Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

Dossier : 2004‑3299(EI)

ENTRE :

STEVEN BEKHOR,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

L'UNIVERSITÉ DE L'ALBERTA,

intervenante.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel portant le numéro

(2004‑3301(CPP)) le 7 mars 2005, à Montréal (Québec).

 

Devant : L’honorable juge Louise Lamarre Proulx

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimé :

Me Marie‑Aimée Cantin

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

L’appel est rejeté et la décision de l’intimé est confirmée, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour de juillet 2005.

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


 

 

Dossier : 2004‑3301(CPP)

ENTRE :

STEVEN BEKHOR,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

L'UNIVERSITÉ DE L'ALBERTA,

intervenante.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel portant le numéro

2004‑3299(EI) le 7 mars 2005, à Montréal (Québec).

 

Devant : L’honorable juge Louise Lamarre Proulx

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

 

 

Avocate de l’intimé :

Me Marie‑Aimée Cantin

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

L’appel est rejeté et la décision de l’intimé est confirmée, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour de juillet 2005.

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx

 


 

 

 

Référence : 2005CCI443

Date : 20050715

Dossiers : 2004‑3299(EI)

2004‑3301(CPP)

 

ENTRE :

STEVEN BEKHOR,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

L'UNIVERSITÉ DE L'ALBERTA,

intervenante.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Lamarre Proulx

 

[1]     Il s’agit d’un appel interjeté à l’égard de la décision du ministre du Revenu national (le « ministre ») selon laquelle l’appelant n’exerçait pas un emploi ouvrant droit à pension ou un emploi assurable pendant la période allant du 22 octobre 2002 au 31 juillet 2003. La décision a été rendue le 28 juillet 2004 en application de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada (le « RPC ») et de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance‑emploi (la « Loi »). La raison donnée à l’appelant est la suivante : [TRADUCTION] « Vous n’étiez pas embauché dans le cadre d’un contrat de louage de services et vous n’étiez donc pas un employé de l’université de l'Alberta ».

 

[2]     L’Agence des douanes et du revenu du Canada (l’« ADRC ») a d’abord rendu une décision le 20 janvier 2004 par laquelle elle concluait que Steven Bekhor exerçait un emploi assurable. L’université de l'Alberta a interjeté appel de cette décision et la décision faisant maintenant l’objet du présent appel a été rendue.

 

[3]     Le paragraphe 5 de la réponse à l’avis d’appel est ainsi rédigé :

 

[TRADUCTION]

 

Pour en arriver à sa décision, l’intimé, le ministre du Revenu national, s’est appuyé sur les hypothèses de faits suivantes :

 

a)         Du 22 octobre 2002 au 31 juillet 2003, l’appelant était boursier postdoctoral à l’université de l'Alberta;

 

b)         Une bourse payée par l’intermédiaire du service de la rémunération du personnel et des étudiants de l’université lui a été décernée;

 

c)         Aucun contrat de louage de services n’est intervenu entre l’appelant et l’université.

 

[4]     L’avis d’intervention énonce ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

 

1.         Durant la période pertinente, l’appelant était un boursier postdoctoral à l’université de l'Alberta (l’« université »).

 

2.         Une bourse gérée par le service de la rémunération du personnel et des étudiants de l’université a été décernée à l'appelant.

 

3.         Les boursiers postdoctoraux (les « BPD ») sont des personnes qui ont obtenu un doctorat, notamment un doctorat en médecine ou en chirurgie dentaire, ou un grade équivalent et qui souhaitent accroître leurs compétences en matière de recherche en plus d’ajouter des publications à leur actif.

 

4.         En ce qui concerne les « étudiants » et les « employés », l’université, à l’instar d’autres établissements d’enseignement postsecondaire au Canada, estime que les BPD s’apparentent davantage à des étudiants qu’à des employés, puisque le principal objectif du programme de bourses postdoctorales vise la poursuite de la formation du BPD.

 

5.         Les programmes de bourses postdoctorales n’ont qu’une durée limitée, allant d’une période minimale de trois mois à une période maximale de cinq ans.

 

6.         Même si la gestion des fonds destinés aux BPD relève, pour des raisons d’efficacité, du service de la rémunération du personnel et des étudiants de l’université, le financement du programme à l’intention des BPD provient de nombreuses sources, dont le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, l’Alberta Heritage Foundation for Medical Research, les Instituts de recherche en santé du Canada et les bourses postdoctorales Killam.

 

7.         L’intimé a décidé que les activités poursuivies par l’appelant dans le cadre de son programme de bourse postdoctorale ne constituaient pas un « emploi » pour l’application de la Loi sur l’assurance‑emploi et du Régime de pensions du Canada et que l’université n’était donc pas tenue de retenir et de verser des sommes à l’intimé suivant ces deux textes législatifs.

 

[5]     Selon l’avis d’appel, un contrat de louage de services existait entre l’employeur, Robert Rankin, et l’employé, Steven Bekhor, pour les raisons suivantes :

 

[TRADUCTION]

 

1.         Comme il est mentionné dans la décision initiale du 20 janvier 2004 (CE 0335 6135 3184 et CE 0402 0144 0516), laquelle me définit comme un employé lié par un contrat de louage de services :

 

a)         C’est l’employeur qui décidait de mes activités, de mon travail et de mes heures de travail.

