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Dossier: 2002-1583(EI)

ENTRE :

 

OASIS LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 25 février 2003 à Edmonton (Alberta)

 

Devant : L’honorable juge suppléant Michael H. Porter

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

Richard Scheer

 

Pour l’intimé :

Laura Dunham (stagiaire)

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel est rejeté, et la décision du ministre est confirmée, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 2e jour de juin 2003.

 

 

 

 

« M. H. Porter »

J.S.C.C.I.


 

 

 

Référence: 2003CCI370

Date: 20030602

Dossier: 2002-1583(EI)

ENTRE :

OASIS LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge suppléant Porter, C.C.I.

 

[1]     Le présent appel a été entendu à Edmonton, en Alberta, le 25 février 2003. L’appelante était représentée par Richard Scheer, l’administrateur de la compagnie.

 

[2]     L’appelante a interjeté appel à l’encontre d’une décision datée du 25 janvier 2002 qu’a rendue le ministre du Revenu national (ci-après appelé le « ministre ») selon laquelle l’emploi qu’occupait Wesley St. Jean (le « travailleur ») pour le compte de cette entreprise pendant la période du 7 octobre au 31 décembre 2000 représentait un emploi assurable en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi sur l’a.-e. ») pour le motif suivant :

                  

                     [traduction]

 

[...] Wesley St. Jean a été engagé en vertu d’un contrat de louage de services. Par conséquent, il était un employé.

 

On a indiqué que cette décision avait été rendue en vertu de l’article 93 de la Loi sur l’a.-e. et qu’elle était fondée sur l’alinéa 5(1)a) de cette même Loi.

 

[3]   Les faits pertinents révèlent que, pendant la période en cause, l’appelante exploitait une entreprise de montage de meubles. Celle-ci a engagé le travailleur comme manœuvre et ses tâches consistaient à monter des meubles et à effectuer quelques livraisons. Le travailleur a été engagé en vertu d’un contrat écrit intitulé [traduction] « entente de sous-traitance de prestation de services ». Le ministre a décidé qu’en dépit de ladite entente écrite, le travailleur travaillait en fait en tant qu’employé en vertu d’un contrat de louage de services. Par contre, l’appelante soutient que le travailleur représentait un entrepreneur qui fournissait ses services en vertu d’un contrat d’entreprise. Il s’agit là de la question en litige que la présente Cour est appelée à trancher.

 

Le droit

Contrats de louage de services et contrats d’entreprise

 

[4]     La façon dont la Cour doit procéder pour déterminer s’il s’agit d’un emploi exercé aux termes d’un contrat de louage de services et, par conséquent, d’une relation employeur-employé ou aux termes d’un contrat d’entreprise et, par conséquent, d’une relation avec un entrepreneur indépendant a longuement été expliqué par le juge MacGuigan de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N. (C.A.F.), [1986] 3 C.F. 553 (87 DTC 5025). Par la suite, dans d’autres décisions qu’elle rendues, la Cour a davantage développé le sujet et a expliqué plus en détail le raisonnement appliqué dans cette affaire, notamment dans les arrêts Moose Jaw Kinsmen Flying Fins Inc. c. M.R.N., C.A.F. n° A-531-87, 15 janvier 1988 (88 DTC 6099), Charbonneau c. Canada (M.R.N.), [1996] A.C.F. n° 1337, et Vulcain Alarme Inc. c. Le ministre du Revenu national, C.A.F., n° A‑376‑98, 11 mai 1999 ((1999) 249 N.R. 1), qui tous ont fourni aux cours de premières instances des lignes directrices utiles lorsqu’il s’agit de rendre une décision dans des affaires semblables.

 

[5]     La Cour suprême du Canada a de nouveau examiné la question dans l’affaire 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] R.C.S. 983. La question en litige, dans cette décision, a été analysée dans le contexte de la responsabilité du fait d’autrui. Cependant, la Cour a reconnu que les mêmes critères s’appliquaient dans de nombreuses autres circonstances, notamment en matière de dispositions législatives sur l’emploi. Le juge Major, parlant au nom de la Cour, a approuvé l’approche qu’a adoptée le juge MacGuigan J. dans l’arrêt Wiebe Door case (précité), lorsque ce dernier a analysé des causes canadiennes, britanniques et américaines et, en particulier, il a mentionné les quatre critères sur lesquels on doit s’appuyer pour rendre une telle décision, critères qui sont énoncés par lord Wright dans l’affaire City of Montreal v. Montreal Locomotive Works Ltd., [1974] 1 D.L.R. 161 aux pages 169 et 170. Le juge MacGuigan a conclu, à la page 560 (DTC : à la page 5028) que :

 

Dans ce contexte, les quatre critères établis par lord Wright [contrôle, propriété des instruments de travail, chances de bénéfice, risques de perte] constituent une règle générale, et même universelle, qui nous oblige à « examiner l’ensemble des divers éléments qui composent la relation entre les parties ». Quand il s’est servi de cette règle pour déterminer la nature du lien existant dans l’affaire Montreal Locomotive Works, lord Wright a combiné et intégré les quatre critères afin d’interpréter l’ensemble de la transaction.

