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Dossier : 2001-4542(IT)G

ENTRE :

WILLEM VANKERK,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus sur preuve commune avec les appels d'Elsbeth Vankerk (2001-4540(IT)G) à Kitchener (Ontario), les 13 et 14 décembre 2004.

Devant : L'honorable juge L. M. Little

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me John W. McDonald

Avocats de l'intimée :

Mes John R. Shipley et Harry Erlichman

____________________________________________________________________


JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en application de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1986, 1987, 1988, 1989, 1990, 1991, 1992, 1993, 1994 et 1995 sont rejetés, avec dépens, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 3e jour de mai 2005.

« L. M. Little »

Le juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de mai 2006.

Yves Bellefeuille, réviseur.


Dossier : 2001-4540(IT)G

ENTRE :

ELSBETH VANKERK,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Willem Vankerk (2001-4542(IT)G) à Kitchener (Ontario), les 13 et 14 décembre 2004.

Devant : L'honorable juge L. M. Little

Comparutions :

Avocat de l'appelante :

Me John W. McDonald

Avocats de l'intimée :

Mes John R. Shipley et Harry Erlichman

____________________________________________________________________


JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en application de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1986, 1987, 1988, 1989, 1990, 1991, 1992, 1993, 1994 et 1995 sont rejetés, avec dépens, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 3e jour de mai 2005.

« L. M. Little »

Le juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de mai 2006.

Yves Bellefeuille, réviseur.


Référence : 2005CCI292

Date : 20050503

Dossiers : 2001-4542(IT)G

2001-4540(IT)G

ENTRE :

WILLEM VANKERK et

ELSBETH VANKERK,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Little

A.       LES FAITS :

[1]      Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits (pièce A-1).

[2]      L'exposé conjoint des faits est en partie libellé comme suit :

[TRADUCTION]

a)          en 1987, Mark Allan Eizenga et, par la suite, James Sylvester ont ourdi un stratagème en vue d'escroquer des millions de dollars au gouvernement du Canada et à des investisseurs;

b)          le stratagème comportait la création de multiples prétendues « sociétés en nom collectif » . Ces « sociétés en nom collectif » n'étaient pas de véritables sociétés en nom collectif, parce que ni M. Eizenga ni M. Sylvester, en leurs qualités de dirigeants de la commanditée, faisant affaires sous la raison sociale Advanced Business Opportunities, n'avaient l'intention d'exploiter une entreprise en commun avec les investisseurs. Messieurs Eizenga et Sylvester avaient plutôt l'intention de frauder les investisseurs et le gouvernement du Canada;

c)          Messieurs Eizenga et Sylvester, ainsi que d'autres personnes, ont déclaré aux investisseurs que les « sociétés en nom collectif » s'occuperaient de la production d'enregistrements sonores, de disques et ainsi de suite. Cette déclaration était fausse, et MM. Eizenga et Sylvester savaient qu'elle était fausse;

d)          en fait, MM. Eizenga et Sylvester, ainsi que leurs sociétés et prête-noms, empochaient simplement la plupart des sommes reçues à titre de placements effectués dans les diverses sociétés en nom collectif. Les quelques sommes que M. Eizenga, M. Sylvester et d'autres personnes n'ont pas soutirées ont servi à du camouflage destiné à montrer que des activités commerciales étaient exercées par la société en nom collectif, alors qu'en fait aucune activité n'était exercée;

e)          Messieurs Eizenga et Sylvester ont commercialisé les « sociétés en nom collectif » en tant que véhicules destinés à permettre de réaliser d'importantes économies d'impôt. Messieurs Eizenga et Sylvester ont également promu les « sociétés en nom collectif » en tant qu'entreprises de production de disques à risque élevé;

f)           une bonne partie des placements effectués dans les « sociétés en nom collectif » l'ont été au moyen d'obligations selon lesquelles il fallait verser de l'argent comptant et signer des billets, obligations qui n'étaient pas honorées ou qui ne l'étaient qu'au moment où des remboursements d'impôt étaient générés;

