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Dossier : 2004-3699(GST)G

 

 

ENTRE :

JAMES NING LAU,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

________________________________________________________________

Appel entendu le 25 juin 2007, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

Devant : L'honorable juge C. H. McArthur

 

Comparutions :

 

Avocats de l'appelant :

MMarjorie E. Brown et

MBrian J. Wallace, c.r.

Avocate de l'intimée :

MLinda L. Bell

 

________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre de l'avis de cotisation établi à l'égard d'un tiers sous le régime de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 30 juillet 2002 et porte le numéro 68731, est accueilli avec dépens en faveur de l'appelant, et la cotisation est annulée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 5jour de décembre 2007.

 

 

« C. H. McArthur »

Le juge McArthur

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour de mars 2008.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur


 

 

 

 

Référence : 2007CCI718

Date : 20071205

Dossier : 2004-3699(GST)G

 

 

ENTRE :

JAMES NING LAU,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge McArthur

 

[1]     L'appelant, James Ning Lau, interjette appel d'un avis de cotisation établi à l'égard d'un tiers par le ministre du Revenu national (le « ministre ») le 30 juillet 2002 en application du paragraphe 323(1) de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi »). Le ministre prétend que l'appelant, à titre d'unique actionnaire de la société Golden Leaf Development Company Ltd. (« GL Trust »), est responsable d'un montant de taxe nette impayé s'élevant à 998 100 $. GL Trust a fait l'objet d'une cotisation de 1 095 270 $ au titre de la taxe sur les produits et services relative à une fourniture à soi‑même de 78 unités condominiales.

 

[2]     Les questions suivantes sont notamment en litige :

 

(i)      GL Trust était-elle responsable de percevoir et de verser la somme de 998 100 $ selon les règles de la fourniture à soi‑même prévues par le paragraphe 228(2) de la Loi?

 

(ii)      Dans l'affirmative, l'appelant a-t-il agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement de GL Trust de verser la TPS nette que ne l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances?

 

[3]     Je me pencherai d'abord sur la première question. GL Trust était‑elle responsable de percevoir et de verser la somme de 998 100 $ suivant le paragraphe 228(2) de la Loi? Le droit de l'appelant de contester la responsabilité de la personne morale n'a pas vraiment été mis en doute par le ministre. La thèse de l'appelant consiste notamment à soutenir que le ministre a établi une cotisation à l'égard de la mauvaise partie, puisque GL Trust agissait comme nue‑fiduciaire pour les bénéficiaires de la coentreprise.

 

[4]     Le ministre soutient qu'en raison de son inscription aux fins de la TPS et de son inclusion dans la convention de coentreprise, GL Trust était un entrepreneur participant à la coentreprise et qu'à ce titre, elle était tenue de verser la taxe pour tous les membres de la coentreprise suivant le paragraphe 273(1) de la Loi.

 

Les faits

 

[5]     Lorsqu'il a établi la cotisation à l'égard de l'appelant, le ministre s'est appuyé sur les faits suivants :

 

[TRADUCTION]

 

a)         GL Trust était, à tous les moments pertinents, inscrite aux fins de la TPS sous le numéro 12497 3165 RT 0001.

 

b)         En 1997, GL Trust a construit un ensemble d'habitations de 128 unités constitué de deux immeubles de 14 étages comptant 124 unités condominiales et de quatre maisons en rangée adjacentes (le « projet »).

 

c)         En juillet 1999, 50 des unités avaient été vendues et au 31 décembre 1999, les 78 unités qui restaient avaient été louées.

 

d)         Pour les périodes de déclaration allant du 1er décembre 1997 au 230 [sic] novembre 2000, GL Trust a produit des déclarations de TPS relatives à la vente des unités condominiales et demandait des CTI au titre du projet.

 

e)         GL Trust n'a déclaré aucune TPS au titre de la fourniture à soi‑même découlant de la location des 78 unités restantes.

 

f)          La juste valeur marchande des 78 unités restantes s'élevait à 12 663 000 $.

 

g)         La TPS relative à la fourniture à soi‑même des 78 unités restantes s'élevait à 886 410 $.

