moment où les parties ont signé le document, ce qui a eu lieu en 2001.

[7]      Peut-on dire que la correspondance échangée entre les avocats de M. et de Mme Chappell soit suffisante pour constituer un accord écrit? Bien que je sois d'accord avec les motifs des décisions citées par M. Sherbert, comme Pienaar v. R.,[1] Grant c. R.[2] et Foley c. La Reine[3], que la correspondance échangée entre avocats peut servir d'accord écrit, je ne suis pas convaincu que dans la présente affaire, les lettres soient suffisamment claires, tel que l'est un accord, pour constituer un accord écrit. En effet, la lettre de l'avocate de Mme Chappell du 13 décembre énonce clairement le contraire. Elle dit que, si d'autres affaires ne sont pas réglées, il est peu probable que M. Chappell obtienne un accord écrit au sujet des montants de pension alimentaire. J'estime que ce serait étirer la signification de ces mots précis et du ton employé par Mme Herman dans ses lettres, bien au-delà de leur sens ordinaire, que de conclure qu'ils représentent un accord écrit; ce n'est pas le cas.

[8]      Voici, encore une fois, une de ces situations regrettables où le contribuable choisit la bonne voie et prend la décision décente de ne pas poursuivre son ex-épouse en justice, pour des raisons humanitaires, et il se fait avoir au tournant par les lois fiscales. Cependant, je ne peux faire abstraction de ces lois, sinon ce serait le chaos.

[9]      Il n'y avait pas d'accord écrit exécuté en 2000 permettant la déductibilité correspondant à l'année 1999. Je ne peux pas prétendre qu'il y en avait un. Sans accord, les paiements ne sont pas déductibles et l'appel doit être rejeté.

[10]     Dans les circonstances, il pourrait s'agir d'une situation appropriée pour demander au ministre d'exercer son pouvoir discrétionnaire d'annuler les intérêts. Cela n'est plus en mon pouvoir. L'affaire doit être présentée au ministre. Cela doit être réglé entre M. Chappell et le ministre.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de janvier 2004.

« Campbell J. Miller »

Juge Miller

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour de mai 2004.

Ingrid B. Miranda, traductrice



[1]           [2003] 1 C.T.C. 2296.

[2]           C.C.I., no 2000-2702(IT)I, 27 mars 2001([2001] 2 C.T.C. 2474).

[3]           [2000] A.C.I. no485.

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