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Dossier : 96-4635(IT)I

ENTRE :

CAMIL ROULEAU,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

____________________________________________________________________

Appel entendu les 7, 8, 9, 10 et 11 mai 2007, à Québec (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Pierre Archambault

 

Comparutions :

 

Pour l'appelant :

l'appelant lui-même

 

 

Avocats de l'intimée :

Me Pierre Cossette

Me Simon Petit

 

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JUGEMENT

 

          L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 1992 est rejeté, selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

 

Signé à Georgeville, Québec, ce 17e jour de septembre 2007.

 

 

« Pierre Archambault »

Juge Archambault

 


 

 

 

 

 

Référence : 2007CCI338

Date : 20070917

Dossier : 96-4635(IT)I

ENTRE :

CAMIL ROULEAU,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Archambault

 

[1]   Messieurs Camil Rouleau et Richard McKeown faisaient partie en 1992 des 83 investisseurs de la société de personnes Cablotel Enr. (Cablotel), un abri fiscal mis sur pied pour financer un programme de recherche scientifique et de développement expérimental (R&D). Tout comme monsieur Rouleau, monsieur McKeown a interjeté appel devant cette Cour. Dans les deux cas, le ministre du Revenu national (ministre) avait refusé la déduction de la perte d'entreprise provenant entièrement de dépenses de R&D et refusé aussi le crédit d'impôt à l’investissement (CII) attribuable à ces dépenses, au motif que les associés de Cablotel étaient des commanditaires aux fins fiscales.

 

[2]   L'audition de l’appel interjeté sous le régime de la procédure générale par monsieur McKeown, qui était représenté par un avocat, a duré 33 jours devant feu le juge en chef Garon en 1998 et 1999[1]. Le 12 mars 2001, le juge en Chef Garon a rejeté l'appel de monsieur McKeown relatif tant à son placement dans Commu‑Sys Enr. (Commu‑Sys) en 1991 qu’à celui dans Cablotel en 1992. De façon succincte, il a conclu : i) que ces sociétés n'avaient pas été validement formées, notamment parce que le seul objectif poursuivi par les investisseurs était d'obtenir des déductions fiscales et non d'exploiter une entreprise; ii) que monsieur McKeown était un associé déterminé commanditaire et, par conséquent, n'avait pas droit à la déduction des pertes fiscales provenant de R&D ni au CII; et iii) qu’il était également un associé déterminé passif et par conséquent n'avait pas droit au CII.

 

[3]   Chose étonnante, l'appel de monsieur Rouleau interjeté le 12 décembre 1996 sous le régime de la procédure informelle n'a été entendu que plus de 10 ans plus tard et plus de six ans après la décision dans McKeown c. La Reine. Selon ce que j'en comprends, les appels de cinq autres investisseurs de Cablotel ainsi que ceux de deux investisseurs de Commu-Sys devaient être entendus en même temps que celui de monsieur Rouleau, mais ces autres investisseurs se sont tous désistés de leur appel à la dernière minute. Monsieur Rouleau serait ainsi le dernier investisseur de Cablotel dont l’appel a été entendu par cette Cour.

 

[4]   En plus du refus des déductions fiscales, le ministre demande l'application de la pénalité prévue à l'article 179.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu (Loi) et des dépens pour abus de procédure. Aucune autre pénalité n'est en litige.

 

Les faits

 

[5]   L'audition de l'appel de monsieur Rouleau a duré cinq jours et quatre témoins ont été entendus. En plus de témoigner lui‑même, monsieur Rouleau a fait témoigner monsieur Daniel Bédard, le conseiller qui lui avait proposé le placement dans Cablotel, et monsieur Michel Cusson, un co‑investisseur qui, contrairement à monsieur Rouleau, a accepté un règlement que le ministre avait soumis en 1995 tant à lui qu’à des centaines de contribuables ayant acquis le même genre d’abri fiscal. De son côté, l’intimée a fait témoigner le vérificateur du ministre, monsieur Gabriel Caponi.

 

[6]   Au paragraphe 38 de la réponse à l’avis d’appel, le ministre a énoncé les faits suivants qu'il a tenus pour acquis pour établir sa cotisation :

 

a)         La société CABLOTEL (« la Société ») a été créée le 16 janvier 1992; (admis)[2]

 

b)         avant que l’appelant n’adhère à la Société le 11 novembre 1992, la Société a signé avec Omzar Technologies Inc. (« Omzar ») un document intitulé « Contrat de service » (sic), lequel énonce que Omzar effectuera des travaux décrits comme des travaux de recherche scientifique et de développement expérimental; (avéré)[3]

 

c)         Omzar a été incorporée le 27 novembre 1990 avec comme objet de faire des travaux présentés comme étant de la recherche et du développement; elle devait exécuter différents travaux et pour ce faire, 9 sociétés de personnes (« les sociétés[4] ») ont été créées :

 

 

1990

 

 

Dreyfus

Bio‑Systems

 

 

 

 

 

1991

 

Bio-Systems 1

 

Ersol

 

VCA

Commu-sys

 

 

 

1992

 

 

Bio-Systems

 

Solarix

 

Cablotel

 

Communicab

(admis)

 

d)         le promoteur-organisateur des sociétés était en réalité Omzar et son âme dirigeante, M. Abdel Jabbar Abouelouafa (« Jabbar »); (non contredit et considéré comme avéré)[5]

 

e)         pour son exercice financier se terminant le 31 décembre 1992, la Société indique une perte de 2 000 108 $, dont les sommes de 740 000 $ et 1 260 000 $ présentées respectivement au titre de frais de recherche selon le sous-alinéa 37(1)a)(i) et l’alinéa 37(1)b) de la Loi de l’impôt sur le revenu; (avéré)

 

f)          vers la fin de 1992, l’appelant a versé à la Société une somme d’argent représentant 50% de sa participation totale dans la Société; (admis)[6]

g)         quant au surplus, l’appelant n’avait aucune obligation envers quiconque; (non avéré)[7]

 

h)         lors de la vente des participations, le plan d’achat consistait à ce que tous les investisseurs, sans exception, bénéficient d’un financement de 50% de leur participation; tous les membres ayant investi n’ont donc eu à débourser que 50% de leur participation; (avéré)[8]

 

i)          Noreco Inc. finance, sans aucune enquête de crédit, chacun des membres de la Société; (non contredit et avéré)

 

j)          IPF Finance Inc., Loron Inc., et Noreco Inc. (les « corporations de financement ») ont toutes un lien de dépendance avec Omzar et Jabbar; (avéré)[9]

 

k)         selon ce qui est indiqué dans les documents présentés au ministre du Revenu national, le prêt, portant un taux d’intérêt de 10%, était remboursable par 120 paiements mensuels, soit sur une période de 10 ans commençant 1 an après la date d’investissement, soit à la fin de 1993; (admis)[10]

 

l)          le remboursement des prêts se fait par la cession des participations en 1994, selon ce qui est indiqué dans les documents fournis au ministre du Revenu national, mais qui ne représentent pas la réalité; (avéré)[11]

m)        l’appelant savait que, selon le montage présenté lors de la sollicitation, sa participation ferait l’objet d’un rachat à court terme pour le montant présenté comme étant financé; (admis)[12]

 

n)         l’appelant avait reçu l’engagement des promoteurs que sa participation serait rachetée à un prix fixé d’avance dans un court laps de temps; (non avéré comme cela est rédigé)[13]

 

o)         tous les membres de la Société ont cédé leurs participations à la compagnie Noreco Inc. pour un montant représentant 50% de leur participation (le montant « financé »); ( non avéré comme cela est rédigé )[14]

 

p)         le paiement dans tous les cas se fait par compensation de dette pour un montant représentant le montant « financé » consenti par la corporation de financement et payable, selon le document de convention de cession, par « réduction, par voie de compensation, d’un prêt consenti » par la corporation de financement : le montant en question dépassait la juste valeur marchande de sa participation au moment de la disposition; (avéré)[15]

 

q)         étant donné que Noreco Inc. a financé tous les membres de la Société pour une somme représentant 50% de leur participation, Noreco Inc. n’a donc eu à débourser aucune somme d’argent; (avéré)[16]

 

r)          en conséquence, Noreco Inc. a acquis les participations pour une somme totale de 1 000 000 $ et a annulé ses prêts à recevoir des membres du même montant; (avéré)[17]

s)         l’utilisation du stratagème du rachat-financement décrit ci-haut représentait, pour les promoteurs et les membres de la Société, une caractéristique essentielle de « l’abri fiscal » dont ils étaient réciproquement vendeurs et acheteurs; (admis)[18]

 

t)          les sommes reçues au comptant (50%) des membres sont déposées au compte de banque de la Société et la Société fait immédiatement un paiement à Omzar au même montant;  (avéré)

 

u)         Omzar n’a donc à sa disposition en réalité que 50% des fonds disponibles pour exécuter les obligations énoncées dans le document intitulé « Contrat de service » [sic]; (avéré)

 

v)         à partir de novembre 1992, dès que les fonds sont reçus de la Société, Omzar avance immédiatement ces mêmes fonds à une des « corporations de financement » qui les utilise à nouveau pour « financer » d’autres investisseurs; (avéré)[19]

 

w)        les corporations de financement ne remboursent jamais les avances de Omzar : elles sont plutôt annulées lors d’une transaction entre Omzar et la corporation de financement impliquée; (avéré)[20]

 

x)         selon un document portant la date du 15 février 1994 entre Omzar et Noreco Inc, cette dernière doit à Omzar 3 755 500 $; (avéré)[21]

 

y)         cette somme représente les avances de Omzar à Noreco Inc, soit :

 

Solarix (2 447 000 $ X 50%)

1 223 500 $

 

 

Cablotel (2 000 000 $ X 50%)