 

h)         Un avis de cotisation daté du 30 janvier 2002 et portant le numéro 11BU0601988 a été établi à l'égard de GL Trust pour la période du 1er décembre 1997 au 30 novembre 2000 au titre de la TPS sur la fourniture à soi‑même des 78 unités restantes pour une somme totale de 1 095 270,19 $, répartie de la façon suivante :

 

TPS                 886 410,00 $

Pénalités           111 199,72 $

Intérêts               97 660,47 $

 

i)          GL Trust ne s'est pas opposée à cette cotisation.

 

j)          Un certificat visant la somme de 1 104 417,33 $ (le « certificat ») au titre du montant de taxe impayée par GL Trust, des pénalités et des intérêts a été produit à la Cour fédérale du Canada le 21 février 2002.

 

k)         Le 13 mai 2002, un bref a été délivré relativement au certificat.

 

l)          Selon le rapport sur le bref daté du 18 juillet 2002, le bref n'a pu être exécuté en raison de l'impossibilité de situer des éléments d'actif réalisables.

 

m)        L'appelant était un des administrateurs de GL Trust du 13 décembre 1989 au 2 août 2000.

 

[6]     La plupart de ces hypothèses sont exactes. Cependant, le paragraphe b) déforme la réalité étant donné que GL Trust agissait comme nue‑fiduciaire. De fait, les bénéficiaires de la fiducie, Thompson & Redford Holdings Ltd. et Golden Leaf Trust, ont construit l'ensemble d'habitations en faisant appel aux connaissances spécialisées de MAA Management Company Ltd. En outre, je signale que l'appelant n'était pas un administrateur de GL Trust lorsque le ministre a établi la cotisation. Il avait été libéré de cette charge environ un an et demi plus tôt.

 

[7]     L'appelant a témoigné pour son propre compte et J. Leung, vérificateur, a témoigné pour le compte du ministre. Les faits reconnus par les parties et les faits auxquels j'ai conclu comprennent les faits suivants. GL Trust a été fondée par M. Moh[1], homme d'affaires résidant à Taipei, en République de Chine. Elle a conclu une convention de coentreprise et de gérance (la « convention ») avec les groupes suivants :

 

(i)      Thompson and Redford Holdings Ltd., société de la Colombie‑Britannique (« Thompson »);

 

(ii)      Golden Leaf Development Trust (« Golden Leaf ») [2];

 

(iii)     MAA Management Co. Ltd., autre société de la Colombie‑Britannique (« MAA »).

 

La convention a été conclue en vue de l'acquisition et de la mise en valeur de terrains pour le compte de Thompson et de Golden Leaf (les « coentrepreneurs ») [3].

 

[8]     Monsieur Moh a engagé l'appelant et l'a fait nommer unique actionnaire et administrateur de GL Trust. À la demande de M. Moh, l'appelant a procédé à la constitution de Thompson, mais il ne détenait aucun intérêt bénéficiaire, ni dans la coentreprise ni dans Thompson.

 

[9]     La pièce A‑1, onglet 1, consiste en un double de la convention du 29 décembre 1989, laquelle fait état des modalités relatives à la coentreprise. Le préambule de la convention mentionne notamment ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

 

A.        Golden Leaf et Thompson and Redford, à titre de coentrepreneurs, conviennent d'acheter les terrains décrits aux présentes par l'intermédiaire de la fiduciaire [GL Trust], à titre de nue‑fiduciaire, en vue d'y construire le projet exposé plus loin.

 

B.         La fiduciaire sera la propriétaire inscrite des terrains et, à ce titre, elle détiendra les intérêts bénéficiaires indivis dans ces terrains en fiducie pour le compte de chacun des coentrepreneurs conformément à la déclaration de fiducie prévue par les présentes.

 

C.        Les coentrepreneurs détiendront, sous réserve des conditions stipulées dans la présente convention, les intérêts proportionnels précisés dans les présentes à titre de tenants communs.

 

D.        MAA a affirmé aux coentrepreneurs qu'elle possédait les compétences et les connaissances spécialisées nécessaires pour superviser la planification, l'élaboration, la construction, la commercialisation et la vente du projet.

 

Il convient de répéter que GL Trust, à titre de nue‑fiduciaire pour le compte des bénéficiaires de la coentreprise, soit Golden Leaf dans une proportion de 90 pour 100 et Thompson dans une proportion de 10 pour 100, ne détenait aucun intérêt bénéficiaire dans le projet immobilier.

