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Dossier : 2006-1311(EI)

ENTRE :

PAUL E. HAMON,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 26 janvier 2007, à Ottawa (Ontario).

 

Devant : L'honorable juge en chef adjoint Gerald J. Rip

 

Comparutions :

 

Représentant de l'appelant :

Jean Maisonneuve

Avocat de l'intimé :

Me Frédéric Morand

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L'appel interjeté en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance‑emploi est accueilli, et la décision du ministre du Revenu national en date du 19 décembre 2005, visant la période du 1er janvier 2005 au 28 janvier 2005, est annulée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour d'avril 2007.

 

 

 

« Gerald J. Rip »

Juge en chef adjoint Rip

 


 

 

 

 

 

Référence : 2007CCI220

Date : 20070416

Dossier : 2006-1311(EI)

ENTRE :

PAUL E. HAMON,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge en chef adjoint Rip

 

[1]     Paul Hamon appelle de la décision du ministre du Revenu national (le « ministre ») selon laquelle il exerçait un emploi assurable au sens du paragraphe 5(1) de la Loi sur l’assurance‑emploi (la « LAE ») pendant la période allant du 1er janvier 2005 au 28 janvier 2005, alors qu’il travaillait pour Groupe Financier Hamon Financial Group Inc. (le « payeur »).

 

[2]     Le payeur a été constitué en personne morale le 9 août 2004 sous le nom de Gestion Hamon Inc. pour acquérir de la société André Hamon Agence d'Assurance Ltée, dont l’unique actionnaire était André Hamon, le père de l’appelant, une entreprise consistant dans une agence d’assurance‑vie et de placement.

 

[3]     Pendant toute la période pertinente, les actionnaires du payeur étaient les personnes suivantes :

 

André Hamon Agence d'Assurance Ltée

1 action ordinaire de catégorie B

Suzanne Hamon (mère)

50 actions de catégorie A[1]

Appelant

50 actions de catégorie C

André Hamon (père)

200 actions spéciales de catégorie D

 

[4]     Les parties ne contestent pas le fait que l’appelant et le payeur sont des personnes liées et qu’ils ont entre eux un lien de dépendance. Toutefois, le ministre a décidé que, selon le paragraphe 5(3) de la LAE, l’appelant et le payeur étaient réputés ne pas avoir de lien de dépendance parce qu’il était convaincu qu'il était raisonnable de conclure qu'ils auraient conclu entre eux un contrat de travail à peu près semblable s'ils n'avaient pas eu de lien de dépendance, compte tenu des circonstances suivantes :

 

a)         l'appelant rendait des services au payeur à titre de directeur;

 

b)         l'appelant, à titre de directeur et actionnaire du payeur était responsable entre autres 

- d'embaucher et congédier les employés,

- de gérer les opérations journalières de l'entreprise,

- de procéder à la gestion des revenus et dépenses,

- de participer à la prise de décision d'achat d'item capital.

 

c)         l'appelant travaillait à la place d'affaires du payeur;

 

d)         l'appelant devait être présent et disponible durant les heures d'affaires normales du payeur soit entre 8:30 et 16 h, du lundi au vendredi;

 

e)         malgré son autorité auprès du payeur, il devait se conformer aux instructions et directives provenant du payeur;

 

f)          le travail de l'appelant était supervisé et ses échéanciers établis par le payeur;

 

g)         dans le cadre de son travail, l'appelant utilisait le matériel et les équipements mis à sa disposition par le payeur;

 

h)         l'appelant utilisait occasionnellement son automobile et ses dépenses reliées aux longs déplacements étaient remboursées par le payeur;

 

i)          malgré un horaire de travail variable et conséquemment à ses responsabilités, l'appelant travaillait généralement entre 60 et 65 heurs [sic] par semaine;

 

j)          l'appelant recevait une rémunération annuelle de 55 000,00 $, payable bi‑mensuellement par chèque;

 

k)         l'appelant rendait des services au payeur en vertu d'un contrat de louage de services;

 

l)          le payeur embauchait un directeur des ventes dont le salaire annuel était de 50 000 $;

 

m)        le salaire versé à l'appelant était raisonnable compte tenu de ses tâches et responsabilités;

 

n)         l'appelant était tenu de produire des rapports au payeur et son travail était supervisé par le payeur;

 

o)         l'appelant rendait des services au payeur à plein temps;

 

p)         l'appelant rendait des services au payeur comme directeur et son travail était essentiel et directement lié aux activités du payeur.

 

[5]     L’appelant a déclaré dans son témoignage que le payeur avait été constitué à des fins de planification financière. En 1995, à l’âge de 21 ans, l'appelant a commencé à travailler pour la société de son père, aidant celui‑ci à gérer l’entreprise. À ce moment-là, il était prévu qu’il achèterait l’entreprise un jour. Comme je l’ai déjà mentionné, le payeur a été constitué en personne morale à cette fin et, le 1er décembre 2004, a changé son nom pour celui de Groupe Financier Hamon Financial Group Inc. Le payeur a commencé à exercer ses activités le 1er janvier 2005.