 

b)         J’étais obligé de fournir des rapports relatifs à mon travail pour assister aux réunions.

 

c)         Je devais suivre les directives que mon employeur me donnait sur mon travail, sur la façon de l’accomplir et sur les méthodes à employer.

 

d)         Mon employeur fixait les échéances et les priorités que je devais respecter dans le cadre d’un contrat qui lui avait été attribué par l’Agence spatiale canadienne.

 

e)         Mon employeur me fournissait le matériel et les fournitures nécessaires pour accomplir mon travail.

 

f)          Mon employeur m’offrait une assurance contre les accidents du travail ainsi que des prestations de maladie.

 

g)         Les modalités de mon emploi ne me permettaient pas de réaliser un bénéfice et ne m’exposaient pas à un risque de perte.

 

2.         Une entente signée, constatée sur de la papeterie de l’université et énonçant les modalités de mon emploi, la durée de celui‑ci, mon salaire ainsi que les avantages auxquels j’avais droit, m’a été transmise par télécopieur par mon employeur avant le début de mon emploi à l’université de l'Alberta. J’ai ensuite dû signer une déclaration portant acceptation de ces modalités et faisant état de mon intention de commencer à travailler à l’université à une date donnée. Ces deux documents constituent un contrat de travail écrit et explicite. Suivant l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada et l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance‑emploi, j’ai droit à des prestations d’A‑E et du RPC.

 

3.         L’annonce du poste de recherche postdoctorale en cause mentionne clairement que l’employeur, Robert Rankin, engage des personnes dans le cadre d’un emploi d’une durée déterminée. Les personnes embauchées devaient travailler pour Robert Rankin et accomplir les tâches précises énoncées dans un contrat lui ayant été attribué par l’Agence spatiale canadienne.

 

4.         Des collègues travaillant à l’université de l'Alberta en la même qualité, avec le même titre professionnel et le même salaire que moi, mais pour des employeurs différents et dans le cadre d’un contrat semblable de l’Agence spatiale canadienne, reçoivent actuellement des prestations d’A‑E et du RPC et exerçaient donc un emploi assurable. Selon l’alinéa 7(1)c) du Régime de pensions du Canada et l’alinéa 5(4)c) de la Loi sur l’assurance‑emploi, les employés de mon employeur ont également droit aux mêmes avantages. Sinon, la législation ne peut être appliquée de façon équitable.

 

5.         Il existe déjà des précédents en ce qui concerne la gestion des prestations d’A‑E et du RPC à l'université Simon Fraser, à l'université Queen’s et à l’Université d’Ottawa. Le critère d’admissibilité est énoncé dans leur charte respective et prévoit deux genres de boursiers postdoctoraux (les « BPD »). Ceux (les BPD externes) qui reçoivent une allocation directement d’une agence externe (le CRSNG, par exemple) ou de l’université sous forme de subventions globales ne sont pas admissibles à des prestations d’A‑E ou du RPC. Dans ce cas, le boursier postdoctoral ne reçoit pas de directives d’un employeur, il est responsable de la façon dont avancent ses travaux et il décide de son horaire. Ceux (les BPD bénéficiant d’une subvention) dont la rémunération est payée au moyen de subventions ou de contrats de recherche attribués à des membres d’un corps enseignant universitaire (Robert Rankin, en l’occurrence) sont considérés comme des employés du bénéficiaire de la subvention et les fonds sont gérés par l’université. Dans ce cas, l’employé fait l’objet d’une supervision directe de la part du membre du corps enseignant et reçoit des directives de ce dernier quant aux travaux effectués à l’université. Les boursiers postdoctoraux qui relèvent de cette catégorie ont droit à des prestations du RPC et d’A‑E, lesquelles devraient être gérées de façon semblable par tous les établissements d’enseignement supérieur.

 

[6]     L’appelant a témoigné pour son propre compte. M. Jeffrey Goldberg et M. Robert Rankin ont témoigné pour la partie intervenante.

 

[7]     L’annonce d’un [TRADUCTION] « poste de travailleur scientifique postdoctoral et/ou de scientifique invité en physique spatiale » a été déposée sous la cote A‑3. Elle mentionnait que le groupe de science spatiale du département de physique de l’université de l'Alberta offrait des postes de travailleur scientifique postdoctoral et/ou de scientifique invité dans le domaine de la physique magnétosphérique.

 

[8]     La lettre d’offre datée du 13 septembre 2002 a été déposée sous la cote A‑2. Cette lettre, qui est signée par les professeurs Rankin et Marchand, est ainsi rédigée :

 

[TRADUCTION]

 

J’ai le plaisir de vous offrir une bourse postdoctorale au sein de notre département pour une période minimale de deux ans, sous réserve d’un examen satisfaisant après un an et de la disponibilité de fonds. Vous travaillerez sous la direction du Dr R. Rankin et du Dr R. Marchand du département de physique. Compte tenu de vos antécédents et de votre intérêt pour ce qui concerne le plasma spatial, je crois que cette occasion d’approfondir vos connaissances pourrait se révéler très avantageuse pour vous. Vos travaux engloberont l’élaboration de théories et de modèles touchant les procédés magnétosphériques ainsi que l’utilisation de modèles pour interpréter les données recueillies dans le cadre du programme canadien de surveillance géospatiale. Il importe de signaler que, si vous acceptez ce poste, vous devrez travailler au sein d'une équipe, ce qui signifie que vous devrez faire preuve d'ouverture en ce qui concerne les échanges avec les autres membres du groupe.

