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Dossier : 2003-607(IT)G

ENTRE :

PHILIPPE ROULEAU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 29 mars 2005 à Sherbrooke (Québec)

Devant : L'honorable juge Paul Bédard

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Richard Généreux

Avocate de l'intimée :

Me Anne-Marie Boutin

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1997, 1998 et 1999 est admis, sans dépens, et les nouvelles cotisations déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour d'octobre 2005.

« Paul Bédard »

Juge Bédard


Référence : 2005CCI234

Date : 20051024

Dossier : 2003-607(IT)G

ENTRE :

PHILIPPE ROULEAU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bédard

[1]      L'appelant conteste les cotisations établies selon la méthode de l'avoir net par le ministre du Revenu national (le « ministre » ) à l'égard des années 1997 à 1999 (la « période pertinente » ). Le ministre a ajouté au revenu de l'appelant des revenus non déclarés de 13 206 $ en 1997, de 25 823 $ en 1998 et de 31 487 $ en 1999. Une de ces cotisations a été établie après la période normale de nouvelle cotisation, mais l'avocat de l'appelant a indiqué au début de l'audience qu'il n'allait pas en contester le bien-fondé en invoquant ce fait. De plus, l'avocat de l'appelant a reconnu au début de l'audience que la Cour pouvait dûment imposer à l'appelant, pour les années d'imposition 1997, 1998 et 1999, les pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard des revenus non déclarés tels que déterminés par la Cour dans le présent jugement.

[2]      L'appelant soutient que le ministre a commis des erreurs dans le calcul de son revenu établi selon la méthode de l'avoir net. En fait, le débat portait principalement sur les dépenses de consommation de l'appelant. Pour faciliter la compréhension des points en litige, je reproduis ici l'annexe I de la Réponse à l'avis d'appel, qui est un sommaire des calculs effectués par le ministre pour établir les revenus d'entreprise non déclarés par l'appelant, et l'annexe A de l'Avis d'appel, qui est aussi un sommaire des calculs effectués par l'appelant pour établir ses revenus d'entreprise non déclarés.

Réponse à l'avis d'appel :

ANNEXE 1

BILAN PERSONNEL

Philippe Rouleau

N.A.S. :

1995

1996

1997

1998

1999

ACTIF

Encaisse Banque Scotia

26.32

2.28

7.26

35.21

63.20

Immobilisations

Motocyclette

3,000.00

-

-

18,000.00

18,000.00

Motoneige

-

-

6,800.00

6,800.00

8,000.00

Placement :

Entreprise P.R. Enr.

34,596.00

33,633.00

23,418.00

23,971.00

45,940.27

__________

__________

__________

__________

__________

TOTAL DE L'ACTIF

37,622.32 $

33,635.28 $

30,225.26 $

48,806.21 $

72,003.47 $

__________

__________

__________

__________

__________

PASSIF

__________

__________

__________

__________

__________

TOTAL DU PASSIF

- $

- $

-    $

- $

- $

__________

__________

__________

__________

__________

CAPITAL AU 31 DÉCEMBRE

37,622.32 $

33,635.28 $

30,225.26 $

48,806.21 $

72,003.47 $

__________

__________

__________

__________

__________

37,622.32 $

33,635.28 $

30,225.26 $

48,806.21 $

72,003.47 $

__________

__________

__________

__________

__________

AUGMENTATION (DIMINUTION) DU CAPITAL

(3,987.04) $

(3,410.02) $

18,580.95 $

23,197.26 $

__________

__________

__________

__________

SOMMAIRE DES RAJUSTEMENTS

Philippe Rouleau

N.A.S. :

1996

1997

1998

1999

Capital à la fin

33,635.28 $

30,225.26 $

48,806.21 $

72,003.47 $

Capital au début

37,622.32 $

33,635.28 $

30,225.26 $

48,806.21 $

__________

__________

__________

__________

Variation du capital

(3,987.04) $

(3,410.02) $

18,580.95 $

23,197.26 $

__________

__________

__________

__________

RAJUSTEMENTS

Ajouter

Dép. pers. Échange de service

Portion personnelle (maison 300$/mois)

3,600.00

3,600.00

3,600.00

3,600.00

Dép. pers. Payées par Tourbe P.R.

