Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossiers : 2002-1550(EI)

2002-1552(EI)

ENTRE :

KIRANPAL K. SANDHU,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

Appels entendus le 5 décembre 2002 à Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

Devant : l’honorable juge suppléant D. W. Rowe

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Avtar Dhinsa

 

Avocat de l’intimé :

Me Nadine Taylor Pickering

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel 2002‑1552(EI) est rejeté et la décision du ministre est confirmée.

 

          L’appel 2002‑1550(EI) est admis et la décision du ministre est modifiée selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Sidney (Colombie‑Britannique), ce 27jour de février 2003.

 

 

 

« D. W. Rowe »

J.S.C.C.I.

 


 

 

 

 

Référence : 2003CCI75

Date : 20030227

Dossiers : 2002-1550(EI)

2002-1552(EI)

ENTRE :

KIRANPAL K. SANDHU,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Rowe, C.C.I.

 

[1]     L’appelante interjette appel à l’encontre de deux décisions distinctes qu’a rendues le ministre du Revenu national (le « ministre »). Les avocats des deux parties ont accepté que ces deux appels soient entendus ensemble et que le recueil de pièces de l’intimé qui contient des documents aux onglets 1 à 6 inclusivement, aux onglets 12 à 15 inclusivement et à l’onglet 20 soit déposé en preuve sous la cote R-1. Les renvois à un numéro d’onglet signifieront que les documents déposés en preuve figurent dans ladite pièce.

 

[2]     Le ministre a rendu une décision datée du 29 janvier 2002 selon laquelle l’emploi qu’occupait l’appelante Kiranpal K. Sandhu (Mme Sandhu ou la travailleuse) auprès de Param R. S. Malhi (M. Malhi ou le payeur) pendant la période du 6 juillet au 24 octobre 1998 ne représentait pas un emploi assurable en vertu des dispositions pertinentes de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi ») pour le motif qu’elle n’a pas été engagée en vertu d’un contrat de louage de services. Cette décision fait l’objet de l'appel 2002‑1550(EI).

 

[3]     Le ministre a rendu une décision datée du 28 janvier 2002 selon laquelle il a été déterminé que l’emploi qu’occupait Mme Sandhu auprès de Manjit S. Grewal (M. Grewal) et Jasvir S. Dhaliwal (M. Dhaliwal) pendant la période du 3 août au 6 novembre 1999 ne représentait pas un emploi assurable en vertu de la Loi pour le motif qu’elle n’a pas été engagée en vertu d’un contrat de louage de services. Cette décision fait l’objet de l'appel 2002‑1552(EI).

 

[4]     Russel Gill, un interprète qualifié en punjabi et en anglais, a interprété le témoignage de Kiranpal Kaur Sandhu. Mme Sandhu est une travailleuse agricole qui vit à Osoyoos, en Colombie‑Britannique. Elle est arrivée au Canada en 1993, après avoir terminé sa onzième année en Inde. Elle a vécu à Winnipeg, au Manitoba avant de déménager pour aller s’installer à Osoyoos en 1995 où elle s’est trouvée des emplois l'un dans une station fruitière et l'autre, dans un restaurant à service rapide. Elle a commencé à occuper un emploi pour le compte de M. Malhi et a travaillé jusqu’en octobre. Pendant cette période, ses tâches consistaient à éclaircir, à conduire un tracteur pour déplacer des récipients et à déplacer le matériel d’arrosage. Mme Sandhu a indiqué que son époux, Charanpal Sandhu, s’était entretenu à quelques reprises avec M. Malhi concernant une possibilité d’emploi et que, le 14 mars 1998, il avait obtenu une avance de 3 000 $ au regard de ses salaires à venir que M. Malhi lui aurait versés par chèque. Son taux horaire avait été établi à 10 $, y compris une paye de vacance. M. Malhi avait engagé deux autres travailleurs qui n’étaient pas des personnes liées ni des membres de sa famille. Il était un exploitant agricole spécialisé dans la culture des pêches, des poires et des pommes dans un verger situé à Oliver, en C.‑B., soit à 15 minutes de voiture de la résidence de l’appelante. Celle‑ci a indiqué qu’elle-même et d'autres travailleurs commençaient à travailler tôt le matin, de sorte que, lorsque la chaleur devenait accablante durant la journée, ils pouvaient quitter. À l’occasion, elle retournait travailler pendant quelques heures en soirée, lorsque la température était plus fraîche. À l’onglet 1, l’appelante a reconnu son relevé d’emploi (RE) qu’a émis Susan Kassian (Mme Kassian) indiquant qu’elle avait accumulé 742 heures de travail assurables pour des gains assurables totalisant 7 420 $ pendant la période du 6 juillet au 24 octobre 1998. Mme Sandhu a aussi reconnu sa demande de prestations d’assurance‑emploi (a.‑e.) déposée en preuve à l’onglet 2 que son mari a remplie pour elle. Elle a examiné le contenu de la demande puis l’a signée. On a renvoyé l’appelante à la page 3 de l’onglet 4 qui contient la photocopie d’un chèque daté du 14 mars 1998 payable initialement à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard mais dont le nom qui y figurait avait été rayé et remplacé par celui de la bénéficiaire Kiranpal Sandhu. L’appelante a expliqué que M. Malhi avait apporté cette correction lorsqu’il avait délivré le chèque. Le 4 décembre 1998, elle a perçu un autre chèque que lui a délivré M Malhi au montant de 1 500 $ parce qu’elle avait besoin d’argent pour voyager à destination de l’Inde. L’appelante a également reconnu un chèque qui figure à l’onglet 5 daté du 16 juin 1999, payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchards et sur lequel une note avait été inscrite indiquant qu’il s’agissait d’un paiement relatif à la « feuille de paye pour 1998 ». Le fils de l’appelante est né en 1995 et son époux bénéficiait de l’aide de sa sœur et de son frère, qui vivaient avec eux à Osoyoos, pour prendre soin de l’enfant. Le nom de l’entreprise Puneet Orchard, qui apparaît quelquefois sur certains documents sous le nom de Puneet Orchards, était celui qu’utilisait son époux, Charanpal Sandhu, pour exploiter sa propre entreprise de vergers, mais elle a affirmé qu’elle ne faisait pas partie de cette entreprise. Pendant la période où elle a occupé un emploi pour le compte de M. Malhi, elle n’a tenu aucun registre de ses heures de travail, à l’exception de celles qu’elle consignait sur un calendrier qu’elle utilisait pour calculer le nombre total d’heures qu’elle avait travaillées chaque semaine. M. Malhi se servait de ce nombre en vue de tenir ses livres de paye. L’appelante a indiqué qu’elle n’avait pas repris son emploi auprès de M. Malhi en 1999, mais qu’elle s’était trouvée un autre emploi pour travailler dans un verger situé à Oliver et qui appartenait à M. Dhaliwal et M. Grewal. Ses tâches consistaient à tailler et à éclaircir. De plus, elle cueillait et emballait des pêches et des pommes dont certaines variétés étaient tardives. Elle percevait un taux horaire de 10 $ et travaillait 6 ou 7 jours par semaine. Pendant cette période, son époux demeurait à Osoyoos et continuait d’exploiter l’entreprise Puneet Orchard. Son RE, qui figure à l’onglet 12 et qui concerne l’emploi qu’elle a occupé auprès de M. Grewal et de M. Dhaliwal, a été produit par Susan Kassian le 5 novembre 1999. L’appelante a affirmé qu’elle avait accumulé, depuis le 3 août 1999, 728 heures de travail assurables pour des gains assurables totalisant 7 280 $. Elle avait également rempli une demande de prestations d’assurance-emploi, qui figure à l’onglet 13, et elle a reconnu qu’il s’agissait de sa signature apposée sur ladite demande. L’appelante a indiqué qu’elle a perçu une rémunération totale au montant de 6 872,56 $ qui lui a été versée par chèque (onglet 14) daté du 7 décembre 1999 et qui lui a été délivré par J. S. Dhaliwal. L’appelante a également reconnu une liste de ses heures de travail que tenaient ses employeurs et qui figure à l’onglet 15. Elle n’a tenu aucun registre personnel de ses heures de travail. L’appelante a indiqué qu’elle travaillait selon un taux horaire en utilisant tous les outils et l’équipement que lui avaient fournis M. Malhi en 1998 ou M. Grewal et M. Dhaliwal en 1999, et qu’elle n’était pas liée à l’une ou l’autre de ces personnes.