 

À la page 562 (DTC : à la page 5029), il déclare :

 

[...] Je considère le critère de lord Wright non pas comme une règle comprenant quatre critères, comme beaucoup l’ont interprété, mais comme un seul critère qui est composé de quatre parties intégrantes et qu’il faut appliquer en insistant toujours sur ce que lord Wright a appelé « l’ensemble des éléments qui entraient dans le cadre des opérations » et ce même si je reconnais l’utilité des quatre critères subordonnés. (L’italique est de moi.)

 

À la page 563 (DTC : à la page 5030), il poursuit :

 

Il est toujours important de déterminer quelle relation globale les parties entretiennent entre elles. [...]

 

Il a aussi observé :

 

Quand il doit régler un tel problème, le juge de première instance ne peut se soustraire à l’obligation de peser avec soin tous les facteurs pertinents, comme l’a indiqué le juge Cooke. [...]

 

[6]     Le juge MacGuigan a aussi dit ce qui suit :

 

C’est probablement le juge Cooke, dans Market Investigations, Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732 (Q.B.D.), qui, parmi ceux qui ont examiné le problème, en a fait la meilleure synthèse (aux pages 738 et 739):

 

[TRADUCTION] Les remarques de lord Wright, du lord juge Denning et des juges de la Cour suprême des États-Unis laissent à entendre que le critère fondamental à appliquer est celui-ci : «La personne qui s’est engagée à accomplir ces tâches les accomplit-elle en tant que personne dans les affaires à son compte? ». Si la réponse à cette question est affirmative, alors il s’agit d’un contrat d’entreprise. Si la réponse est négative, alors il s’agit d’un contrat de service personnel. Aucune liste exhaustive des éléments qui sont pertinents pour trancher cette question n’a été dressée, peut-être n’est-il pas possible de le faire; on ne peut non plus établir de règles rigides quant à l’importance relative qu’il faudrait attacher à ces divers éléments dans un cas particulier. Tout ce qu’on peut dire, c’est qu’il faudra toujours tenir compte du contrôle même s’il ne peut plus être considéré comme le seul facteur déterminant; et que des facteurs qui peuvent avoir une certaine importance sont des questions comme celles de savoir si celui qui accomplit la tâche fournit son propre outillage, s’il engage lui-même ses aides, quelle est l’étendue de ses risques financiers, jusqu’à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion, et jusqu’à quel point il peut tirer profit d’une gestion saine dans l’accomplissement de sa tâche. L’utilisation du critère général peut être plus facile dans un cas où la personne qui s’engage à rendre le service le fait dans le cadre d’une affaire déjà établie; mais ce facteur n’est pas déterminant. Une personne qui s’engage à rendre des services à une autre personne peut bien être un entrepreneur indépendant même si elle n’a pas conclu de contrat dans le cadre d’une entreprise qu’elle dirige actuellement.

 

[7]     Dans l’affaire Kinsmen Flying Fins Inc., mentionnée ci-haut, la Cour d’appel fédérale a dit ce qui suit :

 

[...] comme le juge MacGuigan, nous considérons les critères comme des subordonnés utiles pour peser tous les faits relatifs à l’entreprise de la requérante. C’est maintenant l’approche appropriée et préférable pour la très bonne raison que dans une cause donnée, et celle-ci peut très bien en être une, un ou plusieurs des critères peuvent être peu ou pas applicables. Pour rendre une décision, il faut donc considérer l’ensemble de la preuve en tenant compte des critères qui peuvent être appliqués et donner à toute la preuve le poids que les circonstances peuvent exiger.

 

[8]     Les critères qu’a mentionnés la Cour peuvent se résumer ainsi :

 

a) le degré ou l’absence de contrôle de la part du prétendu employeur;

          b) la propriété des instruments de travail;

          c) les chances de bénéfice ou les risques de perte;

          d) l’intégration du travail du prétendu employé dans l’entreprise du prétendu employeur.

 

En outre, la Cour  doit considérer la question de l’intégration, le cas échéant, du travail du prétendu employé dans l’entreprise du prétendu employeur.

 

[9]     Dans la décision Sagaz (précitée), le juge Major affirme que :

 

[...] le contrôle n’est toutefois pas le seul facteur à considérer pour décider si un travailleur est un employé ou un entrepreneur indépendant. [...]