 

Vous recevrez une allocation de 42 000,00 $CAN par année, plus les avantages applicables habituellement offerts aux boursiers postdoctoraux. Si vous prévoyiez accepter la présente offre, veuillez nous en informer par écrit au plus tard le 23 septembre 2002.

 

Je crois savoir que vous êtes un citoyen canadien. Vous n’êtes donc pas assujetti aux conditions applicables aux ressortissants étrangers.

 

[9]     Le contrat conclu entre l’Agence spatiale canadienne et l’université de l'Alberta a été déposé sous la cote A‑4. Ce contrat a été signé pour le compte de l’université de l'Alberta par le directeur des recherches, Robert Rankin, par le directeur du département et par le doyen de la faculté. Il porte la date du 26 novembre 2001.

 

[10]    Le contrat prévoit notamment que le titulaire du contrat doit établir et présenter un rapport d’étape trimestriel. Ce rapport doit présenter une description des progrès accomplis relativement à chaque tâche, accompagnée de croquis, de schémas, de photographies, etc. Jointe au contrat se trouve une annexe explicitant les travaux à accomplir. Ces travaux se divisent en 13 tâches. Une autre annexe précise les étapes et le calendrier de livraison allant du 1er août 2001 au 31 juillet 2003.

 

[11]    L’appelant a déposé sous la cote A‑8 un document relatif aux boursiers postdoctoraux (les « BPD ») qui a été imprimé à partir du site Web de l'université Queen’s. Ce document mentionne que les BPD sont considérés comme des employés de l'université Queen’s, sauf s’ils reçoivent leur financement d’une source externe. Le document de politique concernant les boursiers postdoctoraux de l'université Simon Fraser a été déposé sous la cote A‑9. Cet établissement suit les mêmes politiques que celles de l'université Queen’s en ce qui a trait à la situation d’emploi des BPD. Les mêmes politiques semblent également avoir été adoptées par l’Université d’Ottawa (pièce A‑10).

 

[12]    Le document de politique régissant les boursiers postdoctoraux à l’université de l'Alberta a été déposé sous la cote I‑1. Le terme [TRADUCTION] « boursiers postdoctoraux » y est défini de la façon suivante :

 

[TRADUCTION]

 

« boursiers postdoctoraux » (les « BPD ») S’entend des personnes qui sont en formation normale dans les cinq ans suivant la date où elles ont obtenu leur doctorat (y compris la soutenance de thèse) et dans les dix ans suivant la date où elles ont obtenu un doctorat en médecine ou en chirurgie dentaire ou un grade équivalent. Comme les BPD sont en formation, l’université les considère comme des stagiaires plutôt que comme des employés.

 

[13]    L’expression [TRADUCTION] « source de financement » est ainsi définie :

 

[TRADUCTION]

 

« source de financement » S’entend de la provenance des fonds devant servir à payer l’allocation et les avantages du BPD nommé sous le régime des présentes politiques. Les fonds sont détenus par un « organisme de financement », soit l’université, soit un autre établissement ou un autre organisme (comme le CRSNG, le CRSH, l’AHFMR, les IRSC ou les bourses Killam), et peuvent être versés sous forme de subventions, de bourses, de bourses d’études ou de contrats.

 

[14]    Sous la rubrique intitulée [TRADUCTION] « Introduction », le document mentionne ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

 

De façon générale, les BPD en sciences souhaitent étendre leurs connaissances et leurs compétences en matière de recherche sous la direction d’un chercheur reconnu. Pour les BPD en sciences humaines, il s’agit habituellement d’entreprendre un nouveau projet de recherche sous la direction d’un membre expérimenté du corps enseignant et en collaboration avec lui. Peu importe le domaine, un objectif important des BPD consiste à ajouter des publications à leur actif et à rehausser leur CV afin d’acquérir une réputation et d’accroître leurs chances d’obtenir un poste plus près de la permanence au sein d’une faculté ou dans le domaine de la recherche.

 

Le service responsable des BPD est chargé de l’enregistrement et de la gestion pour l’ensemble des BPD travaillant à l’université, que ce soit sur le campus ou non, peu importe leur source de financement.

 

[15]    Concernant la résiliation, le document prévoit qu’il peut être mis fin à la nomination d’un BPD à tout moment pour un motif valable suite à la recommandation donnée par un membre du corps enseignant responsable du BPD. Le BPD a droit à un avis d’un mois pour chaque année de service.

 

[16]    Le formulaire de commande remis au service de la comptabilité pour le paiement de l’allocation de l’appelant a été déposé sous la cote I‑2. Il s’intitule Academic Appointment/Pay Action Form et porte la date du 22 octobre 2002. Il précise qu’il s’agit d’une nouvelle nomination au poste de boursier postdoctoral, que la somme devant être payée est de 42 000,00 $ par année et que le détenteur de la fiducie est le Dr R. Rankin.

