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Dossier : 2005-1052(EI)

ENTRE :

AGENCE OCEANICA INC.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

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Appel entendu le 2 décembre 2005, à Montréal (Québec).

Devant : L'honorable juge Lucie Lamarre

Comparutions :

Représentant de l'appelante :

Riad Brahimi

Avocate de l'intimé :

Me Julie David

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JUGEMENT

L'appel en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi est rejeté et les décisions rendues par le ministre du Revenu national en date du 7 janvier 2005 pour la période du 1er mars 2002 au 5 mai 2004 relativement aux sept travailleuses, Marie-Carmel Douyon, Claude Davilmar, Nadège Pierre, Viviane Gaston Florestal, Roberte Jean, Raymonde Joseph et Patricia Horacius sont confirmées, de sorte que des primes d'assurance-emploi étaient payables pour ces sept travailleuses au cours de la période en litige, aux termes de l'alinéa 6g) du Règlement sur l'assurance-emploi.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de janvier 2006.

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre


Référence : 2006CCI14

Date : 20060105

Dossier : 2005-1052(EI)

ENTRE :

AGENCE OCEANICA INC.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre

[1]      Cet appel consiste à déterminer si l'alinéa 6g) du Règlement sur l'assurance-emploi ( « Règlement » ) s'applique.

            6. Sont inclus dans les emplois assurables, s'ils ne sont pas des emplois exclus conformément aux dispositions du présent règlement, les emplois suivants :

[...]

g) l'emploi exercé par une personne appelée par une agence de placement à fournir des services à un client de l'agence, sous la direction et le contrôle de ce client, en étant rétribuée par l'agence.

[2]      La première question en litige est celle de savoir si l'appelante est une agence de placement.

[3]      Ici, l'appelante n'agissait pas comme simple intermédiaire. Elle rémunérait les infirmières selon le tarif qu'elle établissait elle-même, soit 250 $ pour sept heures de travail, soit 35,71 $ de l'heure. L'appelante allait également chercher une marge de profit auprès de ses clients, tel qu'admis par monsieur Riad Brahimi, l'unique actionnaire de l'appelante, au paragraphe 7 p) de la Réponse à l'avis d'appel. De plus, l'appelante conservait une liste de ses travailleuses. C'est l'appelante qui faisait les arrangements entre ses clients, les Centres locaux de services communautaires ( « CLSC » ) et les Centres d'hébergement et de soins de longue durée ( « CHSLD » ) et les travailleuses. Il en ressort que l'appelante était bien une agence de placement au sens de l'alinéa 6g) du Règlement (voir Sheridan c. M.R.N., [1985] A.C.F. no 230 (QL) et Vendor Surveillance Corp. c. M.R.N., [2000] A.C.I. no 620 (QL).

[4]      La deuxième question en litige est de déterminer si les travailleuses en question exécutaient leur travail sous la direction et le contrôle des clients pour lesquels elles étaient appelées à rendre des services à la demande de l'agence de placement Oceanica. Si oui, elles seront assurables au sens de l'alinéa 6g) du Règlement.

[5]      Ici, les travailleuses acceptaient selon leur gré d'aller travailler chez les clients de l'agence, selon un tarif convenu avec l'agence. Les clients étaient les CLSC ou les CHSLD.

[6]      Une fois qu'elles acceptaient de s'y rendre, peut-on dire qu'elles étaient sous le contrôle et la direction des CLSC et des CHSLD? Je comprends de la preuve que les CLSC et les CHSLD font appel à des agences de placement pour remplacer ou compléter leur personnel infirmier. C'est pourquoi les infirmières référées par l'agence font le même travail que les infirmières déjà sur place et qui sont des employées de ces CLSC ou CHSLD.