 

[10]    Il traite également de l’insuffisance du « critère de contrôle » en approuvant de nouveau les propos du juge MacGuigan dans l’arrêt Wiebe Door (précité). Ainsi : 

 

Ce critère a le grave inconvénient de paraître assujetti aux termes exacts du contrat définissant les modalités du travail : si le contrat contient des instructions et des stipulations détaillées, comme c’est chose courante dans les contrats passés avec un entrepreneur indépendant, le contrôle ainsi exercé peut être encore plus rigoureux que s’il résultait d’instructions données au cours du travail, comme c’est l’habitude dans les contrats avec un préposé, mais une application littérale du critère pourrait laisser croire qu’en fait, le contrôle exercé est moins strict. En outre, le critère s’est révélé tout à fait inapplicable pour ce qui est des professionnels et des travailleurs hautement qualifiés, qui possèdent des aptitudes bien supérieures à la capacité de leur employeur à les diriger.

 

[11]    Puis il ajoute :

À mon avis, aucun critère universel ne permet de déterminer, de façon concluante, si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant.  Lord Denning a affirmé, dans l’arrêt Stevenson Jordan, précité, qu’il peut être impossible d’établir une définition précise de la distinction (p. 111) et, de la même façon, Fleming signale que [TRADUCTION] « devant les nombreuses variables des relations de travail en constante mutation, aucun critère ne semble permettre d’apporter une réponse toujours claire et acceptable » (p. 416).  Je partage en outre l’opinion du juge MacGuigan lorsqu’il affirme -- en citant Atiyah, op. cit., p. 38, dans l’arrêt Wiebe Door, p. 563 – qu’il faut toujours déterminer quelle relation globale les parties entretiennent entre elles :

[TRADUCTION]  [N]ous doutons fortement qu’il soit encore utile de chercher à établir un critère unique permettant d’identifier les contrats de louage de services [...]  La meilleure chose à faire est d’étudier tous les facteurs qui ont été considérés dans ces causes comme des facteurs influant sur la nature du lien unissant les parties.  De toute évidence, ces facteurs ne s’appliquent pas dans tous les cas et n’ont pas toujours la même importance.  De la même façon, il n’est pas possible de trouver une formule magique permettant de déterminer quels facteurs devraient être tenus pour déterminants dans une situation donnée.

Bien qu’aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante.  La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte.  Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l’employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s’il engage lui-même ses assistants, quelle est l’étendue de ses risques financiers, jusqu’à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu'à quel point il peut tirer profit de l’exécution de ses tâches.

Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n’y a pas de manière préétablie de les appliquer.  Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l’affaire.

 

[12]    Je m’appuie également sur les propos du juge d’appel Décary dans l’affaire Charbonneau (précitée) lorsque, parlant au nom de la Cour d’appel fédérale, il déclare :

Les critères énoncés par cette Cour [...] ne sont pas les recettes d’une formule magique. Ce sont des points de repère qu’il sera généralement utile de considérer, mais pas au point de mettre en péril l’objectif ultime de l’exercice qui est de rechercher la relation globale que les parties entretiennent entre elles. Ce qu’il s'agit, toujours, de déterminer, une fois acquise l’existence d’un véritable contrat, c’est s’il y a, entre les parties, un lien de subordination tel qu’il s’agisse d’un contrat de travail [...] ou s’il n’y a pas [...] un degré d’autonomie tel qu’il s'agisse d’un contrat d’entreprise ou de service [...] En d’autres termes, il ne faut pas [...] examiner les arbres de si près qu’on perde de vue la forêt. Les parties doivent s’effacer devant le tout. [...] (Je souligne.)

 

[13]    Je fais également référence aux propos du juge d’appel Létourneau dans l’affaire Vulcain Alarme (précitée), lorsqu’il déclare  :

 

[...] Ces critères jurisprudentiels sont importants mais, faut-il le rappeler, ils ne sauraient compromettre le but ultime de l’exercice, soit d’établir globalement la relation entre les parties [...] Cet exercice consiste à déterminer s’il existe entre les parties un lien de subordination tel qu’il faille conclure à l’existence d’un contrat de travail au sens de l’article 2085 du Code civil du Québec ou s’il n’existe pas plutôt entre celles-ci ce degré d’autonomie qui caractérise le contrat d’entreprise ou de service [...]

 

[14]    Je suis d’autant plus conscient que, conséquemment aux décisions qu’a récemment rendues la Cour d’appel fédérale dans les affaires Wolf c. Canada (C.A.), [2002] A.C.F. n° 375 et Precision Gutters Ltd. c. Canada (ministre du Revenu national – M.R.N.), [2002] A.C.F. n° 771, il semble que l’on permette dorénavant un degré de latitude considérable lorsqu’il s’agit d’intervenir en matière de jurisprudence afin de permettre aux experts-conseils d’être engagés de manière à ce qu’ils ne soient pas réputés être des employés, comme ils auraient pu l’être auparavant. Je tiens particulièrement compte des propos du juge Décary dans la décision Wolf (précité) lorsqu’il déclare :

 

De nos jours, quand un travailleur décide de garder sa liberté pour pouvoir signer un contrat et en sortir pratiquement quand il le veut, lorsque la personne qui l’embauche ne veut pas avoir de responsabilités envers un travailleur si ce n’est le prix de son travail et lorsque les conditions du contrat et son exécution reflètent cette intention, le contrat devrait en général être qualifié de contrat de service. Si l’on devait mentionner des facteurs particuliers, je nommerais le manque de sécurité d’emploi, le peu d’égard pour les prestations salariales, la liberté de choix et les questions de mobilité. (Je souligne.)