 

[17]    Le Dr Jeffrey Goldberg enseigne au département des sciences biologiques de l’université de l'Alberta. Il occupe également le poste de vice‑doyen de la Faculté des études supérieures et de la recherche depuis le 1er juillet 2004.

 

[18]    Les extraits suivants sont tirés des pages 5 et 6 de la transcription et montrent en quoi consiste une bourse de recherche postdoctorale selon le Dr Goldberg :

 

[TRADUCTION]

 

Q. Pouvez‑vous expliquer à la Cour quelle est votre conception d’une bourse de recherche postdoctorale?

 

R. Un boursier postdoctoral est habituellement une personne qui a obtenu un doctorat d’une université donnée et qui poursuit ses activités de recherche. Ce genre de poste est habituellement obtenu dans les cinq ans suivant l’obtention du doctorat et les activités de recherche visent à étendre la formation des boursiers postdoctoraux pour qu’ils puissent par la suite occuper un poste plus permanent ou un poste de recherche de rang plus élevé.

 

Q. Donc, quel serait le principal objectif poursuivi dans le cadre d’une bourse postdoctorale typique?

 

R. Terminer la recherche à titre de collègue débutant d’un professeur qui est habituellement chargé de surveiller ce boursier postdoctoral pour qu’il termine la recherche, laquelle est généralement effectuée en collaboration avec un superviseur, afin d’améliorer ou d’élargir le dossier en matière de recherche du boursier postdoctoral, à savoir les publications qu’il a à son actif. Et aussi, en général, recevoir une formation en ce qui touche le domaine de recherche du superviseur afin d’acquérir des connaissances et des compétences en la matière.

 

[19]    Aux pages 9 et 10, il explicite les diverses sources des fonds destinés aux boursiers postdoctoraux :

 

[TRADUCTION]

 

Q. Donc, il serait exact de dire, Dr Goldberg, qu’il existe deux sources générales de fonds pour les personnes qui sont des boursiers postdoctoraux. L’une de ces sources consiste en des fonds qui sont, selon cette définition, détenus par l’université ou qui, à tout le moins, passent par l’université. La seconde catégorie concerne les fonds qui proviennent d’un autre organisme, comme le CRSNG, le CRSH ou les autres qui y sont énumérés. Serait‑il exact de dire qu’il y a deux sources générales de financement pour les boursiers postdoctoraux?

 

R. Oui, c’est exact mais, dans les deux cas, il me faut vraiment préciser qu’un organisme tel que le CRSNG peut être une source de fonds pour l’une ou l’autre de ces deux méthodes, comme vous le dites, dans un cas, l’argent est directement remis par l’organisme au boursier postdoctoral. Dans l’autre cas, l’argent passerait normalement par l’université parce que les fonds sont initialement accordés à un directeur des recherches, à savoir un professeur, puis les fonds sont utilisés pour financer les activités du boursier postdoctoral. Par conséquent, les organismes peuvent être les mêmes; il est important de le préciser, à mon avis, mais les deux méthodes que vous avez mentionnées sont bien celles auxquelles on a recours.

 

Q. Ainsi, le financement, par exemple, pourrait provenir du CRSNG mais, dans un cas, il pourrait être remis directement au boursier et, dans un autre cas, il pourrait être versé à un professeur qui à son tour le remettrait au boursier postdoctoral. Ce résumé est‑il exact?

 

R. Oui, c’est exact.

 

Q. Est-ce que l’université fait une distinction entre les boursiers postdoctoraux qui obtiennent leur financement directement et ceux qui le reçoivent indirectement, au moyen d’une subvention accordée à un professeur d’université?

 

R. L’université de l'Alberta ne fait pas cette distinction.

 

[20]    En ce qui concerne les politiques suivies par certaines autres universités, comme il est mentionné au paragraphe 5 de l’avis d’appel, M. Goldberg a déclaré qu’il était exact que le traitement réservé aux boursiers postdoctoraux, que ce soit à titre de stagiaires ou d’employés, n’était pas le même partout au pays (pages 26 à 29 de la transcription) :

 

[TRADUCTION]

 

Q. À votre connaissance, le fait de traiter les boursiers postdoctoraux à titre de stagiaires ou d’employés, ce traitement est‑il le même partout au pays?

 

R. Ce traitement n’est pas le même partout au pays. Ce qui est constant partout au pays, ce sont les fonctions, les responsabilités et les activités des boursiers postdoctoraux. Mais la façon dont les universités choisissent de traiter cette question n’est pas la même dans tout le pays.

 

Q. Donc, vous entendez probablement par l’expression « pas la même » que certaines universités traitent effectivement les boursiers postdoctoraux à titre d’employés et d’autres non?

 

R. Certaines universités choisissent de traiter comme des employés les boursiers postdoctoraux qui sont financés à l’aide des subventions de recherche versées à leur superviseur. Aucune université ne traite comme des employés les boursiers postdoctoraux qui reçoivent leurs fonds directement d’un organisme de financement, parce que ces organismes fédéraux ne vous autorisent pas à les traiter comme des employés; ils veulent que vous les traitiez comme des stagiaires. Donc, selon la catégorie d’allocation dont il s’agit, si cette dernière provient de la subvention de recherches du superviseur, certaines universités choisiront de qualifier ce boursier d’employé.