2,166.45

2,138.84

2,622.48

4,116.29

Retraits de l'entreprise

9,749.00

17,193.00

18,610.71

22,201.00

Dépôts non retracés

1,500.00

5,000.00

Dépôts non retracés (aide sociale)

2,435.00

Perte sur disposition de bien à usage pers.

non admissible en vertu de 40(2)g)(iii)

1,500.00

1,800.00

Paiement des impôts féd. et prov.

-   

700.00

1,080.45

4,597.18

20,950.45 $

23,631.84 $

25,913.64 $

41,314.47 $

Total des additions

__________

__________

__________

__________

Avis d'appel :

BILAN PERSONNEL

1995

1996

1997

1998

1999

ACTIF

Actif à court terme

Encaisse

23,62 $

2,28 $

7,26 $

35,21 $

63,20 $

Argent en main

0 $

5 276,32 $

9 000,00 $

3 000,00 $

0 $

23,63 $

5 278,60 $

9 007,26 $

3 035,21 $

63,20 $

Immobilisations

Motocyclette

3 000,00 $

0 $

0 $

14 400,00 $

14 400,00 $

Motoneige

0,00 $

0 $

6 800 $

6 800,00 $

8 000,00 $

3 000,00 $

0 $

6 800,00 $

21 200,00 $

22 400,00 $

Placement

Entreprise P.R. Enr

34 595,57 $

33 633,00 $

23 418,00 $

23 971,00 $

45 940,27 $

Total de l'actif

37 619,19 $

38 911,60 $

39 225,26 $

48 206,21 $

68 403,47 $

PASSIF

Total du passif

0 $

0 $

0 $

0 $

0 $

Capital au 31 décembre

37 619,19 $

38 911,60 $

39 225,26 $

48 206,21 $

68 403,42 $

Augmentation (Diminution)

du capital

0 $

1 292,41 $

313,66 $

8 980,95 $

20 197,21 $

CONCILIATION DE CAPITAL POUR LA PÉRIODE DU 1ER JANVIER 1996 AU 31 DÉCEMBRE 1999

1996

1997

1998

1999

Capital à la fin

38 911,60

39 225,26 $

48 206,21 $

68 403,42 $

Capital au début

37 619,19 $

38 911,60 $

39 225,26 $

48 206,21 $

Variation de capital

1 292,41 $

313,60 $

8 980,95 $

20 197,21 $

RAJUSTEMENT

Déduire :

Remboursement TPS

251,50 $

304,00 $

254,06 $

178,06 $

Gain en capital non imposable

0 $

0 $

43,00 $

250,00 $

Total des déductions :

251,50 $

304,00

297,06

428,00

Ajouter :

Dépenses personnelles payées par le commerce

1 248,32 $

2 138,84 $

2 622,48 $

4 116,29 $

Dépenses personnelles

12 357,68 $

11 848,16 $

14 374,52 $

13 335,71 $

Impôts payés

0 $

700,00 $

1 080,45 $

4 597,18 $

Perte sur bien à usage personnel

1 500,00 $

0 $

0 $

1 800,00 $

Total des additions :

15 106,00 $

14 687,00 $

18 077,45 $

23 849,18 $

Revenu total disponible

16 146,91 $

14 696,60 $

26 761,34 $

43 618,39 $

Revenu total déclaré

16 146,91 $

6 712,00 $

18 375,00 $

32 097,00 $

Revenu additionnel net

0,00 $

7 984,60 $

8 386,34 $

11 521,39 $

Contexte

[3]      Pendant les années pertinentes, l'appelant était propriétaire unique d'une entreprise exploitée sous la raison sociale « Tourbe P.R. enr. » (l' « entreprise » ). L'entreprise avait comme activité la pose de gazon pendant la saison estivale et le déneigement pendant la saison hivernale.

[4]      Madame Guérin a témoigné qu'à la suite de la vérification de l'entreprise qu'elle a faite pour l'année d'imposition 1996, elle avait décidé d'utiliser la méthode de l'avoir net pour établir les revenus de l'appelant pour la période pertinente. Elle a relaté que l'entreprise et l'appelant n'avaient utilisé qu'un seul compte bancaire pendant l'année 1996 et pendant la période pertinente. Elle a expliqué que le contrôle interne et la gestion des liquidités de l'entreprise étaient très déficients. À titre d'exemple, l'entreprise avait utilisé sur ses factures en 1996 trois séries numériques différentes; l'une était imprimée d'avance et les trois séries numériques étaient incomplètes. Elle a ajouté qu'elle avait constaté pour la même année que des factures de vente de l'entreprise avaient été payées en argent comptant et que l'appelant n'avait pas déposé l'argent comptant (16 000 $) dans le compte bancaire.