 

[15]    Il semble donc, à la présente Cour, que le mouvement du pendule ait permis aux parties de diriger leurs affaires plus facilement relativement aux emplois d’expert-conseil et de se ranger elles-mêmes plus facilement dans la catégorie des entrepreneurs indépendants plutôt que dans la catégorie des employés engagés en vertu d’un contrat de louage de services, et ce, sans qu’interviennent la Cour et le ministre.

 

[16]    En conclusion, il n’existe aucune formule établie. Tous ces facteurs doivent être pris en compte et comme l’a indiqué le juge Major, dans la décision Sagaz (précitée), le poids que l’on accordera à chacun de ces facteurs dépendra des circonstances et des faits particuliers de l’affaire en cause. De nombreux critères peuvent être tout à fait neutres et s’appliquer à ces deux situations. Dans pareil cas, l’on doit sérieusement tenir compte de l’intention des parties, tâche qui relève du juge de première instance. 

 

Les faits

 

[17]    On a indiqué, dans la réponse à l’avis d’appel signée au nom du ministre, que ce dernier s’est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes (j’ai indiqué entre parenthèses, celles qu’a admises ou niées l’appelante) :

 

[Traduction]

6.

a)      L’appelante exploite une entreprise de montage de meubles; (admise)

 

b)      le travailleur a été embauché comme manœuvre et ses tâches consistaient notamment à monter des meubles et à effectuer quelques livraisons; (admise, à condition que le terme « embauché » soit remplacé par « engagé »)

 

c)      le travailleur fournissait la plupart de ses services sur le lieu d’affaire de l’appelante; (admise)

 

d)      le travailleur a dû signer une entente écrite avant de commencer à travailler pour le compte de l’appelante; (admise)

 

e)      le travailleur était rémunéré selon un taux horaire de 10 $; (admise)

 

f)        lorsque le travailleur effectuait des heures supplémentaires, sa rémunération correspondait à 1,5 fois son salaire établi; (admise)

 

g)      l’appelante a établi le taux de rémunération; (niée; les parties ont négocié entre elles le taux de traitement)

 

h)      le travailleur était rémunéré toutes les deux semaines; (admise dans l’ensemble; les travailleurs étaient rémunérés dans les 30 jours suivant l’exécution du contrat de travail)

 

i)        le travailleur travaillait normalement de 8 h à 16 h 30; (niée)

 

j)        l’appelante a établi l’horaire de travail du travailleur; (niée)

 

k)      le travailleur était tenu d’assurer le suivi de ses heures de travail qu’il consignait sur une feuille de temps; (admise)

 

l)        le travailleur se présentait sur le lieu d’affaire de l’appelant chaque matin; (admise; la plupart du temps)

 

m)    l’appelante obtenait les contrats de travail et les assignait aux travailleurs; (admise)

 

n)      l’appelante établissait les horaires et les échéanciers; (niée)

 

o)      l’appelante donnait des directives au travailleur et le supervisait; (niée; des explications sont fournies à ce sujet) 

 

p)      le travailleur travaillait normalement avec le contremaître de l’appelante; (niée)

 

q)      le travailleur ne pouvait engager un remplaçant ou ses propres aides; (niée)

 

r)       le travailleur fournissait ses propres petits outils manuels; (admise)

 

s)       l’appelant fournissait les gros outils, tels que des plates-formes, des chariots, des outils sans fil et un camion de livraison; (admise, à l’exception des outils sans fil)

 

t)        le travailleur n’a engagé aucune dépense dans le cadre de l’exécution de ses fonctions; (niée)

 

u)      le travailleur ne facturait pas la TPS à l’appelante; (admise).

 

[18]    Richard Scheer (« M. Scheer ») ainsi qu’un autre manœuvre ont témoigné au nom de l’appelante. Quant au travailleur, il a témoigné au nom du ministre.  

