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Dossier : 2005-2224(GST)I

ENTRE :

9010-9869 QUÉBEC INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appel entendu les 13 et 14 juin 2006, à Sherbrooke (Québec)

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelante :

Me Guy Plourde

 

 

Avocat de l'intimée :

Me Robert Poupart

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie relativement à la taxe sur les produits et services en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 30 mars 2005 et porte le numéro 4-17-5126, pour la période du 1er novembre 1996 au 31 octobre 2000, est accueilli en partie, sans frais, et la cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte des aveux indiqués au tableau intitulé « Correction des achats Tupper 1999 » (pièce I‑3), selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juillet 2007.

 

 

 

« Alain Tardif »

Juge Tardif


 

 

 

 

Référence : 2007CCI365

Date : 20070710

Dossier : 2005-2224(GST)I

ENTRE :

 

9010-9869 QUÉBEC INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Tardif

 

 

[1]     Il s'agit de l'appel d'une cotisation établie en vertu des dispositions de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi »), relativement à la taxe sur les produits et services (« TPS »), portant le numéro 4-17-5126 et en date du 30 mars 2005 pour la période du 1er novembre 1996 au 31 octobre 2000.

 

[2]     Les questions en litige ont été définies par l'intimée comme suit :

 

          i)   le montant de la taxe sur les ventes non déclarées (achats majorés), l'intimée ayant déterminé que ce montant était de 79 338 $;

 

          ii)  le montant des crédits de taxe sur les intrants (les « CTI ») non admissibles en raison de la définition du terme « acquéreur », l'intimée ayant déterminé que ce montant était de 84 318 $;

 

[3]     L'appelante exploite une entreprise de vente et de location de vidéocassettes et de jeux électroniques. L'appelante agit aussi en quelque sorte comme grossiste pour plusieurs petits commerces du même secteur. L'appelante louait également des édifices commerciaux.

 

[4]     L'appelante, dans le cours de ses affaires, faisait de nombreuses transactions, dont plusieurs avaient des caractéristiques propres à ce domaine. Elle achetait, revendait et louait des films et des cassettes pour jeux vidéo. Les prix variaient beaucoup, notamment selon la qualité, mais aussi selon les clients et le matériel. En outre, il y avait des primes, des cassettes gratuites et diverses promotions afin de stimuler les ventes.

 

[5]     Étant donné le nombre et la grande variété des diverses opérations, il aurait été utile, sinon essentiel, d'avoir un système comptable adéquat permettant de bien identifier toutes les transactions.

 

[6]     L'appelante a soutenu énergiquement qu'elle avait mis en place une telle comptabilité, dont les données permettaient de répondre à toutes les questions d'une manière fiable afin de satisfaire à ses obligations comme mandataire pour la perception et la remise de la TPS, mais aussi afin de pouvoir réclamer et obtenir les CTI auxquels elle avait droit.

 

[7]     Selon l’avis d'appel, le système comptable de l'appelante était irréprochable. Je reproduis notamment les paragraphes 4, 5, 8 et 20 de son avis d'appel.

 

(4)        Les justifications et pièces justificatives fournies par l'appelante auraient dû satisfaire le vérificateur et le convaincre de ne pas recourir à cette méthode alternative;

 

(5)        En effet, les pièces justificatives et/ou factures devant servir à sa vérification ont toujours existées et été disponibles;

 

[...]

 

(8)        Dans les faits, l'appelante a tenu des registres et conservé les pièces à l'appui des renseignements contenues dans les registres, permettant au vérificateur d'établir, de corroborer ou de corriger les montants devant être déduits, retenus, perçus ou payés en vertu des lois fiscales;

 

[...]

 

(20)      La procédure comptable suivie par l'appelante avait été supervisée et entérinée par une vérificatrice de l'autorité fiscale, qui au cours de l'année 1996 avait passé neuf (9) mois à l'intérieure [sic] de l'entreprise;

 

[8]     Le même avis d'appel fait cependant état d'une autre réalité :

 

(6)        Dans les faits le vérificateur justifie plutôt son recours à cette méthode du au fait qu'il ait constaté qu'il manquait plusieurs numéros de facture, puisqu'en ce qui concerne ses autres observations, telle que les erreurs de calcul, les factures enregistrées en double, les écritures ou retranscription erronées ou omissions, le vérificateur a été en mesure de les retracer et de les corriger et d'en conclure que l'appelante avait remis trop de taxe;

 

(7)        Pourtant le vérificateur, suite aux explications et pièces justificatives fournies par l'appelante, a pu constater qu'il ne s'agissait point de factures mais bien de numéros de factures qui étaient manquants, et que ces numéros n'avaient nullement été utilisées [sic] pour facturer quoique ce soit;

[Je souligne.]

 

[9]     L'avis d'appel fait état de griefs, d'erreurs ou de manquements imputables à l'intimée. De façon cohérente avec son avis d'appel, lors de l'audition, l'appelante a consacré le principal de ses énergies à tenter de faire la preuve des nombreux manquements et erreurs du vérificateur lors de sa vérification. Cela ressort d'ailleurs très clairement de l'avis d'appel :

 

(3)        L'appelante s'oppose tout d'abord à l'utilisation par le vérificateur de l'autorité fiscale d'une méthode alternative afin de reconstituer les ventes par les achats, telle que décrite au paragraphe 2a). Elle considère cette décision comme injustifiée et au surplus qualifie la méthode de défectueuse, les résultats obtenus étant erronés, déraisonnables et non réalistes;

 

[...]