1 000 000 $

 

 

Communicab (2 017 000 $ X 50%)

1 008 500 $

 

 

Bio-Systems II (1 047 000 $ X 50%)

   523 500 $

 

 

Total des avances :

3 755 500 $

(avéré)[22]

 

z)         le document du 15 février 1994 indique également que Noreco Inc. détient les participations des sociétés Solarix, Cablotel, Communicab et Bio‑Systems II : ces quatre Sociétés cèdent à Omzar leurs droits (sur les résultats et travaux de « recherche ») et à titre de considération, Omzar donne quittance complète à Noreco Inc. pour les avances de 3 755 500 $  selon les documents présentés au ministre du Revenu national, la cession des participations des membres de la Société en faveur de Noreco Inc. est en date du 16 février 1994; (avéré)[23]

 

aa)       l’appelant avait le droit de recevoir un montant qui lui était accordé en vue de supprimer ou réduire l’effet d’une perte du fait qu’il avait une participation dans la Société; (avéré)[24]

 

bb)       l’appelant a bénéficié d’un mécanisme prévoyant la disposition de sa participation dans la Société et dont il est raisonnable  de considérer qu’un des principaux objets consiste à tenter de le soustraire à l’application du paragraphe 96(2.4) de la Loi de l’impôt sur le revenu;[25]

 

cc)       la majeure partie des dépenses de Omzar, selon ses états financiers, est constituée de frais de gestion, honoraires professionnels et frais légaux : ces dépenses ne sont pas appuyées de pièces justificatives et une partie importante de celles-ci est comptabilisée par des écritures de fin d’année à l’égard desquelles le comptable de Omzar est resté très « évasif »; (avéré)[26]

 

dd)       les revenus de Omzar proviennent exclusivement des sociétés susmentionnées; (avéré)[27]

 

ee)       les soi-disant dépenses de Omzar sont toutes regroupées et il est impossible de déterminer pour laquelle des sociétés elles auraient été engagées ;  (avéré)[28]

 

ff)         plusieurs des dépenses qui auraient été engagées par Omzar ont comme bénéficiaire des corporations qui ont un lien de dépendance avec Omzar et Jabbar; (avéré)[29]

 

gg)       une partie infime des dépenses de Omzar a servi à l’exécution des contrats de service conclus avec les sociétés; (avéré)[30]

 

hh)       l’obtention d’une réduction de son impôt à payer en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu est la seule raison pour laquelle l’appelant est devenu membre de la Société; (avéré)

 

ii)         les membres de la Société ne se connaissent pas et ne travaillent pas activement dans la Société;  (avéré)[31]

 

jj)         la Société n’avait aucune raison d’être sauf de servir de véhicule qui génère des remboursements d’impôt et qui sert comme outil de financement pour Omzar; (avéré)

 

kk)       l’appelant est un associé qui de façon régulière, continue et importante tout au long de l’année en litige où la Société exploite habituellement son entreprise, ne prend pas une part active dans les activités de l’entreprise de la Société et n’exploite pas une entreprise semblable à celle que la Société exploite au cours de cette année; (avéré)

 

[7]   Lors de son témoignage, monsieur Rouleau a révélé qu’il était bachelier ès sciences appliquées, grade que lui avait conféré l’Université Laval en 1984. Il y était inscrit au programme de baccalauréat en informatique de génie. Après une courte période d’enseignement au Cégep de Thetford Mines, monsieur Rouleau a accepté, le 27 décembre 1984, un emploi en tant qu’informaticien de génie auprès d’UBM 2001 Inc. au salaire annuel de 20 000 $, augmenté quelques mois plus tard à 21 000 $ et a quitté cet emploi en 1985 en raison de l’avenir incertain de son employeur et de son faible salaire et il a commencé à travailler dans la fonction publique québécoise, d’abord comme occasionnel et, par la suite, comme travailleur permanent. Il a travaillé au sein de plusieurs ministères, dont le ministère des Finances de 1992 à 1998.

 

[8]   Monsieur Rouleau déclare des revenus d’environ 46 000 $ pour l’année d’imposition 1992. Sa déclaration de revenus indique comme seule autre source de revenus des revenus d’intérêt provenant de Revenu Canada et de Revenu Québec. Il a reconnu lors de son contre‑interrogatoire qu’il n’avait pas fait de placements à la Bourse. Il ne possédait pas non plus de maison ni de résidence secondaire. Il avait acheté sa voiture avec de l’argent de sa mère. Pour l’année 1993, ses seules sources de revenus sont son revenu d’emploi de tout près de 53 000 $, des revenus d’intérêt provenant de Revenu Québec et une allocation de retraite de 57,63 $.

 

[9]   Monsieur Rouleau a eu vent des abris fiscaux Omzar en apprenant que son père avait investi dans Commu‑Sys en 1991. C’est un collègue de son père, monsieur Bédard, qui avait proposé ce placement à monsieur Rouleau. Parmi ces abris fiscaux, celui de Cablotel a suscité de l’intérêt de la part de monsieur Rouleau en raison du champ de recherches. Il s’agissait d’un projet de conception et de développement d’un prototype de système télématique en vue de l’optimisation de la maintenance de réseaux de diffusion d’information télévisée dans les régions éloignées. Il a signé le formulaire de souscription de Cablotel le 10 novembre 1992 (voir pièce A‑3.)

 

[10]    Pour financer le coût d’acquisition, de 15 000 $, de sa participation dans Cablotel, monsieur Rouleau a obtenu un prêt de 7 500 $ de la Caisse populaire des fonctionnaires du Québec le 13 novembre 1992. Ce prêt a financé son débours de 7 500 $. Les autres 7 500 $ provenaient du prêt consenti par Noreco. Ce dernier prêt était garanti par un nantissement des parts de monsieur Rouleau dans Cablotel. (Voir pièce A‑2, onglet 7.) Le prêt de la Caisse populaire a été rapidement remboursé par monsieur Rouleau.

 

[11]    La documentation concernant cet abri soulignait l’importance de la participation des investisseurs et monsieur Rouleau croyait être en mesure d’y participer. Toutefois, cette participation était presque inexistante. En décembre 1992, comme monsieur Rouleau n’avait pas eu de nouvelles de Cablotel, il a communiqué avec monsieur Bédard pour s’informer si le projet avait débuté. Monsieur Bédard lui avait alors indiqué que tout allait normalement et qu’il ne fallait pas s’inquiéter. De janvier à juillet 1993, la participation de monsieur Rouleau s’est limitée à un ou deux appels téléphoniques par mois. Monsieur Rouleau a indiqué qu’il communiquait avec monsieur Bédard pour éviter des frais d’interurbain, puisqu’il habitait à Québec et que les bureaux de Cablotel et d’Omzar étaient situés à Montréal. On lui a mentionné lors d’un des appels susmentionnés qu’un rapport d’étape lui serait fourni. Ce rapport ne lui a été remis que le 20 octobre 1993. (Voir pièce A‑2, onglet 11.) Bien évidemment, monsieur Rouleau a reçu de Cablotel les états financiers et les feuillets de renseignements nécessaires pour lui permettre de remplir sa déclaration de revenus de 1992.

 

[12]    Monsieur Rouleau a confirmé qu’il n’avait pas participé à des assemblées générales des associés de Cablotel; il n’était pas au courant s’il y en avait eu. Il a aussi déclaré qu’il n’avait pas été consulté relativement à la décision de transférer, le 12 février 1993, l’établissement de Cablotel du boulevard Hamel à Québec au boulevard Métropolitain à Montréal. Monsieur Rouleau a également reconnu qu’il ne connaissait pas les autres associés de Cablotel.

 

[13]    Monsieur Rouleau semble ne s’être présenté qu’une seule fois au laboratoire d’Omzar situé à Montréal. Cette visite n’a eu lieu qu’après que Noreco eut acquis, le 16 février 1994, presque toutes les participations dans Cablotel, soit le lundi 28 février 1994[32]. Elle coïncidait avec un week‑end de ski que monsieur Rouleau a passé au Mont‑Tremblant. Il n’a passé qu’une heure à discuter du projet de Cablotel. On lui a montré certaines pièces d’équipement, mais on n’a pas été en mesure de lui faire une démonstration des résultats obtenus par le programme de R&D, prétendument en raison d’une panne d’ordinateur. Après sa visite de février 1994, monsieur Rouleau a tenté de communiquer à nouveau avec Omzar, mais sans succès parce qu’il n’y avait plus de service au numéro de téléphone de cette entreprise.

 

[14]    Monsieur Rouleau a produit un extrait en date du 6 mai 2007 de l’état des informations sur une entreprise individuelle obtenu du registraire des entreprises (système Cidreq). On y indique que monsieur Rouleau exploite une entreprise de services d’informatique. Sous la rubrique « Raison sociale », on indique « Micro Arc‑en‑ciel, date du début : 14 septembre 1989, fin : le 31 décembre 1989 ».  Sous la rubrique « État juridique », on indique que monsieur Rouleau « n’est plus en affaires ». Les explications fournies par monsieur Rouleau à l’audience ne démontrent pas l’existence d’une entreprise exploitée par lui en 1992. D’ailleurs, les seules données indicatives de l’existence d’une entreprise qui apparaissent dans sa déclaration de revenus de 1992 ne concernent que Cablotel (pièce A‑5, page 1 de la déclaration, ainsi que le feuillet T‑5013 qui y a été joint).

 

Analyse

 

[15]    Tout d’abord, quelques commentaires généraux s’imposent relativement à la qualité des différents témoignages entendus lors de l'audience, et certains extraits de ces témoignages doivent être soulignés.