 

[19]    Au cours de son témoignage, M. Scheer a indiqué que le travailleur savait lorsqu’il a été engagé, qu’il l’était en tant que sous-traitant et qu’il lui avait mentionné qu’il n’engageait que des sous-traitants. Il a affirmé qu’ils avaient signé le contrat à cet effet avant que le travailleur commence à travailler. L’appelante a déposé en preuve une formule de contrat qui, je suppose, est une formule standardisée. Le travailleur n’a pas eu voix au chapitre quant à la formulation de son contenu. Le contrat (qui figure dans la pièce A-1) est ainsi rédigé :

 

[traduction]

Concernant : Entente de sous-traitance de prestation de services 

 

Tous les sous-traitants sont responsables de fournir leurs propres outils pour être en mesure d’installer des meubles de bureau. L’entreprise O.A.S.I.S. LTD., pour sa part, fournira l’équipement nécessaire pour déplacer les produits d’un lieu à un autre.

 

Tous les sous-traitants sont tenus de fournir, tous les jours, leur propre moyen de transport au lieu de travail initial. Tous les sous-traitants qui utiliseront leur véhicule pour transporter de l’équipement seront rémunérés selon un taux horaire de 14 $ tant et aussi longtemps que l’entreprise O.A.S.I.S. LTD. pourra facturer cette dépense à ses clients.

 

Tous les sous-traitants sont tenus de se munir d’un équipement de communication (téléphone cellulaire, téléavertisseur, etc.) pour lequel l’entreprise ne sera pas financièrement responsable. 

 

Pour tout contrat de travail à l’extérieur de la ville nécessitant de se déplacer, les sous-traitants percevront un taux horaire régulier. Les heures supplémentaires seront rémunérées après huit heures de travail par jour ou après quarante heures par semaine, selon le cas, à l’exception des heures correspondant aux voyages aller-retour. Les factures que soumettront les sous-traitants seront calculées du dimanche au samedi inclusivement, afin de s’assurer que les heures supplémentaires y figurent de manière exacte. Si une formation quelconque est nécessaire, le sous-traitant représente l’unique responsable sur le plan financier.

 

Toutes les factures soumises seront payées dans les trente jours suivant la période de travail.

 

Toute mauvaise qualité d’exécution sera l’unique responsabilité du sous‑traitant. Une approche raisonnable devra être adoptée afin de rectifier la situation.

 

Les sous-traitants seront tenus de respecter les demandes des clients de l’entreprise avec une extrême courtoisie. 

 

Tous les impôts et les cotisations au Régime de pensions du Canada qui doivent être prélevés à l’égard des factures que soumet le sous-traitant sont l’unique responsabilité de ce dernier. 

 

[20]    M. Scheer a indiqué qu’il avait mentionné au travailleur qu’il ne pouvait pas lui garantir du travail quotidiennement. Cependant, la preuve a révélé, par la suite, que le travailleur était tenu de se présenter tous les jours sur le lieu d’affaire ou à la cafétéria de l’appelante dans l’édifice Place du Canada pour qu’on lui assigne des contrats de travail. Certains éléments de preuve semblent indiquer qu’il n’agissait ainsi que sur appel, mais, selon ce que je comprends de la preuve, il se rendait sur le lieu d’affaire pratiquement tous les jours.

 

[21]    M. Scheer a indiqué qu’il avait dit au travailleur qu’il devait fournir ses propres outils de travail et se munir d’un moyen de communication, tel qu’un téléphone cellulaire ou un téléavertisseur. Selon M. Scheer, le travailleur lui aurait mentionné qu’il pouvait obtenir certains outils de son père qui vivait à Sherwood Park. Manifestement, il n’a pas obtenu ces outils, du moins pour presque toute la durée du contrat.

 

[22]    Le taux de traitement qui était horaire a été négocié entre les deux parties, et le travailleur a accepté un taux de 10 $ heure qu’il jugeait satisfaisant. À mon avis, les parties n’ont pas réellement négocié ce taux de salaire. En fait, M. Scheer a proposé ce taux horaire et le travailleur a accepté.  

 

[23]    Dès le début, M. Scheer n’a pas été impressionné par le rendement au travail du travailleur; selon des commentaires dont lui ont fait part ses autres travailleurs et ses clients, le travailleur en question était paresseux et affichait un problème d’attitude. Je pense donc que leur relation a connu un mauvais départ et qu’elle s’est détériorée par la suite.

 

[24]    Bon nombre de contrats de travail qu’obtenait l’appelante s’exécutaient dans l’édifice Place du Canada à Edmonton. M. Scheer a expliqué qu’il assignait des contrats de travail au travailleur dans cet édifice. Au début, le travailleur travaillait en compagnie d’autres collègues de travail. Quelqu’un assurait le suivi de ses heures de travail. Après un certain temps, il exécutait seul de petits projets. Néanmoins, ces projets lui étaient assignés par l’appelante. Il n’avait pas voix au chapitre quant aux contrats de travail qu’il voulait ou non exécuter.  