 

[10]    En 1997 et en 1998, les coentrepreneurs ont fait construire les Golden Leaf Towers, à savoir deux tours de 15 étages (124 unités condominiales) et quatre maisons en rangée situées avenue Granville, à Richmond, en Colombie‑Britannique. Au 30 novembre 1998, seulement 50 unités avaient été vendues et les bénéficiaires étaient préoccupés non seulement par l'absence de rendement du capital investi, mais aussi par les nombreuses demandes d'argent reçues au fil des ans depuis 1989.

 

[11]    Une prise de contrôle inversée a été réalisée le 18 mai 1999. Par suite de cette prise de contrôle, Total Global Venturers (« Global ») a acquis l'ensemble des intérêts bénéficiaires dans les 74 unités restantes et dans les quatre maisons en rangée pour la somme de 1 $, et des actions de Global ont été émises aux investisseurs bénéficiaires. La prise de contrôle inversée visait à offrir une certaine souplesse aux investisseurs, puisque leurs actions seraient cotées en bourse. Apparemment, cette manoeuvre n'a pas eu l'effet escompté. La prise de contrôle inversée est décrite à l'onglet 19 du recueil conjoint de documents.

 

[12]    À partir du 18 mai 1999, Rancho Management Services, société de gestion immobilière, a été engagée pour louer les 78 unités restantes du projet. Le marché des condominiums s'était effondré en 1999 et toutes les unités avaient été louées avant le 31 décembre 1999 de manière à obtenir un certain rendement pour l'exploitation de la coentreprise. Contrairement à ce que prévoient les dispositions du paragraphe 228(2) de la Loi, aucune TPS n'a été payée.

 

[13]    À la demande de la majorité des bénéficiaires, l'appelant a démissionné de son poste chez GL Trust en août 2000, après quoi il [TRADUCTION] « n'était plus au courant ». En 2002, toutes les unités avaient été vendues et GL Trust ne détenait plus aucun élément d'actif, ni en fiducie ni pour son propre compte[4].

 

[14]    Étrangement, le ministre effectuait une vérification au moment où GL Trust vendait les unités, mais il n'a établi une cotisation que lorsque cette dernière ne détenait plus aucune unité. Le 30 janvier 2002, en application du paragraphe 191(1) de la Loi, le ministre a établi une cotisation d'une somme totale de 1 095 270 $ pour la fourniture à soi‑même de 78 unités en date du 31 décembre 1999. GL Trust n'avait aucun moyen de payer cette dette et le ministre a établi une cotisation à l'égard de l'appelant, mais non des bénéficiaires de GL Trust.

 

[15]    L'appelant, qui a agi comme administrateur du 13 décembre 1989 au 2 août 2000, s'est opposé à l'avis de cotisation établi à l'égard d'un tiers du 30 juillet 2002.

 

[16]    La thèse avancée par le ministre dans sa réponse à l'avis d'appel est la suivante :

 

[TRADUCTION]

 

(i)         GL Trust était responsable de percevoir et de verser la TPS nette au titre de la fourniture à soi‑même des 78 unités condominiales restantes. GL Trust participait à la convention, laquelle était une convention de coentreprise conclue avant 1990. GL Trust était un inscrit aux fins de la TPS ainsi que l'entrepreneur pour l'application de la Loi sur la taxe d'accise. Comme elle a produit les déclarations de TPS relatives à sa première période de déclaration après 1990 et a déclaré une TPS nette au titre du projet, GL Trust est réputée avoir fait un choix conjoint avec les autres coentrepreneurs selon l'article 273 et elle est donc responsable de la perception et du versement de la TPS au titre du projet et, plus particulièrement, au titre de la fourniture à soi‑même des 78 unités restantes au moment de la location de celles‑ci.

 

(ii)        À titre subsidiaire, GL Trust participait à la convention et à la coentreprise puisqu'elle a demandé un numéro d'entreprise aux fins de la TPS et qu'elle a choisi, en application de l'article 273, d'assumer la responsabilité liée aux biens et aux services fournis et acquis pour le compte des coentrepreneurs en vertu de la convention. L'appelant était l'administrateur de GL Trust, il était membre du comité ayant le pouvoir, en vertu de la convention, de prendre des décisions liant les coentrepreneurs et il était l'employé de MAA Management Co. Ltd. chargé de la gestion et de l'exploitation du projet; à ce titre, il avait connaissance de l'ensemble des circonstances au moment où GL Trust est devenue un inscrit. Le ministre s'est fondé sur l'inscription de GL Trust indiquant qu'elle était la personne responsable de la TPS.

