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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Dossier : 2001-3018(IT)I

ENTRE :

PAMELA SNOW,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appels entendus le 10 mai 2004, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

 

Devant : L’honorable juge Gerald J. Rip

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

John B. Haley

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Stacey Michael Repas

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          Les appels formés à l’égard des cotisations établies sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 1998 et 1999 sont rejetés.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de mai 2004.

 

 

 

« Gerald J. Rip »

Juge Rip

 

Traduction certifiée conforme

 

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Référence : 2004CCI381

Date : 20040519

Dossier : 2001-3018(IT)I

ENTRE :

PAMELA SNOW,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Rip

 

[1]     La question en litige dans les présents appels interjetés à l’égard des cotisations établies pour 1998 et 1999 est celle de savoir si Pamela Snow (anciennement Pamela Thomas) résidait au Canada.

 

[2]     Avant 1998, Mme Snow, laquelle a toujours résidé au Canada, travaillait comme directrice adjointe de l’arrondissement scolaire de Surrey en Colombie‑Britannique. En décembre 1997, après une interruption de travail d’environ trois ans, Mme Snow a choisi de prendre une retraite anticipée de l’arrondissement scolaire. Après un divorce qui l’a obligée à déménager, elle a vécu dans une maison en rangée où elle se sentait sous l’empire du règlement de copropriété du syndicat de copropriétaires. Elle [TRADUCTION] « souhaitait changer de vie ».

 

[3]     Mme Snow était citoyenne à la fois du Canada et des États‑Unis et elle détenait un passeport de chacun de ces pays. Elle estimait que cela lui donnait des occasions de voyager. Sa fille vivait dans la ville de New York et elle avait envisagé d’y déménager.

 

[4]     En décembre 1997, Mme Snow est tombée sur une annonce de Volunteers Service Overseas (« VSO »). Cet organisme, qui a son siège au Royaume-Uni et des bureaux à Ottawa, encourage les professionnels à faire profiter les pays en développement de leur expérience de travail. VSO emploie des directeurs de programme dans divers pays. Ces directeurs travaillent avec les ministères gouvernementaux locaux afin de placer les personnes intéressées au sein de ministères dont les besoins correspondent à leurs compétences. Une affectation auprès de VSO dure habituellement deux ans.

 

[5]     Mme Snow a fait une demande à VSO à Ottawa, a été acceptée et, après avoir suivi des cours de formation à Ottawa et au Royaume‑Uni, a été affectée à un poste au sein du ministère de l’Éducation du Belize afin de contribuer à l’élaboration d’un programme d’enseignement national.

 

[6]     VSO a défrayé Mme Snow pour le vol à destination du Belize et pour le voyage de retour à Vancouver. Elle travaillait pour le ministère de l’Éducation du Belize, lequel lui versait une modeste allocation.

 

[7]     Mme Snow a choisi de présenter une demande à VSO pour pouvoir [TRADUCTION] « contribuer » plutôt que de travailler ailleurs comme consultante et de [TRADUCTION] « recevoir beaucoup d’argent ». Elle travaillait [TRADUCTION] « de concert avec des collègues béliziens » pour favoriser leur apprentissage.

 

[8]     Dans son témoignage, Mme Snow a mentionné qu’avant de quitter le Canada, elle savait [TRADUCTION] « dans sa tête » qu’elle ne reviendrait pas au Canada puisqu’elle souhaitait une nouvelle vie. Avant de quitter Vancouver, elle a fermé une petite entreprise qu’elle exploitait, renoncé à ses avantages au titre du régime d’assurance‑santé provincial (lesquels ont été remplacés par l’assurance‑santé de VSO) et quitté son association professionnelle ainsi que le club des femmes de l’université.

 

[9]     Mme Snow se souvient que sa maison en rangée constituait un problème. Elle ne voulait pas vendre la propriété en raison du marché faible de l’immobilier à la fin de 1997 et au début de 1998. De plus, à cause des règles et du règlement de copropriété adoptés par le syndicat de copropriétaires, il était difficile de trouver un locataire qui fût satisfaisant à ses yeux et à ceux du syndicat. Mme Snow a décidé de laisser son fils et son épouse ainsi que leur nouveau‑né vivre dans la maison en rangée sans avoir à payer de loyer. Son fils entretiendrait la propriété, mais elle continuerait de payer les taxes, les primes d’assurance et les charges de copropriété. Elle a en outre donné une procuration à son fils.