 

[6]     Le 10 janvier 2005, les parents de l’appelant sont allés en vacances en Floride. Avant de partir pour la Floride, les parents de l’appelant et l’appelant ont signé une entente temporaire qui prévoyait qu’en cas de décès du père les actions de celui‑ci seraient transférées à son épouse, et qu’au décès de la mère, ou bien si les deux parents mouraient ensemble, les actions seraient vendues à l’appelant. Le paiement du prix d’achat des actions devait être financé par le produit d’une police d’assurance en vigueur à ce moment‑là.

 

[7]     Un élément qui a eu une influence majeure sur la décision du ministre est le fait que le payeur a versé un salaire de 57 200 $ à l’appelant en 2005. À la même époque, le payeur a convenu de payer à M. Gilles Carrière, son directeur des ventes, un salaire annuel de 50 000 $. Je présume que le ministre a considéré qu’une personne liée, soit l’appelant, et une personne non liée, soit M. Carrière, recevaient le même salaire pour le même travail.

 

[8]     L’appelant a indiqué dans son témoignage que, même si M. Carrière et lui se partageaient certaines tâches, la nature de l’ensemble des fonctions qu’ils exerçaient pour le payeur et des responsabilités qu’ils avaient était très différente. Tous les deux recrutaient des employés, faisaient passer des entrevues aux employés éventuels et devaient s'occuper de la formation des nouveaux employés. Des primes pouvaient venir s’ajouter au salaire de M. Carrière. Celui‑ci travaillait de 35 à 45 heures par semaine et avait droit à une rémunération supplémentaire s’il travaillait un jour férié. Il ne recevait pas d’appels de représentants à la maison. M. Carrière s’occupait des ventes seulement; l’appelant ne se mêlait pas des ventes.

 

[9]     L’appelant a témoigné qu’il travaillait de 60 à 65 heures par semaine et qu’il recevait des appels téléphoniques à toute heure. Il ne recevait pas de paye de vacances ni ne touchait une rémunération supplémentaire s’il travaillait un jour férié. C’était lui qui décidait en dernier ressort de l'engagement d'un employé. Il payait les factures. Il négociait les contrats avec les représentants. Il déterminait le salaire des employés. C’était lui qui décidait si l’entreprise devait prendre de l’extension et lui également qui établissait le budget annuel.

 

[10]    Lorsque le père de l’appelant séjournait en Floride, soit pendant une période de trois ou quatre mois, l’appelant dirigeait l’entreprise. Son père, qui avait eu une crise cardiaque en 1999, était semi‑retraité. Lorsqu’il se rendait aux bureaux du payeur, il ne travaillait que de 10 à 20 heures par semaine et il ne gérait aucun dossier ni ne traitait avec les représentants du payeur. Le père de l'appelant passait l’été au chalet familial. L’appelant était titulaire des permis d’assurance‑vie nécessaires pour le Québec et l’Ontario; son père n’était titulaire que d’un permis pour l’Ontario. C’était l’appelant qui traitait avec les assureurs et qui effectuait les placements.

 

[11]    L’appelant a témoigné qu’il établissait ses propres heures de travail et qu’il n’était responsable qu’envers lui‑même. Avant 2005, il rendait compte à son père.

 

[12]    Lorsqu’il a pris la relève de son père en janvier 2005, se rappelait l’appelant, il a dû obtenir l’approbation des sociétés d’assurance‑vie pour s’assurer qu’elles traiteraient avec lui.

 

[13]    Le payeur a versé un salaire au père et à la mère de l’appelant en 2005. En effet, le payeur a versé aux administrateurs des salaires totalisant 199 000 $, dont 57 200 $ à l’appelant et le reste à ses parents. L’appelant a expliqué qu’il n’avait jamais payé pour l’entreprise et que le paiement de salaires à ses parents était une façon de les dédommager.

 

[14]    D’après la preuve, lorsqu’il a exercé son pouvoir discrétionnaire, le ministre n’a pas tenu compte de l’importance du rôle de l’appelant pour l’entreprise exploitée par le payeur. Le ministre s’est contenté de simplement comparer le salaire de l’appelant à celui de M. Carrière. Il n’a pas tenu compte du fait que les heures de travail de l'appelant étaient plus longues, que l'appelant portait un haut degré de responsabilité pour ce qui est de l’exploitation de l’entreprise du payeur et que l’appelant serait un jour propriétaire des actions du payeur. Une personne n’ayant pas de lien de dépendance avec le payeur n'aurait pas consacré à l’entreprise du payeur toutes les heures que l’appelant y a consacrées ni n’accepterait d’assumer l’entière responsabilité de l’exploitation de l’entreprise en contrepartie d’un salaire semblable à celui d’une personne qui travaillait près de la moitié de ses heures et n’avait pas de responsabilités supplémentaires après les heures de travail.

 

[15]    L’appel est accueilli.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour d'avril 2007.

 

 

 

 

« Gerald J. Rip »

Juge en chef adjoint Rip

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI220

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2006-1311(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              PAUL E. HAMON c. M.R.N.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 26 janvier 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge en chef adjoint Gerald J. Rip

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 16 avril 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l'appelant :

Jean Maisonneuve

Avocat de l'intimé :

Me Frédéric Morand

 

AVOCAT(S) INSCRIT(S) AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant :

 

                     Nom :                           

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1]               Les actions de catégorie A et C sont des actions sans droit de vote.

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