 

(iii)       L'appelant est solidairement responsable avec GL Trust de la TPS impayée puisqu'il était un administrateur de GL Trust au moment où cette dernière était tenue de verser la TPS. Au 31 décembre 1999, les 78 unités restantes avaient été louées. La société fiduciaire était tenue de verser la TPS calculée suivant la juste valeur marchande des unités au plus tard le 31 janvier 2000. L'appelant a été administrateur de GL Trust du 13 décembre 1989 au 2 août 2000; par conséquent, il agissait en cette qualité au moment où GL Trust était tenue d'effectuer le versement. Toutes les conditions préalables à l'établissement d'une cotisation fondée sur le paragraphe 323(1) à l'égard de l'appelant sont réunies.

 

(iv)       Jusqu'à maintenant, l'appelant n'a pas réussi à établir qu'il a agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement de GL Trust de percevoir et de verser la TPS nette relative à la fourniture à soi‑même des 78 unités que ne l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

 

[17]    Les dispositions de la Loi les plus pertinentes en l'espèce comprennent les suivantes :

 

273(1) L'inscrit (appelé « entrepreneur » au présent article) qui participe à une coentreprise, sauf une société de personnes, en conformité avec une convention constatée par écrit, conclue avec une autre personne (appelée « coentrepreneur » au présent article) et portant sur l'exploitation de gisements minéraux, ou l'exploration afférente, ou sur une activité visée par règlement, peut faire, avec le coentrepreneur, un choix conjoint pour que les règles suivantes s'appliquent :

 

apour l'application de la présente partie, les biens et services fournis, acquis, importés ou transférés dans une province participante, pendant que le choix est en vigueur, par l'entrepreneur au nom du coentrepreneur aux termes de la convention dans le cadre des activités visées par celle-ci sont réputés l'être par l'entrepreneur et non par le coentrepreneur;

 

bl'article 177 ne s'applique pas à une fourniture visée à l'alinéa a);

 

cpour l'application de la présente partie, les fournitures de biens ou de services effectuées par l'entrepreneur au profit du coentrepreneur aux termes de la convention, pendant que le choix est en vigueur, sont réputées ne pas être des fournitures dans la mesure où les biens ou services seraient, sans le présent article, acquis par le coentrepreneur pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre des activités commerciales visées par la convention.

 

[...]

 

273(3) L'entrepreneur et le coentrepreneur qui font le choix peuvent le révoquer conjointement.

 

273(4) Le choix ou la révocation ne sont valides que s'ils sont faits en la forme déterminée par le ministre, contiennent les renseignements déterminés par lui et précisent la date de leur entrée en vigueur.

 

[...]

 

273(6) L'entrepreneur qui participe à une coentreprise, sauf une société de personnes, aux termes d'une convention, visée au paragraphe (1), conclue avant 1991 avec un coentrepreneur et qui produit une déclaration pour sa première période de déclaration commençant après 1990 portant que les biens et services qu'il a fournis, acquis ou importés pour le compte du coentrepreneur dans le cadre des activités visées par la convention sont fournis, acquis ou importés par lui et non par le coentrepreneur, est réputé avoir fait, conjointement avec le coentrepreneur et en conformité avec le paragraphe (4), le choix prévu au présent article.

 

273(7) Le paragraphe (6) s'applique à l'entrepreneur et au coentrepreneur qui sont parties à une convention si les conditions suivantes sont réunies :

 

al'entrepreneur informe le coentrepreneur, par avis écrit envoyé au plus tard le 31 décembre 1990, de son intention de produire une déclaration pour sa première période de déclaration commençant après 1990 contenant les renseignements prévus au paragraphe (6);

 

ble coentrepreneur n'a pas informé l'entrepreneur, par avis écrit envoyé au plus tard le premier en date du 1er février 1991 et du trentième jour suivant la réception de l'avis de l'entrepreneur, que tous les biens et services que l'entrepreneur se propose d'indiquer dans la déclaration n'ont pas à être considérés comme fournis, acquis ou importés par l'entrepreneur.