 

[16]    Monsieur Caponi a livré un témoignage qui m'est apparu semblable à celui rapporté par feu le juge en chef Garon dans McKeown. J'ai été impressionné par l’étendue de sa vérification et de sa connaissance du dossier. Il a analysé les comptes bancaires et les registres comptables d’Omzar et a pu suivre à la trace les différents transferts de fonds pour conclure que c'est l'argent des investisseurs des neuf abris fiscaux Omzar qui permettait de financer, par l’intermédiaire de sociétés par actions (sociétés financières) liées à Omzar, la moitié du coût d’achat des participations des investisseurs dans ces abris. En fait, l'argent des investisseurs allait dans un abri fiscal comme Cablotel, qui le remettait par la suite à Omzar, qui l’avançait en très grande partie aux sociétés financières, notamment Noreco. Ces dernières le prêtaient à d’autres investisseurs. L'argent recueilli par une société en 1992 permettait de compléter le financement de la R&D qu'une autre société avait commencée en 1991. C'est en quelque sorte un principe semblable à celui des ventes pyramidales qui s'applique ici puisque, pour terminer un projet de R&D, il fallait absolument continuer à lever des fonds au moyen d'autres sociétés, sinon on se trouvait à court d'argent pour financer en entier le programme de R&D. Quand le fisc a découvert le pot aux roses en janvier 1993, tout le stratagème s'est écroulé. Il n'est pas surprenant d'apprendre qu’Omzar a fait faillite. (Voir le bilan de faillite en date du 6 juillet 1995, à la pièce I‑1, onglet 20.)

 

[17]    Mentionnons également que plusieurs centaines de documents ont été produits en preuve. La vérification de monsieur Caponi a permis de révéler combien peu d’attention avait été apportée au montage de ces programmes de R&D et à la réalisation des opérations par le promoteur Omzar, son personnel salarié et certains des professionnels dont les services avaient retenus. Mentionnons par exemple des documents signés par des personnes qui semblent ne pas avoir été autorisées à le faire. De plus, certaines opérations semblent avoir été effectuées avant que des opérations préalables nécessaires ne l'aient été. Ainsi Noreco a déclaré détenir toutes les participations de Cablotel, sauf une, le 15 février 1994 lorsque Cablotel vendait à Omzar la totalité de ses droits sur les résultats des travaux de R&D effectués « de janvier 1993 à janvier 1996 »[33], alors que l'acquisition de ces participations n'aurait été faite que le lendemain, le 16 février 1994[34]. Un autre exemple est le fait que le formulaire de souscription signé par monsieur Rouleau le 10 novembre 1992 est accompagné d’une copie de la convention de société qui porte la signature des deux associés initiaux en date du 10 novembre 1992, alors que, selon toute vraisemblance, la convention a dû être signée le 16 janvier 1992[35].

 

[18]    Monsieur Cusson, qui a témoigné à la demande de monsieur Rouleau et qui était un de ses co‑investisseurs dans Cablotel, a reconnu franchement qu’en ce qui concerne Cablotel seule l’intéressait l’obtention des déductions fiscales, qu'il ne s'intéressait aucunement à la R&D et qu'il n'escomptait pas tirer de bénéfices commerciaux de cette activité. Tout comme monsieur Rouleau, il avait investi 15 000 $. Il a indiqué qu'il ne pouvait pas se permettre d’exposer une telle somme dans une entreprise aussi risquée. Il savait que sa participation serait rachetée pour 7 500 $ quelques mois plus tard — évidemment, ce n’était pas une certitude, mais cela s’était déjà passé dans son cas — ce qui allait annuler son emprunt de 7 500 $ obtenu de Noreco. Son bénéfice serait alors réalisé grâce à un remboursement d'impôt supérieur à son propre débours net.

 

[19]    Monsieur Cusson avait participé déjà à de tels abris fiscaux de 1989 à 1993. Non seulement il avait obtenu son remboursement d'impôt, mais il y avait également eu rachat de sa participation dans ses abris au prix convenu d'avance. Il est à noter que dans le cas de son premier placement, effectué en 1989, monsieur  Cusson avait déboursé 100 % du coût du placement en décembre 1989, mais il était allé chercher lui‑même, quelques semaines plus tard, soit en janvier 1990, le chèque correspondant au rachat à 50 % de ce coût.

 

[20]    Monsieur Cusson ne connaissait pas les autres associés de Cablotel, à part certains collègues de son bureau qui avaient également investi dans cet abri. Il n'avait participé à la prise d’aucune décision lors d'assemblées des associés de Cablotel. Comme monsieur Loranger avait été nommé gestionnaire de Cablotel, cela libérait monsieur Cusson et les autres associés, de cette tâche. Il a reconnu qu'il n'avait pas visité le laboratoire d’Omzar, à laquelle Cablotel avait confié les deux millions de dollars qu'elle avait recueillis.

 

[21]    Monsieur Cusson a indiqué qu'il avait répondu à un très court questionnaire que les promoteurs faisaient remplir pour démontrer que les associés participaient aux activités de la société de façon continue, régulière et importante, mais il n'était pas certain s'il avait reçu ce questionnaire après la transmission du contrat de cession pour le rachat de ses parts en septembre 1993. Monsieur Cusson a fait ce commentaire : « Plus rien ne me surprend dans ce projet-là. » Il faut ajouter que la lettre de bienvenue aux associés de Cablotel n'avait été envoyée qu'en juillet 1993, huit ou neuf mois après la souscription[36].

 

[22]    Monsieur Cusson n'avait pas vérifié de quelle façon l'argent avait été dépensé par Cablotel ou Omzar. Il n'avait pas vérifié non plus si le prix de rachat, égal à 50 % du coût de souscription, représentait la JVM de sa participation dans Cablotel. Il a reconnu toutefois qu'il n'avait jamais pensé que cela pouvait valoir plus que le prix offert et il n'a pas négocié ce prix. Monsieur Cusson a accepté le règlement offert en 1995 par le ministre et il a reconnu qu'il avait été naïf et imprudent lors de son placement dans Cablotel.

 

[23]    Monsieur Rouleau avait les mêmes informations que monsieur Cusson relatifs au rachat de ses parts. Il a produit sous la cote A‑2, à l'onglet 5, le scénario que lui avait proposé monsieur Bédard, son conseiller en placements. Voici un extrait de ce scénario :

 

Avec une participation de :

                  $15,000

 

 

 

 

Il y aura un retour de :

comme 1er droit de refus.

                   $ 7,500

 

 

 

 

S’il y a emprunt, le coût des intérêts

jusqu’à mai 93 sera :

 

                      $ 313

 

 

 

 

Coût net avec emprunt :

                   $ 7,813

 

 

 

 

Il y aura économie d’impôt de :

                  $10,434

 

 

 

 

 

+ un crédit d’impôt fédéral de :

reportable sur des années antérieures.

                           $0

 

 

 

 

Retour d’impôt

                  $10,434

 

 

 

 

Profit sans emprunt

                      2,934

 

 

                               

 

Profit avec emprunt

                      2,622

 

 

                               

 

 

[24]    Monsieur Bédard avait lui‑même investi en 1990 dans un des abris fiscaux Omzar, soit Dreyfus Bio‑Systems. Sa participation dans cette société avait été rachetée, comme cela avait été prévu avant qu’il n’effectue son placement. Il a indiqué qu'il n'était intéressé que par le remboursement d'impôt et non par les résultats de la R&D. Il se foutait de l'aspect commercial. Monsieur Bédard a reçu des commissions de 3 % pour la vente de participations dans Cablotel. Il a aussi confirmé que Noreco avait consenti des prêts à tous les investisseurs dans Cablotel. Selon lui, personne ne s’était vu refuser.

 

[25]    Compte tenu des conclusions de fait décrites plus haut, j'adopterai en très grande partie l’approche de feu le juge en chef Garon dans McKeown. Dans cette affaire‑là, le juge Garon s'est d'abord posé la question suivante : est-ce que Cablotel constituait une société de personnes? Il a répondu par la négative puisque « les investisseurs en cause ne recherchaient que l'obtention d'avantages fiscaux importants et qu'ils n'ont jamais manifesté l'intention de travailler en commun à la poursuite d'activités de recherche scientifique et de développement expérimental. Bref, ils n'avaient pas l'intention de constituer une véritable société » (par. 393 de ses motifs). À mon avis, cette question mériterait davantage de réflexion pour que je puisse me prononcer. Par contre, comme le juge en chef Garon l'a conclu aux paragraphes 394 et suivants, je conclus que Cablotel n’exploitait aucune entreprise :

 

394 Au surplus, aucune entreprise n'a été exploitée par l'appelant ni par les groupements Commu-Sys Enr. et Cablotel Enr. relativement à la poursuite des travaux de recherche. La présente affaire ressemble à l'espèce Bendall v. The Queen, précitée, où le juge Bonner formulait les commentaires suivants :

 

[Traduction]

La question en litige est de savoir si l'appelant exploitait une « entreprise » au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi »). Il faut donner à ce terme son sens ordinaire et ce sens n'inclut pas un projet d'évitement fiscal, qui n'est rien de plus qu'une pâle imitation d'une entreprise. L'appelant ne participait pas à une activité commerciale, que ce soit directement ou par l'entremise d'Omni, son mandataire. La preuve objective concernant la manière dont le projet fonctionnait ainsi que les actes et les omissions des parties portent nettement à conclure que l'appelant et les auteurs du projet n'étaient pas intéressés à commercialiser les cours de lecture rapide et à tirer des profits de cette activité. Il est indubitable que ce qui était recherché, c'était une déduction d'impôt donnant lieu à un remboursement qui irait en partie aux auteurs du projet et en partie à l'appelant.

[Note infrapaginale omise.]

