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Dossier : 2007-35(IT)I

ENTRE :

STÉPHANE GARIÉPY,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 7 juin 2007 à Québec (Québec)

 

Devant : L'honorable juge Paul Bédard

 

Comparutions :

 

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

 

 

Avocate de l'intimée :

Me Stéphanie Côté

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2002 est rejeté, selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de septembre 2007.

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard


 

 

 

Référence : 2007CCI513

Date : 20070926

Dossier : 2007-35(IT)I

ENTRE :

STÉPHANE GARIÉPY,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Bédard

 

[1]     Il s’agit d’un appel entendu sous le régime de la procédure informelle, d'une cotisation établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 2002. Aux termes de la cotisation, le ministre a ajouté au revenu d'emploi de l'appelant, lorsqu'il était au service de la société Laboratoires Abbott Limité (l'« employeur »), la somme de 3 641 $ à titre de frais pour droit d'usage d'une automobile en vertu de l'alinéa 6(1)e) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi ») et la somme de 1 120 $ à titre d'avantage relatif au fonctionnement d'une automobile en vertu de l'alinéa 6(1)k) de la Loi.

 

[2]     Lorsqu'il a établi et ratifié la nouvelle cotisation du 23 mars 2006 pour l'année d'imposition 2002, le ministre a tenu pour acquis les hypothèses de fait suivantes :

 

a)         Dans le cadre d'un programme de vérification d'avantages imposables relatif à un emploi, le vérificateur du Ministre (ci‑après, le « vérificateur ») a effectué la vérification du dossier de l'appelant; (admis)

 

b)         Depuis juin 2002, l'appelant était à l'emploi de l'employeur; (admis)

 

c)         L'employeur fournissait des automobiles dont il était propriétaire, à certains de ses employés dont l'appelant; (admis)

 

d)         Pour l'année d'imposition 2002, le calcul de l'avantage initial déclaré selon le formulaire T‑4 (État de la rémunération payée) de l'appelant, indiquait 298,44 $; (admis)

 

e)         Le vérificateur a analysé les documents et informations fournis par l'appelant relativement aux déplacements pour fins d'affaires et pour fins personnelles quotidiens de ce dernier, pour l'année d'imposition 2002; (admis)

 

f)          Lors de sa vérification, le vérificateur a constaté ce qui suit :

 

i)       Selon les registres du Ministre, en 2002, l'appelant a demeuré au 1276, avenue Chanoine‑Morel à Sillery, puis au 1600, rue de Champigny Est, à Ste‑Foy, province de Québec; (admis)

 

ii)      Le type de véhicule fourni à l'appelant par l'employeur, était une « Chevrolet Astro 1998 » (ci‑après, le « véhicule »); (admis)

 

iii)      Le registre de déplacements de l'appelant, indiquait les déplacements d'affaires journaliers, mais la partie personnelle était compilée sur une base hebdomadaire seulement; (admis)

 

iv)     Le kilométrage indiqué au registre semblait être une approximation et les adresses complètes n'étaient pas toujours indiquées; (admis)

 

v)      Le prélèvement de l'odomètre du véhicule au début de l'année ainsi que celui à la fin de l'année n'étaient pas indiqués dans le registre de déplacements de l'appelant; (admis)

 

vi)     Le registre de déplacements de l'appelant ne concordait pas avec les informations apparaissant sur les factures présentées au compte de dépenses présenté à l'employeur; (ignoré)

 

vii)     Le prélèvement de l'odomètre du véhicule dans le compte de dépenses présenté à l'employeur, était indiqué hebdomadairement, mais ne concordait pas avec la seule facture d'entretien du véhicule, retracée au compte de dépenses; (ignoré)

 

viii)    Le registre de déplacements de l'appelant indiquait un total annuel de 16 563 kilomètres parcourus, dont 15 539 kilomètres pour fins d'affaires; (ignoré)

 

ix)     Selon les informations déclarées à l'employeur, il était indiqué un nombre total annuel de 10 556 kilomètres parcourus, dont 9 905 kilomètres pour fins d'affaires; (ignoré)

 

g)         Compte tenu que le registre de déplacements ne reflétait pas la réalité concernant le nombre de kilomètres total parcouru, et en conséquence, le kilométrage parcouru pour fins personnelles, le vérificateur a effectué le calcul de l'avantage automobile selon le barème suivant :