 

Q. Vous savez, pouvez‑vous informer la Cour de ce que font certaines de ces universités qui traitent les BPD financés indirectement comme des employés, pouvez‑vous nommer certaines de ces universités?

 

R. Les exemples qui me viennent à l’esprit sont Simon Fraser et Queen’s, je crois que cela est exact parce que j’ai examiné certains de leurs documents pendant la fin de semaine.

 

Q. Y a‑t‑il d’autres universités qui, à l’instar de l’université de l'Alberta, ne traitent aucun des BPD comme des employés?

 

R. Oui, à ma connaissance, il y en a plusieurs.

 

Q. Pouvez‑vous en nommer?

 

R. Je crois que l’Université de Montréal fait partie de ces établissements. Je crois que l’université de Calgary fait aussi partie de ces établissements, mais je ne suis pas sûr qu’elle a tranché la question. En réalité, j’aurais aimé le savoir avant, notre service responsable des boursiers postdoctoraux a un tableau qui montre vraiment plusieurs établissements qui appliquent ce modèle et plusieurs autres qui suivent l’autre modèle. Donc, je ne veux pas me tromper, je ne veux pas donner des noms, ou d’autres noms, mais il y en a d’autres, il y en a plusieurs qui suivent ces modèles.

 

Q. Dr Goldberg, à votre connaissance, est‑ce qu’un quelconque tribunal judiciaire ou une autre autorité semblable a ordonné à l’université de l'Alberta de traiter les BPD comme des employés?

 

R. Pouvez‑vous répéter la question, s’il vous plaît?

 

Q. À votre connaissance, est‑ce qu’un quelconque tribunal judiciaire ou une autre autorité semblable a ordonné à l’université de l'Alberta de traiter les BPD, les boursiers postdoctoraux, comme des employés?

 

R. Non, pas à ma connaissance.

 

Q. Dr Goldberg, quel genre de financement les BPD reçoivent‑ils le plus souvent? Le financement remis directement au BPD par l’organisme externe ou celui versé à l’aide d’une subvention de recherches accordée à un professeur d’université?

 

R. L’hypothèse éclairée que je formulerais serait qu’il y en a autant dans une catégorie que dans l’autre. Je ne connais pas la réponse exacte à cette question mais, pour les trois cents (300) ou près de quatre cents (400) boursiers postdoctoraux se trouvant sur le campus en général, je pense qu’un grand nombre appartient à l’une ou l’autre de ces catégories.

 

[21]    Pendant le témoignage du Dr Goldberg, la Cour lui a demandé si les chercheurs travaillant en la même qualité que l’appelant à l’université de l'Alberta, mais dans le cadre d’autres projets, étaient assujettis aux régimes de l’A‑E et du RPC, comme l’avance l’appelant au paragraphe 4 de son avis d’appel. L’appelant est intervenu sur ce point pour déclarer qu’il retirait cette assertion puisque les collègues en question agissaient à ce moment‑là à titre de professeurs. Il importe de signaler que, dans un courrier électronique daté du 16 septembre 2002, le Dr Rankin avait mentionné à l’appelant qu’outre leur salaire, les BPD pouvaient participer à des concours en vue de donner des cours, pour lesquels ils pouvaient gagner une allocation supplémentaire d’environ 5 500,00 $ par cours.

 

[22]    Dans son témoignage, aux pages 70, 71, 74, 75, 76, 111 et 112 de la transcription, le Dr Robert Rankin, professeur au département de physique à la faculté des sciences de l’université de l'Alberta, donne des précisions sur les fins pour lesquelles l’appelant a été engagé et la qualité en laquelle il travaillait :

 

[TRADUCTION]

 

Q. La recherche fait‑elle partie des fonctions de votre poste à l’université de l'Alberta?

 

R. Oui.

 

Q. En quelle qualité le Dr Bekhor travaillait‑il avec vous à l’université de l'Alberta?

 

R. Il était un boursier postdoctoral engagé par moi‑même et par le Dr Richard Marchand.

 

[. . .]

 

Q. Sur quel projet aviez‑vous l’intention de travailler avec le Dr Bekhor pour la durée de sa bourse postdoctorale?

 

R. Il travaillerait sur un projet scientifique suivant les modalités générales d’un contrat que l’Agence spatiale canadienne avait accordé à moi‑même et au Dr Richard Marchand.

 

[. . .]

 

R. Bien, l’objectif consistait à fournir une description générale des progrès en regard de l’ensemble des objectifs établis par le contrat et portant sur l’examen des processus météorologiques qui influent sur le proche espace extra‑atmosphérique entourant la terre. L’objectif consistait donc simplement, je crois, à veiller à ce que nous respections l’objectif global de ce contrat.

 

Q. Redoutiez‑vous que le financement à venir soit mis en péril si l’organisme de financement jugeait que ces rapports étaient insuffisants?