 

(8)        Dans les faits, l'appelante a tenu des registres et conservé les pièces à l'appui des renseignements contenues dans les registres, permettant au vérificateur d'établir, de corroborer ou de corriger les montants devant être déduits, retenus, perçus ou payés en vertu des lois fiscales;

 

(9)        Le vérificateur ne peut certes pas reprocher à l'appelante la tenue de son inventaire, alors qu'il a lui‑même constaté que les retours de location et de consignes, ainsi que plusieurs rachats sont par la suite vendu [sic] par lots pour des prix dérisoires étant donné leur dévaluation rapide;

 

(10)      De plus, lorsqu'on analyse le travail du vérificateur dans l'élaboration de marges bénéficiaires devant servir à la majoration des achats en conformité avec sa méthode alternative, on se rend compte que ce dernier commet plusieurs erreurs et qu'il ne tient nullement compte de la réalité du commerce de l'appelante en ce que :

 

a)         Le vérificateur utilise le coût des rachats afin d'augmenter la marge bénéficiaire et du même coup les ventes de l'appelante alors que ces rachats doivent être utilisés en diminution des ventes et évidemment en diminution de la marge bénéficiaire;

 

b)         Le vérificateur utilise les locations de films de façon à augmenter la marge bénéficiaire alors qu'en réalité il s'agit d'une perte substantielle pour l'appelante;

 

c)         L'échantillonnage utilisé par le vérificateur n'est nullement représentatif de la réalité de l'appelante en ce qu'il ne reflète pas, pour les années en cause, qu'entre 57 % et 64 % des ventes sont effectuées à des clients à fort escompte, représentant une marge bénéficiaire se situant en deçà de 3 % (ex : Accommodation Tupper 1 %);

 

d)         L'utilisation d'échantillons non représentatifs de la situation réelle du commerce de l'appelante apporte des résultats qui sont biaisés;

 

e)         La faible taille des échantillons eux-mêmes entraîne des estimations peu précises qui à leur tour entraînent des imprécisions dans le calcul de la marge bénéficiaire qui ne peuvent être considérées comme négligeables;

 

f)          Le vérificateur n'a pas pris en considération que les films non vendus à leur sortie subissent une dévaluation systématique de leur prix de vente. Un film neuf après seulement une semaine est dévalué de près de 30 % du prix fixé par les distributeurs;

 

g)         L'appelante comptabilise au net ses ventes et dépenses en relation avec le coût des marchandises vendues;

 

h)         Les revenus de location et des consignes sont comptabilisés lors du paiement par le client. Les films sont passés à la dépense;

 

i)          Le prix de vente des films étant contrôlé par les grands distributeurs, il devient irréaliste d'établir d'aussi forte marge bénéficiaire à l'appelante, d'autant plus que toutes les factures d'achat étaient disponibles tel qu'a pu le constater le vérificateur;

 

Tous ces points viennent compromettre l'évaluation du vérificateur et confirment qu'il est déraisonnable de fonder une réclamation sur un tel travail, étant donné les prémisses erronées sur lesquelles il repose;

 

(11)      L'appelante, lors de la vérification, a démontré au vérificateur que son approche était biaisée, et ce en reprenant chacune des factures, les codifiant et les regroupant en classe afin d'établir un plan d'échantillonnages représentatif de son entreprise, lui démontrant que les résultats auxquels il arrivait étaient erronés. Cependant le vérificateur n'a pas voulu considérer ce travail de l'appelante;

 

(12)      Les marges bénéficiaires établit par le vérificateur sont tout simplement illusoire et non conforme à la réalité, d'autant plus qu'elle représenterait des ventes supplémentaires de plus d'un million de dollar, ce qui est tout à fait irréaliste et impensable, comme il a certes été en mesure de le constater;

 

(13)      Les conclusions du vérificateur en relation avec les marges bénéficiaires reposent tout simplement sur une méthodologie renfermant de trop grandes faiblesses pour s'y fier;

 

[...]

 

(15)      La Direction des oppositions de l'autorité fiscal avance être conscient que les résultats obtenus sont probablement différents de la réalité;

 

[...]

 

(19)      L'incohérence de l'autorité fiscale est certes ici flagrante lorsque l'on constate que d'un côté on majore les ventes de l'appelante par l'utilisations [sic] des achats qu'on lui refuse pourtant de l'autre côté parce qu'elle ne rencontrerait pas la définition d'acquéreur;

 

 

[10]    De son côté, l'intimée a indiqué qu'il n'avait pas été possible de procéder à une vérification par le recours à la méthode traditionnelle et directe, qui est d’obtenir la totalité des données et des documents pertinents pour en faire l'analyse et en arriver à un résultat valable, fiable et probant.

 

[11]    Pour justifier le recours à la méthode de rechange, l'intimée a fait valoir plusieurs éléments, notamment les suivants :

 

·        Le système comptable de l'appelante était déficient au point qu'il ne permettait pas de déterminer l'ensemble des ventes.

 

·        Le système comptable de l'appelante était aussi déficient, en ce sens qu'il n'existait aucun moyen de s'assurer que toutes les factures étaient comptabilisées, la vérification ayant démontré qu'il y avait double enregistrement de factures et omission d'enregistrement de très nombreuses factures.

 

·        Le système comptable était déficient puisqu’il ne reflétait pas toutes les activités commerciales de l'appelante.

 

·        Il y avait plus de quinze irrégularités, dont certaines étaient majeures et établissaient l'impossibilité de faire une comptabilité conforme aux règles de l'art.