 

DROIT D'USAGE

20 013 $ x 2 % 7 mois =

 

 

3 641,82 $

FRAIS DE FONCTIONNEMENT

1 000 km* x 0,16 $/km x 7 mois =

 

TOTAL

*kilomètre

 

 

1 120,00 $

 

4 761,82 $

(admis)

 

h)         Le coût du véhicule fourni par l'employeur était de 26 013 $; (ignoré)

 

i)          Le nombre total de kilomètres parcourus avec le véhicule a été déterminé à 16 563 kilomètres par année; (ignoré)

 

j)          Le nombre de kilomètres parcourus pour fins personnelles a été déterminé à 7 000 (1 000 kilomètres par mois, pour 7 mois); (ignoré)

 

k)         Aucune réduction pour le droit d'usage n'a été accordée à l'appelant, puisqu'il a été établi que l'employé effectuait 1 000 kilomètres par mois à des fins personnelles; (ignoré)

 

l)          L'avantage pour frais de stationnement a été calculé selon le taux visé par règlement pour l'année 2002, soit 0,16 $ du kilomètre; (ignoré)

 

m)        Le Ministre a donc ajouté aux revenus de l'appelant un montant de 4 463 $ (4 761 $ - 298 $) à titre d'avantage imposable pour son année d'imposition 2002. (admis)

Témoignage de l'appelant

[3]     L'appelant a déclaré ce qui suit lors de son témoignage :

i)     il avait été à l'emploi de la division des produits diagnostiques de son employeur à partir du 17 juin 2002;

 

ii)    son travail consistait à faire la réparation, l'installation et l'entretien de divers appareils d'analyse médicale utilisés dans les laboratoires des hôpitaux;

 

iii)    dans le cadre de ses fonctions, il couvrait le territoire suivant : la Côte Nord jusqu'à Blanc Sablon, la Gaspésie, la Beauce, le Saguenay, le Lac St‑Jean, la Mauricie et la région des Bois‑Francs. De plus, il lui arrivait à l'occasion de se rendre à Montréal et à Ottawa pour dépanner ses collègues;

 

iv)   il devait, dans le cadre de ses fonctions, transporter dans l'automobile (de type fourgonnette) mise à sa disposition par l'employeur diverses pièces de rechange et des outils. Pour ce faire, l'automobile avait été transformée. Ainsi, une cage en acier comportant des tablettes sur glissières avait été installée dans l'automobile et la banquette du milieu avait été enlevée. L'automobile comptait au maximum deux places assises, y compris celle du conducteur;

 

v)    le bureau de la division diagnostique de l'employeur dont il relevait était situé à Mississauga, dans la province de l'Ontario;

 

vi)   son employeur lui envoyait des appels à son téléphone cellulaire pour lui transmettre les demandes de services. Son horaire pouvait changer en tout temps;

 

vii)   son horaire de travail était le suivant : normalement, il travaillait du lundi au vendredi, et ce, huit heures par jour. De plus, il était de garde une fin de semaine sur cinq. Il a expliqué qu'à l'occasion il avait dépanné des collègues pendant les fins de semaine où il n'était pas de garde. Finalement, il a ajouté qu'il n'avait pas pris de vacances en 2002;

 

viii)  il était par ailleurs propriétaire d'une automobile; et

 

ix)   il ne savait pas qu'il avait la responsabilité de tenir un registre de l’usage du véhicule à moteur fourni par son employeur pour bien distinguer les kilomètres parcourus à des fins personnelles des kilomètres parcourus à des fins professionnelles pendant la période visée. Il a ajouté qu’il ne savait pas que ce registre devait indiquer pour chaque déplacement les détails suivants : date, adresse de destination, nom du client visité ainsi que le kilométrage parcouru. Il a aussi admis avoir consigné ses déplacements pendant la période visée dans un registre (pièce I‑2) et l'avoir fourni à l'Agence des douanes et du revenu du Canada (« l’Agence ») après que cette dernière lui a demandé le 24 août 2005 (pièce I‑1) de lui faire parvenir un tel registre. Il convient de souligner que l'appelant a admis avoir préparé le registre (pièce I‑2) à partir de renseignements tirés de son agenda qui ne contenait que les noms des clients de son employeur visités pendant la période visée.