 

395 Dans la présente cause, il n'y a eu aucune démarche ou demande quelconque pour s'assurer de la rentabilité du projet. Je ne peux déceler aucun indice laissant entrevoir une possibilité de rentabilité dans le cas de ces groupements. Aucune étude du marché n'avait été faite. Aucun plan de commercialisation n'avait été mis sur pied. De plus, la structure mise en place a été montée uniquement à des fins fiscales, comme l'a d'ailleurs démontré le « Programme de participation » créé uniquement pour donner l'illusion de répondre aux critères du gouvernement.

 

[26]    J'ajouterai également ces commentaires que j'ai écrits dans l'affaire Waxman c. Canada, [1996] A.C.I. no 1689 (QL), [1997] 2 C.T.C. 2723, aux paragraphes 47 à 50, et qui s'appliquent de façon semblable ici :

 

47   Il est manifeste que Ferme Rompré avait un intérêt à obtenir les résultats de la R.S. pour améliorer la gestion de son propre cheptel. Je n'ai aucun doute que le programme de R.S., s'il avait été mené par Ferme Rompré, se serait rapporté à son entreprise. Le seul but d'Agriboeuf, il me semble, était de réaliser des projets de R.S. et de passer ses coûts aux commanditaires pour qu'ils les déduisent dans le calcul de leur revenu fiscal.  La Loi prévoit des mesures incitatives pour encourager la R.S. et il est possible qu'une société en commandite puisse engager de telles dépenses dont la déduction pourra être réclamée par les commanditaires. Toutefois, et la réserve est importante, toutes les conditions de la Loi doivent être remplies et ceux qui mettent sur pied de tels montages financiers doivent s'assurer qu'ils respectent non seulement l'esprit de la Loi, mais aussi la lettre de la Loi.

 

48   Je ne crois pas que les commanditaires avaient l'intention d'exploiter, par l'intermédiaire d'Agriboeuf, une entreprise agricole ou de partager dans le produit de la vente des résultats de la R.S. Il n'est pas certain, de toute façon, qu'il y ait eu un marché pour les résultats de ce genre de recherche.  Leur seul intérêt était la déduction pour fins fiscales des dépenses de R.S. et le prix de vente de leurs parts à 150 $ par part.

 

49   S'il avait été établi qu'Agriboeuf n'avait pas exploité une entreprise, non seulement les dépenses de R.S. n'auraient pas été admissibles aux fins de l'article 37 et, par ricochet, pour les fins du crédit d'impôt à l'investissement, mais il est possible que la société en commandite n'ait pas été validement constituée. Une des conditions essentielles à la formation d'une société est qu'elle « soit pour le bénéfice commun des associés » (art. 1830 Code civil du Bas Canada).  Ici, on peut s'interroger sur le fait de savoir si la société avait vraiment l'intention de réaliser un bénéfice pour ses associés. À titre d'illustration à l'égard d'une société en commandite établie dans une province de Common Law, voir la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans Continental Bank Leasing Corporation and Continental Bank of Canada v. The Queen, 96 DTC 6355.

 

50   En conclusion, il est possible qu'Agriboeuf n'ait pas exploité une entreprise agricole en 1987.  Toutefois, puisqu'il y a eu admission de la part du ministre dans sa réponse qu'Agriboeuf en exploitait une, les appelants n'avaient pas à mettre en preuve des faits qui auraient pu me convaincre qu'Agriboeuf exploitait réellement une telle entreprise. Il n'est donc pas approprié dans ces circonstances de conclure qu'Agriboeuf n'exploitait pas une entreprise agricole. Les appelants ont donc réussi dans la tâche qui était la leur, à savoir, établir que les dépenses de R.S. qu'Agriboeuf a engagées et que le ministre a refusées étaient toutes attribuables, en totalité ou presque, à de la R.S.

 

[27]    Pour qu’un contribuable ait droit aux déductions de R&D en vertu de l'article 37 de la Loi[37], il faut qu'il exploite une entreprise et il faut, en plus, que les dépenses de R&D aient un rapport avec une entreprise du contribuable. Or, Cablotel n'exploitait aucune entreprise, car elle n’avait été constituée que pour transférer les déductions fiscales de R&D aux investisseurs, et elle n'avait aucune intention d’exploiter une entreprise, qu’il s’agisse d'exploiter un système de câble, de revendre à profit sa technologie ou de donner un droit de l’utiliser en contrepartie de redevances. En outre, monsieur Rouleau n’exploitait personnellement aucune entreprise non plus. 

 

[28]    Monsieur Rouleau a tort de soutenir que Cablotel exploitait une entreprise en 1992, puisque la conduite d’Omzar en ce qui concerne les différents abris fiscaux qu’elle avait mis en place année après année, de 1990 à 1992, était toujours la même. On rachetait automatiquement, sans égard à la JVM, les participations des investisseurs dans les abris, avant même de terminer les programmes de R&D. À mon avis, jamais les abris fiscaux Omzar, y compris Cablotel, n'ont eu l'intention de revendre dans un cadre commercial normal les droits qu'ils pouvaient avoir obtenus dans le cadre de leur programme de R&D. Il ne s'agissait que d'un simple mécanisme de transfert des déductions fiscales aux investisseurs tout en laissant les résultats de la R&D à l'entité pour laquelle ils pouvaient présenter un intérêt commercial, peut‑être Omzar. Par conséquent, Cablotel n'a pas satisfait aux conditions requises à l’article 37 de la Loi pour pouvoir déduire les dépenses de R&D, et ses associés n’avaient aucun droit à la déduction des pertes fiscales attribuables à ces dépenses, en raison de l'alinéa 96(1)g) de la Loi[38], et, en ce qui a trait au CII, il n’y avaient pas droit en raison du paragraphe 127(8) de la Loi[39] qui calcule le CII d’un associé d’une société en fonction des « dépenses admissibles » de la société, à savoir les dépenses de R&D visées à l'alinéa 37(1)a) ou au sous‑alinéa 37(1)b)(i) de la Loi.

 

[29]    Même si je m'étais trompé en droit en concluant à l'inexistence d'une entreprise exploitée par Cablotel et même si l’on tenait pour acquis que Cablotel était une véritable société de personnes, l'appel de monsieur Rouleau ne pourrait pas être accueilli, parce qu'il était un associé commanditaire au sens des paragraphes 96(2.2) et (2.4) de la Loi. Là aussi, j'adopte la même analyse que celle du juge en chef Garon dans McKeown :

 

403 D'après les plaidoiries des parties et la preuve, l'appelant ne peut être considéré comme un associé commanditaire dans les deux sociétés en question selon la Loi de l'impôt sur le revenu que si les dispositions du paragraphe 96(2.4) de la Loi peuvent lui être applicables. Le paragraphe 96(2.4) se lit ainsi:

 

(2.4) Pour l'application du présent article et des articles 111 et 127, le contribuable qui est, à une date donnée, associé commanditaire d'une société en commandite ou associé d'une autre société de personnes est commanditaire ou assimilé de cette société si son intérêt dans celle-ci n'est pas, à cette date, un intérêt exonéré au sens du paragraphe (2.5) et si, à cette date ou dans les trois ans suivants,

a) sa responsabilité comme associé est limitée par la loi qui régit le contrat de société;

b) le contribuable ou une personne avec qui il a un lien de dépendance a droit de recevoir un montant ou avantage visé à l'alinéa (2.2)d) abstraction faite des sous-alinéas (2.2)d)(ii) et (vi);

c)  il est raisonnable de considérer que le contribuable qui a l'intérêt en question existe, entre autres,

(i) pour limiter la responsabilité d'une autre personne, liée à cet intérêt, et

(ii) non pour permettre à une personne qui a un intérêt chez le contribuable d'exploiter son entreprise — à l'exclusion d'une entreprise de placements — de la manière la plus efficace; ou

d) il existe une convention ou un autre mécanisme prévoyant la disposition d'un intérêt dans la société et dont il est raisonnable de considérer qu'un des principaux objets consiste à tenter de soustraire le contribuable à l'application du présent paragraphe.

 

404 Tout d'abord, une personne qui a un intérêt exonéré n'est pas un associé commanditaire. On n'a pas prétendu que l'intérêt que l'appelant pouvait avoir dans ces sociétés était un intérêt exonéré au sens du paragraphe 96(2.5) de la Loi. Les alinéas a), b), c) et d) du paragraphe 96(2.4) de la Loi sont les seuls susceptibles d'être applicables à l'appelant.

 

405 Il s'ensuit qu'un associé est un associé commanditaire à une date quelconque si, à cette date ou dans les trois ans après cette date, l'une ou plusieurs des conditions prévues aux alinéas a), b), c) et d) du paragraphe 96(2.4) de la Loi sont remplies.

 

406 Dans le présent cas, eu égard aux faits de cette affaire, il ne me paraît nécessaire que de considérer l'application de l'alinéa 96(2.4)b). Cet alinéa renvoie à l'alinéa 96(2.2)d) tout en commandant toutefois de faire abstraction des sous-alinéas 96(2.2)d)(ii) et 96(2.2)d)(vi).

 

407 La partie pertinente de l'alinéa 96(2.2)d) de la Loi se lit ainsi :

 

96(2.2) Pour l'application du présent article ... la fraction à risques de l'intérêt d'un contribuable dans une société dont il est commanditaire ou assimilé à une date donnée correspond à l'excédent éventuel du total:

...

d) le montant ou l'avantage que le contribuable ... a le droit, immédiat ou futur et conditionnel ou non, de recevoir  —  sous forme de remboursement, compensation, garantie de recettes, produit de disposition ou autre  —  et qui est accordé en vue de supprimer ou réduire l'effet d'une perte dont le contribuable serait tenu en tant qu'associé de la société ou du fait qu'il a un intérêt dans la société ou qu'il en dispose, sauf si ... ce droit résulte :

...