 

[25]    M. Scheer a indiqué que le travailleur pouvait aller et venir comme bon lui semblait et qu’il n’établissait aucun horaire de travail. Quant au travailleur, il a expliqué que, selon la procédure, tous les travailleurs se pointaient à l’aire de restauration de l’édifice le matin et M. Scheer leur assignait du travail. Il a mentionné qu’à une occasion, il avait téléphoné à M. Scheer et lui avait demandé s’il pouvait ne pas se présenter au travail le jour suivant. Ce dernier lui a répondu de ne plus se donner la peine de venir au travail s’il ne se présentait pas, ce qui indique clairement qu’il aurait été mis à pied s’il s’était absenté de son travail.

 

[26]    Le travailleur a également attesté qu’il travaillait en compagnie d’un travailleur plus qualifié qui décidait à quel moment ils prendraient une pause ou leur déjeuner et à quel moment ils termineraient leur journée de travail. Ainsi, il estimait qu’il était supervisé et qu’il n’était pas libre d’aller et de venir comme bon il lui semblait. Manifestement, lorsque l’appelante concluait un contrat en vue de mener un projet à terme selon un certain délai, elle s’attendait à ce que le travailleur termine son travail conformément à cet échéancier.   

 

[27]    M. Scheer a affirmé (point q)) du paragraphe 6) que le travailleur pouvait se faire remplacer. À cet égard, il a indiqué à titre d’exemple, qu’à une occasion, le travailleur ne s’était pas présenté au travail et qu’il l’avait remplacé par un autre travailleur. L’appelante avait rémunéré ce dernier, ce qui indique que le travailleur n’engageait pas ses propres aides ou remplaçants. C’était plutôt l’appelante qui fournissait un remplaçant. Le travailleur n’a jamais engagé ses propres aides ou remplaçants. De plus, je ne crois pas qu’il aurait été en mesure de la faire, si tel avait été sa décision.

 

[28]    En ce qui concerne les outils de travail, il est clair que, dès le départ, on avait indiqué au travailleur qu’il devait fournir ses propres outils, tels que des clés, des tournevis et un ruban à mesurer. Ce dernier a indiqué qu’il s’en procurerait, ce qu’il a fait, et à la fin, il s’était constitué un petit coffre d’outils. En règle générale, il empruntait certains outils aux autres travailleurs. Quant à l’équipement plus important, tel que les chariots et les transpalettes à main, c’est l’appelante qui le fournissait. Il semble que le travailleur ne s’est jamais muni d’un téléphone cellulaire ou d’un téléavertisseur et qu’il ait eu de la difficulté à se procurer un camion pour transporter le matériel sur les lieux de travail.

 

[29]    On a également présenté une preuve concernant des T-shirts. M. Scheer a indiqué que les travailleurs portaient ces chandails dans l’édifice Place du Canada afin de s’identifier comme tels. Il a mentionné que ces chandails leur étaient fournis gratuitement et qu’ils étaient libres de les porter. Cependant, selon une facture que le travailleur a déposée en preuve, ce dernier a dû payer pour avoir un T‑shirt. Il estimait qu’il n’avait pas le choix et j’admets son témoignage à cet égard.

 

[30]    Le travailleur produisait et soumettait des factures à l’appelante tous les 14 jours. M. Scheer a indiqué que le travailleur avait dû obtenir ses formules de facturation auprès d’un autre travailleur.  À mon avis, il n’a pas été tout à fait honnête à ce sujet. Le travailleur a affirmé que les formules de facturations étaient disponibles au bureau et qu’il était tenu de s’en procurer une et de la remplir. Il est arrivé à une occasion au moins que l’on a questionné le travailleur concernant ses heures de travail. Il semble que le travailleur responsable de la supervision assurait le suivi des heures de travail consacrées à chaque projet de manière à ce que l’appelante puisse facturer les coûts exacts au client. Donc, indirectement, l’appelante assurait le suivi des heures de travail des différents travailleurs.

 

[31]    Selon le témoignage d’un autre travailleur, le travailleur en cause savait depuis le début qu’il était engagé comme sous-traitant. À mon avis, ce témoignage est inutile puisqu’on n’a pas discuté de ce que cela signifiait d’être engagé en tant que sous-traitant et que les travailleurs l’ignoraient. Manifestement, il y avait mésentente entre le travailleur et ses collègues de travail.   

 

[32]    Voilà donc en bref en quoi consiste mon analyse de la preuve.

 

Application aux divers facteurs

 

[33]    Bien que, dans l’affaire en l’espèce il soit plus ou moins nécessaire d’examiner un certain nombre de facteurs qui, avant la décision Sagaz (précitée), étaient considérés comme un critère composé de quatre parties intégrantes, il peut néanmoins s’avérer utile d’effectuer cet exercice.