 

[5]     En contre-interrogatoire, Kiranpal Sandhu a indiqué qu’elle n’avait jamais fréquenté un établissement d’enseignement lorsqu’elle vivait à Osoyoos et qu’elle n’avait pas été une associée dans l’entreprise Puneet Orchard qu’exploitait son époux, bien qu’elle ait signé pour obtenir un prêt hypothécaire afin d’accroître le capital de l’entreprise et qu’elle ait apposé sa signature sur certains chèques d’entreprise et sur un RE émis à l’intention d’un employé de l’entreprise Puneet Orchard. Mme Sandhu a nié l’allégation de l’avocat selon laquelle, en 1998, l’entreprise Puneet avait engagé la belle‑sœur de M. Malhi. L’appelante a indiqué que, depuis 2001, elle exploite une parcelle de terrain d’une superficie de 45 acres comprenant les vergers de l’entreprise Puneet Orchard parce qu’elle est séparée de son époux et que ce dernier vit maintenant à Winnipeg. L’appelante a indiqué que, pendant les années précédentes, son époux se rendait à Winnipeg en décembre pour travailler comme chauffeur de taxi pendant les mois d’hiver, puis revenait à Osoyoos pour reprendre son travail au verger pendant l’été. En ce qui concerne l’emploi qu’elle a occupé pour le compte de M. Malhi en 1998, Mme Sandhu a expliqué qu’il lui avait délivré un feuillet T4 indiquant que ses revenus nets s’élevaient à 5 774,54 $. Avant de commencer à travailler pour le compte de M. Malhi, soit le 6 juillet 1998, l’appelante recevait des prestations d’assurance‑emploi dont la période admissible a pris deux jours auparavant. L’appelante a expliqué que son époux, son frère et sa belle‑sœur se partageaient la responsabilité de s’occuper de son enfant. Son époux amenait l’enfant avec lui dans les champs, alors que son frère et sa belle-sœur lui donnaient un coup de main lorsqu'ils revenaient de l’école. Lorsqu’elle a rempli le questionnaire daté du 17 décembre 2001 et qui figure à l’onglet 10, elle a expliqué que les tâches qu’elle accomplissait consistaient à éclaircir, à cueillir et à emballer des fruits et à déplacer le matériel d’arrosage. Toutefois, elle n’a pas mentionné qu’elle conduisait un tracteur. Au point b) du paragraphe 3 dudit questionnaire, elle a commis une erreur en indiquant qu’elle accomplissait ses tâches au 33625‑95 St., Oliver, C.‑B. qui correspond à l’adresse de l’entreprise Puneet Orchard. Mme Sandhu a indiqué qu’elle travaillait 7 jours par semaine, mais qu’il arrivait, de temps à autre, qu’elle ait une journée de congé. L’appelante a admis avoir répondu aux questions du paragraphe 6 du questionnaire concernant ses horaires de travail en affirmant qu’elle travaillait, la plupart du temps, du lundi au samedi, entre 7 h et 16 h. On a renvoyé l’appelante à une lettre, déposée en preuve sous la cote R‑2, qui porte sa signature et dans laquelle elle demande à M. Malhi de « délivrer le chèque payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard ». À cet effet, elle a déclaré : « J’ignorais que cela poserait un problème. Il m’était plus facile de déposer le chèque s’il était payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard ». Mme Sandhu a affirmé qu’elle ne souvenait pas à quel moment cette lettre avait été écrite ou qui l’avait rédigée. Elle a expliqué que le chèque, au montant de 3000 $, daté du 14 mars 1998 et qui figure à l’onglet 4, consistait en une avance au regard de ses rémunérations à venir. Cela ne lui a pas paru inhabituel puisque l’entreprise Puneet Orchard elle-même versait une avance sur salaire à un travailleur s’il en avait besoin. Après avoir commencé à travailler pour le compte de M. Malhi en juillet, elle percevait des petites sommes en espèces qu’elle utilisait afin d’acheter de l’essence pour son véhicule en vue de se rendre au travail et de revenir chez elle après sa journée de travail. Mme Sandhu s’est rappelée qu’elle avait demandé à M. Malhi de délivrer son dernier chèque daté du 16 juin 1999 au montant de 1 200 $ payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard. Selon Mme Sandhu, quelqu’un aurait ajouté, par la suite, la note indiquant qu’il s’agissait d’un paiement relatif à la « feuille de paye pour 1998 » parce que cette note était présente lorsque le chèque avait été rédigé. M. Malhi lui a versé la somme totale de 5 700 $ sous forme de trois chèques, de même qu’une somme en espèces supplémentaire que l’appelante n’a pas pris soin de consigner dans un registre quelconque. L’appelante a affirmé qu’en 1998 et en 1999, elle ne participait pas à la gestion de l’entreprise Puneet Orchard. Cependant, elle était au courant de la plupart des chèques qui étaient délivrés relativement à l’exploitation de l’entreprise. M. Malhi avait informé l’appelante qu’il ne serait pas en mesure de lui verser le solde de ses salaires avant juin 1999, soit plus de sept mois après la cessation de son emploi. Mme Sandhu a affirmé que M. Malhi supervisait son travail et que l’autre employé qui travaillait pour le compte de l’entreprise Puneet Orchard pendant l’été 1998 et qui a généré des revenus totalisant environ 6 000 $ n’était pas lié à M. Malhi. Lorsque la Cour est revenue sur la deuxième période d’emploi pour le compte de M. Grewal et de M. Dhaliwal, l’appelante a expliqué qu’elle avait travaillé dans leur verger situé à Oliver, en C.‑B., entre le 3 août et le 6 novembre 1999, même si son RE indique que sa dernière journée de travail était le 5 novembre. Elle avait perçu des prestations d’a.‑e. jusqu’au 3 juillet 1999. Mme Sandhu s’est rappelée que l’on avait procédé à une enquête concernant les circonstances relatives aux RE qu’a délivrés l’entreprise Puneet Orchard, mais elle a nié avoir signé un RE quelconque ou des documents connexes, et elle a ajouté que sa participation à la gestion de l’entreprise n’était limitée qu'à la consignation des heures de travail. L’avocat a questionné l’appelante quant à savoir dans quelle mesure elle avait été impliquée dans la production de RE qui se sont avérés frauduleux et dans une activité visant à percevoir des prestations d’a.‑e. auxquelles elle n’était pas admissible. L’appelante a répondu qu’elle ne pouvait se souvenir d’avoir payé une amende ou des pénalités administratives quelconques au regard d'une enquête qui aurait été menée. Mme Sandhu a également indiqué qu’elle ne se souvenait pas d’avoir délivré un RE à Jasbal Sandhu en 1998, en 1999 et/ou en 2000. Elle n’était pas certaine d’avoir aidé cet employé à remplir un formulaire de demande de prestations d’a.‑e., mais elle a indiqué qu’il était possible qu’elle ait déposé quelques-uns de ses chèques de prestations d’a.‑e. dans son compte personnel ou dans celui de l’entreprise Puneet Orchard. Lorsque l’avocat l’a de nouveau questionnée quant à savoir si elle avait payé une pénalité au montant de 5 912 $ concernant son comportement à l'égard des procédures relatives aux prestations d’a.‑e., l’appelante a répondu qu’elle ne se souvenait pas d’avoir reçu un avis de pénalité, comme l’a décrit l’avocat. Mme Sandhu a reconnu qu’elle avait un pouvoir de signature concernant les opérations dans le compte bancaire de l’entreprise Puneet Orchards depuis le 5 août 1997 (pièce R‑3). Le 9 novembre 1999, l’appelante a soumis sa propre demande de prestations d’a.‑e. qui figure à l’onglet 13 et qui concerne son dernier emploi. Relativement aux tâches qu’elle accomplissait au verger qu’exploitaient M. Grewal et M. Dhaliwal, l’appelante a expliqué qu’elles consistaient à éclaircir, à cueillir et à emballer des pêches, des prunes à pruneau, des pommes et des abricots. Elle n’a pas reconnu les noms de Harminder Kaur Gill, de Amerjit Singh Gill ou de Ranjit Kaur Gill qui étaient des collègues de travail lorsqu’elle a travaillé dans ce verger en particulier. L’appelante a indiqué que, pendant l’hiver 1998‑1999, son époux était retourné travailler à Winnipeg comme chauffeur de taxi. Mme Sandhu a mentionné que, vers la fin du mois de novembre, elle avait été engagée pour nettoyer le verger et tailler les pêchers. En octobre, il fallait également cueillir une variété de pommes tardives et elle aurait aussi taillé des arbres fruitiers. Mme Sandhu a affirmé qu’elle ne se souvenait pas d’avoir déclaré à un intervieweur de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) qu’elle commençait sa journée de travail à 7 h ni d’avoir eu une conversation avec un autre intervieweur quelques mois plus tard au cours de laquelle elle aurait prétendument déclaré qu’elle commençait à travailler tous les jours à 8 h. Mme Sandhu a reconnu sa signature qui apparaît sur une lettre (pièce R‑4) datée du 15 novembre 2001, adressée au chef des appels de l’ADRC et dans laquelle elle indique qu’elle souhaite interjeter appel à l’encontre de la décision du ministre qui lui a refusé des prestations d’a.‑e. pour la période du 3 août au 6 novembre 1999. Elle poursuit sa lettre en indiquant : «  J’ai travaillé pour le compte de Manjit Singh Grewal et de Jasvir Singh Dhaliwal et j’étais rémunérée en espèces pour le travail que j’accomplissais. » On a demandé à l’appelante d’examiner un chèque daté du 7 décembre 1999 payable à son nom au montant de 6 872,56 $ et qui figure à l’onglet 14. Mme Sandhu a expliqué qu’elle croyait que ce chèque avait été déposé dans le compte de l’entreprise Puneet Orchard et qu’elle ignorait la raison pour laquelle elle avait mentionné, dans sa lettre envoyée le 15 novembre 2001 au chef des appels, que ses rémunérations lui étaient versées en espèces. On a ensuite renvoyé l’appelante à une photocopie (Pièce R‑5) d’un extrait provenant d’un état financier de l’entreprise Puneet Orchard qu’a produit la caisse populaire d’Osoyoos et qui indique qu’un chèque au montant de 6 037,52 $ a été déposé le 10 décembre 1999 suivi d’un retrait en espèces au montant de 5 600 $ le 15 décembre 1999. L’appelante a expliqué qu’elle vivait encore avec son époux en décembre 1999 et qu’il avait la responsabilité d’exploiter l’entreprise de vergers. L’appelante a également indiqué qu’au verger de M. Grewal et de M. Dhaliwal, c’est M. Dhaliwal qui, la plupart du temps, supervisait le travail accompli. Elle s’est également rappelé qu’elle avait travaillé avec la sœur de M. Dhaliwal pendant seulement quelques semaines.