 

Analyse

 

[18]    Les parties reconnaissent que l'article 273 permet de résoudre la première question. Avant d'examiner cette disposition, il est utile de faire quelques observations au sujet de GL Trust et de la définition juridique de l'expression [TRADUCTION] « fiducie nue » (en anglais, « bare trust »). Vern Krishna, auteur renommé, a défini ainsi le terme anglais « bare trust » :

 

[TRADUCTION]

 

Dans le cas d'une « fiducie nue », le fiduciaire détient le bien au bénéfice d'une autre personne, mais n'assume aucune obligation autre que celle de détenir le bien et de respecter les instructions du bénéficiaire. Par conséquent, un nu‑fiduciaire ne remplit aucune obligation active relativement à la fiducie [...].

 

[19]    GL Trust répond à la définition de fiducie « nue ». Bien que l'Agence du revenu du Canada prévoie certaines dérogations pour les fiducies nues dans son document de politique TIB B‑068[5], ces mesures s'appliquent uniquement aux fiducies qui ne font que détenir un titre juridique à l'égard du bien en fiducie sans assumer aucune fonction ou obligation ni exercer aucun pouvoir à titre de fiduciaire, ce qui n'est pas le cas de GL Trust. L'article 273 n'offre pas d'avantages particuliers aux fiducies nues et, à ce titre, les dispositions s'appliquent donc en raison de l'inscription de GL Trust sous le régime de la Loi.

 

[20]    Selon l'article 273, l'inscrit (appelé « entrepreneur ») qui participe à une coentreprise en conformité avec une convention peut faire un choix conjoint avec les coentrepreneurs afin de verser la TPS pour le compte de la coentreprise. Le paragraphe 273(4) énonce que ce choix doit être fait en la forme déterminée et qu'il doit préciser la date de son entrée en vigueur. Le paragraphe 273(6) est une disposition déterminative qui se fonde sur la date à laquelle la convention de coentreprise a été conclue. L'application du paragraphe 273(6) est restreinte par le paragraphe 273(7), lequel oblige l'entrepreneur à informer les coentrepreneurs par avis écrit de son intention de produire les déclarations pour leur compte. Je conviens avec les parties que la réponse apportée aux questions suivantes est essentielle à leur thèse respective :

 

a)       GL Trust a-t-elle « particip[é] » à la coentreprise aux termes de l'article 273?

 

b)      GL Trust et les coentrepreneurs sont-ils réputés avoir choisi GL Trust à titre d'« entrepreneur » suivant le paragraphe 273(6)?

 

c)       GL Trust et les coentrepreneurs ont-ils fait ou ont‑ils prétendu faire un choix en application du paragraphe 273(4)?

 

[21]    Pour que l'article 273 s'applique, il faut établir que GL Trust a « particip[é] » à la coentreprise. Même si je conviens que le terme « qui participe » (« participant », en anglais) n'est pas défini dans la Loi, je ne puis souscrire à l'observation de l'appelant voulant qu'une telle définition soit donnée dans la décision Westcan Malting Ltd. c. La Reine[6]. À la lumière de la définition offerte par l'appelant et de celle donnée dans le dictionnaire Shorter Oxford English Dictionary, je conclus que GL Trust a participé à la coentreprise puisque la fiducie assumait une partie des responsabilités de la coentreprise par le truchement de sa gestion des terrains. Le dictionnaire Canadian Oxford English Dictionary, 5e édition, définit ainsi le terme anglais « participant » (« qui participe ») :

 

[TRADUCTION]

 

Personne qui participe à quelque chose; un participant.

 

Je souscris également au passage suivant de l'arrêt Hypothèques Trustco Canada c. Canada [7] :

 

Il est depuis longtemps établi en matière d'interprétation des lois qu'« il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur » [...]. Lorsque le libellé d'une disposition est précis et non équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d'interprétation. [...] [L]orsque les mots utilisés peuvent avoir plus d'un sens raisonnable, leur sens ordinaire joue un rôle moins important. L'incidence relative du sens ordinaire, du contexte et de l'objet sur le processus d'interprétation peut varier, mais les tribunaux doivent, dans tous les cas, chercher à interpréter les dispositions d'une loi comme formant un tout harmonieux.