 

Témoignage de monsieur Daniel Couture

 

[4]     Monsieur Daniel Couture, vérificateur de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, a témoigné qu'il avait examiné attentivement le registre de déplacements que l'appelant lui avait fait parvenir. Le témoignage de monsieur Couture a consisté essentiellement à expliquer les nombreuses anomalies et incohérences du registre de déplacements de l'appelant qu'il avait notées dans son rapport de vérification (pièce I‑3). Il a ajouté que son examen du registre de déplacements l'avait amené à conclure qu'il ne reflétait pas la réalité quant au nombre total de kilomètres parcourus par l'appelant avec la fourgonnette pendant la période pertinente et quant à sa répartition entre les fins personnelles et l'accomplissement des fonctions de son emploi.

 

Position de l’appelant

 

[5]     En l'espèce, l'appelant ne conteste pas le fait que son employeur avait mis à sa disposition une automobile pendant la période visée. Il a aussi admis qu'il n'était pas en mesure de réfuter les présomptions de fait énumérées aux sous‑alinéas f) iii), f) iv), f) v), f)vi), f) vii), f) viii) et f) ix) et à l'alinéa h) du paragraphe 14 de la Réponse à l'avis d'appel, présomptions de faits sur lesquelles le ministre s'était appuyé pour établir la cotisation à l'égard de l'appelant.

 

[6]     En fait, l'appelant soutient essentiellement que je devrais accueillir son appel parce que la Cour, dans la décision Anderson[1] où les faits de la cause étaient similaires à ceux liés au présent appel, a décidé que les contribuables concernés n'avaient tiré aucun bénéfice de l'utilisation des véhicules que leurs employeurs avaient mis à leur disposition. Enfin, l'appelant a soutenu que deux de ses collègues de travail qui œuvraient en Ontario et qui faisaient exactement le même travail que lui avaient réussi à faire annuler pour la division des appels de l'Agence la cotisation établie à leur égard en vertu des alinéas 6(1)e) et 6(1)k) de la Loi en invoquant la décision rendue par la Cour dans le jugement Anderson, précité.

 

Le droit

 

[7]     Les dispositions pertinentes de la Loi se lisaient comme suit pendant la période en question :

 

6(1)a)  Valeur des avantages — la valeur de la pension, du logement et autres avantages quelconques qu'il a reçus ou dont il a joui au cours de l'année au titre, dans l'occupation ou en vertu d'une charge ou d'un emploi, à l'occasion des avantages suivants :

 

[...]

 

(iii) Ceux qui étaient des avantages relatifs à l'usage d'une automobile;

 

[...]

 

6(1)e) Frais pour droit d'usage d'une automobile  lorsque son employeur ou une personne liée à son employeur a mis au cours de l'année une automobile à sa disposition (ou à la disposition d'une personne qui lui est liée), l'excédent éventuel de la somme visée au sous‑alinéa (i) sur le total visé au sous‑alinéa(ii)

 

(i) la somme qui représente les frais raisonnables pour droit d'usage de l'automobile pendant le nombre de jours de l'année où elle était ainsi à sa disposition,

 

(ii) le total des sommes dont chacune représente une somme (autre qu'une dépense liée au fonctionnement de l'automobile) payée au cours de l'année à l'employeur ou à la personne liée à l'employeur par le contribuable ou par la personne qui lui est liée pour l'usage de l'automobile;

 

6(2) (2) Frais raisonnables pour droit d'usage d'une automobile -- Pour l'application de l'alinéa (1)e), la somme qui représente les frais raisonnables pour droit d'usage d'une automobile pendant le nombre total de jours d'une année d'imposition durant lesquels l'employeur d'un contribuable ou une personne liée à l'employeur a mis l'automobile à la disposition du contribuable ou d'une personne qui lui est liée est réputée égale au montant calculé selon la formule suivante :

 

A/B × [(2 % × (C × D) + 2/3 × (E - F)]

 

où :

 

A représente le moins élevé des éléments suivants :