 

[6]     En contre‑interrogatoire, l’appelante a reconnu le questionnaire qu’elle a rempli le 20 décembre 2001 et qui figure à l’onglet 20.

 

[7]     Charanpal Sandhu a attesté qu’il était arrivé au Canada en août 1990, qu’il avait habité à Winnipeg jusqu’à la fin de 1994 et qu’il avait déménagé pour s’installer à Oliver, en C.‑B. où il est demeuré jusqu’en 1997, soit jusqu’à ce qu’il élise domicile sur le terrain loué où se situe le verger à Osoyoos. Présentement, il travaille comme chauffeur de taxi et camionneur à Winnipeg, emplois qu’il occupe depuis qu’il s’est réinstallé dans cette ville en juin 2001. Il a commencé à exploiter l’entreprise Puneet Orchard en 1996 est s’est acquitté seul de cette responsabilité jusqu’en juin 2001, lorsqu’il a remis la succession de l’entreprise à son épouse, c’est‑à‑dire l’appelante, après qu'ils aient décidé de se séparer. Charanpal Sandhu a affirmé que, jusqu’à ce qu’il quitte le domicile conjugal, l’appelante ne participait pas à la gestion de l’entreprise de vergers et qu’il avait embauché des employés pour travailler sur la propriété, soit probablement 4 ou 5 travailleurs, au début de 1996, puis 7 ou 8 travailleurs pendant la saison de l’année 2000. Il a également affirmé qu’il n’avait pas accordé à l’appelante un pouvoir de signature au regard des opérations du compte bancaire de l’entreprise, mais qu’elle avait été obligée de signer certains documents en vue d’obtenir un prêt parce que la caisse populaire exigeait une garantie supplémentaire avant d’accorder une marge de crédit. Charanpal Sandhu a affirmé qu’il connaissait Param Singh Malhi, mais qu’il n’était pas lié à cette personne ni à Manjit Grewal et/ou à Jasvir Singh Dhaliwal. Il a nié que, pendant la saison de croissance, de 1998 et/ou de 1999, il avait engagé la belle‑sœur de M. Malhi parce qu’à sa connaissance M. Malhi n’avait pas de belle‑sœur. Charanpal Sandu a affirmé qu’il vivait à Osoyoos et s’est rappelé que l’appelante avait travaillé pour le compte de M. Malhi en 1998 au verger situé à Oliver. En 1998, il n’est pas retourné à Winnipeg pendant l’hiver pour travailler comme chauffeur de taxi. En fait, il n’y est retourné qu’en 1999, aux environs de Noël. Leur enfant est né en 1995 et il s’en est occupé en 1998 pendant la période durant laquelle l’appelante travaillait à l’extérieur, de même qu’en 1999, lorsqu’elle a travaillé pour le compte de M. Grewal et de M. Dhaliwal.

 

[8]     En contre‑interrogatoire, Charanpal Sandhu a répété qu’il ne s’est pas rendu à Winnipeg en 1998 et qu’il avait exploité l’entreprise Puneet Orchard pendant cette année-là, de même que pendant toute la saison de croissance en 1999. Il a réaffirmé qu’il n’avait pas accordé à l’appelante un pouvoir de signature pour signer les chèques de l’entreprise Puneet Orchards ou pour remplir les RE des travailleurs. En soirée, l’appelante, après avoir terminé sa propre journée de travail pour le compte d’une autre entreprise, pouvait lui donner un coup de main de temps à autre. Plusieurs employés étaient rémunérés en espèces et la délivrance de documents tels que les RE lui incombait. Le verger, d’une superficie de 45 acres, qu’exploitait l’entreprise Puneet Orchard requérait tout son attention relativement à divers aspects tels que la vente des fruits à la coopérative. Il a mentionné qu’il lui arrivait, à l’occasion, d’acheter de petites quantités de fruits auprès d’autres exploitants agricoles pour les vendre à des marchands ambulants, notamment s’il s’agissait de certaines variétés particulières qu’il ne cultivait pas dans son verger. Par exemple, s’il vendait des pêches qu’avait produites l’entreprise Puneet Orchard à l’un des nombreux marchands ambulants qui exploitaient des kiosques de fruits dans la région et que l’un d’entre eux voulait également des petites quantités de cerises, il achetait alors les cerises auprès d’une source externe puis fournissait les cerises et les pêches au marchand en question. Il a indiqué qu’en 1998, il s’était occupé de leur fils âgé alors de trois ans et que lorsque la sœur de l’appelante revenait de l’école, celle-ci l’aidait à en prendre soin. On a renvoyé Charanpal Sandhu à un chèque, qui figure à l'onglet 9, daté du 10 décembre 1999 au montant de 6 037,52 $ qui a été retiré du compte de l’entreprise pour être versé à M. Malhi. Il a expliqué que ce chèque avait pu être délivré relativement à un paiement de jus de pomme et de pêche qu’il avait achetés auprès de M. Malhi, et il a reconnu qu’aucune note ne figurait sur le chèque en question qui aurait pu permettre de déterminer la raison pour laquelle ce paiement avait été versé. Il s’est souvenu de s’être entretenu avec Brian Lundgren, enquêteur à Développement des ressources humaines Canada (DRHC) à plusieurs reprises, mais il n’a pas pu confirmer s’il avait eu une conversation avec M. Lundgren le 28 juin 2001 en matinée. Quant à M. Lundgren, il se souvient d’avoir discuté avec M. Malhi au début de 1998, avant que l’appelante ne commence à travailler sur son exploitation agricole. L’épouse de l’appelante aurait demandé à M. Malhi de lui accorder une aide financière et, suite à cette demande, M. Malhi a délivré un chèque au montant de 3 000 $ comme avance sur les rémunérations futures de l’appelante. On a renvoyé Charapal Sandhu à l’onglet 9 qui contient une liste de certains fruits qu’il aurait apparemment achetés auprès de M. Malhi pour un montant total de 6 038,52 $. Cependant, il a affirmé qu’il n’avait pas produit ce document. Charanpal Sandhu n’a pas été en mesure de se rappeler quel était le nombre d’employés qui ont travaillé pour le compte de l’entreprise Puneet Orchard pendant 1998 et 1999, mais il a indiqué que les effectifs augmentaient pendant la saison de la cueillette des fruits. Il n’a pas non plus été en mesure de se souvenir si Harminder Kaur Gill avait travaillé pour lui, mais il a indiqué que, si un RE ou un autre document avait indiqué que l’appelante avait été son superviseur, alors ce renseignement aurait été inexact. De la même façon, il n’a pas été en mesure de se souvenir si Amarjit Singh Gill avait travaillé pour lui. Il a autorisé l’appelante à déposer ses chèques de paye dans le compte de l’entreprise Puneet Orchard et retirait souvent des sommes de ce compte pour pouvoir verser les salaires de ses employés. Il ne se rappelle pas la raison pour laquelle un retrait de 5 600 $ a été effectué le 15 décembre 1999, mais il se souvient d’avoir déposé le chèque de paye de l’appelante, daté du 7 décembre 1999, au montant de 6 872,56 $, que lui a délivré M. Malhi, étant donné que l’appelante était en Inde à cette période. Il est probable que le chèque ait été inclus dans le dépôt de la journée qui s’élevait à 6 901,20 $, comme l’indique le relevé bancaire déposé en preuve sous la cote R‑5. Charanpal Sandhu a mentionné qu’il avait retiré d’autres sommes importantes à différents moments pour verser les salaires de ses employés ou pour couvrir ses paiements de location. En ce qui concerne la nécessité de verser les salaires des employés, il a expliqué qu’en décembre, lorsque la saison des fruits était terminée, parfois l’entreprise ne disposait pas des fonds suffisants pour payer ses employés régulièrement, en dépit du fait que le solde précédent du compte de l’entreprise correspondait à la limite de la marge de crédit qui s'élevait à 10 000 $. Il n’a pas été en mesure de se souvenir si l’appelante était autorisée à retirer des fonds du compte bancaire de l’entreprise Puneet Orchard, bien qu’elle y ait déposé ses chèques de paye. Il a nié avoir perçu des prestations d’a.‑e. au nom de Jasbal Sandhu qui avait travaillé pour le compte de l’entreprise Puneet Orchard pendant trois ou quatre années. Il ne s’est souvenu d’aucun détail concernant une certaine pénalité au montant de 5 912 $ qui aurait été imposée à l’entreprise Puneet Orchard par un organisme du gouvernement fédéral en relation avec la gestion du système d’a.‑e. Cependant, il a indiqué qu’on lui avait imposé de nombreuses autres pénalités sans qu’il ait eu la chance de s’entretenir avec un agent. Il a admis qu’il était possible que l’appelante ait rempli une demande de prestations d’a.‑e. au nom de Jasbal Sandhu, mais qu’il ignorait si l’appelante avait produit le RE de ce travailleur. Charanpal Sandhu a également admis qu’il était possible qu’il ait encaissé certains chèques payables à l’ordre de Jasbal Sandhu pour lui rendre service, mais il ignore dans quelle mesure son épouse a été impliquée dans la production de certains documents à l’égard desquels des pénalités financières ont été imposées parce qu’ils se sont séparés en juin 2001.