 

 

[12]    Cette absence de système comptable adéquat et conforme aux règles de l'art est d'ailleurs assez bien établie par le témoignage du vérificateur du 13 juin 2006, aux pages 21 à 23 de la transcription, question 31 et suivantes :

 

Q.        Donc, on y reviendra peut-être en détail. Mais, là, au niveau du système comptable, vous avez eu quelques difficultés au niveau du système comptable. C'est exact?

 

R.         Bien, là, j'ai vu que monsieur Boudreau, au lieu d'utiliser une méthode de comptabilité standard, c'est-à-dire que chacune des factures de vente est comptabilisée systématiquement lorsqu'elle est produite, j'ai remarqué tout de suite, là, que c'étaient des lots de vente qui étaient inscrits aux livres. Ça fait que, là, monsieur Boudreau m'a expliqué qu'il transcrivait sur un logiciel qu'on appelle Lotus, là, c'est une forme de tableur électronique, là, les montants, les numéros de factures puis les montants apparaissant, là, sur la facture de vente.

 

            Puis pour chacun des mois, il faisait le total de ce qu'il avait compilé. Pour effectuer ce travail‑là, monsieur Boudreau m'a indiqué qu'il utilisait les factures que monsieur Veilleux lui remettait. Il m'a alors expliqué que monsieur Veilleux lui remettait seulement les factures qui avaient été payées au complet.

 

            Il m'a aussi expliqué que son système, la méthode de travail de Distribution Vidéo Québec consistait à faire de la prévente aussi de films et de jeux vidéos. C'est-à-dire que la semaine précédant ses propres commandes, il avait des préventes de faites avec ses clients. Puis ces préventes‑là étaient déjà inscrites dans un système informatique qui est chez l'inscrit. Ça lui permettait, là, d'émettre la plus grande partie de sa facturation directement à partir de son système informatisé.

 

            Là, il m'a expliqué qu'il gardait beaucoup de statistiques, puis que cette banque de données informatiques‑là était assez complète. Ça fait que, là, je lui ai demandé tout de suite, au début de la vérification, d'avoir une copie de cette banque de données‑là d'informations. Ça me permettait d'avoir une copie des factures qui avaient été produites par le système informatique.

 

Q.        Si je comprends bien, Monsieur Maltais, c'est les précommandes?

 

R.         Les précommandes qui deviennent quand ils reçoivent leurs commandes à eux autres, c'est classé avec la facture de précommande qui devient la facture de vente. Ils utilisent la facture de précommande pour... Bien, tout ce que ça fait, c'est quand ils l'émettent physiquement, ça devient la facture de vente réelle de l'exploitant.

 

Q.        Qu'est-ce qui est arrivé avec ça?

 

R.         Monsieur Boudreau m'a informé deux, trois jours après ma demande que l'informaticien avait passé puis qu'il avait effacé la banque de données parce qu'elle prenait trop de place dans leur système informatique. Ça fait que, là... Pour moi, ça m'a déçu pas mal parce que j'aurais pu corroborer plus facilement les ventes réelles de l'inscrit pour savoir si la méthode que monsieur Boudreau utilisait pour comptabiliser les factures était concordante avec les ventes réelles, qui passaient par le système informatisée de l'inscrit.

 

[...]

 

[13]    Pour illustrer la situation, il m'apparaît utile de reproduire certains extraits :

 

Notes sténographiques du 13 juin 2006, pages 28 et 29 :

 

            La liste des factures en double de l'inscrit, cette particularité-là, au cours de mon travail, il a fallu que je corrobore les factures qui avaient été inscrites sur la forme de tableur Excel par monsieur Boudreau. Puis il y avait une des parties qui avait été inscrites directement aux livres, facture par facture.

 

Q.        Je vous arrête immédiatement. Si je comprends bien, il y avait deux systèmes comptables?

 

R.         Oui. Je crois que c'est dû à l'effet que son système informatique avait planté à plusieurs reprises ou un changement de méthode de comptabilisation de la part de l'inscrit. Mais au début de l'année, il avait commencé à comptabiliser facture par facture dans son système comptable. Puis à un moment donné, il a cessé cette activité-là pour utiliser un tableur pour compiler sur des feuilles externes, si on veut, là, les factures, puis prendre les totaux de ces factures-là pour rapporter le total des factures compilées dans ces registres comptables.

 

[...]

 

 

[14]    Le vérificateur a expliqué avoir consacré quelques mois à temps complet à faire la vérification; avant de recourir à une méthode de rechange, il a tenté de procéder par l'approche traditionnelle, mais a rapidement constaté que cela s'avérait totalement impossible.

 

[15]    Le vérificateur a indiqué avoir découvert 16 erreurs majeures où, dans la très grande majorité des cas, les règles de l'art élémentaires en matière de comptabilité étaient tout simplement bafouées, ce qui lui permettait de conclure que, de façon globale, la comptabilité de l'appelante ne permettait pas d'obtenir des résultats fiables et probants.

 

[16]    Quant aux multiples anomalies constatées, le vérificateur a expliqué et décrit le travail qu'il avait effectué. Il a notamment indiqué avoir informé monsieur Veilleux et son comptable, monsieur Jean‑Paul Boudreau, à plusieurs reprises d'irrégularités où il manquait des pièces justificatives. Chaque fois, les pièces justificatives devaient lui être remises, mais dans les faits, elles ne l'ont jamais été.

 

[17]    Il a également raconté avoir constaté qu'il manquait plusieurs centaines de factures, et que certaines factures portaient exactement le même numéro; l'explication alors fournie par l'appelante était le vol de tablettes de factures.