 

a) le nombre de kilomètres parcourus par l'automobile, autrement que dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi du contribuable, pendant le nombre de jours ci-dessus ou, s'il est moins élevé, le montant représenté par l'élément B, si, à la fois :

 

(i) l'employeur ou la personne liée à celui-ci exige du contribuable qu'il utilise l'automobile dans l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi,

 

(ii) la distance parcourue par l'automobile pendant le nombre de jours ci-dessus est parcourue principalement dans l'accomplissement de ces fonctions;

 

b) le montant représenté par l'élément B, dans les autres cas;

 

B le produit de 1 667 par le quotient de la division, par 30, du nombre de jours ci-dessus, ce quotient étant, s'il est supérieur à un, arrondi, le cas échéant, au nombre entier le plus proche, les résultats ayant cinq au plus en première décimale l'étant à l'entier inférieur;

 

C le coût de l'automobile pour l'employeur ou pour la personne qui lui est liée si l'un ou l'autre est propriétaire de l'automobile à un moment de l'année;

 

D le quotient de la division, par 30, du nombre de jours où l'employeur ou la personne qui lui est liée est propriétaire de l'automobile, compris dans le nombre total de jours ci-dessus, ce quotient étant, s'il est supérieur à un, arrondi, le cas échéant, au nombre entier le plus proche, les résultats ayant cinq au plus en première décimale l'étant à l'entier inférieur;

 

E le total des montants qu'il est raisonnable de considérer comme payables à un bailleur par l'employeur ou par la personne qui lui est liée, pour la location de l'automobile, pendant le nombre de jours où l'automobile est louée à l'employeur ou à la personne qui lui est liée, compris dans le nombre total de jours ci-dessus;

 

F la partie du total représenté par l'élément E qu'il est raisonnable de considérer comme payable au bailleur au titre de tout ou partie du coût, pour celui-ci, de l'assurance :

 

a) contre la perte de l'automobile ou les dommages à celle-ci;

 

b) pour la responsabilité qui peut découler de son utilisation ou de son fonctionnement.

 

6(1)k) Avantage relatif au fonctionnement d'une automobile -- lorsqu'une somme est déterminée en application du sous-alinéa e)(i) relativement à une automobile dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année, qu'un montant au titre du fonctionnement de l'automobile (autrement que dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi du contribuable) pour la ou les périodes de l'année au cours desquelles l'automobile a été mise à sa disposition ou à la disposition d'une personne qui lui est liée est payé ou payable par l'employeur du contribuable ou par une personne liée à cet employeur (l'employeur et cette personne étant appelés « payeur » au présent alinéa) et que le total des montants ainsi payés ou payables n'est pas versé au payeur, au cours de l'année ou des 45 jours suivant la fin de l'année, par le contribuable ou par la personne qui lui est liée, le montant lié au fonctionnement de l'automobile, qui correspond au résultat du calcul suivant :

 

A – B

 

où :

 

A représente :

 

(i) dans le cas où l'automobile sert principalement dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi du contribuable au cours de la ou des périodes en question et où le contribuable avise son employeur, par écrit, avant la fin de l'année de son intention de se prévaloir du présent sous-alinéa, la moitié de la somme déterminée en application du sous-alinéa e)(i) relativement à l'automobile dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année,

 

(ii) dans les autres cas, le produit de la multiplication du montant prescrit pour l'année par le nombre total de kilomètres parcourus par l'automobile (autrement que dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi du contribuable) au cours de la ou des périodes en question;

 

B le total des montants relatifs au fonctionnement de l'automobile au cours de l'année versés au payeur, au cours de l'année ou des 45 jours suivant la fin de l'année, par le contribuable ou par la personne qui lui est liée;

 

248(1) définition « automobile » Véhicule à moteur principalement conçu ou aménagé pour transporter des particuliers sur les routes et dans les rues et comptant au maximum neuf places assises, y compris celle du conducteur, à l'exclusion des véhicules suivants :

 

a) les ambulances;

 

a.1) les véhicules d'intervention d'urgence clairement identifiés qui sont utilisés dans le cadre de la charge ou de l'emploi d'un particulier au sein d'un service des incendies ou de la police;

 

b) les véhicules à moteur acquis principalement pour servir de taxi, les autobus utilisés dans une entreprise consistant à transporter des passagers et les fourgons funéraires utilisés dans une entreprise consistant à organiser des funérailles;