 

[9]     En réponse aux questions que lui a posées la Cour, Charanpal Sandhu a indiqué qu’il croyait que le chèque au montant de 3 000 $ et qui figure à l’onglet 4 avait été, à l’origine, délivré au nom de l’entreprise Puneet Orchard, mais parce que le travail devait être accompli par Kiranpal Sandhu, des modifications y ont été apportées, probablement par M. Malhi. De plus, ce chèque a été déposé dans le compte de l’entreprise. Il a indiqué que l’appelante était plus qualifiée que les autres travailleurs parce qu’elle pouvait conduire un tracteur. Conséquemment, son taux horaire avait été établi à 10 $ plutôt qu’au taux minimum ou qu’au taux approximatif de 9 $ l’heure que percevaient les cueilleurs de cerises qui était calculé en fonction du salaire à la pièce en vigueur à cette époque.

 

[10]    Brian Lundgren a attesté qu’il avait occupé un emploi à titre d’enquêteur pour le compte de DRHC pendant 20 années et qu’il avait mené des enquêtes en ce qui concerne les deux périodes d’emploi en cause qui font l’objet des présents appels. Au cours de son enquête, il a procédé à des vérifications concernant les comptes bancaires auprès des institutions financières, il a obtenu des renseignements relatifs à la feuille de paye et s’est entretenu avec plusieurs personnes, notamment avec l’appelante et M. Malhi. M. Lundgren a expliqué que, dans le cadre de ses fonctions, il a examiné les feuilles de temps quotidiennes afin de déterminer à quelle heure chaque travailleur commençait et terminait sa journée de travail. Il a examiné les documents qui figurent aux onglets 3 et 4, y compris les feuilles de temps et les chèques liés à l’emploi qu’avait occupé l’appelante auprès de M. Malhi. M. Lundgren a tenu compte du chèque au montant de 3 000 $ que M. Malhi a délivré à l’appelante environ 4 mois avant que celle-ci ne commence à travailler. Il a également constaté que le bénéficiaire initial était l’entreprise Puneet Orchard et que ce chèque avait été déposé dans le compte bancaire de cette entité. M. Lundgren a également obtenu une copie du chèque, qui figure à l'onglet 5, daté du 16 juin 1999, au montant de 1 200 $, qu’a délivré M. Malhi à l’entreprise Puneet Orchards. Selon ce qu’il se rappelle, la note indiquant qu’il s’agissait d’un chèque délivré au regard de la « feuille de temps pour 1998 » figurait sur le chèque, à gauche. M. Lundgren a expliqué qu’il avait constaté que ce chèque avait été délivré plus de sept mois après la mise à pied de l’appelante. M. Lundgren s’est entretenu avec M. Malhi le 28 juin 2001 en matinée, et, après leur conversation, il s’est présenté au bureau de Susan Kassian, la commis comptable de M. Malhi. Au moment où il est entré dans le bureau de Mme Kassian, soit vers 11 h, alors qu’il était juste derrière M. Malhi, il a remarqué que ce dernier remettait une feuille à Mme Kassian. Une photocopie de ce document figure à l’onglet 9. M. Lundgren a expliqué qu’il avait été quelque peu surpris par la tournure des événements parce que, plus tôt, dans la matinée, M Malhi lui avait fait croire qu’il avait déjà remis ce document à Mme Kassian de manière à ce qu’elle puisse procéder à l’exécution normale de ses fonctions en tant que comptable de l’entreprise de M. Malhi. M. Lundgren a expliqué qu’après avoir travaillé dans la région d’Osoyoos pendant trois années, il a acquis certaines connaissances relativement aux méthodes de travail et d’exploitation qu’utilisent les propriétaires de vergers. L’entreprise Puneet Orchard était environ deux fois plus importante que celle de M. Malhi, et M. Lundgren a indiqué qu’il avait trouvé quelque peu étrange que la petite entreprise agricole qu’exploitait M. Malhi ait vendu des quantités considérables de fruits à Charanpal Sandhu dont l’entreprise agricole était plus importante. Il a interviewé trois ou quatre travailleurs de l’entreprise Puneet Orchard au sujet de la saison agricole de 1998 et il est parvenu à la conclusion selon laquelle Charanpal Sandhu était absent pendant la majeure partie de cette saison, mais que l’appelante habitait sur la propriété. M. Lundgren a également interviewé des travailleurs concernant la saison de 1998 et, une fois de plus, il est parvenu à la conclusion selon laquelle Charanpal Sandhu était absent pendant certaines périodes au cours de la saison de croissance. Enfin, M. Lundgren a interviewé certaines personnes qui avaient travaillé pour le compte de M. Grewal et de M. Dhaliwal et, en ce qui concerne la saison de 1999, il a conclu que ces derniers n’avaient engagé qu’un seul travailleur et qu’il ne s’agissait pas de l’appelante. M. Lundgren a expliqué que la propriété de M. Grewal et de M. Dhaliwal ne couvrait qu’une superficie de 6 acres, ce qui comprenait un emplacement où était située la maison et la cour. À son avis, il s’agissait davantage d’une entreprise agricole que l’on n’exploitait qu’à temps partiel. En s’appuyant sur l’expérience qu’il avait acquise dans la région d’Osoyoos, M. Lundgren a expliqué qu’il ne s’attendait pas à ce que la cueillette des pêches s’effectue en septembre, en octobre ou en novembre puisque cette variété de fruit est habituellement récoltée vers la mi-août. Il existe 7 ou 8 variétés de pommes, y compris une variété tardive, que l’on peut cueillir au plus tard au début du mois d’octobre parce que, normalement, à la fin du mois de septembre, les pommiers sont dépourvus de leurs feuilles. On a renvoyé M. Lundgren à un document qui figure à l’onglet 15 et ce dernier a reconnu qu’il s’agissait d’une feuille de temps qu’avait produite Mme Kassian. Selon M. Lundgren, ce document est inadéquat parce qu’il indique seulement le nombre d’heures que travaillait l’appelante chaque semaine. Il ne précise pas les journées ou les heures quotidiennes qu’elle travaillait. Le chèque qui figure à l’onglet 14, au montant de 6 872,56 $, daté du 7 décembre 1997 et payable à l’ordre de l’appelante, a été délivré par M. Dhaliwal. Il a été négocié une semaine plus tard, mais M. Lundgren n’a soulevé aucune préoccupation à cet égard, et ce, même si le chèque a été délivré six semaines ou plus après la fin de l’emploi de l’appelante parce que, selon son expérience dans ce domaine, entre 40 et 50 p. 100 de tous les employeurs qui exploitent des vergers versent à leurs employés une somme forfaitaire à la fin de la saison, habituellement à la dernière journée de travail. Cependant, les salaires peuvent être versés en totalité avant de remplir le RE applicable sur lesquels sont indiqués les revenus qui ont été générés.

 

[11]    Lorsque l’avocat de l’appelante a contre-interrogé Brian Lundgren, celui‑ci a admis qu’il ignorait tout au sujet des témoignages présentés devant la Cour concernant la prétendue absence de Charanpal Sandhu pendant les saisons de croissance de 1998 et/ou de 1999. Les deux RE qui figurent aux onglets 1 et 2 et qui ont été produits au regard de l’emploi qu’a occupé l’appelante auprès de M. Malhi et auprès de M. Grewal et de M. Dhaliwal, respectivement, ont été délivrés par Mme Kassian, la commis comptable des payeurs. M. Lundgren a indiqué qu’environ 60 p. 100 des employeurs dans ce domaine tiennent à jour des registres quotidiens détaillés. En ce qui concerne le chèque qui figure à l’onglet 4, payable initialement à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard, dont le nom a été ultérieurement ratifié et remplacé par celui de Kiranpal Sandhu, M. Lundgren a admis que l’écriture relative à ces deux noms n’était pas la même. Il était au courant que deux ou trois chèques délivrés à l’intention de l’appelante avaient été déposés dans le compte bancaire de l’entreprise Puneet Orchard et il a admis l’allégation selon laquelle un conjoint peut aider l’autre conjoint en transférant un chèque de paie personnel dans un compte commercial en vue de fournir un soutien financier dans le cadre de l’exploitation d’une entreprise. M. Lundgren a également admis qu’il n’était pas un expert dans le domaine de la culture des pommes mais que, selon son expérience, il s’attendait tout de même à ce que les variétés tardives soient cueillies au plus tard au début du mois d’octobre.

 

[12]    Lorsque l’avocat de l’intimé a contre-interrogé Brian Lundgren, ce dernier a attesté qu’au cours des 20 années d’expérience comme enquêteur pour le compte de DRHC, il n’avait jamais eu à traiter d’une situation comme celle en espèce concernant l’emploi qu’a occupé l’appelante auprès de M. Malhi, soit lorsqu’un chèque payable à l’ordre d’un employé est délivré au nom d’une entreprise.

