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Dossier: 2002‑3342(EI)

ENTRE :

GERALDINE CARSON,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 21 mai 2003 à Edmonton (Alberta),

 

Devant : L’honorable juge suppléant Michael H. Porter

 

Comparutions

 

Représentant de l’appelante :

Shawn Carson

 

Représentant de l’intimé :

Nadine Nesbitt (stagiaire en droit)

_________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel est admis et la décision du ministre est modifiée conformément aux motifs du jugement ci‑joints. 

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 16e jour de juillet 2003.

 

 

« Michael H. Porter »

Juge suppléant Porter

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de janvier 2004.

 

 

 

 

Nancy Bouchard, traductrice


 

 

 

Référence: 2003CCI474

Date: 20030716

Dossier: 2002‑3342(EI)

ENTRE :

GERALDINE CARSON,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Porter

 

[1]     Le présent appel a été entendu à Edmonton, en Alberta, le 21 mai 2003. L’appelante était représentée par son époux, Shawn Carson.

 

[2]     L’appelante interjette appel à l’encontre de la décision du ministre du Revenu national (ci‑après appelé le « ministre ») datée du 6 août 2002 selon laquelle ses heures assurables aux fins d’admissibilité à des prestations d’assurance‑emploi qu’elle a cumulées lorsqu’elle exerçait un emploi d’enseignante à la Dene Tha' Education Authority du 27 août au 21 décembre 2001 s’élevaient à 697 heures.

 

[3]     On a indiqué que cette décision avait été rendue en vertu du paragraphe 93(3) de la Loi sur l’assurance‑emploi (la « Loi sur l’a.‑e. ») et qu’elle était fondée sur le paragraphe 10(3) du Règlement sur l’assurance‑emploi (le « Règlement »).

 

[4]     Les faits pertinents révèlent que l’appelante a exercé un emploi auprès de la Dene Tha' Education Authority comme enseignante pendant la période en question à Assumption, en Alberta, une région éloignée située au nord de l’Alberta. Son époux exerçait également un emploi auprès de cette même autorité scolaire à peu près pour même période, mais est retourné à Edmonton après avoir appris le décès malheureux et inattendu de leur fils adulte.

 

 

[5]     L’appelante a terminé son emploi le 21 décembre 2001. Les heures totales assurables figurant dans son relevé d’emploi que lui a délivré l’autorité scolaire et qu’a signé une commis du bureau dénommée Debra Ahkimnachie s’élevaient à 595 heures. Aucune discussion n’a eu lieu entre l’autorité scolaire et l’appelante ou son époux concernant le nombre d’heures qui avait été consigné. L’appelante a contesté ledit nombre d’heures ainsi consigné et par voie d’une lettre datée du 4 avril 2002, le bureau des services fiscaux de l’Agence des douanes et du revenu du Canada à Edmonton a rendu une décision selon laquelle l’appelante avait cumulé 688,50 heures assurables pendant la période en cause. En réponse à son appel qu’elle a interjeté à l’encontre de cette décision, le ministre a établi qu’elle avait cumulé 697 heures assurables.

 

[6]     Étant donné que l’appelante n’avait pas travaillé pendant un certain nombre d’années avant d’exercer son emploi auprès de l’autorité scolaire en question en août 2001, elle devait, pour être admissible à des prestations d’assurance‑emploi, satisfaire les exigences à l’égard d’une personne qui devient ou redevient membre de la population active, tel qu’il est énoncé aux paragraphes 7(3) et (4) de la Loi sur l’a.‑e. Ces paragraphes stipulent ceci :

 

(3) Conditions différentes à l’égard de la personne qui devient ou redevient membre de la population active – L’assuré qui est une personne qui devient ou redevient membre de la population active remplit les conditions requises si, à la fois :

 

a)         il y a eu arrêt de la rémunération provenant de son emploi;

 

b)         il a, au cours de sa période de référence, exercé un emploi assurable pendant au moins neuf cent dix heures.