(iv)    d'une convention permettant au contribuable de disposer de son intérêt dans la société pour un montant qui ne dépasse pas sa juste valeur marchande  —  déterminée indépendamment de la convention  —  à la date de la disposition.

 

Si on lit les alinéas 96(2.4)b) et 96(2.2)d) (avec la restriction dans le cas de l'alinéa 96(2.2)d) que je viens d'indiquer) il s'ensuit qu'un associé est assimilé à un associé commanditaire lorsqu'il possède, à la date en question ou dans les trois ans qui suivent, un droit de recevoir sous une forme quelconque un montant ou un avantage visé à l'alinéa 96(2.2)d), si ce montant ou cet avantage est accordé « en vue de supprimer ou réduire l'effet d'une perte dont le contribuable serait tenu en tant qu'associé de la société ou du fait qu'il a un intérêt dans la société ou qu'il en dispose ».

 

408 Selon l'intimée, l'appelant avait un tel droit puisqu'il « était prévu et planifié, au moins tacitement, que les investisseurs disposeraient de leurs parts à un montant fixe supérieur à la juste valeur marchande de celles-ci, déterminé d'avance indépendamment de la valeur à la date de disposition ». Toutefois, l'appelant a affirmé qu'aucune présentation ne lui avait été faite, avant ou lors de l'acquisition des parts, dans les groupements Commu-Sys Enr. et Cablotel Enr. selon laquelle ses parts seraient rachetées. Il a aussi témoigné qu'à la fin de l'été 1993 il a reçu de Loron Inc. une offre d'achat de ses parts dans Commu-Sys Enr. ainsi qu'une offre de Noreco Inc. d'acheter ses parts de Cablotel Enr. Les conventions de cession des parts en question par l'appelant en faveur de Loron Inc. et Noreco Inc. respectivement sont en date du 20 décembre 1993 et du 16 février 1994. Je reproduis ci‑après les clauses principales de la convention de cession entre l'appelant et Loron Inc., la convention de cession de l'appelant avec Noreco Inc. étant identique à toutes fins utiles :

 

CONVENTION DE CESSION INTERVENUE CE 20IÈME JOUR DE DÉCEMBRE 1993

[...]

1.    Je, soussigné(e) associé(e) de la société « Commu-Sys » (ci‑après la « Société »), vend, cède et transfère par les présentes à:

 

Loron Inc., 6555 boul. Métropolitain est, suite 502, St-Léonard, Québec H1P 3[sic]3 (le Cessionnaire) 250 parts dans la Société, représentant tous mes droits et intérêts à titre d'associé(e) de la Société y compris notamment mais non limitativement, tous les droits dans la propriété intellectuelle découlant du projet de recherche et de développement effectué pour le compte de la Société, les droits d'exploitation et de commercialisation de tout résultat issu de ce projet et je consens et m'engage à signer et à remettre, au Cessionnaire, tout document nécessaire ou utile pour effectuer un transfert valide desdites parts et de tout [sic] les droits y afférent [sic].

 

2.    La présente vente est consentie pour une somme de douze mille cinq cents dollars (12,500.00 $), représentant, au meilleur de la connaissance des parties, la juste valeur marchande des parts vendues, la considération susmentionnée étant payable comme suit :

réduction, par voie de compensation, d'un prêt consenti par le Cessionnaire au Cédant: tel prêt ayant été constaté par document écrit portant la date du 20 décembre 1991.

 

3.    Déclaration et garantie du Cédant

 

Le Cédant déclare et garantit au Cessionnaire: qu'il est le seul et unique propriétaire des parts cédées aux termes des présentes, en vertu d'un titre de propriété clair et absolu, lui permettant de les transférer au Cessionnaire franc et quitte de tout [sic] option, de tout gage, nantissement ou autre sûreté quelle qu'elle soit.

 

4.    [...]

 

5.    [...]

 

409 Étant donné les faits relatifs au présent litige, je dois déterminer si le rachat des parts que l'appelant possédait dans les deux groupements Commu-Sys Enr. et Cablotel Enr. par les deux compagnies de financement Loron Inc. et Noreco Inc. en contrepartie de l'annulation des dettes de l'appelant découlant des prêts consentis par ces mêmes deux compagnies pouvait constituer un montant ou un avantage pour l'appelant selon les alinéas 96(2.4)b) et 96(2.2)d) de la Loi. L'extinction des dettes de l'appelant à l'égard des deux compagnies de financement aurait pu constituer pour lui un avantage s'il était possible que ces parts dans les groupements Commu-Sys Enr. et Cablotel Enr. aient une valeur inférieure aux dettes en question.

 

410 La règle posée à l'alinéa 96(2.2)d) de la Loi souffre cependant des exceptions. L'attention du tribunal n'a été attirée que sur le sous-alinéa (iv) de cet alinéa, que je cite de nouveau pour faciliter l'analyse :

 

(iv) d'une convention permettant au contribuable de disposer de son intérêt dans la société pour un montant qui ne dépasse pas sa juste valeur marchande  —  déterminée indépendamment de la convention  —  à la date de la disposition.

 

411 Il est donc nécessaire de se demander si la convention de cession en date du 20 décembre 1993 entre l'appelant et Loron Inc. et la convention de cession en date du 16 février 1994 entre l'appelant et Noreco Inc. permettaient à l'appelant de disposer de ses parts dans les groupements Commu-Sys Enr. et Cablotel Enr. pour un montant qui pourrait dépasser leur valeur marchande lors de leur disposition.

 

412 La réponse à cette question doit être dans l'affirmative. En effet, ces conventions permettaient à l'appelant de disposer de ses parts dans les groupements Commu-Sys Enr. et Cablotel Enr. pour une contrepartie  —  le mot « montant » utilisé dans le sous-alinéa 96(2.2)d)(iv) ayant un sens très large vu la définition figurant au paragraphe 248(1) de la Loi — qui pouvait excéder leur valeur marchande au jour de leur disposition. Les conventions prévoyaient comme contrepartie de la disposition des parts de l'appelant l'extinction des deux dettes (résultant des prêts effectués par Loron Inc. et Noreco Inc.) dont le montant du principal totalisait 25 500 $. Le texte de ces conventions ne prévoyait aucun mécanisme d'évaluation des parts de l'appelant. Elles n'établissaient pas non plus un plafond qui aurait pu être la juste valeur marchande au jour de leur disposition. La simple déclaration par les parties dans chacune des conventions que la vente des parts était consentie pour la somme indiquée « représentant, au meilleur de la connaissance des parties, la juste valeur marchande des parts vendues » n'équivaut pas à l'établissement d'un plafond axé sur la valeur marchande de ces parts. On ne prévoit pas l'existence d'une obligation de remboursement de tout excédent de la part de l'appelant dans le cas où il serait déterminé en dernière analyse par l'autorité compétente que le montant indiqué dans l'une ou l'autre des conventions excédait la valeur marchande des parts dont il est question dans la convention concernée. Il était donc possible qu'en vertu de ces conventions la contrepartie reçue pour la disposition des parts de l'appelant puisse dépasser leur valeur marchande au moment de leur disposition.

 

413 Je ne crois pas que j'aie à considérer si en fait dans la présente affaire la contrepartie reçue par l'appelant le 20 décembre 1993 et le 16 février 1994 — c'est-à-dire l'extinction de ses dettes à l'égard de Loron Inc. et Noreco Inc. — était supérieure à la valeur marchande des parts dont il a disposé. Je dois être guidé uniquement par le texte de ces conventions qui n'empêchait pas à mon avis, un dépassement possible de la contrepartie par rapport à la valeur marchande des parts de l'appelant au moment de leur disposition.

 

414 Je suis donc d'avis que l'exception figurant au sous‑alinéa 96(2.2)d)(iv) de la Loi ne peut être invoqué [sic] par l'appelant dans le présent cas.

 

[… ]

 

416 J'arrive donc à la conclusion que l'appelant doit être considéré comme un associé commanditaire au sens des alinéas 96(2.4)b) et 96(2.2)d). Je n'ai donc pas à examiner l'application des autres alinéas du paragraphe 96(2.4) de la Loi.

 

[Je souligne.]

 

[30]    Comme monsieur Rouleau  prétend que sa situation était différente de celle de monsieur McKeown, je dois commenter les arguments qu’il a invoqués. D'abord, il soutient qu'il n'a jamais vendu sa participation dans Cablotel et qu'il n'est pas visé par la définition de la notion de commanditaire au paragraphe 96(2.4) de la Loi.

 

[31]    Cet argument m’apparaît mal fondé pour plusieurs raisons. D’abord, je crois qu'on peut inférer de sa conduite et de celle de Noreco qu'il avait tacitement accepté la vente de sa participation dans Cablotel à Noreco, même s'il n'a pas signé le contrat de cession. Les faits qui m'amènent à conclure ainsi sont les suivants. Monsieur Rouleau n'a jamais payé d’intérêts sur le prêt que lui avait consenti Noreco, à part ceux payés par anticipation lors de sa souscription. Il n'a jamais remboursé à Noreco le prêt de 7 500 $, qui aurait dû être entièrement remboursé au plus tard en 2003, alors qu’il a remboursé celui que lui avait accordé la Caisse populaire. Noreco ne lui a jamais réclamé le paiement des intérêts pour la période subséquente aux deux premiers mois ni le remboursement du prêt lui-même de 7 500 $. Elle considérait avoir acquis la participation de monsieur Rouleau dans Cablotel, participation qui lui avait été nantie d’ailleurs. (Voir note 17 ci‑dessus.) En outre, monsieur Rouleau n'a entrepris aucune démarche sérieuse pour réclamer sa part du produit de la vente à Omzar des droits sur les résultats de la R&D effectuée par Cablotel. S’il l’avait fait, il n’aurait eu droit qu’à un montant égal à celui de son emprunt et il y aurait eu alors compensation.