 

[13]    En contre-preuve, Charanpal Sandhu a attesté que la récolte de pommes Fuji est très tardive comparativement à celle d’autres variétés et que la cueillette, dans la région d’Oliver, qui se situe plus au nord, s’effectue environ une semaine plus tard qu’à Osoyoos, de sorte que les pommes Fuji peuvent être cueillies à la fin du mois d’octobre et même pendant la première semaine du mois de novembre, selon les saisons.

 

[14]    En réponse aux questions que la Cour lui a posées, Charanpal Sandhu a indiqué qu’il connaissait bien le verger qu’exploitaient M. Grewal et M. Dhaliwal et qu’il avait visité l’exploitation agricole à plusieurs reprises. Il était au courant qu’ils cultivaient des pommes Fuji sur leur propriété, de même qu’il était au courant des cultures particulières que produisait chaque agriculteur de la région immédiate.

 

[15]    L’avocat de l’appelante a fait valoir qu’aucune preuve n’a été présentée pour appuyer l’allégation selon laquelle l’appelante avait produit des documents relatifs à des travailleurs qui occupaient un emploi pour le compte de l’entreprise Puneet Orchard. En ce qui concerne l’emploi qu’elle a exercé auprès de M. Malhi, l’avocat a allégué que la preuve avait démontré que le ministre s’était appuyé sur des renseignements non pertinents pour émettre certaines hypothèses de fait, telles qu’elles sont énoncées au paragraphe 3 de la réponse à l’avis d’appel (la « réponse »). L’avocat a également fait valoir que la preuve avait démontré que l’emploi qu’occupait l’appelante pour le compte de M. Malhi pendant la période en cause représentait un emploi assurable. En ce qui concerne l’emploi qu’elle a exercé auprès de M. Grewal et de M. Dhaliwal, l’avocat a reconnu que M. Dhaliwal n’avait pas rémunéré l’appelante en espèces, comme elle l’a prétendu dans sa lettre déposée en preuve sous la cote R-4. Toutefois, l’avocat a fait valoir que la preuve avait démontré que l’emploi qu’occupait l’appelante pour le compte de M. Grewal et de M. Dhaliwal pendant la période en cause représentait un emploi assurable.

 

[16]    L’avocat de l’intimé a fait valoir que le témoignage de l’appelante relativement à d'importantes questions en litige devrait être rejeté pour le motif qu’il contient de nombreuses contradictions et qu’il ne corrobore pas les faits pertinents en cause. En ce qui concerne la période pendant laquelle l’appelante a occupé un emploi auprès de M. Malhi en 1998, l’avocat a allégué qu’aucune autre preuve n’appuie le commentaire qui figure dans le document déposé en preuve sous la cote R‑2 selon lequel l’appelante avait demandé à M. Malhi de lui délivrer un chèque au montant de 3 000 $ payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard pour des raisons de commodités. Aucune entrée entre le 28 septembre et le 12 octobre inclusivement ne figure sur les prétendues feuilles de temps qui figurent aux onglets 3 et 4 et qui concernent l’emploi qu’elle a exercé auprès de M. Malhi. En ce qui concerne le chèque (onglet 5) daté du 16 juin 1999 au montant de 1 200 $, il n’aurait pas dû être inclus dans les gains assurables, tels qu’ils sont indiqués dans le RE qu’a produit Mme Kassian pour le motif que cette somme n’a pas été versée à cette période et, par conséquent, qu’elle est exclue de ce calcul, conformément à la disposition pertinente que prévoit le Règlement sur l’assurance‑emploi en vertu du pouvoir que confère la Loi. Le feuillet T4 qu’a produit M. Malhi et qui indique la somme de 5 777,54 $ ne semble pas correspondre aux sommes en espèces que l’appelante affirme avoir perçues de temps à autre. En ce qui concerne ses chèques de paye qui étaient payables à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard – et non pas à son nom – l’avocat a fait valoir que cela n'était pas plus commode que de les délivrer simplement à son nom, comme c’est le cas dans le cours normal d’une relation employeur-employé. En ce qui concerne l’emploi qu’elle a occupé auprès de M. Grewal et de M. Dhaliwal, l’avocat a fait remarquer que le RE qui indique comme dernier jour de travail le 6 novembre 1999 et des gains assurables qui s’élèvent à 7 280 $ n’aurait pas dû être produit le 5 novembre 1999 parce que l’appelante n’a perçu aucune rémunération avant qu’un chèque daté du 7 décembre 1999 ne lui soit délivré. En tenant compte de l’ensemble de la preuve, l’avocat a fait valoir que les décisions qu’a rendues le ministre en ce qui concerne les deux périodes d’emploi devraient être confirmées.

 

[17]    D’abord, en ce qui a trait à l’appel concernant l’emploi qu’a occupé l’appelante auprès de M. Malhi pendant la période du 6 juillet au 24 octobre 1998, le ministre s’est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes, telles qu’elles sont énoncées dans la réponse correspondante. Ainsi :

 

[TRADUCTION]

 

a)         pendant la période en cause, l’appelante habitait à Osoyoos, en C.‑B., où elle-même et son époux exploitaient un verger faisant affaire sous le nom de Puneet Orchard;

 

b)         M. Malhi exploite un verger à Oliver, en C.‑B., qui se situe à environ 10 à 15 minutes d’Osoyoos en voiture;

 

c)         M. Malhi a émis un RE indiquant que l’appelante avait travaillé pour le compte de son entreprise pendant la période en cause, qu’elle avait accumulé 742 heures assurables et qu’elle avait généré des gains assurables s’élevant à 7 420 $;

 

d)         selon le feuillet T4 qu’a produit M. Malhi en ce qui concerne l’appelante, le revenu net qu’elle a généré pendant la période en cause aurait dû s’élever à 5 777,54 $;

 

e)         M. Malhi a délivré des chèques qui portent la mention « pour feuille de paye » prétendument à l'égard des salaires de l’appelante pour la période en cause de la façon suivante :

 

            Date des chèques                     Montant

                        Le 14 mars 1998                       3 000 $

                        Le 4 décembre 1998                 1 500 $

                        Le 16 juin 1999                        1 200 $

                        TOTAL                                    5 700 $

 

f)          le chèque daté du 14 mars 1998 était payable à l’ordre de « Puneet Orchard (Kiranpal Sandhu) »;

 

g)         le chèque daté du 16 juin 1999 était payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard;

 

h)         pendant la période en cause, l’époux de l’appelante vivait à Winnipeg, au Manitoba, où il vendait des fruits;

 

i)          pendant la période en cause, l’appelante était la gestionnaire de l’entreprise Puneet Orchard à Osoyoos;

 

j)          pendant la période en cause, l’appelante avait un fils âgé de 4 ans qui ne pouvait être laissé sans surveillance;

 

k)         l’entreprise Puneet Orchards a émis un relevé d’emploi à la belle‑sœur de M. Malhi qui vivait à Oliver, indiquant qu’elle avait travaillé du 20 juillet au 17 octobre 1998 prétendument pour accomplir les mêmes tâches que l’appelante avait censément accomplies pour le compte de l’entreprise Puneet;

 

l)          l’appelante n’a fourni aucun service à M. Malhi pendant la période en cause;

 

m)        le relevé d’emploi qu’a produit M. Malhi à l’intention de l’appelante n’a été émis que pour lui permettre d’être admissible à des prestations d’a.‑e. auxquelles autrement elle n’aurait pas eu droit.

 

[18]    L’appelante a nié les hypothèses énoncées aux points 3 h), i) et k) du paragraphe pour le motif qu’elle-même et son époux ont tous deux attesté qu’il ne vivait pas à Winnipeg pendant la saison 1998 et qu’il n’était pas retourné dans cette ville depuis qu’ils s’étaient installés à Oliver en 1995. Charanpal Sandhu a attesté qu’il était le directeur de l’entreprise Puneet Orchard pendant les années 1998 et 1999 et qu’il s’occupait de leur jeune fils pendant la journée jusqu’à ce que sa belle‑soeur revienne de l’école et prenne la relève. Il a également attesté que M. Malhi n’avait pas de belle-sœur et que l’entreprise Puneet Orchard n’avait émis aucun RE à l’intention d’une telle personne ni avant, ni pendant et ni après la prétendue période en cause. L’appelante a attesté qu’elle avait travaillé pour le compte de M. Malhi. À cet égard, certains éléments de preuve documentaires, bien qu’elles contiennent des incohérences, ont été déposés devant la Cour en vue d’appuyer cette allégation.