g)          les remboursements d'impôt en faveur des investisseurs étaient générés au moyen des états frauduleux produits par MM. Eizenga et Sylvester, ainsi que par leurs prête-noms, en vue de créer, en faveur des investisseurs, un droit apparent à la déduction de pertes et d'intérêts courus;

h)          les remboursements ainsi générés étaient ensuite transmis de nouveau à MM. Eizenga et Sylvester, ainsi qu'à leurs sociétés et prête-noms, ou ils étaient empochés par les investisseurs;

i)           le ministre a par la suite refusé les diverses déductions demandées par les investisseurs, compte tenu du fait, entre autres, que les dépenses y afférentes n'avaient pas été engagées en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien.

Records International 88-6D(la première société en nom collectif)

[3]      Le 15 novembre 1988, 762039 Ontario Limited, faisant affaires sous la raison sociale Advanced Business Opportunities, et George Eizenga (le père de Mark Eizenga) ont censément formé une société en commandite connue sous le nom de Records International 88-6D (la « 88-6D » ). L'exposé conjoint des faits est libellé comme suit :

[TRADUCTION]

k)          en fait, la 88-6D était tout simplement un stratagème complexe que Mark Allan Eizenga, James Sylvester et leurs sociétés avaient ourdi en vue de frauder les investisseurs et le gouvernement du Canada.

[4]      Les appelants ont chacun acheté des unités dans la 88-6D comme suit :

                             Nombre          Montant devant              Montant

                             d'unités        censément être payé            payé    

Willem Vankerk      -     6                              127 500 $               30 900 $       (en partie au

                                                                                                          moyen d'un

                                                                                                          prêt)

Elsbeth Vankerk     -     6                              127 500 $               30 900 $       (en partie au

                                                                                                          moyen d'un

                                                                                                          prêt)

[5]      L'exposé conjoint des faits renferme les remarques suivantes :

[TRADUCTION]

s)          la commanditée (762039 Ontario Limited) était l'unique gérante de toute prétendue entreprise de la 88-6D;

t)           Mark Allan Eizenga était le promoteur et commandité de nombreuses autres prétendues sociétés en nom collectifsimilaires;

u)          en fait, chacune des prétendues sociétés en nom collectifétait simplement un véhicule destiné à permettre à Mark Allan Eizenga, à son associé James Sylvester et aux sociétés que ceux-ci contrôlaient d'escroquer aux détenteurs d'unités le montant qu'ils avaient versé en espèces pour leur placement;

v)          aucune des prétendues sociétés en nom collectif n'exploitait l'entreprise désignée et aucune n'était capable d'exploiter l'entreprise désignée. Dans la mesure où une activité était exercée par les prétendues sociétés en nom collectif, l'activité était conçue pour camoufler le subterfuge ainsi que les intentions de M. Eizenga, de M. Sylvester et de leurs sociétés. Aucune de ces activités n'était exercée au profit des détenteurs d'unités. Au contraire, elles étaient uniquement exercées au profit de M. Eizenga, de M. Sylvester et de leurs sociétés.

Les conséquences fiscales dans le cas de la 88-6D

[6]      En procédant au « camouflage » dont il a ci-dessus été fait mention, la 88-6D a censément émis en faveur d'Esquire Canada, le 27 octobre 1988, un billet d'un montant de 1 020 000 $ aux fins de la commercialisation.

[7]      La 88-6D a prétendu qu'Esquire Canada avait facturé un montant de 1 219 400 $ pour la période allant du 15 décembre au 31 décembre 1988. Il importe de noter que cette facture se rapportait à une période de 15 jours.

[8]      La 88-6D a déclaré une perte de 1 286 004 $, dans ses états financiers, pour l'exercice allant du 15 au 31 décembre 1988.