 

[18]    La preuve de l'appelante a été constituée principalement du témoignage de monsieur Jean‑Guy Veilleux et de son comptable, monsieur Jean‑Paul Boudreau. Ils ont tous deux totalement contredit le vérificateur et insisté sur le fait que toutes les erreurs constatées avaient été corrigées au fur et à mesure de leur constatation lors de la vérification; ils ont soutenu fermement que la totalité des pièces justificatives avaient été mises à la disposition du vérificateur.

 

[19]    Régulièrement, messieurs Veilleux et Boudreau ont affirmé d'une manière non équivoque que la totalité des documents utiles, pertinents et nécessaires, ainsi que toutes les informations et explications appropriées, avaient toujours été disponibles, ajoutant que le tout respectait les règles de l'art et était appuyé par les documents nécessaires à une reddition de comptes, tant pour la TPS que pour les CTI.

 

[20]    Pour expliquer l'absence de factures portant plusieurs centaines de numéros, l'administrateur de l'appelante a blâmé l'imprimeur et s'est engagé à obtenir les explications écrites de ce dernier, ce qui, dans les faits, ne s'est jamais produit.

 

[21]    À un autre moment, toujours pour expliquer l'absence de documents essentiels à une vérification par l'approche traditionnelle, monsieur Veilleux a mentionné un vol. Encore là, le rapport de police ou la liste des biens et documents volés n'a pas été présentée au vérificateur, qui devait les recevoir aux termes d'engagements formels de l'appelante ou de ses représentants, qui agissaient comme administrateur et comptable.

 

[22]    Il a également été fait mention à un autre moment d'un vol pur et simple de livrets de factures par un client laissé seul un court moment à un des établissements laissant sous‑entendre que plusieurs hypothèses étaient possibles en raison d'un tel méfait.

 

[23]    Appelé à expliquer une autre anomalie, monsieur Veilleux a mentionné qu'un ancien employé de l'appelante qui avait quitté pour démarrer sa propre entreprise, avait probablement utilisé dans son nouveau commerce des factures qui appartenaient à son ex-employeur, soit, en l'occurrence, l'appelante.

 

[24]    Monsieur Veilleux a affirmé que l'appelante avait fait des ventes à l'extérieur du pays et que les ventes en question n'étaient pas assujetties à la TPS. Appelé à fournir des pièces justificatives crédibles à cet égard, il a tout simplement mentionné qu'il ne les avait pas.

 

[25]    Les nombreuses contradictions ne découlent pas d'interprétations ou de perceptions, mais purement et simplement de l'analyse rapide et sommaire de plusieurs pièces et documents.

 

[26]    Malgré l’évident manque de pièces et l'absence de fiabilité de plusieurs autres pièces et certaines explications assez loufoques et douteuses, monsieur Veilleux et son comptable ont soutenu, encore une fois, que toutes les pièces étaient disponibles et qu'ils avaient répondu à toutes les questions du vérificateur, ce que ce dernier évidemment, a formellement nié.

 

[27]    Malgré la complexité des activités du commerce de l'appelante, monsieur Veilleux, le seul dirigeant, n'a jamais consulté une personne compétente au sujet de la mise en place d'un système satisfaisant aux exigences.

 

[28]    Bien plus, il a contesté, à plusieurs reprises la compétence et l'expertise du vérificateur au sujet d’un commerce du genre de celui qu'il exploitait, reconnaissant ainsi qu'il s'agissait d'un commerce particulier. Par contre, malgré cette particularité, il a confié cette lourde responsabilité à monsieur Jean‑Paul Boudreau, sur lequel il avait un ascendant considérable évident et qui, de plus, n'avait ni les connaissances, ni l'expérience pour assumer de telles responsabilités.

 

[29]    À tous les éléments contredisant totalement la version voulant que tout était en ordre et disponible s'est ajoutée toute une série de détails démontrant d'une manière non équivoque que le système comptable de l'appelante n'avait pas la clarté qu’affirment messieurs Veilleux et Boudreau.

 

[30]    Je fais notamment référence aux nombreuses factures de vente utilisées non pas pour des ventes, mais pour attester que la marchandise qui y était décrite était laissée en consignation. Je fais aussi référence aux ventes inscrites en double, à certaines réductions tout à fait arbitraires, et à certaines données relatives aux ventes.

 

[31]    Non seulement la preuve a démontré que le recours à une méthode de rechange était approprié, je suis tout à fait convaincu qu'il s'agissait là de la seule approche possible. En effet, en plus des explications soumises par le vérificateur au sujet de plusieurs irrégularités, l'attitude et le comportement de monsieur Veilleux et de son comptable et les nombreux engagements non respectés, justifient le choix de recourir à une méthode de rechange.

 

[32]    La méthode retenue a consisté à recueillir des données provenant d'un échantillon susceptible de produire un résultat probant. Pour s'assurer de la qualité de l'exercice, le vérificateur a d'abord fait valider son travail par un expert en statistique du ministère.

 

[33]    Détail vraiment étonnant, monsieur Veilleux a implicitement reconnu la légitimité d'une telle méthode lors de rencontres avec le vérificateur. Il a même tenté de le convaincre de retenir principalement les données provenant de ses principaux clients qui, selon lui, constituaient la partie la plus importante de ses ventes, tout en étant la moins rentable, puisque les marges de profit pour ces gros clients étaient presque nulles.

 

[34]    La prépondérance de la preuve a révélé d'une manière très convaincante que le système comptable de l'appelante était déficient et totalement insatisfaisant, justifiant ainsi le recours à une méthode de rechange qui, en l'espèce, était le recours à un échantillonnage permettant de tirer des conclusions probantes.