 

[10]    Mme Snow a entreposé la plupart de ses biens ainsi que les antiquités de sa grand‑mère à Vancouver. Les meubles et les appareils électroménagers sont demeurés dans la maison en rangée. Mme Snow estimait que Vancouver était [TRADUCTION] « un endroit où elle pouvait renouer avec les choses qu’elle souhaitait accomplir » et elle s’est rendue à Vancouver pendant son affectation. Elle souhaitait également passer du temps avec sa petite‑fille à Vancouver. En outre, si elle avait besoin d’un endroit où habiter, ce devait être à Vancouver. Elle a affirmé qu’elle ne pouvait pas vivre au Belize. Elle n’a jamais envisagé d’amener ses meubles avec elle au Belize. En revanche, si elle avait déménagé à New York, elle y aurait emporté ses meubles, mais [TRADUCTION] « jamais » n’aurait‑elle amené ses meubles dans un pays en développement.

 

[11]    Mme Snow a conservé son permis de conduire de la Colombie‑Britannique. Elle pouvait s’en servir lors de ses visites dans cette province et il était en outre valide dans les pays en développement, selon ses dires. Elle a vendu son portefeuille de titres en 1998 et en 1999, mais elle a conservé son régime enregistré d’épargne‑retraite de même que ses comptes bancaires canadiens. Ses cartes de crédit étaient émises par des institutions financières canadiennes. Ses prestations de retraite ou d’autres pensions étaient versées à un compte bancaire canadien. En 1998, elle avait informé l’administrateur du régime de pension à l’intention des enseignants et son conseiller en placement du fait qu’elle serait une personne non résidante du Canada pendant deux ans.

 

[12]    Le courrier de Mme Snow continuait d’être envoyé à sa maison en rangée parce que le [TRADUCTION] « service des postes dans les pays en développement est médiocre ».

 

[13]    Le 14 février 1998, Mme Snow a quitté le Canada. Elle a invité les membres de sa famille au Belize pour Noël 1998 et a rendu visite à sa famille à Vancouver et à Manning Park à Noël 1999. Elle a également passé une semaine à Vancouver en février 1999 alors qu’elle se trouvait entre deux emplois au Belize. Le gouvernement du Belize avait initialement retenu ses services pour deux ans afin qu’elle élabore un programme d’enseignement à l’intention des enfants d’âge préscolaire, mais il lui a par la suite demandé de modifier ses fonctions et de préparer un programme d’enseignement préscolaire. Son séjour au Belize a donc été prolongé d’une année. Pendant ses visites à Vancouver, elle se rendait à la Simon Fraser University afin d’obtenir des livres et des renseignements pour l’aider à préparer le programme préscolaire.

 

[14]    Lorsqu’elle était à Vancouver, Mme Snow demeurait dans sa maison en rangée et elle utilisait en outre l’automobile qu’elle y avait laissée. Elle avait décidé de ne pas vendre son automobile parce qu’il s’agissait d’un modèle datant de 1986 et qu’elle n’aurait pas pu obtenir un prix élevé. Elle avait autorisé son fils à se servir de la voiture.

 

[15]    Comme son affectation auprès de VSO touchait à sa fin et qu’elle souhaitait continuer de travailler avec cet organisme, Mme Snow a demandé une deuxième affectation. Elle avait aussi envisagé d’entreprendre des études supérieures dans le domaine du développement dans une université américaine ou britannique. Elle a également passé une entrevue pour un poste supérieur au sein de VSO, mais sans succès. VSO lui a suggéré d’essayer de trouver du travail auprès d’autres organismes et lui a dit que, si ces démarches étaient infructueuses, elle serait toujours la bienvenue à VSO. Elle est retournée à Vancouver après l’entrevue. À son retour, elle a participé à des ateliers offerts par VSO au Canada afin [TRADUCTION] « de tirer profit de l’expérience des autres ». Elle avait l’intention d’accepter une seconde affectation à l’étranger.

 

[16]    Le paragraphe 2(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « L.I.R. ») prévoit que toute personne résidant au Canada à un moment donné au cours de l’année doit payer un impôt sur son revenu imposable. Selon le paragraphe 250(3) de la L.I.R., l’expression « personne résidant au Canada » vise une personne qui, au moment considéré, résidait habituellement au Canada.