Mainstream Productions 89-33(la deuxième société de personnes)

[9]      Messieurs Eizenga et Sylvester ainsi que leurs sociétés ont établi une société en commandite connue sous la raison sociale Mainstream Productions - 89-33 (la « 89-33 » ). Le stratagème concernant la 89-33 était, quant aux aspects pertinents, identique à celui dont il a ci-dessus été question dans le cas de la 88-6D.

[10]     Les appelants ont chacun acheté des unités dans la 89-33 comme suit :

                                          Nombre                    Montant devant            Montant

                                          d'unités                censément être payé             payé    

          Willem Vankerk      -    18                             110 700 $               20 800 $

          Elsbeth Vankerk     -    12                             73 800 $               13 800 $

Les conséquences fiscales dans le cas de la 89-33

[11]     La 89-33 a prétendu qu'Esquire Canada avait envoyé une facture d'un montant de 1 465 100 $ pour la période allant du 4 août au 31 décembre 1989.

[12]     La 89-33 a déclaré une perte de 1 478 713 $ à des fins fiscales pour l'exercice allant du 4 août au 31 décembre 1989.

Mainstream Productions 90-50(la troisième société de personnes)

[13]     762039 Ontario Limited, faisant affaires sous la raison sociale Advanced Business Opportunities ( « ABO » ), a censément créé une société en commandite connue sous la raison sociale 90-50 (la « 90-50 » ).

[14]     Les appelants ont chacun acheté des unités dans la 90-50 comme suit :

                                         Nombre                   Montant devant             Montant

                                         d'unités                 censément être payé             payé   

          Willem Vankerk      -    12                             90 000 $                 40 575 $

          Elsbeth Vankerk     -    12                             90 000 $                 64 950 $

Les conséquences fiscales dans le cas de la 90-50

[15]     La 90-50 a prétendu qu'Esquire Canada avait envoyé une facture d'un montant de 1 740 120 $ pour la période allant du 10 septembre au 31 décembre 1990.

[16]     La 90-50 a déclaré une perte de 1 760 353 $ à des fins fiscales pour l'exercice allant du 10 septembre au 31 décembre 1990.

[17]     Lorsque les appelants ont produit leurs déclarations de revenus pour les années d'imposition indiquées, ils ont déduit les montants suivants :

WILLEM VANKERK

Montant de la

   perte déduite   

            Intérêts

1988

153 756 $

   10 838 $

1989

444 522 $

   60 598 $

1990

293 388 $

   91 422 $

1991

1 308 $

   54 660 $

1992

2 592 $

   40 995 $

1993

        ---

   44 495 $

1994

3 500 $

   40 995 $

1995

       ---        

   40 995 $

899 066 $

344 004 $

ELSBETH VANKERK

Montant de la

   perte déduite   

Intérêts

1988

153 756 $

1989

296 682 $

   10 838 $

1990

295 722 $

44 012 $

1991

   1 308 $

74 835 $

1992

   2 592 $

45 508 $

1993

---       

34 132 $

1994

---       

36 631 $

1995

        ---       

34 131 $

750 060 $

280 087 $

[18]     Le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a établi de nouvelles cotisations pour les années d'imposition susmentionnées des appelants en vue de refuser la déduction des pertes qu'ils avaient demandée à l'égard des trois abris fiscaux susmentionnés et de refuser la déduction des intérêts qu'ils avaient demandée.

B.       LES QUESTIONS EN LITIGE

[19]     La Cour est saisie des questions suivantes :

(1)      Records International 88-6D, Mainstream Productions 89-33 et Mainstream Productions 90-50 étaient-elles des sociétés en nom collectif exploitant une entreprise en vue de réaliser des bénéfices?

(2)      Les appelants doivent-ils être autorisés à déduire le montant des pertes et des intérêts comme ils l'ont demandé lorsqu'ils ont produit leurs déclarations de revenus pour les années d'imposition indiquées?