 

R. Bien, cette préoccupation est toujours présente. En l’occurrence, j’avais l’impression que ce serait le cas, je craignais que cela ne se produise. Je souhaitais donc vivement que les choses progressent conformément aux modalités du contrat et (inaudible).

 

Q. Avez‑vous fait savoir à vos collègues de l’équipe de recherche qu’il était nécessaire de veiller à ce que ces rapports soient établis de façon appropriée et en temps opportun?

 

R. À l’occasion, oui, il m’est arrivé de rappeler aux membres du personnel scientifique qu’il nous fallait toujours garder à l’esprit que nous devions atteindre l’ensemble des objectifs (inaudible) d’un contrat nous offrant le moyen de financer le versement des salaires.

 

Q. Les boursiers postdoctoraux, comme le Dr Bekhor, ont‑ils leur mot à dire quant à la recherche précise qu’ils doivent effectuer lorsque vous êtes le superviseur de cette recherche?

 

R. De façon générale, lorsque je traite avec un boursier postdoctoral, nous discutons des divers projets que ce dernier est susceptible de trouver intéressants et, d’un commun accord, le projet est choisi et, habituellement, il est proposé par le superviseur, moi‑même, pas dans tous les cas, mais dans le contexte d’une importante subvention, un projet sera vraisemblablement proposé.

 

Q. Mais le boursier postdoctoral a néanmoins le droit d’exprimer son avis?

 

R. Le boursier postdoctoral fournit des commentaires scientifiques en vue d’atteindre les objectifs fixés dans le cadre du projet. Ils sont des participants dans le projet de recherche, ils apportent leur contribution intellectuelle, ils font partie intégrante du projet.

 

[. . .]

 

Q. [. . .]

 

Bien, je vais supposer que certains de ces courriers électroniques sont de vous et qu’ils s’adressent à d’autres membres de votre équipe de recherche affectée au projet de l’Agence spatiale canadienne et que, dans plusieurs de ces courriers électroniques, vous qualifiez les membres de, les autres membres de l’équipe, de collègues. Est‑ce ainsi que vous considérez les autres membres de votre équipe de recherche du projet touchant l’Agence spatiale canadienne, comme vos collègues?

 

R. Certainement, il s’agit d’un aspect fondamental de nos rapports mutuels. Les personnes travaillent avec moi, non pour moi, et il s’agit de personnes extrêmement importantes dans un contexte scientifique.

 

[. . .]

 

Q. Et juste une autre question, Dr Rankin. À l’été ou à l’automne 2002, lorsque vous examiniez la candidature du Dr Bekhor pour un poste de boursier postdoctoral, est‑ce que vous envisagiez de lui confier une tâche particulière ou un rôle particulier sensiblement différent de celui des autres boursiers postdoctoraux faisant partie de ce projet de recherche touchant l’Agence spatiale canadienne?

 

R. Non, il a été engagé à titre de boursier postdoctoral et il était considéré comme un collègue travaillant avec moi et bénéficiant des connaissances que j’ai acquises dans la poursuite de projets qu’il aurait (inaudible).

 

L’argumentation

 

[23]    L’appelant a soutenu que les Drs Rankin et Marchand exerçaient un contrôle sur lui pendant la période en cause. Ce sont eux qui ont choisi le sujet de la recherche et décidé de la façon dont les tâches devaient être accomplies. Les rapports devaient être remis conformément à leurs exigences et il lui fallait se présenter à des réunions. Ils fixaient les échéances et les priorités. Les progrès réalisés par l’appelant faisaient l’objet d’une surveillance rigoureuse et on pouvait mettre fin à son emploi pour un motif valable. L’université payait les frais liés au matériel et aux logiciels. Elle lui offrait des avantages sociaux, comme une assurance contre les accidents du travail et des prestations de maladie.

 

[24]    L’avocate de l’intimé et l’avocat de l’intervenante ont avancé que la relation existant entre l’appelant et l’université de l'Alberta n’était pas régie par un contrat de louage de services, mais qu’elle s’apparentait plutôt à des études et de la formation continues ainsi qu’à une aide financière.

 

[25]    Le poste offert à l’appelant était un poste de boursier postdoctoral au sens où l’entendait l’université de l'Alberta. Le financement provenait d’une subvention de l’Agence spatiale canadienne versée relativement à un projet de recherche. L'obtention de la subvention était assujettie à la condition que l’équipe de recherche respecte diverses étapes. Le travail fourni visait à aider des personnes ayant récemment obtenu un doctorat qui souhaitaient poursuivre leur formation. Il ne s’agissait pas d’un emploi auprès de l’université de l'Alberta.

 

Analyse et conclusion

 

[26]    La question en litige n’est pas celle de savoir si l’entente intervenue entre les parties constitue un contrat de travail ou un contrat d’entreprise (la situation d’un employé par opposition à celle d’un entrepreneur indépendant). La Cour doit plutôt se demander s’il s’agit d’un contrat de travail ou d’une entente d’aide financière au titre des études continues (la situation d’un employé par opposition à celle d’un étudiant ou d’un étudiant de troisième cycle).