 

(4) Personne qui devient ou redevient membre de la population active – La personne qui devient ou redevient membre de la population active est celle qui, au cours de la période de cinquante‑deux semaines qui précède le début de sa période de référence, a cumulé, selon le cas : 

 

a)         moins de quatre cent quatre‑vingt‑dix heures d’emploi assurable;

 

b)         moins de quatre cent quatre‑vingt‑dix heures au cours desquelles des prestations lui ont été payées ou lui étaient payables, chaque semaine de prestations se composant de trente‑cinq heures;

 

c)         moins de quatre cent quatre‑vingt‑dix heures reliées à un emploi sur le marché du travail, tel qu’il est prévu par règlement;

 

d)         moins de quatre cent quatre‑vingt‑dix heures de l’une ou l’autre de ces heures.

 

[7]     Étant donné que l’appelante n’avait cumulé aucune heure d’emploi assurable pendant la période de 52 semaines précédentes que prévoit la Loi, elle doit être considérée comme une personne qui devient ou redevient membre de la population active. Pour être admissible à des prestations, l’appelante doit démontrer qu’elle a cumulé 910 heures ou plus d’emploi assurable au cours de la période en question.

 

[8]     L’appelante et son époux ont témoigné. Ils étaient indignés, c’est le moins que l’on puisse dire, que les autorités, au nom du ministre, n’ont accordé aucune importance à toutes les heures supplémentaires que l’appelante, à son avis, avait consacrées à son travail, notamment parce qu’ils s’entendaient à ce qu’on leur manifeste de la sympathie pour la perte de leur fils, perte qui a obligé l’appelante à quitter son emploi. Il s’agit, bien sûr, d’une question de droit, et ni le ministre ni ses agents ne sont investis d’un pouvoir discrétionnaire concernant le décaissement de fonds publics et n’ont d’autre choix que de suivre les règles qu’établies le Parlement. Je ne dispose d’aucune preuve qui démontre que le ministre ou l’un de ses agents a agi de mauvaise foi.

 

[9]     Le témoignage a démontré que de nombreux enfants autochtones ayant des difficultés d’apprentissage fréquentaient l’établissement d’enseignement en question, ce qui exigeait davantage d’efforts de la part du directeur et, conséquemment, des enseignants. Il était évident que l’on s’entendait à ce qu’ils travaillent des heures supplémentaires afin d’être bien préparés à donner leurs cours à leurs élèves. De plus, étant donné qu’il s’agissait de sa première année d’enseignement à cette école et qu’elle n’avait pas enseigné depuis quelque temps, l’appelante elle‑même a dû consacrer de nombreuses heures de travail en vue de préparer ses cours. Je n’ai aucun doute qu’elle était très consciencieuse et appliquée dans l’exécution de ses fonctions. De nombreuses heures devaient être consacrées au travail scolaire en plus du temps réellement consacré à l’enseignement en classe. Dès le début, l’appelante s’est opposée à la décision du ministre dans le but d’établir clairement le nombre d’heures que ce temps représentait.   

 

[10]    L’appelante a produit en preuve ses notes qu’elle prenait quotidiennement concernant son travail en classe, notes dans lesquelles elle indique presque chaque jour l’heure à laquelle elle quittait l’école tous les après‑midi. Selon son témoignage, elle demeurait à l’école après le départ des enfants pour faire, entre autres choses, quelques heures supplémentaires en vue de préparer ses cours. À cet égard, j’admets son témoignage puisque ses notes le confirment. Il ne fait aucun doute qu’elle demeurait à l’école en vue de préparer ses cours et, contrairement à ce qu’a conclu le ministre, elle travaillait, pour sa préparation de cours, beaucoup plus qu’une heure par jour. Il a admis qu’elle travaillait jusqu’à 17 h tous les jours, et il est clair qu’elle a souvent travaillé jusqu’à 17 h 30. En fait, en m’appuyant sur ses notes, j’ai estimé qu’elle avait travaillé jusqu’à 17 h 30 65 jours durant, ce qui nous donne 32,5 heures supplémentaires.

 

[11]    L’appelante a également déposé en preuve un calendrier pour la période en question sur lequel est inscrit un certain nombre d’heures travaillées pendant les fins de semaine. Il était difficile d’établir la provenance de ces heures puisque aucune feuille de temps ni note n’ont été produites pendant cette période pour les justifier, comme l’ont permis les notes susmentionnées que l’appelante a prises concernant son travail en classe. Je retiens de la preuve qu’elle a compilé ce nombre d’heures après son retour à Edmonton, probablement vers le mois de janvier 2002, lorsqu’elle a rempli sa demande de prestations. Elle ne s’est pas préoccupée de faire le suivi de ces heures avant cette date. Par conséquent, je conclus que le calendrier en soi n’appuie pas son témoignage oral. Manifestement, elle a produit ce calendrier après les faits.