C.       ANALYSE

1.        Les sociétés en nom collectif appelées Records International 88-6D, Mainstream Productions 89-33 et Mainstream Productions 90-50 étaient-elles des sociétés en nom collectifconstituées de la façon appropriée et exploitant une entreprise en vue de réaliser des bénéfices?

[20]     L'article 2 de la Loi sur les sociétés en nom collectif de l'Ontario définit la société en nom collectif comme suit :

2.          La société en nom collectif est la relation qui existe entre des personnes qui exploitent une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice. Ne constitue toutefois pas une société en nom collectif, au sens de la présente loi, la relation qui existe entre les membres d'une compagnie ou d'une association constituée en personne morale par une loi générale ou spéciale en vigueur en Ontario ou ailleurs ou en application de celle-ci, ou inscrite comme personne morale aux termes d'une telle loi. L.R.O. 1980, chap. 370, art. 2.

[21]     Il a été convenu des faits suivants dans l'exposé conjoint des faits :

1.        La commanditée, Advanced Business Opportunities, n'a jamais eu l'intention d'exploiter une entreprise en commun avec les investisseurs (voir l'historique de l'exposé, alinéa b).

2.        La plus grande partie de l'argent reçu des personnes qui avaient effectué des placements dans les diverses sociétés en nom collectifa été tout simplement empoché par MM. Eizenga et Sylvester et le reste a servi à du camouflage dans une tentative manifeste visant à faire croire qu'une entreprise était exploitée (voir l'historique de l'exposé, alinéa c).

3.        La plupart des placements effectués par chaque investisseur étaient composés d' « obligations » de signer des billets et ces « obligations » n'ont jamais été honorées (voir l'historique de l'exposé, alinéa e).

4.        Les sociétés en nom collectif n'exploitaient pas l'entreprise désignée. En outre, les sociétés en nom collectif n'étaient pas capables d'exploiter l'entreprise désignée.

ET

5.        Aucune des activités exercées par les sociétés en nom collectifne l'était au profit des investisseurs.

[22]     En résumé, les sociétés en nom collectifn'exerçaient pas d'activités commerciales. La seule et unique activité qui était exercée était l'activité frauduleuse à laquelle se livraient MM. Eizenga et Sylvester.

[23]     J'ai conclu que les prétendues sociétés en nom collectifn'avaient jamais exercé d'activité commerciale. Il n'y avait pas d'intention de réaliser un bénéfice. Je cite le passage suivant de l'alinéa b) de l'exposé conjoint des faits :

[TRADUCTION]

b)          [...] Ces « sociétés en nom collectif » n'étaient pas de véritables sociétés en nom collectif, parce que ni M. Eizenga ni M. Sylvester, en leurs qualités de dirigeants de la commanditée, faisant affaires sous la raison sociale Advanced Business Opportunities, n'avaient l'intention d'exploiter une entreprise en commun avec les investisseurs. Messieurs Eizenga et Sylvester avaient plutôt l'intention de frauder les investisseurs et le gouvernement du Canada;

2.        Les appelants participaient-ils à l'exploitation d'une entreprise lorsqu'ils ont investi des fonds dans les sociétésen nom collectif?

[24]     L'alinéa 18(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) prévoit que le contribuable qui effectue une déduction de son revenu doit démontrer que la dépense a été engagée ou effectuée en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien.

[25]     En décidant s'il était possible de considérer que les appelants exploitaient une entreprise, il faut noter les points suivants :

-         les prétendus « frais de commercialisation » n'ont jamais été payés et il n'y a jamais eu de « commercialisation » ;

-         les sociétés en nom collectif n'ont jamais été constituées, parce que ni M. Eizenga ni M. Sylvester (les dirigeants d'ABO) n'avaient l'intention d'exploiter une entreprise en commun avec les investisseurs;

-         MM. Eizenga et Sylvester ont déclaré aux investisseurs que les sociétés en nom collectifexploiteraient une entreprise de production d'enregistrements sonores, de disques et de musique; ces déclarations étaient fausses;