 

[27]    Je vais d’abord me pencher sur les politiques suivies par d’autres universités en matière de bourses postdoctorales. Certaines pièces produites par l’appelant permettent de penser – et cela est confirmé par le témoignage du Dr Goldberg reproduit au paragraphe 19 des présents motifs – que des universités peuvent considérer comme un employé le stagiaire de troisième cycle se trouvant dans une situation de travail semblable à celle où se trouvait l’appelant. Je n'ai nullement l'intention de laisser entendre, par la conclusion que je tire en l’espèce, que la décision de ces universités est erronée en droit. J’estime qu’il s’agit d’une situation juridique où l’intention des parties qui concluent le contrat est déterminante.

 

[28]    Sur ce point, je renvoie à l’arrêt Ambulance St‑Jean c. Canada (M.R.N.), [2004] A.C.F. no 1680 (Q.L.), de la Cour d’appel fédérale, au paragraphe 3 :

 

3          Bien que l’intention déclarée des parties ou leur entente apparente ne soit pas nécessairement déterminante quant à la nature de leur relation, il faut cependant accorder une grande importance à ces facteurs en l’absence d’une preuve contraire, par exemple un comportement qui trahit ou contredit cette intention ou cette entente. Lorsque les parties ont librement « choisi de conclure des accords commerciaux distincts [...] [et] choisissent d’agir de la sorte, plutôt qu’une des parties imposant arbitrairement ou artificiellement ce choix à l’autre, au point que cela constitue un trompe‑l’oeil, on ne devrait pas intervenir dans leur choix et les autorités devraient le respecter ». Nous sommes d’accord avec cette affirmation, que le juge suppléant Porter a faite dans la décision Krakiwsky c. Canada (Ministre du Revenu national - M.R.N.), 2003 A.C.I. no 364.

 

[29]    Je dois examiner non seulement les conditions auxquelles les activités relatives au travail sont assujetties, mais également l’intention déclarée des parties telle qu’elle est constatée par leurs écrits et leur conduite.

 

[30]    Dans son témoignage, le Dr Goldberg, vice‑doyen des études supérieures, a mentionné que l’université de l'Alberta ne considère pas les postes de boursiers postdoctoraux comme des emplois, mais plutôt comme une formation, et qu’elle estime que les allocations versées ne constituent pas des salaires, mais plutôt une aide financière aux étudiants plus âgés. Cette assertion est corroborée par l’annonce faite du poste, le document de politique imprimé à partir du site Web de l’université, la lettre d’offre ainsi que la correspondance échangée entre le Dr Rankin, l’appelant et les membres de l’équipe.

 

[31]    À cet égard, je renvoie à un courrier électronique daté du 13 mars 2003 que le Dr Rankin a envoyé aux membres de l’équipe. (Ce document fait partie de la pièce I‑5). À mon avis, ce courrier électronique expose bien la situation d’un programme de recherche universitaire maintenu en existence grâce à la détermination et au travail des professeurs pour le bénéfice des jeunes travailleurs scientifiques postdoctoraux. Le document montre également que l'on accordait beaucoup d'importance au fait de conserver la confiance des sources externes intéressées à promouvoir la recherche dans les universités canadiennes dans leurs domaines d’activité particuliers.

 

[TRADUCTION]

 

L’ASC [l’Agence spatiale canadienne] vient juste de me demander de préparer un rapport d’étape concernant vos activités pour la période allant du 1er janvier 2003 au 31 mars 2003. Ce rapport doit être soumis vers le 1er avril 2003. Il est impératif que vous gardiez cette date à l’esprit, puisque je vous demanderai de bien vouloir m’envoyer des documents au plus tard le 31 mars.

 

Il convient de résumer la situation actuelle. Le contrat permettant de vous payer prend fin le 31 juillet 2003. À ce moment, j’aurai présenté une nouvelle proposition en vue d’obtenir le maintien du financement. Vous savez peut‑être que l’ASC n’a pas reçu de fonds supplémentaires dans le cadre du budget fédéral. Cela signifie que nous devons entièrement justifier tout financement postérieur au 31 juillet 2003. Pour être en mesure de le faire, je dois idéalement avoir deux ou trois documents sous forme de publications ou d’articles soumis par chacun d’entre vous (à l’exception de Stephen puisqu’il n’est ici que depuis quelques mois) dont je pourrai faire état dans mon rapport. Ces documents doivent avoir un lien direct avec les étapes du contrat, et non se fonder sur des travaux antérieurs dans d’autres établissements. Cette exigence est de la plus haute importance parce que les étapes approximatives fixées dans le contrat ne peuvent être justifiées que par l’existence de publications. À titre de comparaison, on s’attend à ce qu’un membre du corps d'enseignants moyen qui assume une pleine charge d’enseignement (3 cours) et des fonctions administratives publie deux ou trois articles par année.

 

Nous jouissons toutefois d’une certaine latitude à cet égard, puisque la plupart d’entre vous travaillez dans un nouveau domaine de recherche, lequel nécessite du temps (de l’ordre d’un an) avant d’être pleinement maîtrisé. Je ferai valoir ce point dans la nouvelle proposition que je vais préparer au cours des deux prochains mois environ. Cependant, à l’avenir, vous devez vraiment vous efforcer d’atteindre un rythme de publication comparable à celui fixé pour les membres du corps enseignant. Cela sera tout aussi important pour vos futures carrières.