Remarques préliminaires

[5]      Il convient de souligner que l'appelant n'était pas présent lors de l'audience, prétendument pour cause de maladie. Seul, madame Nathalie Guérin, vérificatrice à l'Agence des douanes et du revenu du Canada ( « ADRC » ), et monsieur François Bergeron, agent des appels à l'ADRC, ont témoigné.

Analyse

[6]      La méthode de l'avoir net consiste à évaluer l'augmentation du capital (l'actif moins le passif) d'un contribuable au cours de la période considérée et à y ajouter les dépenses de consommation au cours de cette période. Du résultat ainsi obtenu, on soustrait différents montants exonérés d'impôt, tels les dons, les legs, les gains résultant du hasard et la portion non imposable des gains en capital réalisés et, le cas échéant, les revenus déjà déclarés. Le solde représente le revenu additionnel, objet de la cotisation arbitraire. Par cette méthode, on détermine donc le changement dans l'avoir net entre le début et la fin d'une année donnée.

[7]      Tout d'abord, il faut traiter du fardeau de la preuve qui incombe à l'appelant. Mon collègue le juge Tardif a eu l'occasion de traiter du fardeau de la preuve dans une affaire soulevant, comme c'est le cas ici, la question de l'avoir net.

[8]      Dans l'affaire Bastille c. Sa Majesté la Reine, (1999) 99 DTC 431, 4 C.T.C. 2155, il a écrit aux paragraphes 5 et suivants :

[5] Il m'apparaît important de rappeler qu'en cette matière, le fardeau de la preuve incombe aux appelants, à l'exception toutefois de la question des pénalités où le fardeau de preuve est imputable à l'intimée.

[6] Une cotisation établie en vertu de la formule AVOIR NET ne peut jamais découler de la rigueur mathématique souhaitée et souhaitable en matière de cotisation. Il y a généralement une certaine partie d'arbitraire provenant de la détermination de la valeur des composantes. Le Tribunal doit décider de la raisonnabilité de cet arbitraire.

[7] Le recours à ce procédé n'est d'ailleurs pas la règle. Il constitue en quelque sorte une exception utilisée dans les situations où le contribuable n'a pas en sa possession toutes les informations, documents et pièces justificatives pour permettre une vérification plus conforme aux règles de l'art et surtout plus précise quant au résultat.

[8] Les assises ou fondements des calculs élaborés dans le cadre d'un avoir net sont tributaires en très grande partie des informations transmises par le contribuable faisant l'objet de la vérification.

[9] La qualité, la vraisemblance, la raisonnabilité des informations ont donc une importance absolument fondamentale.

[9]      Un autre de mes collègues, le juge Bowman (tel était alors son titre), tenait les propos suivants dans l'affaire Ramey c. La Reine, [1993] A.C.I. no 142 (Q.L.), ([1993] 2 C.T.C. 2119, 93 DTC 791), au paragraphe 6 :

Je ne sous-estime pas les difficultés énormes, sinon pratiquement insurmontables, auxquelles l'appelant et son avocat se heurtent dans leur tentative de contester les cotisations d'actif net établies à l'égard d'un contribuable décédé. Estimer le revenu annuel d'un contribuable à partir de la valeur de son actif net est une méthode insatisfaisante et imprécise. C'est un instrument grossier que le ministre doit utiliser en dernier ressort. Une cotisation d'actif net repose sur une comparaison de l'actif net du contribuable, à savoir la valeur de l'actif moins le passif au début d'une année, avec son actif net à la fin de l'année. À la différence ainsi obtenue, on ajoute les dépenses qu'il a engagées pendant l'année. Le montant obtenu est réputé être le revenu du contribuable, sauf preuve contraire. Ces cotisations peuvent être inexactes dans une mesure indéterminée, mais elles sont valables jusqu'à preuve de leur inexactitude. Il est quasi impossible de les contester à la pièce. La seule façon vraiment efficace de les contester est de procéder à une reconstitution complète du revenu du contribuable pour l'année. Un contribuable dont les registres comptables et le mode de déclaration de revenus sont dans un tel fouillis que la cotisation d'actif net s'impose est souvent l'artisan de son propre malheur.