 

b.2) [sic] les véhicules de secours médical d'urgence clairement identifiés qui sont utilisés, dans le cadre de la charge ou de l'emploi d'un particulier au sein d'un service de secours médical d'urgence ou d'un service d'ambulance, pour transporter de l'équipement médical d'urgence et un ou plusieurs préposés aux soins médicaux d'urgence ou travailleurs paramédicaux;

 

c) sauf pour l'application de l'article 6, les véhicules à moteur acquis pour être vendus ou loués dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise de vente ou de location de véhicules à moteur et les véhicules à moteur utilisés pour le transport de passagers dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise consistant à organiser des funérailles;

 

d) les véhicules à moteur suivants :

 

(i) les véhicules de type fourgonnette ou camionnette, ou d'un type analogue, comptant au maximum trois places assises, y compris celle du conducteur, et qui, au cours de l'année d'imposition où ils sont acquis ou loués, sont utilisés principalement pour le transport de marchandises ou de matériel en vue de gagner un revenu,

 

(ii) les véhicules de type fourgonnette ou camionnette, ou d'un type analogue, dont la totalité ou la presque totalité de l'utilisation au cours de l'année d'imposition où ils sont acquis ou loués est pour le transport de marchandises, de matériel ou de passagers en vue de gagner un revenu,

 

(iii) les véhicules de type camionnette qui sont utilisés, au cours de l'année d'imposition où ils sont acquis ou loués, principalement pour le transport de marchandises, de matériel ou de passagers en vue de gagner un revenu à un ou plusieurs endroits au Canada qui sont, à la fois :

 

(A) visés, pour ce qui est d'un ou de plusieurs des occupants du véhicule, aux sous-alinéas 6(6)a)(i) ou (ii),

 

(B) situés à au moins 30 kilomètres du point le plus rapproché de la limite de la plus proche région urbaine, au sens du dernier dictionnaire du recensement publié par Statistique Canada avant l'année en question, qui compte une population d'au moins 40 000 personnes selon le dernier recensement publié par Statistique Canada avant cette même année.

 

 

Analyse et conclusion

 

[8]     Il ressort des dispositions pertinentes de la Loi qu’il faut d’abord répondre à la question suivante : Est-ce que la fourgonnette fournie à l’appelant par son employeur était une automobile au sens du paragraphe 248(1) de la Loi? En effet, la question est pertinente étant donné que, si la fourgonnette n’est pas une automobile au sens du paragraphe 248(1) de la Loi, le ministre n’était pas en droit d’ajouter au revenu d’emploi de l’appelant la somme de 3 641 $ à titre de frais d’usage d’une automobile en vertu de l’alinéa 6(1)e) de la Loi et une somme de 1 120 $ à titre d’avantage relatif au fonctionnement d’une automobile en vertu de l’alinéa 6(1)h) de la Loi.

 

[9]     La définition « d'automobile » prévue au paragraphe 248(1) de la Loi prévoit dans son préambule qu'un véhicule à moteur principalement conçu ou aménagé pour transporter des particuliers sur les routes et dans les rues et comptant au maximum neuf places assises, y compris celle du conducteur est une automobile. Donc, a contrario, si un véhicule à moteur n’est pas principalement conçu ("designed" selon la version anglaise) ni principalement aménagé ("adapted" selon la version anglaise) pour transporter des particuliers, ce véhicule ne sera pas considéré comme une automobile au sens du paragraphe 248(1) de la Loi. Je note immédiatement que le législateur n'a pas précisé dans sa définition d'« automobile » le moment où le véhicule devait être conçu ou aménagé pour transporter des particuliers pas plus qu'il n'a précisé la personne qui devait concevoir ou aménager le véhicule à moteur pour transporter des particuliers.

 

[10]    Est-ce que la fourgonnette a été principalement aménagée pour transporter des particuliers? Puisque le mot « aménagé » ("adapted" dans sa version anglaise) n'est pas défini dans la Loi et qu'il n'a pas un sens juridique bien établi et reconnu, il faut déterminer le sens ordinaire et grammatical de ces mots. Le Robert, dictionnaire de la langue française, 1988, et le Oxford English Dictionnary, 1989, définissent respectivement les mots « aménagé » et "adapted" ainsi :

 

Le Robert :

 

Aménagé

 

1.   Disposé, distribué, et préparé méthodiquement (une construction, un espace organisé par l’homme) en vue d’un usage déterminé […] Organisé.