 

Dans la nouvelle proposition, je vais demander une augmentation des salaires, mais une telle requête est toujours tributaire de la façon dont nous respectons les étapes générales du contrat.

 

[32]    Dans ce courrier électronique, on emploie le mot « salaires ». Il figure aussi dans quelques autres lettres et le terme « employeur » a également été utilisé une ou deux fois. Cela ne peut pourtant pas permettre d’établir la nature des relations qui existent entre les chercheurs et leur chef d’équipe. À mon sens, le contenu même du courrier électronique est autrement plus révélateur. Il fait état des étapes approximatives ou des étapes générales du contrat qui déterminent la façon dont les travaux de recherche doivent être faits. Le travail englobe des tâches qui sont loin d’être précises et qui doivent être effectuées tous les jours. Un rapport d’étape est requis après trois mois de recherche personnelle et collective. Les chercheurs bénéficient d’une grande latitude. Le courrier électronique ajoute que les articles à soumettre doivent présenter les résultats de la recherche effectuée au regard des étapes fixées par le contrat et non de recherches antérieures. Cette exigence montre que le programme de l’université vise à favoriser la recherche et à perfectionner les compétences des chercheurs, permettant ainsi à l’établissement de remplir son mandat en matière d’enseignement et de formation.

 

[33]    Je conclus que ce courrier électronique étaye la thèse de l’intervenante selon laquelle les boursiers postdoctoraux de l’université de l'Alberta sont des stagiaires et non des employés. Je tirerais cette même conclusion de l’ensemble de la preuve produite, y compris le témoignage rendu par l’appelant.

 

[34]    L’appelant a mentionné que les Drs Marchand et Rankin exerçaient sur lui un contrôle à titre d’employeurs. Ni le Dr Marchand ni les anciens collègues de l’appelant à l’université n’ont témoigné. Le Dr Rankin a témoigné à la demande de l’intervenante. À la lumière de la correspondance échangée entre l’appelant et le Dr Rankin et des autres documents mentionnés dans les présents motifs, j’arrive à la conclusion qu’il ne s’agit pas de relations entre employeur et employé, mais plutôt de relations entre directeur de programme de recherche et chercheur, c’est‑à‑dire enseignant et étudiant.

 

[35]    C’est le chef d’équipe qui dirige l’équipe de recherche. Les stagiaires sont des subalternes du chef d’équipe. Ils sont des subalternes parce qu’ils ont besoin d’être dirigés et souhaitent l’être. C’est la raison pour laquelle les stagiaires dans le cas présent avaient accepté leur poste. Il était précisé dans la lettre d’offre (pièce A‑2) : [TRADUCTION] « Vous travaillerez sous la direction du Dr R. Rankin et du Dr R. Marchand du département de physique. »

 

[36]    On s’attendait à ce que les boursiers postdoctoraux travaillent au projet de recherche. Ils ont reçu leurs allocations pour ces travaux. Cependant, grâce à ce travail et à la direction qu’ils ont reçue, ils ont également eu l’occasion d’apprendre. Dans son témoignage, l’appelant a affirmé qu’il voyait le Dr Marchand régulièrement, presque tous les jours, et qu’il était sous sa direction.

 

[37]    La même lettre (pièce A‑2) mentionne ce qui suit : [TRADUCTION] « Vous recevrez une allocation de 42 000,00 $CAN par année plus les avantages applicables habituellement offerts aux boursiers postdoctoraux. » L’appelant avait posé des questions quant à la nature de ces avantages et avait obtenu les renseignements demandés. Il n’a pas à ce moment demandé l’assurance‑emploi. Il n’a même pas demandé s’il était couvert par le régime d’assurance‑emploi. Les renseignements donnés sur le site Web de l’université sont explicites. Rien ne permet de penser que l’appelant cherchait un emploi assurable ou qu’il a été induit en erreur quant à la nature de l’entente.

 

[38]    L’appelant a également soulevé la question de la clause de résiliation mentionnée au paragraphe 15 des présents motifs. Il est tout à fait normal qu’une entente relative à une aide financière prévoie la possibilité de mettre fin à la convention pour un motif valable.

 

[39]    Pour tous ces motifs, je conclus que l’appelant et l’université de l'Alberta avaient une relation d’étudiant d’études supérieures et de professeur, et non d’employé et d’employeur. L’allocation reçue tenait d’une aide financière offerte à un boursier postdoctoral en formation, et non d’une rémunération pour des services rendus par un employé à un employeur.

 

[40]    L’appel doit être rejeté.

 

 

Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour de juillet 2005.

 

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx

 


 

 

RÉFÉRENCE :                                  2005CCI443

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2004‑3299(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Steven Bekhor c. le M.R.N. et L'université de l'Alberta

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 7 mars 2005

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L’honorable juge Louise Lamarre Proulx

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 15 juillet 2005

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

 

Avocate de l’intimé :

Me Marie‑Aimée Cantin

 

AVOCAT(S) INSCRIT(S) AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                   Nom :                            

 

                   Cabinet :

 

       Pour l’intimé :                             Me John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa (Ontario)

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.