 

[19]    Je souhaite maintenant analyser certains éléments de preuve, étant donné qu’elles ont trait à des pénalités administratives que DRHC ou l’ADRC auraient imposées à l'égard de certaines affaires qui ont fait l’objet d’une enquête en 2000 ou en 2001 relativement à des événements qui se sont produits pendant ces années‑là et qui, peut-être, ont un lien avec les saisons de croissances 1998 et 1999. Au départ, j’ai inclus, dans les présents motifs, un témoignage relatif à l’affaire en cause parce qu’il aurait pu avoir une influence sur la crédibilité de l’appelante et de son époux, Charanpal Sandhu, qui a également témoigné, au cours de l’audience de l’affaire en l’espèce, en faveur de l’appelante. Pour permettre à l’avocat de présenter ultérieurement certains éléments de preuve, la Cour a demandé qu’il renvoie l’appelante et son époux à certaines allégations qui auraient pu permettre de déterminer si l’appelante avait produit et signé des RE pour le compte de l’entreprise Puneet Orchard ou si elle a agi autrement en sa qualité de gestionnaire en ce qui concerne sa prétendue implication en vue de permettre aux travailleurs de l’entreprise Puneet Orchard d’être admissibles à des prestations d’a.‑e. Cependant, le témoignage de Brian Lundgren a simplement permis d’établir que certaines pénalités administratives avaient été imposées, mais il n’a pu confirmer si de telles pénalités avaient été imposées à l’appelante car il ignorait si elle avait reçu la documentation appropriée à cet égard. En raison de l’absence de précisions en ce qui concerne la pénalité qui aurait été imposée après les périodes en question dans cet appel et de la tendance manifeste de ce type de témoignage à être davantage préjudiciable que probant, j’ai donc préféré par la suite ignorer le témoignage concernant toute l’affaire relative aux prestations d’a.‑e. qu’aurait perçues Jasbal Sandhu en 2000 et/ou en 2001 pour le motif qu’il ne m’aide pas à rendre une décision à l’égard des présents appels en fonction d’éléments de preuve pertinents. La prétendue conclusion en ce qui concerne l’auteur de certains documents qui, peut-être, ont été produits pendant les périodes en cause était aussi totalement fondé sur des ouï-dire. Le ministre était parfaitement au courant de la position de l’appelante, notamment, qu’elle avait travaillé pendant les périodes pertinentes et qu’elle était admissible à des prestations d’a.‑e. pour le motif qu’elle avait occupé un emploi assurable en 1998 et en 1999. Si le ministre avait voulu prouver certains actes qu’aurait commis l’appelante à l'égard de son implication, pour le compte de l’entreprise Puneet Orchard, visant à permettre à certains travailleurs d’obtenir des prestations d’a.‑e. dans des circonstances inappropriées ou établir qu’elle s’était appropriée, de façon contraire à la loi, des chèques délivrés à un travailleur qui était peut-être admissible ou non à de telles prestations, alors il aurait été nécessaire de produire des témoins ayant une connaissance personnelle directe concernant ces affaires. Les renseignements que recueille un enquêteur qui a passé en revue certaines notes de service interministérielles sont, sans plus, inadéquats pour prouver une hypothèse particulière au regard de la légitimité de l’emploi qui constitue la question en litige des présents appels. L’appelant doit certainement s’acquitter complètement du fardeau de la preuve, mais dès qu’une hypothèse de fait est directement réfutée, le fardeau incombe alors au ministre et celui-ci ne peut s’attendre à ce que la Cour rejette simplement le témoignage des témoins relativement à un point en litige particulier et qu’elle rétablisse une hypothèse de fait énoncée dans la réponse en redonnant à cette dernière le caractère inattaquable dont elle bénéficiait auparavant.

 

[20]    Le prétendu emploi qu’a occupé l’appelante pour le compte de M. Malhi est étrange à certains égards. D’abord, il est étrange que son époux, qui exploite un verger à son propre compte, ait obtenu une avance de salaire au montant de 3 000 $ auprès d'un futur employeur de son épouse et qu’il ait ensuite déposé ce chèque dans le compte bancaire de l’entreprise. Les explications qu’ont fournies l’appelante et son époux sont incohérentes et non convaincantes. Le dernier chèque daté du mois de juin 1999 au montant de 1 200 $ était également payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchards. Les soi‑disant feuilles de temps sont inadéquates. Il est évident qu’elle n’a pas commencé à travailler pour le compte de M. Malhi avant le 6 juillet 1998, soit deux jours après la date d’échéance de ses prestations d’a.‑e. qu’elle percevait, et ce, même si elle avait déjà obtenu une avance de 3 000 $ grâce aux efforts qu’a déployés son époux. La preuve a révélé que M. Malhi exploitait un verger assez important et qu’il embauchait d’autres travailleurs. L’appelante percevait un taux horaire de 10 $ parce qu’elle était apparemment l’employée la plus qualifiée. Depuis le départ de son mari, en 2001, elle exploite l’entreprise Puneet Orchard à son compte. Le fait que l’appelante ait fourni des versions détaillées légèrement différentes lorsqu’on lui a demandé d’expliquer en quoi consistait une semaine de travail typique n’est pas vraiment important parce que la saison de croissance pendant l’été nécessite de longues journées de travail et, conséquemment, il serait difficile de se rappeler avec précision, après plusieurs mois, quel était l’horaire de travail. L’appelante a admis qu’elle avait effectué certaines tâches au verger de l’entreprise Puneet Orchard, ce qui apparaît tout à fait logique puisque son époux représentait le preneur à bail et l’exploitant de l’entreprise et que la résidence était également située sur la propriété. Un conjoint n’est pas tenu d’engager sa conjointe et souvent, cette possibilité n’est même pas envisagée pour d’excellentes raisons, notamment parce qu’une telle situation entraîne souvent un refus à des avantages conséquemment aux répercussions qu’a la situation familiale sur la relation de travail. Dès que l’appelante et son époux ont réfuté les hypothèses de fait dont j’ai fait mention ci‑dessus, la Cour ne disposait d’aucune autre preuve pour appuyer l’allégation du ministre selon laquelle l’appelante n’avait pas fourni de services à M. Malhi pendant la période en cause ou selon laquelle M. Malhi avait émis à l’appelante un RE uniquement afin de lui permettre d’être admissible à des prestations d’a.‑e. auxquelles elle n’aurait pas eu droit autrement. Charanpal Sandhu a nié l’allégation selon laquelle l’entreprise Puneet Orchard avait engagé une employée qui était une proche parente de M. Malhi. Le 10 décembre 1999, soit près de un an plus tard, Charanpal Sandhu a délivré un chèque de l’entreprise Puneet Orchard payable à l’ordre de M. Malhi au montant de 6 037,52 $, apparemment pour le paiement de fruits qu’il avait achetés, tel qu'il a été consigné sur une feuille déposée en preuve à l’onglet 9, en plus de certaines entrées qu’indique la bande témoin d’une calculatrice pour un montant total de 6 038,52 $. M. Malhi a remis ce document à la commis comptable, Mme Kassian, à la toute dernière minute puisqu’il est arrivé à son bureau à peine quelques minutes avant M. Lundgren, l’enquêteur pour le compte de DRHC. Curieusement, le compte et le montant qui figure sur la bande témoin présente un écart de un dollar par rapport au montant du chèque qui a été délivré à M. Malhi pour le paiement. Un peu plus tôt, ce matin-là, M. Malhi avait confirmé à M. Lundgren qu’il avait déjà remis ce document dressant la liste d’achats de fruits à Mme Kassian. Ce document dresse la liste de certaines variétés de fruits achetés, et Charanpal Sandhu a attesté qu’il achetait certaines variétés qu’il ne cultivait pas dans son verger en vue de revendre ces petites quantités et ses propres produits à des marchands qui exploitaient des kiosques de fruits.

 

[21]    L’emploi qu’a occupé l’appelante auprès de M. Grewal et de M. Dhaliwal, et dont l’appel porte le numéro de dossier 2002‑1552(EI), concerne la période du 3 août au 6 novembre 1999. Jusqu’au 3 août 1999, l’appelante percevait des prestations d’a.‑e. La propriété en cause couvrait seulement une superficie de 6 acres et il a semblé à M. Lundgren, après avoir examiné les registres des payeurs, que seulement une personne avait travaillé dans ce verger. À la date à laquelle Susan Kassian a produit el RE – qu'elle n’était pas autorisée à émettre un tel document – l’appelante n’avait pas encore perçu ses salaires. M. Dhaliwal a délivré un chèque daté du 7 décembre 1999 au montant de 6 872,56 $ aux fins de paiement de tous les salaires qu’avait gagnés l’appelante pendant la période en cause. Ce chèque a été déposé dans le compte bancaire de l’entreprise Puneet Orchard le 15 décembre 1999 (et qui, probablement, faisait partie du dépôt totalisant 6 901,20 $, comme l’indique la pièce R‑5) et ce même jour, Charanpal Sandhu, l’époux de l’appelante, a retiré la somme de 5 600 $. À cette époque, l’appelante était en Inde et son époux a perçu le chèque en son nom qu’il a déposé par la suite. Il n’a pas été en mesure de se rappeler pourquoi il avait retiré un tel montant, si ce n’est qu’il avait peut-être effectué un tel retrait en vue de verser certains salaires en retard qui étaient dus à ses employés parce qu’en règle générale, il les rémunérait en espèces, en plus des montants imputables à des arriérés. Le relevé bancaire, déposé en preuve sous la cote R‑5, n’indique aucun autre retrait d’espèces supérieur à 700 $ pendant la période du 29 novembre au 31 décembre. Les hypothèses de fait énoncées au paragraphe 3 de la réponse et sur lesquelles s’est appuyé le ministre sont les suivantes :

 

[TRADUCTION]

 

a)         pendant la période en cause, l’appelante habitait à Osoyoos, en C.‑B., où elle-même et son époux exploitaient un verger faisant affaire sous le nom de Puneet Orchard;