 

[35]    L'intimée et l'appelante ont toutes deux eu recours à des témoins experts pour soutenir leur position respective. Les parties ont reconnu comme experts, messieurs Claude Boivin pour l'appelante et Bernard Collin, pour l'intimée.

 

[36]    De son côté, l'intimée a fait témoigner monsieur Bernard Collin pour valider tant le travail exécuté que la cotisation dont il est fait appel.

 

[37]    Quant à, l'appelante, elle a retenu les services de monsieur Claude Boivin à titre d’expert. Ce dernier a essentiellement affirmé que la fiabilité d'un résultat obtenu à partir d'un échantillon dépend directement de la qualité et de la quantité de l’échantillon, l'idéal étant évidemment d’utiliser la totalité des données, ce à quoi le tribunal souscrit entièrement.

 

[38]    À partir de cette évidence, l'expert de l'appelante a émis certaines réserves quant à la qualité du travail du vérificateur, en relevant principalement que l'échantillon retenu aurait pu et dû être plus important, ce à quoi le tribunal souscrit encore là, puisque tout ce qui permet une plus grande fiabilité est, de toute évidence, préférable.

 

[39]    En l'espèce, la question est la suivante : le travail du vérificateur, qui est manifestement imparfait, doit-il être rejeté ou écarté? Si jamais le tribunal en arrivait à cette conclusion, le résultat serait que le tribunal devrait alors, à partir de la preuve disponible, établir ce qu’aurait dû être la cotisation.

 

[40]    Claude Boivin a été mis à contribution pour justifier la méthode statistique à l'origine de la cotisation. Il a expliqué avoir fait différentes vérifications afin de vérifier la qualité des échantillons retenus. Il a conclu que la méthode utilisée avait permis d'obtenir un résultat probant et très certainement fort raisonnable. Il a, sans hésitation, reconnu que plus l'échantillon était grand, plus probantes étaient les conclusions, l'idéal étant d’utiliser la totalité des données.

 

[41]    Quant à l'expert de l'appelante, il a principalement dit que la taille de l'échantillon lui semblait trop faible, au point que cela avait eu des incidences sur le résultat. Il n'a pas été en mesure de soumettre sa propre étude statistique, sa compétence étant limitée à la critique du travail de l'expert de l'intimée.

 

[42]    Il n'a pas fait la démonstration convaincante de manquements précis ou d'erreurs manifestes. Son témoignage a essentiellement consisté à exprimer des réserves et des inquiétudes sur la qualité des données prises en considération. Il n'a pas rejeté l'approche; il a essentiellement fait porter son témoignage sur les liens entre la fiabilité et la qualité et la quantité des données des échantillons.

 

[43]    Il a affirmé que la qualité et la fiabilité des conclusions tirées d’une approche statistique dépendent directement de l'envergure de l'échantillon, ce à quoi le tribunal souscrit sans aucune réserve.

 

[44]    En l'espèce, l'idéal était possible, puisqu'il aurait suffi que l'appelante ait mis en place une comptabilité adéquate et conforme aux règles de l'art, auquel cas, la vérification aurait pu se faire selon l'approche traditionnelle et directe, la méthode de rechange étant alors inappropriée et injustifiée.

 

[45]    L'appelante a plutôt choisi de confier l'importante question de sa comptabilité à une personne qui n'avait manifestement ni les connaissances ni la compétence pour le faire; d'autre part, son administrateur a lui‑même agi d'une manière désintéressée, voire même très négligente, dans la gestion des affaires de l'appelante, puisqu’il n'avait pas véritablement la volonté d'avoir une comptabilité acceptable. Peut-être croyait-il que la confusion et l'ambiguïté serviraient mieux les intérêts de l'appelante; chose certaine, il n’y avait pas en place un véritable système comptable.

 

[46]    En qualité de mandataire de l'État, tout inscrit en matière de la TPS doit se conformer aux dispositions de la Loi afin de bien exécuter cette tâche et pour s’assurer que l’on puisse effectuer en tout temps une vérification permettant de tirer des conclusions fiables.

 

[47]    La bonne foi, les excuses, l'ignorance et l'incompétence ne peuvent ni expliquer ni justifier l'absence totale ou même partielle d'un système comptable approprié et conforme aux règles de l'art.

 

[48]    Lorsqu'une personne, dans le cours de ses activités, doit s'inscrire pour la perception de taxes, elle doit mettre sur pied un véritable système comptable, à défaut de quoi elle s'expose à des conséquences qui peuvent être très graves, tant du côté de la taxe que des intérêts et des pénalités.

 

[49]    En effet, à défaut d’une comptabilité adéquate et de toutes les pièces justificatives, la vérification devra se faire au moyen d'une méthode de rechange qui, d'entrée de jeu, ne peut avoir la fiabilité de la méthode directe réalisée grâce à une comptabilité satisfaisant aux règles de l'art et aux dispositions de la Loi.

 

[50]    À la suite de l'utilisation d’une quelconque méthode de rechange, il sera très facile pour l'inscrit, partie à un litige fiscal, de relever des erreurs, de soulever divers griefs et d'attaquer tant la qualité de la méthode de rechange retenue que le travail de vérification effectué de cette façon. Il sera également facile de prétendre que la méthode de rechange retenue était imparfaite et non fiable.

 

[51]    Ses chances de réussir seront toutefois très minces, surtout si le travail a été fait de bonne foi et judicieusement et à l'intérieur de paramètres raisonnables.

 

[52]    Ainsi, à moins de pouvoir démontrer la présence d’une approche abusive, vindicative, non sérieuse et empreinte d'arbitraire et d’une façon de travailler inacceptable, l'inscrit devra vivre avec les conséquences financières, si pénibles soient-elles.