 

[…]

 

      Vx ou régional. Installé, préparé en vue d’une installation (une chose concrète).

 

[…]

 

4. Adapté pour rendre plus efficace, plus adéquat.

 

L'Oxford

 

Adapted

 

1.   Fitted; fit, suitable

 

[…]

 

2.   Modified so as to suit new conditions.

 

 

[11]    Le sens grammatical et ordinaire des mots « aménagé » et "adapted" m'amène à conclure qu'une chose est aménagée ou "adapted" si elle est changée ou modifiée. En l'espèce, la preuve a révélé que la banquette arrière avait été enlevée et qu'une cage en acier comportant des tablettes sur glissières avait été installée à la place de cette banquette de façon à transporter diverses pièces de rechange et des outils. La preuve a aussi révélé qu'après les modifications, la fourgonnette ne comptait au maximum que deux places assises y compris celle du conducteur. On peut donc conclure que la fourgonnette a été aménagée et qu'elle n'a pas été aménagée principalement pour transporter des particuliers.

 

[12]    Par ailleurs, est-ce que la fourgonnette a été principalement conçue pour transporter des particuliers? Puisque les mots « concevoir » et ("designed" (dans la version anglaise) ne sont pas définis dans la Loi et qu'ils n'ont pas un sens juridique bien établi et reconnu, il faut déterminer le sens ordinaire et grammatical de ce mot. Le Robert, dictionnaire de la langue française, 1988, et le Oxford English Dictionnary, 1989, définissent respectivement les mots « concevoir » et "designed" ainsi :

 

Le Robert

« Concevoir »

[…]

3.   Créer par l’imagination, former, imaginer, inventer.

      Concevoir un projet, un dessein

L'Oxford

 

"Designed"

Marked out, appointed […] Planned, purposed, intended […] Drawn, outlined; formed, fashioned, or framed according to design

 

[13]   Même si la portée de ces définitions semble très large, même si le législateur n'a pas précisé le moment où le véhicule à moteur doit être conçu ni la personne qui l'a conçu, il me semble implicite à la lumière de ces définitions que la personne qui a pu concevoir cette fourgonnette est nécessairement celle qui lui a donné naissance ou encore celle qui est à l'origine de sa création. En l'absence de preuve contraire, je dois présumer qu'en l'espèce celui qui a conçu à l'origine la fourgonnette est la société General Motors, son fabricant. En l'absence de preuve contraire, je dois aussi présumer, en l'espèce, que la fourgonnette a été conçue à l'origine par son fabricant principalement pour transporter des particuliers.

 

[14]   Je rappelle que le préambule de la définition d'automobile prévoit « a contrario » que, si un véhicule à moteur n'est ni principalement conçu ni principalement aménagé pour transporter des particuliers, ce véhicule n'est pas une « automobile ». En l'espèce, la preuve a révélé très clairement que la fourgonnette avait été aménagée principalement pour transporter des marchandises et qu'elle ne comptait, suite à l'aménagement, au maximum que deux places assises. Par ailleurs, puisque j'ai conclu précédemment que la fourgonnette avait été principalement conçue par General Motors pour transporter des particuliers, il m'est difficile de conclure qu'en vertu du préambule de cette définition, la fourgonnette n'est pas une automobile.

 