 

b)         la société de personnes exploite un verger à Oliver, en C.‑B., qui se situe à environ 10 à 15 minutes d’Osoyoos en voiture;

 

c)         la société de personnes a émis un relevé d’emploi indiquant que l’appelante avait travaillé pour son compte pendant la période en cause, qu’elle avait accumulé 728 heures assurables et qu’elle avait généré des gains assurables s’élevant à 7 280 $;

 

d)         la société de personnes a délivré un chèque au montant de 6 872,56 $ qui porte la mention « pour main-d’œuvre agricole » prétendument en rapport avec les salaires de l’appelante pour la période en cause;

 

e)         pendant la période en cause, l’époux de l’appelante vivait à Winnipeg, au Manitoba, où il vendait des fruits;

 

f)          pendant la période en cause, l’appelante était la gestionnaire de l’entreprise Puneet Orchard à Osoyoos;

 

g)         pendant la période en cause, l’appelante avait un fils âgé de 5 ans qui ne pouvait être laissé sans surveillance;

 

h)         l’entreprise qu’exploitait la société de personnes consistait en un terrain dont une acre était consacrée à la culture de cerises, trois acres à la culture de pêches et deux acres à la culture de pommes. On cultivait, en outre, sur ces deux acres, quelques pruniers et abricotiers;

 

i)          les associés vivaient sur leur verger avec les trois sœurs et la mère de Jasvir Dhaliwal;

 

j)          aucun registre indiquant quelles journées travaillait l’appelante ou le nombre d’heures qu’elle travaillait chaque jour n’a été tenu;

 

k)         la dernière vente de fruit qu’a fait la société de personnes a été conclue le 18 septembre 1999;

 

l)          l’appelante n’a fourni aucun service à la société de personnes pendant la période en cause;

 

m)        le relevé d’emploi qu’a produit la société de personnes à l’intention de l’appelante n’a été émis que pour lui permettre d’être admissible à des prestations d’a.‑e. auxquelles elle n’aurait pas eu droit autrement.

 

[22]    Les témoignages de l’appelante et de son époux ont permis de réfuter l’allégation selon laquelle ce dernier vivait à Winnipeg pendant la période en cause où il vendait des fruits. L’appelante a témoigné concernant d’autres travailleurs qui avaient été engagés au verger de M. Grewal et de M. Dhaliwal et a affirmé qu’elle ne reconnaissait pas les noms qu’on lui a mentionnés, mais elle s’est rappelée qu’elle avait travaillé avec la sœur de M. Dhaliwal pendant quelques semaines. Si la dernière vente de fruits a été conclue le 18 septembre 1999, alors il est difficile d’admettre que l’appelante a travaillé jusqu’au 6 novembre, et ce, même si l’on tient compte de la récolte tardive de pommes Fuji parce que la petite superficie consacrée à la production de pommes ne couvrait que deux acres. Aucun registre indiquant les journées ou les heures travaillées n’a été tenu. Le ministre a donc conclu que le prétendu emploi qu’a occupé l’appelante auprès de la société de personnes constituée de M. Grewal et de M. Dhaliwal avait été créé de toute pièce uniquement en vue de permettre à l’appelante d’obtenir un RE indiquant des heures de travail suffisantes afin qu’elle soit admissible à des prestations d’a.‑e. L’avocat de l’intimé a renvoyé la Cour au retrait de la somme de 5 600 $ qui a été effectué le même jour que le dépôt du chèque qu’avait délivré M. Dhaliwal à l’appelante et a fait valoir qu’il s’agissait d’un événement inhabituel à l’égard duquel aucune explication rationnelle n’a été fournie et, conséquemment, que le ministre était en droit de conclure que l’argent avait été retourné à M. Grewal et à M. Dhaliwal parce que l’appelante n’avait fourni aucun service et que l’objectif principal visait à permettre à l’appelante d’obtenir un RE qui, à cette époque, était en Inde. L’appelante a rempli une demande de prestations d’a.‑e., qui figure à l'onglet 13, le 9 novembre 1999, alors qu’elle n’avait pas encore perçu ses salaires auprès de son prétendu employeur. Le RE qu’a produit Mme Kassian était inexact et mensonger. À cette date, l’appelante n’avait perçu aucun revenu assurable tiré de tout présumé emploi auprès de M. Grewal et de M. Dhaliwal. Le RE a été émis la journée précédant le dernier jour d’emploi de l’appelante, ce qui démontre que Mme Kassian, agissant à titre d’agente pour le compte des payeurs, a procédé de façon expéditive et par anticipation.

 

[23]    De nombreux appels concernant des ouvriers agricoles et d'exploitation arboricoles ont été interjetés en vertu de la Loi. Dans la plupart des cas, les registres, s’il en existe, ont été tenus de façon inadéquate et contiennent des erreurs mathématiques, des entrées erronées et diverses autres incohérences. Les paiements sont souvent versés aux travailleurs en retard. Les chèques sont soit postdatés, antidatés ou, encore, il arrive quelquefois que les travailleurs perçoivent une somme forfaitaire à la fin d’une saison de travail. En raison de l’absence de documents adéquats, il devient difficile, pour toutes les parties concernées, de trancher plusieurs points en litige, notamment lorsqu’il s’agit, en premier lieu, de déterminer si l’emploi occupé pendant une période pertinente représentait un emploi assurable. Si un appelant franchi cet obstacle, la prochaine étape consiste à établir le nombre d’heures assurables travaillées et le montant des gains assurables générés. Le nombre d’heures assurables permettra de déterminer l’admissibilité à des prestations d’a.‑e., dont le montant sera établi en fonction des gains assurables. Pour pouvoir inclure ses revenus comme des gains assurables, un travailleur doit avoir perçu le paiement du travail accompli pendant la période assurable, sauf si un montant est imputable à des arriérés de salaire. Ce manquement a d’ailleurs fait l’objet d’une plainte devant un tribunal ayant compétence pour rendre une décision relativement à des normes d’emploi. Il incombe à l’appelant de prouver chacun de ces éléments, selon la prépondérance des probabilités. Si un travailleur ne tient pas un relevé de temps personnel sous une forme qui peut être produite en preuve  ultérieurement et s’il est incapable de prouver les paiements qu’il a perçus en espèces, qu’il s’agisse du montant, de la date ou du lieu, et d’autres détails essentiels, alors cela a pour effet de créer des problèmes permanents lorsque le travailleur est tenu plus tard de prouver le bien-fondé de sa cause.

 

[24]    Dans l’arrêt Narang c. Canada (ministre du Revenu national – M.R.N.), [1997] A.C.I. n° 99, l’honorable juge Margeson de la C.C.I. a entendu des appels concernant plusieurs travailleurs qui prétendaient avoir été engagés par l’employeur pendant de brèves périodes en vue d’accomplir des tâches administratives, des travaux d’entretien et de travailler dans les champs pour le compte de son exploitation agricole de petits fruits. Au paragraphe 136 et suivants de son jugement, le juge Margeson s’est exprimé en ces termes :

136.     Certains documents sur lesquels l'appelant et les intervenants se sont fondés ont été établis par l'appelant lui‑même, celui-ci ayant censément recopié les documents qui auraient été établis par d'autres préposés à la tenue de livres. Une personne raisonnable considérerait au mieux cet exercice comme superflu; aucune explication raisonnable n'a été donnée à ce sujet et aucune preuve n'a été présentée par une autre personne qui aurait établi les autres documents.

137.     La preuve relative au revenu tiré des ventes au comptant en 1993 n'était qu'une estimation et n'était pas fondée sur des faits acceptables ou raisonnables. Les chiffres que l'appelant a produits à ce sujet ne semblent pas raisonnables même s'ils figurent dans la déclaration de revenu de l'entreprise pour l'année 1993; de plus, ils étaient incompatibles avec le montant du revenu réalisé par l'appelant en 1993 et calculé à l'aide des pourcentages que l'appelant avait fournis à l'agent de Revenu Canada.

138.     Il n'était pas normal de verser les salaires de cette façon. Payer les employés en espèces, puis obtenir d'eux un reçu n'est pas une bonne idée. Dans un cas, le salaire n'avait même pas été entièrement versé à la travailleuse, mais il avait censément été en partie versé au mari de cette dernière.

139.     De toute évidence, l'entreprise ne cultivait pas de fraises; pourtant, une travailleuse a affirmé en avoir cueilli ou avoir cueilli des framboises ou encore avoir cueilli des fraises et des framboises. Cela n'est pas quelque chose qu'un travailleur oublierait facilement.

140.     Les salaires ont censément été versés en espèces, ce qui est anormal, mais ils ont aussi censément été versés au moyen de sommes forfaitaires à la fin de la période de travail, lorsque les travailleurs avaient besoin d'argent; de toute façon, le paiement périodique mentionné dans les RE était de toute évidence inexact.

141.     Dire qu'un représentant de Revenu Canada a amené l'appelant à croire que le RE n'était pas important n'est pas une réponse. Le RE est important; il constitue le fondement du règlement et ce qui y est allégué devrait être établi.