 

[32]    Même si je me trompe en fait et en droit en concluant que monsieur Rouleau avait tacitement accepté la vente de sa participation, je crois néanmoins que cela ne change rien en ce qui concerne l'application des dispositions pertinentes, à savoir celles des paragraphes 96(2.4) et (2.2) de la Loi. Ce qui importe, c'est de savoir si monsieur Rouleau avait, en 1992 ou dans les trois années qui ont suivi, un droit de recevoir un avantage au sens des paragraphes 96(2.4) et (2.2) de la Loi. Je rappellerai ici le passage pertinent du paragraphe 96(2.4) : « le contribuable [monsieur Rouleau] qui est, à un moment donné, un associé d'une société de personnes [Cablotel] est commanditaire [...] si, à ce moment ou dans les trois ans suivants [le contribuable], a le droit [...] de recevoir un montant ou un avantage qui serait visé à l’alinéa (2.2)d) [de la Loi] ». L'avantage dont il est question à cet alinéa est « l'avantage que le contribuable [...] a le droit, immédiat ou futur et conditionnel ou non, de recevoir  —  sous forme de remboursement, compensation, garantie de recettes, produit de disposition ou autre  —  et qui est accordé en vue de supprimer ou réduire l'effet d'une perte dont le contribuable serait tenu en tant qu'associé de la société ».

 

[33]    À mon avis, monsieur Rouleau avait non seulement le droit de recevoir un tel avantage, mais il l’a reçu, ce qui lui a permis de limiter l’effet de la perte qu’a entraînée sa participation dans Cablotel. Compte tenu du montage qui avait été mis en place, je n'ai aucun doute que l'intention d’Omzar et de Noreco était de faire en sorte que monsieur Rouleau ne soit pas tenu de rembourser le prêt consenti par Noreco, une société liée à Omzar. Le mécanisme prévu pour atteindre cet objectif était d’éteindre le prêt de monsieur Rouleau, comme celui de tous les autres investisseurs, par le rachat de sa participation à un prix égal au montant de ce prêt. Il avait le droit de recevoir cet avantage. Tout ce qu’il devait faire était de signer le contrat de cession. Or, pour des raisons qui sont les siennes, monsieur Rouleau a refusé de le signer.

 

[34]    En outre, l’avantage n’a pas à prendre la forme d’un « produit de disposition ». L’alinéa 96(2.2)d) de la Loi spécifie que l’avantage peut revêtir une « autre » forme. Ici, monsieur Rouleau a joui du même avantage que les autres assiociés de Cablotel, qui ont signé le contrat de cession, soit la libération de l’obligation de rembourser le prêt, libération qu’accordait Noreco pour limiter l’effet de la perte résultant de l’acquisition d’une participation dans Cablotel. Jamais on ne lui a réclamé le remboursement de ce prêt et je suis convaincu qu’il n’aura jamais à le rembourser. Voilà la forme de l’avantage qu’a reçu monsieur Rouleau.  Dans l’esprit des concepteurs et des promoteurs de ce montage fiscal, ce n’est pas l’absence d’une signature sur un contrat qui allait faire perdre l’avantage qu’était la libération de l’obligation de rembourser le prêt, qu’ils offraient à tous les investisseurs. Dans les faits, monsieur Rouleau n’a jamais eu à financer plus que la moitié de sa perte et c’est là l’abus que les dispositions de l’article 96 de la Loi visent à enrayer. J'en arrive à la conclusion que toutes les conditions sont remplies pour pouvoir conclure que monsieur Rouleau était un commanditaire de Cablotel aux fins de la Loi.

 

[35]    Le fait d'être un associé commanditaire de Cablotel vient empêcher monsieur Rouleau de se prévaloir du droit de déduire sa part de la perte subie par cet abri fiscal et qui est attribuable à la R&D. Or, toute la perte est attribuable à de la R&D. Ainsi, il n'a droit à la déduction d’aucun montant de perte. Il en est de même en ce qui a trait au CII [40].

 

[36]    Pour ce qui est du CII, il existe un motif additionnel pour conclure à l'absence du droit de monsieur Rouleau de le déduire. En effet, il était également un associé déterminé passif de Cablotel aux fins du paragraphe 127(8) de la Loi; par conséquent, il ne peut déduire sa part du montant de CII qui aurait pu être déterminé à l’égard de cette société. Pour ne pas être considéré comme un associé déterminé passif[41], il aurait fallu que monsieur Rouleau établisse, selon la prépondérance des probabilités, qu'il avait pris une part active aux activités de Cablotel de façon continue, régulière et importante.

 

[37]    Comme l'a conclu également feu le juge en chef Garon dans McKeown, la participation des associés de la société Cablotel était très symbolique dans le meilleur des scénarios et il m'apparaît clair que cette conclusion s’applique également à monsieur Rouleau. En outre, je crois que l'intention du législateur lorsqu'il a adopté la définition de « associé déterminé » aux fins du calcul du CII était d’empêcher que des sociétés de personnes constituées comme abris fiscaux ne puissent bénéficier de ce CII.

 

[38]    Invoquer le fait qu'il n'y avait que peu d’activité chez Cablotel comme justification possible de l'absence d'activité de monsieur Rouleau m'apparaît aller tout à fait à l'encontre de l'esprit de la Loi. En fait, pour être exclu de la notion d'associé déterminé passif, il faut démontrer qu'on a été actif, et s'il n'y avait aucune raison d'être actif, voilà des circonstances dans lesquelles le but de la disposition est rempli. Je n'ai aucun doute que monsieur Rouleau était un associé déterminé passif aux fins du CII et c’est ce que je conclus.

 

[39]    On pourrait avoir des doutes quant à la nature de certaines des dépenses engagées par Cablotel et quant à leur admissibilité en vertu de l’article 37 de la Loi, mais compte tenu du fait que monsieur Rouleau n'a droit à la déduction d’aucune de ces dépenses, qu'elles aient été engagées ou pas, et qu'elles soient admissibles ou pas, j'en viens à la conclusion que l'appel de monsieur Rouleau doit être rejeté.

 

Pénalité de l’art. 179.1 de la Loi et dépens pour abus de procédure

 

[40]    Selon les avocats de l’intimée, monsieur Rouleau savait qu’il avait une dette fiscale importante qui demeurait toujours impayée. Il savait également que les mesures de recouvrement étaient suspendues tant qu'il y avait un appel pendant. Il n’a lu qu’une partie de la décision McKeown, celle qui s'appliquait directement à son cas. Il a reconnu avoir reçu la jurisprudence que des avocats du ministère de la Justice lui avaient transmise, notamment les décisions Brillon (2006 CCI 76, 2006 DTC 2340 (fr.)), Boudreault (2005 DTC 1650 (fr.), 2005 CCI 660) et Maslanka (2004 DTC 2933, 2004 CCI 158) qu’il n’a pas lues, car elles lui étaient défavorables.

 

[41]    Ces mêmes avocats soutiennent qu’une semaine avant l’audition de l’appel de monsieur Rouleau, ce dernier affirmait qu'il avait des faits à faire valoir sur le degré de sa participation aux activités de Cablotel. Des associés de cette société sont venus témoigner à la Cour à sa demande. Leurs témoignages selon les avocats de l’intimée ont été préjudiciables à monsieur Rouleau. En outre, soutiennent-ils, monsieur Cusson a reconnu qu'il réalisait maintenant les subtilités de la Loi et a dit qu'après avoir pris conseil auprès d’un conseiller indépendant, il avait décidé de régler son dossier. Il s’agissait là, selon eux, d’une évaluation objective de son dossier. L’absence d'une telle évaluation objective de la part de monsieur Rouleau et son comportement à l’égard de l'acquittement de sa dette fiscale « ne laisse place à aucun autre doute qu'il s'est servi de cette Cour un peu comme un stationnement, que son appel était en attente puisque les mesures de recouvrement étaient suspendues et que ça faisait son affaire ». Ces avocats d’ajouter : « il s'est peut‑être dit :Je n'ai pas grand-chose à perdre que de venir à la Cour, je vais y aller” ». Les avocats de l’intimée soutiennent qu’il «  reste beaucoup de dossiers comme celui de monsieur Rouleau qui sont devant cette Cour et nous estimons que le temps est venu [] d'indiquer aux appelants que s'ils ne présentent pas de preuve, et c'est ce que nous lui avions écrit [qu’il devait] présenter de la preuve sur des aspects importants [et voilà qu’il] se présente ici [] sans être au courant de la jurisprudence très pertinente [] il devrait, je crois, être susceptible soit d'être condamné aux frais ou soit d'être [assujetti à l’application de] l'article 179.1 ».

 

[42]    Ces avocats ont cité également l'arrêt Fournier[42] de la Cour d’appel fédérale, dans lequel ladite cour reconnaît à notre Cour le pouvoir d’accorder des dépens à l’intimée quand un contribuable commet un abus de procédure. Dans cet arrêt, il était question « d'entêtement outrancier ». Selon les avocats de l’intimée, l'abus en l’espèce a été que monsieur Rouleau a fait témoigner des personnes dont les témoignages ont été préjudiciables à sa cause. Il y a eu également des demandes, faites à répétition et à la dernière minute, de modifications de l’avis d’appel et de remise de l’audience pour avoir plus de temps pour se préparer.