[15]   Certes, le paragraphe 248(1) de la Loi définit le terme « automobile » comme un véhicule à moteur conçu ou aménagé pour transporter des particuliers […]  et comptant au maximum neuf places assises, y compris celle du conducteur. Par ailleurs, le même véhicule sera exclu de la définition du mot « automobile », si c’est un véhicule du type fourgonnette comptant au maximum trois places assises, y compris celle du conducteur et qui, au cours de l’année d’imposition où il est acquis, sert principalement au transport de marchandises ou de matériel en vue de gagner un revenu. Sera également exclue de la définition du mot « automobile » une fourgonnette dont la totalité ou presque de l’utilisation au cours de l’année d’imposition où elle est acquise est pour le transport de marchandises, de matériel ou de passagers en vue de gagner un revenu. Ainsi, même si un véhicule est conçu à l’origine compter plus de trois places assises, mais qu’il est ensuite aménagé pour ne compter que trois places au maximum, et qu’il respecte les autres conditions prévues aux sous‑alinéas d)(i) et d)(ii) de la définition qui se trouvent au paragraphe 248(1), ce véhicule ne sera pas considéré comme une « automobile » au sens de la Loi. En l’espèce, l’appelant a fait la preuve que la fourgonnette avait été aménagée pour ne compter au maximum que trois places assises. Par ailleurs, il n’a pas fait preuve que la fourgonnette respectait les autres conditions prévues aux sous-alinéas d)(i) et d)(ii) de la définition qui se trouve au paragraphe 248(1) de la Loi.

 

[16]   Puisque j’ai conclu que la fourgonnette est une automobile au sens de la définition prévue au paragraphe 248(1) de la Loi, nous examinerons les dispositions prévues à l’alinéa 6(1)e) de la Loi et au paragraphe 6(2) de la Loi qui traitent des frais pour droit d’usage d’une automobile et des dispositions prévues à l’alinéa 6(1)g) de la Loi qui traitent de l’avantage relatif au fonctionnement d’une automobile.

 

[17]    Il ressort essentiellement de l’alinéa 6(1)e) et du paragraphe 6(2) de la Loi que, lorsqu'un employeur a mis au cours de l’année une automobile à la disposition d’un employé, ce dernier doit inclure dans le calcul de son revenu tiré, pour cette année d’imposition, de son emploi, une somme qui représente les frais raisonnables pour droit d’usage de cette automobile pendant le nombre de jours de l’année où elle était ainsi à sa disposition. Ces frais sont généralement fixés à 2 % par mois du coût initial de l’automobile (ou les deux tiers du paiement de location-bail). Ces frais peuvent être réduits uniquement lorsque l’utilisation à des fins personnelles de l’automobile fournie par l’employeur est inférieure à 1 000 kilomètres par mois et qu'une proportion de 90 % ou plus de l’utilisation de l’automobile par l’employé est liée à l’accomplissement des fonctions de son emploi. Pour obtenir une telle réduction, l’employé doit nécessairement fournir une preuve claire et expresse de l’utilisation réelle de l’automobile en termes de kilomètres. Ainsi, l’employé devra établir clairement et expressément le nombre de kilomètres parcourus dans l’année pour l’accomplissement des fonctions de son emploi et le nombre de kilomètres parcourus à des fins personnelles pour avoir droit à une telle réduction.

 

[18]    À mon avis, l’appelant n’a pas fait cette preuve. La preuve de l’appelant à cet égard reposait essentiellement sur un registre de ses déplacements qu’il avait préparé et fourni à l’agence après que cette dernière lui eût demandé le 24 août 2005 de lui faire parvenir un tel registre. Ce registre m’a paru peu fiable non seulement parce qu’il contenait de nombreuses anomalies et incohérences mais aussi parce qu’il indiquait un total annuel de kilomètres parcourus avec la fourgonnette et un total annuel de kilomètres parcourus pour fins d’affaires avec la même fourgonnette qui ne correspondent nullement aux déclarations antérieures à cet égard faites par l’appelant à son employeur. Je rappelle que l’appelant a déclaré à son employeur qu’il avait parcouru avec la fourgonnette 10 556 kilomètres pendant la période pertinente, dont 9 905 kilomètres pour l’accomplissement des fonctions de son emploi et que le registre indiquait pour la même période un total annuel de 16 563 kilomètres parcourus, dont 15 539 kilomètres pour fins d’affaires.

 

[19]    Puisque l’appelant n’a pu faire la preuve que l’utilisation à des fins personnelles de la fourgonnette fournie par l’employeur était inférieure à 1 000 kilomètres par mois et qu'une proportion de 90 % ou plus de l’utilisation de la fourgonnette était liée à l’accomplissement des fonctions de son emploi, je suis d’avis que le ministre était en droit d’ajouter au revenu d’emploi de l’appelant pour son année d’imposition 2002 une somme à titre de frais pour droit d’usage d’une automobile égale à 2 % par mois (en l’espèce 7 mois) du coût de la fourgonnette (en l’espèce 26 013 $).