 

[34]    Titre : Il est important de bien comprendre que, même si les parties choisissent de donner un titre à leur relation, si la véritable nature et l’essence de l’arrangement ne correspondent pas à ce titre, c’est l’essence dont doit tenir compte la Cour. Cela étant dit, il est également juste d’affirmer que, lorsque les parties choisissent vraiment une méthode particulière d’établir leur relation de travail, ce n’est pas au ministre ou à la présente Cour de faire abstraction de ce choix. On doit faire preuve de retenue quant à la méthode qu’ont choisie les parties et, si selon la preuve dans son ensemble, il n’y a aucune raison de déroger au titre qu’ont donné les parties à leur relation, alors ce titre devrait rester intact. Les arrêts Wolf et Precision Gutter (précités) appuient cette assertion. Dans l’affaire en l’instance, je ne suis pas du tout convaincu que le travailleur, en signant un contrat en tant que sous‑traitant, savait ce que cela impliquait. On lui a remis une formule de contrat standard, il n’a pas eu voix au chapitre quant au contenu. Il est vrai qu’on lui a demandé s’il avait des questions. Cependant, il savait aussi qu’il devait signer ce contrat s’il voulait obtenir un emploi. Après avoir entendu son témoignage, dire que le travailleur est naïf lorsqu’il s’agit de discuter d’affaires représenterait un euphémisme. À mon avis, il n’avait aucune idée de ce qu’impliquait un tel contrat. Je ne peux certainement pas affirmer que les parties s’étaient mises d’accord. Le titre que l’on a donné à l’arrangement ne m’indique pas qu’il s’agissait en fait nécessairement d’une entente conclue avec un entrepreneur indépendant.

 

[35]    Degré de contrôle : À mon avis, l’appelante ou ses agents exerçaient un contrôle considérable sur le travailleur. On lui indiquait clairement à quel endroit il travaillerait et avec qui. Le travailleur qui le supervisait lui indiquait à quel moment ils prendraient leur pause et à quel moment ils termineraient leur journée de travail. S’il ne se présentait pas au travail, il risquait de perdre son emploi. Il était tenu de produire ses factures en utilisant les formules de facturation de l’entreprise. Il devait porter un T-shirt à l’effigie de l’entreprise. Après avoir observé Richard Scheer qui affiche un caractère énergique et le travailleur qui semble quelque peu naïf, il ne fait aucun doute, dans mon esprit, que l’on exerçait un contrôle considérable sur ce dernier relativement à l’exécution de ses fonctions.   

 

[36]    À mon avis, il est clair que ce facteur tend à démontrer qu’il s’agissait d’un employé engagé en vertu d’un contrat de louage de services.

 

[37]    Instruments de travail et équipement : L’appelante s’attendait à ce que le travailleur fournisse ses propres outils de travail, mais ce ne fut pas le cas. Il les empruntait aux autres travailleurs, bien qu’il ait acquis un minimum d’outils ultérieurement, conformément aux modalités du contrat. L’appelante, quant à elle, fournissait les plus gros outils. Ainsi, bien que je tienne compte de l’affaire Precision Gutters (précitée) et des propos du juge d’appel Sexton, je ne suis pas d’avis que, dans l’affaire en l’espèce, le travailleur possédait des gros outils qui l’auraient situé dans la même catégorie que les installateurs de gouttières en cause dans l’affaire susmentionnée. Il s’agit peut-être d’une question de degré, mais il est clair que de nombreux employés engagés en vertu d’un contrat de louage de services fournissent leurs propres outils de travail et qu’on ne pourrait supposer qu’ils ne représentent pas des employés en se fondant uniquement sur ce facteur.  

 

[38]    À mon avis, ce facteur tend à démontrer qu’il s’agissait davantage d’un contrat de louage de services que d’un contrat d’entreprise.

 

[39]    Chance de bénéfices et risque de pertes : Ici encore, je considère que l’affaire en l’instance se distingue considérablement de la décision Precision Gutters (précitée). Le travailleur avait accepté le taux horaire qu’on lui avait proposé, mais en réalité, c’est l’appelante qui a établi le taux de traitement. Il n’y a eu aucune véritable négociation concernant un projet quelconque en particulier. Le travailleur, dans la présente affaire, n’a pas utilisé son propre jugement quant à savoir à quel moment il travaillerait ou quant à savoir s’il devait accepter ou refuser un contrat de travail en particulier. En aucun temps, le prix n’a fait l’objet de négociation continue. Essentiellement, le travailleur n’était pas libre de travailler pour le compte d’autres entreprises d’installation sans courir le risque de perdre son emploi auprès de l’appelante. On assignait au travailleur des contrats de travail particuliers et, donc, il n’était pas libre de tirer des profits d’autres entreprises. Il ne pouvait pas engager d’autres travailleurs pour qu’ils travaillent à son compte. Il était responsable des défectuosités, mais aucune preuve n’a démontré qu’une telle situation se soit jamais produite ou qu’elle risquait de se produire. Il est vrai que l’entreprise ne pouvait garantir du travail, mais en réalité, il y avait quotidiennement du travail à accomplir. 