[10]     De l'examen du bilan personnel de l'appelant tel qu'établi par le ministre et par l'appelant pour les années d'imposition 1996, 1997, 1998 et 1999, je note que les seuls écarts entre les deux bilans sont liés à la valeur de la motocyclette acquise en 1998 (18 000 $ contre 14 400 $), l'encaisse à la fin de l'année d'imposition 1996 (0 $ contre 5 276,32 $), l'encaisse à la fin de l'année d'imposition 1997 (0 $ contre 9 000 $) et l'encaisse à la fin de l'année d'imposition 1998 (0 $ contre 3 000 $). L'appelant avait le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que le ministre avait tort sur ce point. Ce n'est certes pas en étant absent lors de l'audience, en ne produisant aucun témoignage à cet égard et en ne fournissant aucune preuve objective crédible sur ce point que l'appelant pouvait se décharger de l'obligation qui lui incombait de me démontrer que la valeur de la motocyclette acquise en 1998, que le ministre a établie à 18 000 $, n'était pas exacte. Quant à l'encaisse de l'appelant à la fin des années concernées, je n'ai pas de raison de mettre en doute le témoignage de madame Guérin, selon qui l'appelant lui avait affirmé lors de sa première rencontre, qu'il n'avait pas eu d'encaisse à la fin de chacune des années concernées. Pour ces raisons, je conclus que les variations du capital établies par le ministre dans le sommaire de ses calculs reproduits ci-dessus sont exactes.

[11]     En fait, le litige portait essentiellement sur les dépenses de consommation de l'appelant. La preuve a révélé que le ministre a établi les dépenses de consommation de l'appelant en additionnant les quatre premiers postes des « rajustements » qui apparaissent au sommaire des calculs du ministre reproduits ci-dessus (les « rajustements du ministre » ), qui s'intitulent respectivement « Dép. pers. Échange de service - Portion personnelle (maison 300$/mois) » , (il manque 2 mentions) « Dépôts non retracés » . Aussi, le ministre a établi le coût de la vie de l'appelant à 22 931 $ pour l'année d'imposition 1997, à 24 832 $ pour l'année d'imposition 1998 et à 34 917 $ pour l'année d'imposition 1999. Il convient immédiatement de souligner que l'appelant ne conteste pas le fait que les montants apparaissant aux deux premiers postes des rajustements du ministre doivent faire partie de son coût de la vie. D'ailleurs, la pièce A-4 intitulée « Établissement du coût de la vie » que l'appelant a préparée dans le but de démontrer son véritable coût de la vie pour la période pertinente démontre clairement que les deux premiers postes des rajustements du ministre en font partie. Le litige portait donc plus particulièrement sur les troisième et quatrième postes des rajustements du ministre, qui s'intitulent « Retraits de l'entreprise » et « Dépôts non retracés » .

[12]     Le ministre a soutenu que les « Retraits de l'entreprise » , c'est-à-dire l'argent comptant provenant de l'encaissement de chèques (pendant la période pertinente) payables à lui-même que l'appelant avait faits et qui étaient tirés sur le seul compte de banque qu'il détenait pendant la même période, devaient être ajoutés au coût de la vie de l'appelant parce que ce dernier n'avait pas été en mesure de donner des explications crédibles quant à l'utilisation de l'argent comptant provenant de ces retraits. Monsieur Bergeron a témoigné à cet égard qu'il avait jugé peu crédibles les explications de l'appelant que l'argent comptant :

          i)         provenant de 8 retraits[1] (variant entre 350 $ et 1 050 $) totalisant une somme de 5 400 $ avait servi à payer partiellement la motocyclette de marque « Harley » acquise le 18 août 1998;

          ii)        provenant de 2 retraits de 3 000 $ chacun[2] avait servi à payer partiellement la motoneige acquise le 29 janvier 1999;

          iii)       provenant de 8 retraits[3] (variant entre 300 $ et 600 $) totalisant la somme de 3 450 $ avait servi à payer partiellement la motoneige acquise le 14 décembre 1999.