142.     À coup sûr, si elle avait travaillé au moment où elle affirme avoir travaillé et si elle avait reçu la rémunération qu'elle affirme avoir reçue, Kamaljit K. Gill aurait su qui travaillait là en même temps qu'elle et à quel moment elle avait travaillé. Les renseignements fournis à l'enquêteur auraient été compatibles avec le témoignage que Mme Gill a présenté à l'audience. On aurait présenté davantage d'éléments de preuve en ce qui a trait à la supervision; la travailleuse aurait disposé d'autres éléments de preuve établissant qu'elle avait reçu son salaire; le fait qu'elle avait travaillé aurait été corroboré d'une façon indépendante, par exemple au moyen du témoignage d'autres travailleurs. La nature même du travail que Mme Gill affirme avoir fait était suspecte compte tenu des circonstances, étant donné qu'elle en savait fort peu au sujet de tout ce qui se passait censément à la ferme.

143.     Si elle avait exercé un emploi assurable, tel qu'il est ici allégué, Raj R. Narang aurait su ce qu'elle faisait exactement, quel genre de baies elle cueillait; elle aurait reçu son salaire régulièrement et elle aurait mieux connu les noms de ses compagnons de travail. La Cour doute fort que pendant le dernier mois et demi, Raj R. Narang ait travaillé à ramasser les ordures et ait accompli les autres tâches qu'elle affirme avoir accomplies. Elle aurait reçu tout son salaire, et le salaire n'aurait pas été remis à son mari. Elle saurait exactement à quel moment elle a reçu ce salaire.

[25]    Dans l’arrêt Khunkhun c. Le ministre du Revenu national, C.C.I., n° 2002‑1986(EI), 13 septembre 2002 ([2002] T.C.J. No. 483), l’honorable juge Miller de la Cour canadienne de l’impôt a éprouvé des difficultés semblables. La question en litige faisant l’objet d’un appel consistait à déterminer si l’appelante avait occupé un emploi assurable dans un verger pendant l’été 2000 et, si tel était le cas, quel était le nombre exact d’heures assurables. Dans l’affaire Khunkhun, la Agricultural Compliance Team (équipe chargée d’assurer la conformité en matière d’agriculture) avait visité le verger en l’absence de l’appelante qui ne travaillait pas ce jour‑là. De plus, l’appelante n’avait pas de tenu de registre de ses heures de travail et son époux qui, avait-on supposé, avait assuré le suivi de ses heures travaillées, n’a pas été appelé à témoigner. Le payeur avait délivré des chèques à la travailleuse plus ou moins régulièrement, mais en fait, l’appelante avait été rémunérée pour toutes ses heures travaillées sous forme d’un paiement unique qui lui avait été versé en octobre, soit à la fin de la saison de croissance. Comme c’est le cas en ce qui concerne les présents appels, il a été nécessaire, dans l’affaire susmentionnée, d’examiner les documents contradictoires, d’évaluer la crédibilité des témoins et de trier divers documents dont la plupart étaient apparemment conflictuels, afin de déterminer si une véritable relation d’employeur-employé avait existé et afin d’effectuer, par la suite, les calculs appropriés en vue d’établir le montant des heures et des gains assurables.

 

[26]    D’abord, j’analyserai la requête qu’a formulée l’appelante en ce qui concerne l’emploi qu’elle a occupé auprès de M. Malhi pendant la période du 6 juillet au 24 octobre 1998. Bien que cette relation de travail présente plusieurs aspects étranges, notamment en ce qui concerne l’avance de 3 000 $ versée par chèque, qui, à l’origine, était payable à l’ordre de l’entreprise Puneet Orchard et qui a été déposé dans le compte de l’entreprise, j’admets que l’appelante occupait un emploi assurable auprès de M. Malhi pendant cette période. Les activités commerciales de l’entreprise de M. Malhi étaient raisonnablement importantes et l’appelante a fourni des éléments de preuve relativement aux tâches qu’elle accomplissait et à son horaire de travail, de même que d’autres éléments d'information connexes qui étaient suffisamment crédibles pour appuyer son allégation selon laquelle elle avait occupé un emploi assurable. Cependant, la somme de 1 200 $ versée par chèque daté du 16 juin 1999 pour le paiement de salaires qu’avait gagnés l’appelante pendant la saison 1998 ne peut être incluse dans le calcul des gains assurables.

 

[27]    Maintenant, en ce qui concerne l’emploi qu’a occupé l’appelante auprès de M. Grewal et de M. Dhaliwal en 1999, voici les éléments dont je tiendrai compte.  Dans cette affaire, il ne faut pas oublier que le verger couvrait une très petite superficie et que la dernière vente de fruits a été conclue le 18 septembre 1999. On a fait mention d’un registre des journées et/ou des heures qu’avait travaillées l’appelante, mais aucun registre de ce genre n’a été déposé en preuve. Les salaires de l’appelante lui ont été versés en un seul paiement par chèque daté du 7 décembre 1999 et déposé dans le compte bancaire de l’entreprise Puneet Orchard. Immédiatement après ce dépôt, Charanpal Sandhu, l’époux de l’appelante, a effectué un retrait. À cette époque, l’appelante était en Inde. Aucune explication satisfaisante n’a été fournie à la Cour en ce qui concerne cette opération. Il est improbable que l’appelante ait travaillé sur cette petite propriété appartenant à M. Grewal et à M. Dhaliwal jusqu’au 6 novembre 1999. À une question du questionnaire (onglet 20) demandant une description détaillée des tâches accomplies, l’appelante a répondu qu’elle « cueillait et emballait des fruits » et qu’elle « effectuait des travaux d’entretien et de nettoyage généraux ». Le RE qu’a émis Susan Kassian, la commis comptable des payeurs, le 5 novembre 1999, atteste que l’appelante avait perçu des rémunérations totalisant 7 280 $ alors qu’à cette date, aucune somme ne lui avait encore été versée. Ensuite, l’appelante, dans une lettre datée du 15 novembre 2001 qu’elle avait rédigée à l’attention du chef des appels à l’ADRC et qui concernait son appel, a curieusement allégué qu’elle était rémunérée en espèces pour le travail qu’elle accomplissait. La preuve a révélé qu’elle possédait des connaissances pratiques relativement à l’exploitation de l’entreprise Puneet Orchard et qu’elle avait accès aux livres, aux registres et aux états financiers qu’avait produit la caisse populaire et, conséquemment, elle devait être au courant que le paiement de ses salaires avait été versé sous forme d’un chèque qu’a délivré M. Dhaliwal, à moins que l’entente relative à son prétendu emploi n'ait fait l’objet d’une négociation conclue entre son époux et M. Dhaliwal et/ou M. Grewal.

 

[28]    Le processus qui consiste à déterminer s’il s’agit d’un emploi assurable et à établir par la suite l’admissibilité à des prestations d’a.‑e. ne constitue pas un jeu de cache-cache. Il ne s’agit pas non plus d’une charade, jeu populaire qui consiste à deviner la signification d’une phrase ou à identifier un mot, une personne ou un objet à l’aide d’indices vagues et habituellement stupides que l’on fournit inadéquatement aux joueurs. Le ministre, avant de rendre sa décision qui, ultérieurement, fait l’objet d’un appel, n’est pas tenu de procéder à un examen de comptabilité judiciaire détaillé ou d’analyser chaque aspect possible d’une relation de travail pour être en mesure d’émettre une hypothèse plausible qui peut expliquer des incohérences flagrantes inhérentes aux faits pertinents et aux déclarations qu’a formulés la travailleuse à diverses occasions. Au cours de l’audience d’un appel, la Cour n’est pas obligée d’admettre une allégation qu’énonce vaguement un appelant selon laquelle il existait une véritable relation d’employeur‑employé et, en l’absence d’une preuve crédible, de procéder à un examen d’un RE mensonger ou de relever les irrégularités que contiennent les documents concernant la relation de travail qui sont déposés en preuve. La Cour doit déterminer s’il existe suffisamment d'éléments de preuve crédibles pour démontrer l’existence d’un emploi assurable. Chaque affaire est différente et, en ce qui concerne celles qui touchent plusieurs personnes travaillant pour le même payeur, il est souvent nécessaire d’examiner la preuve en fonction de chaque partie concernée plutôt que d’adopter une approche générale. Dans le même esprit, les appels qui portent sur plusieurs périodes d’emploi, et particulièrement ceux qui concernent différents payeurs, peuvent produire des résultats variés.

 

[29]    Si je tiens compte de l’ensemble de la preuve, je ne suis pas convaincu que l’appelante occupait un emploi assurable auprès des payeurs M. Grewal et M. Dhaliwal pendant la période du 3 août au 6 novembre 1999. Par conséquent, l’appel qui porte le numéro de dossier 2002‑1552(EI) est rejeté.

 

[30]    En ce qui concerne l’appel portant le numéro de dossier 2002‑1550(EI) relatif à l’emploi qu’occupait l’appelante auprès de M. Malhi en 1998, il est accueilli et la décision du ministre est modifiée de manière à établir ce qui suit :

 

L’appelante exerçait un emploi assurable pour le compte de Param R. S. Malhi au cours de la période du 6 juillet au 24 octobre 1998; elle a accumulé 742 heures d'emploi assurables et  a généré des gains assurables totalisant 6 220 $.

 

Signé à Sidney (Colombie‑Britannique), ce 27e jour de février 2003.

 

 

 

 

« D. W. Rowe »

J.S.C.C.I.

 

Traduction certifiée conforme

ce  e jour de 200 .

 

 

 

 

 , réviseur

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