-         MM. Eizenga et Sylvester ont commercialisé les sociétés en nom collectifen tant que véhicules destinés à entraîner d'importantes économies d'impôt. Une bonne partie des fonds investis dans les prétendues sociétés en nom collectifl'étaient au moyen d'obligations de verser de l'argent comptant. Ces obligations n'ont pas été honorées ou elles ont été honorées uniquement lorsque des remboursements d'impôt étaient générés;

-         les remboursements d'impôt des investisseurs étaient générés ou créés par suite des déclarations frauduleuses que MM. Eizenga et Sylvester avaient faites en vue de créer, en faveur des investisseurs, un droit apparent à la déduction de pertes et des intérêts courus.

[26]     Eu égard aux faits contenus dans l'exposé conjoint des faits et des faits présentés à la Cour, j'ai conclu que les dépenses qui ont été déduites n'étaient pas des dépenses au sens de l'alinéa 18(1)a) de la Loi, parce que les prétendues dépenses étaient du camouflage et qu'il s'agissait de fausses dépenses ou de dépenses fictives.

[27]     J'ai donc conclu qu'eu égard à ces faits, aucune entreprise n'était exploitée. Il s'agissait tout simplement d'un stratagème frauduleux que MM. Eizenga et Sylvester avaient ourdi.

[28]     En arrivant à cette conclusion, je me suis reporté aux décisions judiciaires suivantes :

          Dans la décision Tonn et al. c. La Reine, [1996] 2 C.F. 73, 96 D.T.C. 6001, la Cour fédérale a dit qu'il doit exister une possibilité de gagner un revenu, sinon la dépense n'est pas déductible.

          Dans la décision Moloney, Young, Russell et Fullard c. La Reine, no T-1059-85, 20 janvier 1989, 89 D.T.C. 5099, la Cour fédérale a dit qu'un stratagème n'a aucune fin commerciale réelle s'il consiste seulement à transmettre des documents et déclarations d'une façon circulaire, transmission qui est uniquement générée par des déductions fiscales. (Nota - Cette décision a été confirmée par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Moloney c. La Reine, no A-73-89, 5 octobre 1992, 92 D.T.C. 6570.

          Dans l'arrêt Stewart c. Canada, [2002] 2 R.C.S. 645, la Cour suprême a dit ce qui suit, à la page 679 :

[...] la question de savoir si l'activité exercée par un contribuable constitue une source de revenu est tranchée en se demandant si le contribuable a l'intention d'exercer cette activité en vue de réaliser un profit et s'il existe des éléments de preuve étayant cette intention.

[29]     Dans ce cas-ci, aucune activité commerciale n'était exercée par l'une ou l'autre des trois sociétés en nom collectif.

3.        Les frais d'intérêts sont-ils déductibles?

[30]     Je dois maintenant décider si les appelants ont le droit de déduire les frais d'intérêts. Les déductions suivantes ont été demandées :

                             Willem Vankerk

                                     1989                         10 838 $

                                     1990                         60 598 $

                                     1991                         91 422 $

                                     1992                         54 660 $

                                     1993                         40 995 $

                                     1994                         44 495 $

                                     1995                          40 995 $

                                                                  344 003 $

                             Elsbeth Vankerk

                                     1989                         10 838 $

                                     1990                         44 012 $

                                     1991                         74 835 $

                                     1992                         45 508 $

                                     1993                         34 132 $

                                     1994                         36 631 $

                                     1995                          34 131 $

                                                                  280 087 $

[31]     Les intérêts susmentionnés ont été calculés sur les prétendus billets. Toutefois, les appelants n'ont jamais payé d'intérêt sur les billets.

[32]     L'alinéa 20(1)c) de la Loi prévoit que les frais d'intérêts peuvent être déduits du revenu si les intérêts sont payés en exécution d'une obligation légale de verser des intérêts sur de l'argent emprunté en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien.