[13]     De plus, monsieur Bergeron a soutenu que l'argent comptant provenant des « Dépôts non retracés » devait aussi être ajouté au coût de la vie de l'appelant parce que ce dernier n'avait pas été en mesure de donner des explications crédibles quant à l'utilisation de l'argent comptant provenant de ces « Dépôts non retracés » . Monsieur Bergeron a témoigné à cet égard qu'il avait jugé peu crédibles les affirmations de l'appelant : i) qu'il avait reçu 5 000 $ en argent comptant lors de la vente de la motoneige (acquise en 1997) le 4 novembre 1999; ii) qu'il avait utilisé une partie du produit de la vente, soit 450 $, pour payer ses dépenses personnelles; iii) qu'il avait utilisé le solde du produit de la vente (4 550 $) pour payer partiellement le prix d'achat (8 000 $) de la motoneige acquise le 14 décembre 1999.

[14]     Par ailleurs, l'avocat de l'appelant soutient que les « Retraits de l'entreprise » et les « Dépôts non retracés » des rajustements du ministre doivent être globalement exclus du calcul de l'avoir net et ce, parce qu'ils peuvent faire double emploi; autrement dit, il prétend que le risque est trop élevé que l'on compte en double certains éléments d'actifs d'un contribuable en ajoutant globalement l'argent comptant provenant de ces deux sources dans le calcul des revenus non déclarés établis selon la méthode de l'avoir net. Somme toute, il soutient que la méthode utilisée par le ministre était, en l'espèce, déraisonnable et illogique.

[15]     De façon générale, il m'apparaît fort douteux d'ajouter les « Retraits de l'entreprise » et les « Dépôts non retracés » dans le calcul des revenus non déclarés établis selon la méthode de l'avoir net. En effet, le risque est trop élevé que l'on compte en double certains éléments d'actifs d'un contribuable. Certes, l'argent comptant provenant de telles sources peut servir à payer le coût de la vie d'un contribuable pendant une période donnée, mais il peut aussi servir à d'autres fins, notamment à financer l'acquisition d'éléments d'actif au cours de cette période donnée.

[16]     Voilà pourquoi je suis d'avis que les rajustements du ministre faisant l'objet du présent litige, en l'occurrence les « Retraits de l'entreprise » et les « Dépôts non retracés » , devraient en principe être exclus du calcul de l'avoir net. Toutefois, il m'apparaît difficile de conclure ainsi dans la présente affaire. En effet, l'argent comptant ne peut servir qu'à épargner ou à consommer. Est-ce que l'appelant a épargné pendant la période pertinente? La preuve a révélé que l'appelant n'avait pas de passif et qu'il n'avait pas d'argent comptant à la fin de chacune des années 1996, 1997, 1998 et 1999. Certes, l'argent comptant provenant de ces deux sources a pu servir par ailleurs à financer les actifs acquis par l'appelant pendant la période pertinente. Toutefois, l'appelant a lui-même affirmé à madame Guérin et à monsieur Bergeron qu'une partie seulement de l'argent provenant de ces deux sources, soit 6 000 $ en 1997, 5 400 $ en 1998 et 8 000 $ en 1999, avait servi à financer l'achat des éléments d'actif acquis pendant la période pertinente. Il m'apparaît donc difficile de conclure en l'espèce que le solde de l'argent comptant provenant de ces deux sources (c'est-à-dire l'argent comptant n'ayant pas servi à acquérir les éléments d'actif pendant la période pertinente) ait pu servir à d'autres fins que de payer en l'espèce le coût de la vie de l'appelant.

[17]     Pour ces motifs, je conclus que seuls les montants suivants devraient être exclus des revenus additionnels de l'appelant :

          i)         6 000 $ en 1997;

          ii)        5 400 $ en 1998;

          iii)       8 000 $ en 1999.

[18]     L'appel est admis dans cette mesure seulement, sans dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour d'octobre 2005.

« Paul Bédard »

Juge Bédard


RÉFÉRENCE :                                   2005CCI234

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2003-607(IT)G

INTITULÉ DE LA CAUSE :               Philippe Rouleau et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Sherbrooke (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  Le 29 mars 2005

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable juge Paul Bédard

DATE DU JUGEMENT :                    Le 24 octobre 2005

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelant :

Me Richard Généreux

Avocate de l'intimée :

Me Anne-Marie Boutin

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

       Pour l'appelant :

                   Nom :                              Me Richard Généreux

                   Étude :

       Pour l'intimée :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Ontario



[1]               Retraits effectués entre le 2 juillet 1998 et le 1er décembre 1999.

[2]               Retraits effectués le 3 et le 18 février 1997.

[3]               Retraits effectués entre le 19 novembre 1999 et le 14 décembre 1999.

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