 

[17]    Dans l’arrêt Thomson v. M.N.R.[1], le juge Rand mentionne ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

Pour l’application de la législation fiscale, il faut présumer qu’un particulier a toujours une résidence. Il n’est pas nécessaire qu’il ait une maison ou un logement particuliers ou même un abri. Il peut coucher à la belle étoile. Il faut uniquement déterminer les limites géographiques dans lesquelles il passe sa vie ou auxquelles sa vie ordinaire ou quotidienne est liée.

 

[18]    Une personne peut être résidente de plus d’un pays à des fins fiscales. La nature de la vie d’une personne et la fréquence à laquelle elle vient au Canada sont des facteurs importants à prendre en compte pour décider du lieu de sa résidence[2]. Les termes « résidait habituellement » employés au paragraphe 250(3) renvoient au lieu où, dans sa vie de tous les jours, la personne habite d’une manière normale ou habituelle[3]. L’intention d’un contribuable, même si elle est manifestement pertinente pour déterminer quelle est sa « vie de tous les jours », ne permet pas à elle seule de trancher l’affaire[4]. L’absence temporaire d’une personne du Canada n’entraîne pas nécessairement la perte de la résidence canadienne si le ménage familial demeure au Canada ou même, éventuellement, si des liens personnels ou commerciaux étroits sont maintenus au Canada[5].

 

[19]    Dans la présente affaire, la contribuable a accepté une affectation d’une durée de deux ans au Belize. Elle peut fort bien avoir cru qu’elle ne reviendrait pas au Canada une fois son affectation terminée. Elle a conservé une résidence à Vancouver où son fils et sa famille habitaient. L’ensemble de ses intérêts bancaires et de ses autres intérêts financiers se trouvaient au Canada. Ses chèques de pension étaient déposés dans son compte bancaire canadien. Son courrier lui était toujours envoyé à Vancouver. Elle ne faisait tout simplement pas confiance au système bancaire et au service postal du Belize et elle n’avait nullement l’intention de résider de façon permanente dans ce pays. Elle trouvait commode que ces questions continuent d’être réglées au Canada.

 

[20]    Au Belize, Mme Snow vivait dans un appartement [TRADUCTION] « très modeste » comprenant deux chambres et les [TRADUCTION] « meubles essentiels ». Elle a signalé qu’elle [TRADUCTION] « ne pourrait vivre au Belize » pour une longue période.

 

[21]    Pour Mme Snow, Vancouver était l’endroit où elle pouvait [TRADUCTION] « renouer avec les choses qu’elle souhaitait accomplir » et où elle pouvait demeurer en cas de besoin. Mme Snow a séjourné au Belize de façon temporaire[6]. Vancouver était sa terre d’attache; c’était la ville où se trouvait sa maison et [TRADUCTION] « c’est là où toujours asile [lui] sera donné »[7].

 

[22]    Son représentant a soutenu que la maison en rangée était habitée par la famille de son fils et que l’appelante ne pouvait l’utiliser quand bon lui semblait. Or, aucun élément de preuve n’établit ce fait. La maison en rangée de l’appelante était l’endroit où toujours asile lui serait donné.

 

[23]    Mme Snow résidait habituellement au Canada en 1998 et en 1999.

 

[24]    Les appels sont rejetés.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de mai 2004.

 

 

 

« Gerald J. Rip »

Juge Rip

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.

 


 

 

RÉFÉRENCE :

2004CCI381

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2001-3018(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Pamela Snow c. La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 10 mai 2004

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

L’honorable juge Gerald J. Rip

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 19 mai 2004

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

John B. Haley

 

Avocat de l’intimée :

Me Stacey Michael Repas

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1]           [1946] S.C.R. 209, p. 224 et 225.

[2]           Thomson, précité, p. 213 et 214, le juge Kerwin.

[3]           Thomson, précité, p. 231, le juge Estey.

[4]           Peter W. Hogg, Joanne E. Magee et Jinyan Li, Principles of Canadian Income Tax Law, 4e éd., p. 60 à 62, Carswell, Toronto.

[5]           Hogg, précité, p. 62.

[6]           The Shorter Oxford English Dictionary, vol. 2, 1973.

[7]           Robert Frost, The Death of the Hired Man, cité par le juge en chef adjoint Bowman, dans la décision Fisher v. R., [1995] C.T.C. 2011, 95 DTC 840, 1994 CarswellNat 1149, par. 41.

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