 

[43]    Il ne fait pas de doute que monsieur Rouleau aurait fait mieux d’accepter le règlement que le ministre a offert le 8 décembre 1995 à lui et à tous les investisseurs dans ce genre d’abri fiscal de R&D (pièce A‑6). Je m’explique mal qu’il ne l’ait pas fait. Par contre, je ne crois pas  qu’il y ait lieu d’appliquer la pénalité prévue par l’article 179.1 de la Loi, qui édicte :

 

179.1 Appel non fondé — Lorsque la Cour canadienne de l'impôt se prononce sur un appel interjeté par un contribuable à l'égard d'un montant payable en vertu de la présente partie ou lorsqu'il y a désistement ou rejet sans procès de l'appel, la cour peut, sur demande du ministre et qu'elle accorde ou non des dépens, ordonner au contribuable de verser au receveur général un montant ne dépassant pas 10 % de toute partie de la somme en litige à l'égard de laquelle elle juge que l'appel n'était pas raisonnablement fondé, si la cour est d'avis qu'une des principales raisons pour lesquelles une partie quelconque de l'appel a été interjetée ou poursuivie était de reporter le paiement d'un montant payable en vertu de la présente partie. 

[Je souligne.]

 

[44]    Pour une raison que je ne peux m’expliquer, monsieur Rouleau, comme de nombreux contribuables qui ont investi dans des abris fiscaux comme Cablotel, est incapable d’accepter qu’il a été trompé par des promoteurs qui ont été soit malhonnêtes, soit incompétents ou ont manqué de discernement. Ces projets n’auraient jamais dû être offerts à des investisseurs ordinaires comme lui. Le fait que la vente au public des participations en question n’ait pas reçu l’aval de la Commission des valeurs mobilières du Québec aurait dû les alerter. En tout état de cause, monsieur Rouleau continue à croire, obnubilé par sa conviction, qu’il a droit à ses déductions fiscales. Il aurait même pris un congé sans solde d’environ six semaines pour préparer l’audition de son appel. Monsieur Rouleau se représentait lui-même et la complexité des dispositions pertinentes de la Loi l’empêche peut-être d’évaluer correctement le bien-fondé de sa position. Quoi qu’il en soit, je lui donne le bénéfice du doute quant aux motifs qui l’animent dans sa démarche. Je ne suis pas convaincu qu'une des principales raisons d'avoir ainsi persisté était de reporter le paiement de ses impôts. Les intérêts continuent à courir, comme il l’a mentionné, et plus le remboursement de sa dette fiscale est retardé plus son fardeau fiscal augmente. Par conséquent, je vais rejeter la demande de l’intimée d’imposer la pénalité de l’article 179.1 de la Loi.

 

[45]    De plus, comme il s’agit d’une procédure informelle et qu'il n'y a pas eu d'abus manifeste de procédure, il n'y a pas lieu d’accorder non plus de dépens à l’intimée. Cela ne veut pas dire que je ne crois pas qu’il y ait eu ici une certaine forme d’abus du système judiciaire, puisqu’un appel semblable à celui de monsieur Rouleau, soit celui de monsieur McKeown, a été entendu pendant 33 jours et celui de monsieur Rouleau a nécessité cinq jours. L’appelant n’a obtenu gain de cause dans ni l’un ni l’autre cas. On aurait probablement dû réunir les deux appels pour éviter que le ministre soit tenu de présenter deux fois une preuve longue et détaillée justifiant sa cotisation. D’autres solutions auraient peut-être pu atteindre l’objectif d’une administration plus efficace de la justice. Toutefois, pénaliser monsieur Rouleau soit en appliquant l’article 179.1, soit en le condamnant aux dépens, ne m’apparaît pas approprié ici.

 

[46]    Pour tous ces motifs, l’appel de monsieur Rouleau est rejeté, sans dépens.

 

 

Signé à Georgeville, Québec, ce 17e jour de septembre 2007.

 

 

 

« Pierre Archambault »

Juge Archambault

 

 


 

 

 

 

 

RÉFÉRENCE :                                  2007CCI338

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      96-4635(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              CAMIL ROULEAU ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Québec (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 11 mai 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Pierre Archambault

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 17 septembre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l'appelant :

l'appelant lui-même

 

 

Avocats de l'intimée :

Me Pierre Cossette

Me Simon Petit

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant:

 

                     Nom :                           

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1]           De nombreux témoins ont été entendus, au moins dix si je compte ceux qui sont mentionnés dans les rubriques de la décision publiée à 2001 DTC 511 (fr.), [2001] 4 C.T.C. 2197.

[2]           Les admissions ont été faites par monsieur Rouleau à l'audience.

[3]           Je considère ce fait comme avéré en raison de la production du « contrat de service », qui est daté du 2 avril 1992 (pièce I‑2, à l'onglet B‑3). Il est curieux de noter que la société de personnes Cablotel est désignée dans ce document comme étant une « corporation ».

[4]           Je les désignerai comme les « abris fiscaux Omzar ».

[5]           Comme cet énoncé n'a pas été contredit (« démoli ») par monsieur Rouleau, je le tiens pour avéré.

[6]           En tenant compte du fait qu'il a payé par chèque. J'ajouterais au fait déjà admis par monsieur Rouleau que le versement s'est effectué le 13 novembre 1992, comme il ressort de la pièce A‑2, à l'onglet 8.

[7]           Sur la foi de la pièce A‑2 à l'onglet 7, je suis convaincu que monsieur Rouleau avait obtenu un emprunt de Noreco correspondant à la moitié du coût de son placement et qu'il s'était engagé à le rembourser. Par contre, en ce qui concerne la période après le rachat des participations par Noreco, je tiens ce fait pour avéré.

[8]           Je tiens ce fait pour avéré en me fondant sur la pièce I‑1, onglet 306 et sur le témoignage de monsieur Caponi.

[9]           Je tiens ce fait pour avéré en raison de l’ensemble de la preuve, et la preuve présentée par monsieur Rouleau ne l’a pas contredit.

[10]          Voir la pièce A‑2, onglet 7.

[11]          Je tiens la première partie de la phrase pour avérée et la partie qui dit « mais qui ne représentent pas la réalité » pour non avérée. J'ajouterai que la cession des participations s'est effectuée le 16 février 1994. Quant à monsieur Rouleau, il a refusé de signer le contrat de cession parce qu’il n'avait pas d'abord été signé par l'acquéreur éventuel, Noreco, et qu’il se sentait lui‑même mal à l’aise de le signer sans avoir la certitude que Noreco le signerait. De plus, il s'était dit inquiet à l’idée de vendre sa participation dans Cablotel alors qu'il était incertain quant à son « retour d'impôt ». Il a déclaré qu’il aurait accepté de vendre ses parts à 50 % s’il obtenait son « retour d’impôt ».

[12]          À la pièce A‑2, onglet 5, on décrit un scénario préparé par monsieur Bédard, son conseiller en placements, qui fait état d'un rachat éventuel des parts, puisqu'on y mentionne qu'il y aura un remboursement de 7 500 $. Il y a aussi le témoignage de monsieur Cusson, qui corrobore le fait qu'il devait y avoir un rachat des participations dans Cablotel.

[13]          Monsieur Rouleau a indiqué qu'il n'avait pas reçu d'engagement de la part du promoteur. J'accepte son témoignage. Je tiens donc ce fait pour non avéré. Il y a aussi le témoignage de monsieur Cusson selon lequel il n'avait pas obtenu de garantie qu'il y aurait un rachat de leurs parts. Toutefois, tous les deux avaient de bonnes raisons de croire que le rachat s’effectuerait, comme cela avait été fait pour d’autres abris fiscaux d’Omzar. De plus, pour continuer à lever des fonds, Omzar devait suivre la même conduite que celle adoptée à l’égard des autres abris.

[14]          Selon les informations obtenues par le vérificateur Caponi d'une employée d’Omzar, à savoir madame Bouffard, tous les associés de Cablotel avaient cédé leurs parts pour un montant représentant 50 % de leur participation. En outre, au contrat intervenu entre Noreco et Omzar, Noreco déclare posséder toutes les parts de Cablotel, à l'exception d'une seule, qui appartenait à monsieur Michel Loranger (pièce I‑1, onglet 197, p. 2). Le vérificateur, selon son rapport, n'a pas pu trouver dans les dossiers d’Omzar une douzaine de contrats de cession (pièce I‑1, onglet 135). En ce qui a trait à monsieur Rouleau, celui-ci a déclaré sous serment qu'il avait refusé de signer le contrat qu’on lui avait transmis le 23 septembre 1993 pour les motifs que j’ai exposés ci‑dessus (pièce A‑2, onglet 13).

[15]          Monsieur Rouleau n'a produit aucune preuve, en particulier quant à la JVM des participations dans Cablotel, pour contredire ce fait. La conclusion de fait à laquelle le vérificateur est arrivé, à savoir que le prix offert pour les participations était supérieur à leur JVM, m’apparaît raisonnable dans les circonstances et, j’ajouterais même, plus vraisemblable selon l’ensemble de la preuve présenté à l’audience. Notamment, il y a le fait qu’Omzar, la société qui a prétendument réalisé les différents projets de R&D, a indiqué à son comptable qu'en date du 30 novembre 1993 le projet de Cablotel n'avait été réalisé qu'à 10 %. Or, quelques semaines plus tard, c’est‑à‑dire le 15 février 1994, presque tous les investisseurs de Cablotel ont vendu leur participation à Noreco et le paiement s'est fait par compensation de dette, à savoir pour le montant de l’emprunt obtenu de Noreco, soit 50 % du coût de la participation. Comment peut-on alors affirmer, comme cela est stipulé dans les contrats de cession, que la somme indiquée représentait « au meilleur de la connaissance des parties, la juste valeur marchande des parts vendues »? La même question se pose à nouveau et avec plus de force quand on constate que le prix de rachat versé, année après année, aux investisseurs des autres abris fiscaux Omzar, dont les projets de R&D sont à différents stades d'avancement, représente toujours 50 % du coût de ces abris, peu importe l’état  d'avancement de ces projets et peu importe les résultats  obtenus par chaque projet. Il est invraisemblable que chacun des abris ait obtenu des résultats identiques. Par conséquent, la JVM de chacun des abris fiscaux Omzar pouvait difficilement être identique. (Voir la pièce I-1, onglets 27 et 28.)