 

[53]    En l'espèce, l'intimée a d'abord justifié le recours à une méthode de rechange. Elle a ainsi énuméré les nombreux faits qui l'avaient amenée à recourir à la méthode de rechange.

 

[54]    Certes, certains de ces éléments étaient moins déterminants que d'autres. La légitimité du recours à une méthode de rechange n'a rien à voir avec la quantité des erreurs constatées; elle découle essentiellement de l'importance de ces erreurs ou de la gravité des éléments manquants.

 

[55]    Ainsi, un inscrit qui n'aurait en sa possession aucune des pièces justificatives ne pourrait certainement pas prétendre que le recours à une méthode de rechange était inapproprié; cette seule erreur serait largement suffisante pour justifier le recours à une méthode de rechange.

 

[56]    En l'espèce, le fait que le vérificateur ait relevé plusieurs manquements importants et déterminants me semble largement justifier le recours à une méthode de rechange.

 

[57]    Lorsqu'une cotisation est établie par une méthode de rechange, le contribuable qui désire contester le bien‑fondé de la cotisation doit préférablement prouver que le recours à la méthode de rechange était, dans les circonstances, inapproprié parce que les pièces disponibles étaient suffisantes pour permettre l'établissement d'une cotisation par une méthode traditionnelle et directe.

 

[58]    J'ai d'ailleurs indiqué au représentant de l'appelante, pendant l’audience, que je trouvais très curieux qu’il n’ait pas consacré des sous et de l'énergie à la préparation d'un dossier qui aurait permis de découvrir ce qu'aurait dû être la cotisation, d'autant plus qu'il s'agissait là d'un exercice facile, réaliste et extrêmement fiable, puisque lui et le comptable ont affirmé avec insistance que tout était correct et que toutes les pièces justificatives étaient disponibles.

 

[59]    En d'autres termes, si toutes les pièces justificatives et les registres étaient disponibles, pourquoi ne pas avoir élaboré une preuve adéquate pour démontrer ce qu'aurait dû être la cotisation? Non seulement une telle preuve n'a pas été soumise, tous les efforts ont essentiellement consisté à critiquer le travail de vérification.

 

[60]    En matière de taxes et d'impôts, les explications essentiellement verbales ayant pour but de discréditer le travail des vérificateurs ont peu ou pas de chance d'être retenues, sauf dans des circonstances tout à fait exceptionnelles.

 

[61]    Il ne s'agit pas de présumer de la mauvaise foi, il s'agit essentiellement de comprendre que dans un régime fondé sur l'autocotisation, il est tout à fait normal et légitime de s’attendre à ce que la personne qui agit à titre de mandataire de l'État, soit en mesure, en tout temps, de rendre compte suivant certaines règles élémentaires permettant d’en arriver à un résultat fiable.

 

[62]    Je ne retiens pas les prétentions que tous les documents étaient disponibles et complets pour permettre un résultat fiable; il s'agit là d'une explication farfelue et totalement invraisemblable ne correspondant aucunement à la preuve soumise. Le seul fait qu'il manquait un très grand nombre de factures et que certaines factures avaient le même numéro réfute totalement cette prétention de l'administrateur et du comptable de l'appelante.

 

[63]    Accepter les explications essentiellement verbales et tout à fait invraisemblables (vol, perte, erreur de l'imprimeur, problème informatique, complexité de l'activité, etc.) aurait pour effet de cautionner des aberrations totalement irréconciliables avec les dispositions de la Loi, mais aussi avec le simple gros bon sens élémentaire.

 

[64]    D'ailleurs, si les documents et pièces justificatives étaient tous disponibles et que la comptabilité était adéquate, pourquoi le tout n'a-t-il pas été remis à un expert-comptable compétent pour qu’il produise un rapport conforme aux prétentions de l'appelante? Pourquoi ne pas avoir soumis un résultat tiré d'un échantillon valable par son propre expert?

 

[65]    L'appelante a préféré présenter au tribunal le rapport d’un expert qui affirme que la fiabilité des conclusions était douteuse en raison de la quantité de données prises en considération.

 

[66]    Est-ce là suffisant pour discréditer le travail de l'intimée afin de justifier la cotisation? Je conclus par la négative, d'autant plus que la preuve de l'appelante à cet égard n'a pas permis de conclure que l'approche était déraisonnable et que le travail effectué lors de la vérification et de l’analyse était de mauvaise qualité.

 

[67]    Je n'ai pas compris, (je l’ai d'ailleurs indiqué lors de l’audience) pourquoi l’on n’avait pas présenté une preuve directe établie selon ce qui existait d'une manière complète, tant pour la qualité que pour la quantité, selon messieurs Veilleux et Jean‑Paul Boudreau.

 

[68]    Il aurait été simple, et surtout beaucoup plus fiable, de présenter une preuve directe, laquelle aurait pu être étayée par divers témoins. Pourquoi une preuve d'une telle qualité n'a-t-elle pas été présentée? Le tribunal n'a qu'une seule explication : une telle preuve était, vu les circonstances, totalement impossible étant donné l'absence de documents et les nombreuses incohérences administratives.

 

[69]    Le fardeau de la preuve incombait à l'appelante. Cela ne libère pas l'intimée de l’obligation de faire une preuve de bonne qualité grâce à des méthodes dont l'application génère un résultat ou des conclusions raisonnables et vraisemblables.