 

[12]    Néanmoins, elle a clairement indiqué, dans son témoignage, qu’elle se rendait à l’école presque tous les samedis et qu’elle y travaillait de 13 h à 17 h. C’était sa routine, à quelques exceptions près qu’elle a notées. Elle a également dit que, presque tous les dimanches après la messe, elle se rendait régulièrement à l’école, dans l’après‑midi, et qu’elle y travaillait pendant trois heures en vue de préparer ses cours. J’admets son témoignage en ce qui concerne le travail qu’elle accomplissait ces samedis et dimanches après‑midi. Son témoignage était suffisamment crédible pour que je la croie lorsqu’elle a affirmé qu’elle avait travaillé ces heures.

 

[13]    En outre, elle a affirmé qu’elle avait travaillé le 12 novembre, jour férié, le 2 octobre ainsi que les 7 et 8 novembre dans le cadre de rencontres avec les parents et les Aînés qui avaient eu lieu en soirée. Une fois de plus, j’admets son témoignage à cet égard.

 

[14]    Le ministre a déjà tenu compte des journées de congé qu’elle a prises pour assister aux funérailles de son fils et de son congé de deuil, et il a porté ces congés à son crédit.    

 

[15]    L’appelante a également calculé le nombre total d’heures qui, affirme‑t‑elle, équivalent à des heures consacrées à un perfectionnement professionnel, à du travail supplémentaire, à des remises de prix, à la préparation des bulletins scolaires, à la commande de fournitures ainsi qu’à la mise à jour de son registre et aux corrections. Aucune preuve particulière ne m’a été présentée concernant ces activités, et j’ai donc beaucoup de difficultés, en l’absence d’une telle preuve, à croire qu’elle n’a pas pu effectuer ces tâches pendant les après‑midi ou les fins de semaine au cours desquels elle affirme avoir travaillé, heures de travail que le ministre a déjà portées à son crédit. Je dois donc reconnaître que l’avocat du ministre avait raison lorsqu’il a allégué que ces heures semblent avoir été comptabilisées en double. Cependant, je lui accorde les cinq heures qu’elle a consacrées le soir du 19 décembre pour assister à un concert de Noël, comme l’indiquent ses notes. 

 

[16]    En dernier lieu, l’appelante a indiqué qu’elle avait souvent travaillé à son domicile en soirée. Ici encore, aucune preuve particulière ne m’a été présentée, et je ne dispose d’aucun élément de preuve sur lequel m’appuyer pour porter à son crédit les heures qu’elle affirme avoir travaillées en soirée. 

 

[17]    Si je tiens compte des faits énoncés précédemment et, en particulier, lorsque j’examine en détail les notes qu’elle prenait quotidiennement concernant son travail en classe, j’établis ses heures assurables de la façon suivante :

 

Heures de travail qu’a calculées le ministre

8,5 heures pendant 82 jours (de 8 h 30 à 16 h)                  697 heures

une demi‑heure x 65 jours pour les heures travaillées en après‑midi, après les cours, selon les notes prises en classe                                        32,5 heures

Jour du Souvenir                                                             8,5 heures

Rencontre avec les Aînés et les parents le 2 octobre

en soirée                                                                         5 heures

Entretiens entre parents et enseignants les 7 et 8 novembre

5 heures x 2                                                                    10 heures

Concert de Noël, le soir du 19 décembre                          5 heures

Samedis 11 jours x 4 heures                                             44 heures

2 jours x 5 heures                                                            10 heures

Dimanches 12 jours x 3 heures                                         36 heures

                    Travail à l’ordinateur pour les services

                    effectué le 4 novembre                                                    5 heures

TOTAL                                                                          853 heures

 

[18]    En l’occurrence, je conclus que l’appelante a cumulé 853 heures assurables pendant la période en question, ce qui, malheureusement, est encore moindre que le nombre d’heures requises pour être admissible, en vertu des dispositions législatives, à des prestations d’assurance‑emploi. L’appel est donc admis en conséquence.

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 16e jour de juillet 2003.

 

 

 

 

 

 

 

« Michael H. Porter »

Juge suppléant Porter

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de janvier 2004.

 

 

 

 

Nancy Bouchard, traductrice


 

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