 

[20]    Il ressort essentiellement des dispositions prévues à l’alinéa 6(1)g) de la Loi que, si l’employeur paie dans une année donnée une fraction quelconque des frais de fonctionnement d’une automobile lui appartenant et mise à la disposition d’un employé, ce dernier devra inclure dans le calcul de son revenu tiré, pour cette année, de son emploi une somme correspondant à un nombre fixe de cents par kilomètre (0,168 en 2002) pour usage personnel. Puisque l’appelant n’a pas été en mesure de réfuter la présomption de fait énoncée dans la Réponse à l’avis d’appel à l’effet que le kilométrage pour fins personnelles qu’il a parcouru avec la fourgonnette était de 7 000 kilomètres en 2002, je suis d'avis que le ministre était en droit d’ajouter en vertu de l’alinéa 6(1)g) de la Loi, au revenu d’emploi de l’appelant, pour son année d’imposition 2002, une somme de 1 120 $ à titre de frais de fonctionnement.

 

[21]    Je rappelle que l’appelant a soutenu que je devrais accueillir son appel pour le motif que la Cour, dans l’affaire Anderson, précitée, dont les faits, à son avis, étaient similaires à ceux liés au présent appel, avait décidé que les contribuables concernés n’avaient tiré aucun bénéfice de l’utilisation des véhicules qui avaient été mis à leur disposition par leur employeur.

 

[22]    Dans l’affaire Anderson, précitée, le ministre avait cotisé les employés sur l’avantage lié à l’usage de véhicules à moteur de type camionnette en vertu de l’alinéa 6(1)a) de la Loi. La question à trancher était de savoir si les appelants avaient reçu ou avaient joui d’un avantage au titre, dans l’occupation ou en vertu de leur emploi, cet avantage prenant la forme de l’utilisation qu’ils faisaient de leur véhicule (spécialement équipé pour leur travail) afin de faire le trajet entre leur domicile et leur lieu de travail en 1999. Dans sa décision, le juge Beaubier, qui avait déterminé par ailleurs que ces véhicules n’étaient pas des automobiles au sens du paragraphe 248(1) de la Loi parce qu'ils ne comptaient pas plus de deux places assises, avait conclu en outre que les employés n’avaient tiré aucun avantage lié à l’utilisation d'une automobile puisqu'ils faisaient l’objet d’un contrôle de la part de leurs employeurs lorsqu'ils étaient dans leur véhicule et qu’ainsi seuls les employeurs obtenaient un avantage.

 

[23]    À mon avis, la décision Anderson, précitée, n’est d’aucune utilité en l'espèce puisque le très bref raisonnement sur la question à savoir si les camionnettes étaient des automobiles au sens du paragraphe 248(1) de la Loi est erroné.

 

[24]    Je rappelle que, dans l’affaire Anderson, le ministre avait cotisé les employés concernés en vertu de l’alinéa 6(1)a) de la Loi et non en vertu des alinéas 6(1)e) et 6(1)g) de la Loi puisqu’il considérait que les camionnettes en question n’étaient pas des automobiles au sens du paragraphe 248(1) de la Loi. Je souligne qu’en vertu du sous‑alinéa 6(1)a)iii) de la Loi, les avantages relatifs à l’usage d’une automobile sont exclus de l’application de l’alinéa 6(1)a) de la Loi. Or, en l’espèce, j’ai conclu que la fourgonnette était une automobile au sens du paragraphe 248(1) de la Loi. Par conséquent, ce sont les dispositions prévues aux alinéas 6(1)e) et 6(1)k) de la Loi qui prévoient comment les avantages liés à l’usage d’une automobile sont inclus dans le calcul du revenu d’un contribuable tiré d’un emploi.

 

[25]    Pour ces motifs, l’appel est rejeté.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de septembre 2007.

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI513

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2007-35(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Stéphane Gariépy et Sa Majesté La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Québec (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 7 juin 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Paul Bédard

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 26 septembre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

 

 

Avocate de l'intimée :

Me Stéphanie Côté

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant:

 

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1]  Anderson c. Canada [2002], ACI, no 361

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