 

[70]    Le fait que l'appelante ait réussi à faire ressortir certaines lacunes, voire même un oubli important, reconnu d'ailleurs d'emblée par l'intimée, n'a pas pour effet de discréditer le travail du vérificateur. Le contraire aurait été assez surprenant, puisque le propre de toute méthode de rechange est justement d’être moins fiable, plus vulnérable et plus douteuse quant aux résultats.

 

[71]    L’appelante n’a pas respecté ses obligations légales prévues à l'article 286 de la Loi, qui se lit comme suit :

 

(1)        Toute personne qui exploite une entreprise au Canada ou y exerce une activité commerciale, toute personne qui est tenue, en application de la présente partie, de produire une déclaration ainsi que toute personne qui présente une demande de remboursement doit tenir des registres en anglais ou en français au Canada ou à tout autre endroit, selon les modalités que le ministre précise par écrit, en la forme et avec les renseignements permettant d’établir ses obligations et responsabilités aux termes de la présente partie ou de déterminer le remboursement auquel elle a droit.

 

(2)      Le ministre peut exiger que la personne qui ne tient pas les registres nécessaires à l’application de la présente partie tiennent ceux qu’il précise. Dès lors, la personne est tenue d’obtempérer.

 

(3)      La personne obligée de tenir des registres doit les conserver pendant la période de six ans suivant la fin de l’année qu’ils visent ou pendant toute autre période fixée par règlement.

 

(3.1)     Quiconque tient des registres, comme l’en oblige le présent article, par voie électronique doit les conserver sous une forme électronique intelligible pendant la durée de conservation visée au paragraphe (3).

 

(3.2)     Le ministre peut, selon des modalités qu’il estime acceptables, dispenser une personne ou une catégorie de personnes de l’exigence visée au paragraphe (3.1).

 

(4)      La personne obligée de tenir des registres qui signifie un avis d’opposition ou est partie à un appel ou à un renvoi aux termes de la présente partie doit conserver les registres concernant l’objet de ceux-ci ou de tout appel en découlant jusqu’à ce qu’il en soit décidé.

 

(5)      Le ministre peut exiger, par demande signifiée à la personne obligée de tenir des registres ou par lettre envoyée par courrier recommandé ou certifié, la conservation des registres pour la période précisée dans la demande ou la lettre, lorsqu’il est d’avis que cela est nécessaire pour l’application de la présente partie.

 

(6)      Le ministre peut autoriser par écrit une personne à se départir des registres qu’elle doit conserver avant la fin de la période déterminée pour leur conservation.

 

 

[72]    Puisque l’appelante n’a soumis aucune preuve directe et s'est essentiellement limitée à critiquer et à faire valoir certains griefs à l'endroit du travail exécuté, le tribunal ne peut évidemment pas conclure que l'appelante a satisfait au fardeau de la preuve qui lui incombait.

 

[73]    Par contre, l'intimée a soumis une preuve dont la qualité a souffert en raison de la piètre qualité des données disponibles. Eu égard aux nombreuses contraintes que le dossier comportait, la preuve a établi que le travail colossal qui a été effectué a été fait d'une manière fort acceptable et que la conclusion à l'origine des cotisations était raisonnable; le tribunal n'a donc aucune raison de les écarter.

 

[74]    Quant aux CTI, l'analyse des factures a démontré que les pièces justificatives (factures d'achat) ne respectaient pas les exigences de la Loi, notamment parce que plusieurs factures d'achat étaient établies au nom de tiers.

 

[75]    La définition du terme « acquéreur » au paragraphe 123(1) de la Loi, se lit comme suit :

 

« acquéreur »

 

a) Personne qui est tenue, aux termes d'une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;

 

b) personne qui est tenue, autrement qu'aux termes d'une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;

 

c) si nulle contrepartie n'est payable pour une fourniture :

 

(i) personne à qui un bien, fourni par vente, est livré ou mis à sa disposition,

 

(ii) personne à qui la possession ou l'utilisation d'un bien, fourni autrement que par vente, est transférée ou à la disposition de qui le bien est mis,

 

(iii) personne à qui un service est rendu.

 

Par ailleurs, la mention d'une personne au profit de laquelle une fourniture est effectuée vaut mention de l'acquéreur de la fourniture.

 

[76]    L'appelante ne répondait pas à cette définition et n'avait pas droit aux CTI pour les factures à l’égard desquelles elle ne satisfait pas à la définition du terme « acquéreur » prévue par la Loi.

 

[77]    L'intimée a refusé d'accorder certains CTI au motif que les factures n'étaient pas adéquates, puisqu’elles ne respectaient pas les formalités prévues par la Loi. Ces exigences sont prévues par l'article 169 de la Loi, qui se lit comme suit :

 

169.     (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, un crédit de taxe sur les intrants d’une personne, pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit, relativement à un bien ou à un service qu’elle acquiert, importe ou transfère dans une province participante, correspond au résultat du calcul suivant si, au cours de cette période, la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable :

 

A × B

 

où :

 

A— représente la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert, selon le cas, qui, au cours de la période de déclaration, devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable;

 

B :

 

a) dans le cas où la taxe est réputée, par le paragraphe 202(4), avoir été payée relativement au bien le dernier jour d’une année d’imposition de la personne, le pourcentage que représente l’utilisation que la personne faisait du bien dans le cadre de ses activités commerciales au cours de cette année par rapport à l’utilisation totale qu’elle en faisait alors dans le cadre de ses activités commerciales et de ses entreprises;

 

b) dans le cas où le bien ou le service est acquis, importé ou transféré dans la province, selon le cas, par la personne pour utilisation dans le cadre d’améliorations apportées à une de ses immobilisations, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne utilisait l’immobilisation dans le cadre de ses activités commerciales immédiatement après sa dernière acquisition ou importation de tout ou partie de l’immobilisation;