[33]     Dans ce cas-ci, les appelants n'ont pas établi qu'ils avaient versé des sommes qui étaient imputables aux intérêts sur les billets. En outre, aucune entreprise n'était associée aux montants que les appelants ont déduits au titre des intérêts.

4.        Les dépenses qui ont été déduites étaient-elles raisonnables dans les circonstances?

[34]     L'article 67 de la Loi prévoit qu'aucune déduction ne peut être faite relativement à une dépense, sauf dans la mesure où cette dépense était raisonnable dans les circonstances.

[35]     Dans ce cas-ci, Willem Vankerk a versé un montant de 92 275 $ et a déduit des pertes s'élevant à 899 066 $, plus des intérêts d'un montant de 344 004 $. Elsbeth Vankerk a versé un montant de 109 650 $ et a déduit des pertes s'élevant à 750 060 $, plus des intérêts d'un montant de 280 087 $. L'écart entre le montant qui a été versé en espèces par rapport aux pertes qui ont été déduites n'est pas raisonnable dans les circonstances.

[36]     Avant de conclure, j'aimerais faire certaines remarques au sujet des intérêts qui ont fait l'objet de cotisations de la part du ministre. Compte tenu des documents qui ont été produits devant la Cour, je note que l'année d'imposition 1987 de Willem Vankerk a donné lieu à une nouvelle cotisation le 18 juillet 1991 et que l'année d'imposition 1988 a donné lieu à une nouvelle cotisation le 26 février 1993. L'année d'imposition 1987 d'Elsbeth Vankerk a donné lieu à une nouvelle cotisation le 18 juillet 1991 et l'année d'imposition 1988 a donné lieu à une nouvelle cotisation le 31 janvier 1992. Les années d'imposition 1989, 1990 et 1991 de Willem Vankerk ont donné lieu à une nouvelle cotisation le 20 août 1993. Les années d'imposition 1989, 1990 et 1991 d'Elsbeth Vankerk ont donné lieu à une nouvelle cotisation le 30 août 1993. En d'autres termes, il y a eu un retard inhabituel de dix à quinze ans entre la date à laquelle les nouvelles cotisations ont été établies et l'audition des appels.

[37]     Je ne suis pas autorisé à renoncer aux intérêts qui ont été imposés. Toutefois, en vertu des dispositions d'équité de la Loi, le ministre est autorisé à renoncer à une partie des intérêts si le retard dans le traitement des appels était attribuable aux actions de représentants de l'Agence du revenu du Canada (l' « ARC » ). (Nota : je crois que la politique de l'ARC, pour ce qui est de la renonciation aux intérêts de la part du ministre, s'appliquerait également aux retards attribuables aux représentants du ministère de la Justice.) Le ministre voudra peut-être examiner la situation en vue de décider s'il faut renoncer à une partie des intérêts qui ont été imposés dans le cas où le retard serait attribuable à des représentants de l'ARC ou à des avocats du ministère de la Justice.

[38]     Pour les motifs susmentionnés, j'ai conclu que les appels doivent être rejetés avec dépens.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 3e jour de mai 2005.

« L. M. Little »

Le juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de mai 2006.

Yves Bellefeuille, réviseur.


RÉFÉRENCE :

2004CCI292

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

2001-4542(IT)G

2001-4540(IT)G

INTITULÉ :

Willem Vankerk et Esbeth Vankerk c.

Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Kitchener (Ontario)

DATES DES AUDIENCES :

Les 13 et 14 décembre 2004

MOTIFS DU JUGEMENT :

L'honorable juge L.M. Little,

DATE DU JUGEMENT :

Le 3 mai 2005

COMPARUTIONS :

Avocat des appelants :

Me John W. McDonald

Avocats de l'intimée :

Mes John R. Shipley et Harry Erlichman

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour les appelants :

Nom :

John W. McDonald

Cabinet :

McDonald, Ross

Cambridge (Ontario)

Pour l'intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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