[16]          Pour mieux comprendre la portée de cet énoncé, il faut ajouter à la fin du paragraphe « lors du rachat ». Y ajoutant cette mention, je conclus que ce fait est avéré.

[17]          Je tiens cet énoncé pour avéré. Jamais Noreco n’a demandé à monsieur Rouleau de rembourser son emprunt parce qu’elle considérait, selon toute vraisemblance, qu’elle avait acheté sa participation en contrepartie de la remise de cette dette. D’ailleurs, elle a affirmé détenir toutes les participations des investisseurs, sauf celle d’un des promoteurs initiaux. Je conclus en outre que monsieur Rouleau s’est comporté comme s’il avait vendu sa participation, notamment en n’ayant jamais remboursé ou tenté de rembourser son prêt et en n’ayant entrepris aucune démarche pour obtenir sa part du produit de la vente par Cablotel à Omzar de ses droits sur les résultats de la R&D. S’il s’était considéré comme un associé de Cablotel (parce qu’il n’avait pas vendu sa participation), il aurait réclamé sa part du prix payé par Omzar. De plus, monsieur Rouleau affirme avoir perdu de l’intérêt pour les résultats de la R&D quand le ministre a commencé à refuser les déductions fiscales. L’intérêt de monsieur Rouleau s’est alors limité à cet aspect.

[18]          Si on remplace le mot « stratagème » par « arrangement ».

[19]          Je tiens cet énoncé pour avéré en ce qui a trait en tout cas à une très grande partie des fonds qui avaient été recueillis par Omzar. Je me fonde sur le témoignage du vérificateur ainsi que sur ses feuilles de travail.

[20]          Je me fonde notamment sur la pièce I‑1, onglets 197 et 34.

[21]          Ibid.

[22]          Ibid.

[23]          Voir la pièce  I‑1, aux onglets 157 à 172.

[24]          Je reviendrai sur cet énoncé dans mon analyse ci-dessous.

[25]          Compte tenu des motifs de cette décision, il n’est pas nécessaire de me prononcer sur cette conclusion de fait, comme l’a également décidé le juge en chef Garon dans McKeown, supra, au par. 416 de sa décision.

[26]          Je tiens cet énoncé pour avéré, sauf qu'il est plus exact de conclure que les dépenses n'étaient pas appuyées de pièces justificatives ou de pièces fournissant une description des services fournis à Omzar.

[27]          Je me fonde sur le témoignage de monsieur Caponi.

[28]          Ibid.

[29]          Compte tenu de l'ensemble de la preuve, il est raisonnable de croire qu'il existait effectivement un tel lien de dépendance.

[30]          Selon l'analyse faite par monsieur Caponi (en particulier à la pièce I‑1, onglet 308), environ 19 % des dépenses étaient à des dépenses de R&D, même si, évidemment, il est difficile de se faire une idée précise relative à la nature de ces dépenses.

[31]          Si on ajoute les mots « de façon générale » avant « les membres de la Société ne se connaissent pas ».

[32]          Cette visite est attestée par une déclaration écrite de monsieur Rouleau faite le 28 février 1994 (voir pièce A‑2, onglet 12).

[33]             Pièce I‑1, onglet 197, p. 3.

[34]          Évidemment, cela ne signifie pas nécessairement que ces opérations ne sont pas valides en droit. Il est possible de vendre un bien que l’on ne possède pas si on l’acquiert par la suite.

[35]             Voir l'alinéa 38a) de la réponse à l'avis d'appel.

[36]          La lettre de bienvenue adressée à monsieur Rouleau en date du 15 juillet 1993 a été produite sous la cote A‑2, à l’onglet 10.

[37]          Cet article édicte notamment ce qui suit :

37(1) Recherches scientifiques et développement expérimental. — Le contribuable qui exploite une entreprise au Canada au cours d'une année d'imposition peut, en produisant un formulaire prescrit contenant les renseignements prescrits avec sa déclaration de revenu en vertu de la présente partie pour l’année, déduire dans le calcul du revenu qu'il tire de cette entreprise pour l'année un montant qui ne dépasse pas la fraction éventuelle du total des montants suivants :

a) le total des montants dont chacun représente une dépense de nature courante qu'il a faite au cours de l'année ou d'une année d'imposition antérieure se terminant après 1973 :

(i) pour des recherches scientifiques et du développement expérimental effectués au Canada directement par le contribuable ou pour son compte, en rapport avec une entreprise du contribuable,

(ii) sous forme de paiement à l'une des entités suivantes :

(A) une association agréée qui effectue des recherches scientifiques et du développement expérimental,

(B) une université, un collège, un institut de recherches ou un autre établissement semblable agréés,

(C) une corporation résidant au Canada exonérée, par application de l'alinéa 149(1)j), de l'impôt prévu à la présente partie,

(D) une autre corporation résidant au Canada, ou

(E) une organisation agréée qui verse des fonds à une association, un établissement ou une corporation visés aux divisions (A) à (C);

[…]

[Je sougline.]

[38]          Cet alinéa édicte ce qui suit :

96. (1) Règles générales — Lorsqu'un contribuable est membre d'une société, son revenu, le montant de sa perte autre qu'une perte en capital, de sa perte en capital nette, de sa perte agricole restreinte et de sa perte agricole, s’il y en a, pour une année d'imposition, ou son revenu imposable gagné au Canada pour une année d'imposition, selon le cas, est calculé comme si :

[…]

g) la perte du contribuable — à concurrence de la part dont il est tenu — résultant d'une source ou de sources situées dans un endroit donné, pour l'année d'imposition du contribuable au cours de laquelle l'année d'imposition de la société se termine, équivalait à l'excédent éventuel :

(i) de la perte de la société, pour une année d'imposition, résultant de cette source ou de ces sources,

sur :

(ii) dans le cas d'un associé déterminé (au sens de la définition d'« associé déterminé » figurant au paragraphe 248(1), mais sans tenir compte de l'alinéa b) de celle‑ci) de la société dans l'année, le montant éventuellement déduit par la société en application de l'article 37 dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition provenant de cette source ou de ces sources,

(iii) dans les autres cas, zéro.

[Je souligne.]

[39]          Ce paragraphe édictait notamment ce qui suit durant la période pertinente :

127(8) Crédit d'impôt à l'investissement d'un associé. Lorsque, dans une année d'imposition donnée d'un contribuable associé d'une société, un montant serait déterminé à l'égard de la société — si celle-ci était une personne et si son exercice financier était son année d'imposition — pour l'année d'imposition de celle-ci se terminant au cours de l'année donnée, en vertu :

a)    soit de l'alinéa a) de la définition de « crédit d'impôt à l'investissement », au paragraphe (9) — abstraction faite du sous‑alinéa a)(iii) de cette définition et, si le contribuable est un associé déterminé de la société dans l'année d'imposition de celle-ci, abstraction faite du sous‑alinéa a)(ii) de cette définition —,

b)    [...]

la partie de ce montant qu'il est raisonnable de considérer comme la part du contribuable doit être ajoutée dans le calcul du crédit d'impôt à l'investissement du contribuable à la fin de l'année donnée.

[Je souligne.]

À l’époque en cause, le paragraphe 127(9) disposait notamment comme suit dans la définition de CII :

« crédit d'impôt à l'investissement » d'un contribuable à la fin d'une année d'imposition s'entend de l'excédent, s'il en est, du total

a)    de l'ensemble des montants dont chacun représente le pourcentage déterminé :

[...]

(ii)                d'une dépense admissible que le contribuable a faite dans l'année, ou […]

[Je souligne.]

 

Le paragraphe 127(9) définissait une « dépense admissible » ainsi :

« dépense admissible » s'entend d'une dépense pour recherches scientifiques et développement expérimental qu'un contribuable a faite après le 31 mars 1977 et qui est admissible à titre de dépense visée à l'alinéa 37(1)a) ou au sous‑alinéa 37(1)b)(i), à l'exclusion

[…]

[Je souligne.]

[40]          Voir le sous‑alinéa 96(1)g)ii) et l’alinéa 127(8)a) de la Loi, cités aux notes précédentes.

[41]          La définition d'« associé déterminé » se trouve au paragraphe 248(1) de la Loi :

« associé déterminé » s'entend, dans un exercice financier ou une année d'imposition, selon le cas, d'une société, de tout associé qui :

a)    soit est commanditaire ou assimilé de la société, au sens du paragraphe 96(2.4), à un moment de l'exercice ou de l'année,

b)    soit, de façon régulière, continue et importante tout au long de la partie de l'exercice ou de l'année où la société exploite habituellement son entreprise :

(i)    ne prend pas une part active dans les activités de la société, sauf dans celles qui ont trait au financement de l'entreprise de la société, ou

(ii)   n'exploite pas une entreprise semblable à celle que la société exploitait au cours de l'exercice ou de l'année, sauf à titre d'associé d'une société.

Cette définition est encore plus claire dans sa version anglaise :

“specified member” of a partnership in a fiscal period or taxation year of the partnership, as the case may be, means

(a)   any member of the partnership who is a limited partner (within the meaning assigned by subsection 96(2.4)) of the partnership at any time in the period or year, and

(b)   any member of the partnership, other than a member who is

(i)    actively engaged in those activities of the partnership business which are other than the financing of the partnership business, or

(ii)   carrying on a similar business as that carried on by the partnership in its taxation year, otherwise than as a member of a partnership,

on a regular, continuous and substantial basis throughout that part of the period or year during which the business of the partnership is ordinarily carried on and during which the member is a member of the partnership.

[Je souligne.]

[42]          Fournier c. Canada, [2005] A.C.F. no 606, 2005 CAF 131.

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