 

[40]    De plus, aucune preuve ne démontre que le travailleur a engagé des dépenses importantes pour l’achat d’outils ou l’acquisition d’un téléphone cellulaire ou d’un camion, ce qui, en soit, peut changer considérablement les choses.

 

[41]    Le travailleur pouvait tout simplement générer davantage de revenus en travaillant davantage. Il n’avait aucune chance de générer un profit au sens entrepreneurial pas plus qu’il ne risquait de subir des pertes. Ce facteur démontre clairement, à mon avis, qu’il s’agissait, non pas d’une relation de travail avec un entrepreneur indépendant, mais d’une relation avec un employé. 

 

[42]    L’intégration : Il s’agit de l’aspect du critère le plus souvent critiqué. La question que l’on doit poser est la suivante : «  le travailleur fournissait-il ses services en tant que personne exploitant sa propre entreprise? ». Pour répondre à cette question, on doit examiner la situation du point de vue du travailleur et non de l’employeur puisque, du point de vue de ce dernier, il s’agira toujours de son entreprise. En d’autres termes, dans l’affaire en l’instance, exploitait-on une seule entreprise ou deux entreprises distinctes?

 

[43]    Dans la présente situation, le travailleur avait auparavant occupé un emploi comme gardien de sécurité. M. Scheer l’a approché pour lui proposer de travailler pour le compte de l’appelante parce qu’il le connaissait. On lui a indiqué qu’il serait engagé en tant que sous-traitant. Cependant, le travailleur n’avait pas envisagé d’exploiter une entreprise à son propre compte. Pour lui, il s’agissait d’un emploi et le titre qu’on lui donnait n’avait aucune importance. Il a accepté sans difficulté de s’occuper lui-même de verser les déductions obligatoires. Toutefois, selon ce que je comprends de la preuve, il était loin de penser qu’il exploiterait une entreprise à son propre compte. En résumé, il n’a tout simplement pas su faire la part des choses pour envisager la situation sous cet aspect.

 

[44]    Dans l’affaire en l’espèce, il me semble plutôt que l’appelante mettait la pièce à côté du trou. Il est possible que les autres travailleurs se soient entendus avec l’appelante pour travailler en tant qu’entrepreneurs indépendants ou de conclure un contrat de travail au sens entrepreneurial, selon lequel ils peuvent correspondre aux critères énoncés dans l’arrêt Precision Gutters (précité). Il se peut que l’on ait à considérer chacun d’eux en fonction de leur situation respective et individuelle. Dans les présents motifs, on ne devrait pas tenir pour acquis que les faits s’appliquent nécessairement aux autres travailleurs qui travaillaient pour le compte de l’appelante. Cependant, dans la présente affaire mettant en cause le travailleur concerné, on s’attendait à ce qu’il fournisse des outils, qu’il acquière un téléphone cellulaire ainsi qu’un camion et qu’il obtienne un numéro de TPS, soit tout ce dont se munit un entrepreneur indépendant. Il n’en avait aucun. Essentiellement, je suis d’avis que le travailleur a seulement accepté un emploi pour lequel il était rémunéré selon un taux horaire de 10 $ et qu’il faisait ce qu’on lui dictait de faire. L’appelante souhaitait le classer dans la catégorie des sous-traitants, mais franchement, la façon dont il a été engagé ne correspond pas du tout à cette catégorie. Le travailleur n’avait pas la moindre idée qu’il exploitait une entreprise à son propre compte. À mon avis, il n’y avait qu’une seule entreprise dans la présente affaire et le travailleur en faisait partie intégrante. Le fait qu’on lui ait indiqué qu’il serait engagé en tant qu’entrepreneur indépendant ou qu’on lui ait même fait signer un document à cette fin et le fait qu’on lui ait mentionné qu’aucune déduction obligatoire ne serait prélevée sur sa paye n’était pas suffisant pour modifier la relation de travail qui existait entre les deux parties.

 

Conclusion

 

[45]    Lorsque j’examine la forêt dans son ensemble et non seulement chaque arbre qui la compose, je suis tout à fait convaincu, selon la preuve, que le travailleur représentait un employé en vertu d’un contrat de louage de services. À mon avis, l’affaire en l’instance se distingue considérablement des décisions Wolf et Precision Gutters (précitées). Bien que les principes énoncés dans ces affaires puissent maintenant inciter de nombreux experts-conseils à se faire engager en tant qu’entrepreneurs indépendants plutôt qu’en tant qu’employés, l’affaire en l’espèce m’a néanmoins donné l’impression générale que le travailleur en cause était en réalité un employé.

 

[46]    Par conséquent, la décision du ministre est confirmée et l’appel est rejeté.

 

Signé à Calgary (Alberta) ce 2jour de juin 2003.

 

 

 

 

 

« M. H. Porter »

J.S.C.C.I.

 

 

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