[7]      En général, les travailleuses étaient assignées à travailler pour Info Santé. Toutes leurs conversations téléphoniques étaient enregistrées. Elles avaient un code d'accès pour accéder à l'ordinateur et retranscrivaient toutes les informations pertinentes de leur conversation téléphonique avec le patient sur une fiche informatique. Cette façon de faire permettait aux CLSC ou CHSLD en cas de problème de retracer ce qui avait été dit par chacune des travailleuses. Ceci est certainement une forme de contrôle. De plus, il y avait toujours une infirmière en chef ou une assistante infirmière sur les lieux. Bien que les infirmières avaient une certaine latitude, la seule présence de cette infirmière en chef constituait également une forme de contrôle et de direction sur le personnel, que ce soit les infirmières déjà employées par les CLSC ou CHSLD ou les infirmières de l'agence.

[8]      Il ressort également que les infirmières devaient inscrire leur présence dans un registre, lequel indiquait déjà leurs noms. Ceci est aussi une autre forme de contrôle de la présence des infirmières pour la période de travail où elles devaient se présenter.

[9]      Quant elles étaient assignées à domicile, elles devaient faire un rapport. Elles avaient la liste des patients à voir, les soins à prodiguer, et elles complétaient par écrit ce qui avait été fait. L'une des travailleuses a soulevé lors de son témoignage que les soins à domicile ne sont pas couverts par l'assurance-responsabilité et qu'elle avait avisé l'agence qu'elle ne devait pas être assignée au domicile des patients par les clients de l'agence. Une fois avisée de ceci, l'agence est intervenue auprès de ses clients afin que ceci ne se reproduise plus. Par contre, la preuve a révélé qu'avant que ce problème ne soit soulevé auprès de l'agence, l'infirmière s'était conformée aux directives du CLSC et s'était rendue au domicile de certains patients. Une fois l'agence avisée, cela ne s'est plus reproduit. Il y avait donc un contrôle et une directive exercée par le CLSC avant que l'agence n'intervienne.

[10]     Si l'infirmière ne pouvait se présenter au moment indiqué, elle pouvait tout simplement se faire remplacer. Elle avisait l'agence qu'elle se chargeait d'envoyer quelqu'un d'autre si celle-ci acceptait la personne suggérée par l'infirmière. Par ailleurs, si une infirmière voulait quitter le CHSLD avant l'heure prévue, elle devait en aviser l'infirmière en chef (l'une des infirmières, Marie Carmen Douyon, a même dit qu'elle devait avoir l'autorisation de celle-ci).

[11]     Ces infirmières se considéraient à l'emploi de l'agence puisqu'elles ne réclamaient aucune dépense dans le calcul de leur revenu avant que monsieur Brahimi ne leur indique de le faire.

[12]     Par ailleurs, les infirmières devaient suivre certains protocoles dans leurs fonctions et poser une série de questions précises.

[13]     Selon moi, tous ces indices reflètent un certain encadrement du travail des travailleuses par les CLSC et les CHSLD. Bien qu'elles pouvaient ne pas se présenter au travail, une fois qu'elles y étaient, il y avait certainement un encadrement qui démontre un contrôle et une direction exercés par les clients de l'agence.

[14]     À ce sujet, je me réfère aux critères énoncés dans l'affaire 9041-6868 Québec Inc. c. Canada, [2005] A.C.F. no 1720 (QL), 2005 CAF 334, rendue par la Cour d'appel fédérale le 17 octobre 2005. À mon avis, à partir du moment où les travailleuses travaillaient pour les clients de l'agence, elles étaient traitées de la même façon que les autres employées de ces clients. Ceci est également un critère à considérer (voir Wolf c. Canada, [2002] A.C.F. no 375 (QL), 2002 CAF 96, paragraphe 118).

[15]     Je suis donc d'avis que les travailleuses sont visées par l'alinéa 6g) du Règlement et que leur emploi est assurable.

[16]     L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de janvier 2006.

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre


RÉFÉRENCE :                                   2006CCI14

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2005-1052(EI)

INTITULÉ DE LA CAUSE :               AGENCE OCEANICA INC. ET M.R.N.

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 2 décembre 2005

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable juge Lucie Lamarre

DATE DU JUGEMENT :                    le 5 janvier 2006

COMPARUTIONS :

Représentante de l'appelante :

Riad Brahimi

Avocate de l'intimé :

Me Julie David

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

       Pour l'appelante:

                   Nom :                             

                   Étude :

       Pour l'intimé :                              John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Ontario

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