 

c) dans les autres cas, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne a acquis ou importé le bien ou le service, ou l’a transféré dans la province, selon le cas, pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

 

(1.1) Lorsqu’une personne acquiert ou importe un bien ou un service, ou le transfère dans une province participante, pour l’utiliser partiellement dans le cadre d’améliorations apportées à une de ses immobilisations et partiellement à d’autres fins, les présomptions suivantes s’appliquent aux fins du calcul de son crédit de taxe sur les intrants relativement au bien ou au service :

 

a) malgré l’article 138, la partie du bien ou du service qui est à utiliser dans le cadre d’améliorations apportées à l’immobilisation et l’autre partie du bien ou du service sont réputées être des biens ou des services distincts qui sont indépendants l’un de l’autre;

 

b) la taxe payable relativement à la fourniture, à l’importation ou au transfert, selon le cas, de la partie du bien ou du service qui est à utiliser dans le cadre d’améliorations apportées à l’immobilisation est réputée correspondre au résultat du calcul suivant :

A × B

 

où :

 

A— représente la taxe payable (appelée « taxe totale payable » au présent article) par la personne relativement à la fourniture, à l’importation ou au transfert, selon le cas, du bien ou du service, calculée compte non tenu du présent article,

 

B— le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la contrepartie totale payée ou payable par la personne pour la fourniture au Canada du bien ou du service, ou la valeur des produits importés ou du bien transféré dans la province, est incluse dans le calcul du prix de base rajusté de l’immobilisation pour la personne pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu, ou le serait si la personne était un contribuable aux termes de cette loi;

           

c) la taxe payable relativement à l’autre partie du bien ou du service est réputée égale à la différence entre la taxe totale payable et le montant calculé selon l’alinéa b).

 

(2) Sous réserve de la présente partie, lorsqu’un inscrit importe des produits d’une personne non-résidente qui n’est pas inscrite aux termes de la sous-section d de la section V, en vue d’effectuer, au profit de cette dernière, la fourniture taxable d’un service commercial relatif aux produits et que, au cours d’une période de déclaration de l’inscrit, la taxe relative à l’importation devient payable par lui ou est payée par lui sans qu’elle soit devenue payable, le crédit de taxe sur les intrants de l’inscrit relativement aux produits pour la période de déclaration est égal à cette taxe.

 

(3) Un montant n’est inclus dans le calcul du crédit de taxe sur les intrants d’une personne au titre de la taxe qui devient payable par elle aux termes du paragraphe 165(2) ou de l’article 212.1 pendant qu’elle est une institution financière désignée particulière que si, selon le cas :

 

a) le crédit de taxe sur les intrants se rapporte :

 

(i) soit à la taxe que la personne est réputée avoir payée aux termes des paragraphes 171(1), 171.1(2), 206(2) ou (3) ou 208(2) ou (3),

 

(ii) soit à un montant de taxe qui est visé par règlement pour l’application de l’alinéa a) de l’élément F de la formule figurant au paragraphe 225.2(2);

 

b) la personne peut demander le crédit de taxe sur les intrants aux termes des paragraphes 193(1) ou (2).

 

(4) L’inscrit peut demander un crédit de taxe sur les intrants pour une période de déclaration si, avant de produire la déclaration à cette fin :

 

a) il obtient les renseignements suffisants pour établir le montant du crédit, y compris les renseignements visés par règlement;

 

b) dans le cas où le crédit se rapporte à un bien ou un service qui lui est fourni dans des circonstances où il est tenu d’indiquer la taxe payable relativement à la fourniture dans une déclaration présentée au ministre aux termes de la présente partie, il indique la taxe dans une déclaration produite aux termes de la présente partie.

 

(5) Le ministre peut, s’il est convaincu qu’il existe ou existera des documents suffisants pour établir les faits relatifs à une fourniture ou à une importation, ou à une catégorie de fournitures ou d’importations, ainsi que pour calculer la taxe relative à la fourniture ou à l’importation, qui est payée ou payable en application de la présente partie :

 

a) dispenser un inscrit, une catégorie d’inscrits ou les inscrits en général des exigences prévues au paragraphe (4) relativement à la fourniture ou à l’importation ou à une fourniture ou importation de la catégorie;

 

            b) préciser les modalités de la dispense.

 

 

[78]    Le vérificateur a admis qu'une erreur avait été commise, notamment dans les achats indiqués dans le tableau « Correction des achats Tupper 1999 » (pièce I‑3), où le fichier pour l'année d’imposition 1999 n'a pas été retenu. L’aveu ayant pour effet de réduire la cotisation à l'origine de l'appel, il y a lieu d'accueillir l'appel afin que les corrections pertinentes soient apportées.

 

[79]    Étant donné que la cotisation dont il est fait appel devra être modifiée, je dois faire droit à l'appel, même si la correction requise aura un effet marginal sur la cotisation.

 

[80]    Le tout sans frais.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juillet 2007.

 

 

« Alain Tardif »

Juge Tardif


RÉFÉRENCE :                                  2006CCI365

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2005-2224(GST)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              9010-9869 QUÉBEC INC.

                                                          ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Sherbrooke (Québec)

 

DATES DE L’AUDIENCE :               les 13 et 14 juin 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Alain Tardif

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 10 juillet 2007.

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l'appelante :

Me Guy Plourde

 

Avocat de l'intimée :

Me Robert Poupart

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelante:

 

                   Nom :                             Me Guy Plourde

                   Ville :                              Magog (Québec)

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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