 

[22]    Le ministre soutient que l'article 273 s'applique en l'espèce par suite de l'application du paragraphe 273(6), selon lequel l'entrepreneur (GL Trust en l'occurrence) est réputé responsable du versement de la taxe pour le compte de la coentreprise. Le paragraphe 273(7), qui prévoit explicitement qu'un avis « écrit » doit être envoyé aux coentrepreneurs au plus tard à une date précise, a pour effet de restreindre l'application du paragraphe 273(6). De plus, le ministre avance que cet avis a été donné lorsque l'appelant a signé la demande d'inscription aux fins de la TPS pour le compte de GL Trust et, qu'aux intervalles prévus, cette dernière a produit des déclarations de TPS par lesquelles elle demandait des crédits de taxe sur les intrants et déclarait une taxe nette pour chaque mois.

 

[23]    Même si le ministre soutient qu'il incombe à l'appelant d'établir qu'aucun avis n'a été envoyé aux coentrepreneurs, j'estime que l'appelant, par son témoignage, s'est acquitté de cette obligation.

 

[24]    Le ministre affirme en outre que l'appelant bénéficiait des services de conseillers professionnels pour établir quelle société devait être inscrite aux fins de la TPS s'il était de l'intention des parties de tomber sous le coup des dispositions du paragraphe 273(6) de la Loi. Ces conseillers n'auraient‑ils pas veillé à ce que les mesures appropriées soient prises pour permettre l'application de cette disposition? Sur le fondement de ce qui précède, je ne crois pas que le paragraphe 273(6) de la Loi s'applique en l'espèce.

 

[25]    D'autre part, le ministre soutient qu'en l'absence de choix réputé, la Cour doit conclure qu'un choix conjoint a été fait par les coentrepreneurs et GL Trust en application du paragraphe 273(4) de la Loi. Le ministre soutient que les exigences fixées au paragraphe 273(4) sont remplies puisque les renseignements visés se trouvent dans la demande présentée pour obtenir un numéro d'entreprise et dans la convention de coentreprise. La Loi ne précise pas les renseignements exigés ni la forme en laquelle ce choix doit être fait. Elle prévoit toutefois que la date d'entrée en vigueur du choix doit être mentionnée.

 

[26]    Bien que je ne sois pas lié par elle, la politique du ministre figurant dans le document P‑187 est utile[8]. Selon cette politique, les renseignements déterminés doivent être énoncés dans un document. Le ministre a en outre soutenu que les renseignements déterminés peuvent être fournis dans une convention de coentreprise ou dans une annexe à celle‑ci [TRADUCTION] « à la condition que ces renseignements soient présentés de telle sorte qu'ils permettent de savoir que les coentrepreneurs ont connaissance de l'obligation prévue à l'article 273 »[9]. Cela tombe sous le sens puisqu'on ne devrait pas être obligé de deviner ou de réunir les pièces d'un casse‑tête pour découvrir les renseignements déterminés et les relier entre eux. En l'espèce, le ministre veut tout avoir : il exige habituellement un respect scrupuleux de la forme tandis que, lorsque cela lui convient, comme en l'espèce, il demande qu'une norme moins rigoureuse soit appliquée.

 

[27]    Je conviens avec le ministre que les moyens très restrictifs par lesquels les contribuables peuvent se prévaloir de l'article 273 montrent bien qu'il s'agit d'une disposition d'allégement. Il ressort de tout l'article l'idée générale voulant que les parties doivent avoir conscience du choix et accepter celui‑ci, ce qui doit être constaté par une quelconque reconnaissance écrite. Je ne puis modifier les dispositions de la Loi. S'il avait été de l'intention du législateur qu'il soit possible d'examiner divers documents extrinsèques pour décider si l'exigence fixée à l'article 273 est respectée, il l'aurait précisé. Dans le cas contraire, tout contribuable pourrait compter sur l'application de cette disposition.

 

[28]    Les exigences prévues au paragraphe 273(4) ne sont pas remplies parce qu'à la lumière du raisonnement exposé dans la politique P‑187, les renseignements sur lesquels le ministre s'est appuyé ne se trouvent pas dans un document en particulier. En outre, aucune mention d'une date d'entrée en vigueur du choix ne figure dans l'un ou l'autre des documents présentés. Même si le ministre croit que le seul vice notable susceptible d'entacher un choix est l'absence d'une date d'entrée en vigueur, j'estime tout aussi important que les parties reconnaissent qu'un choix est effectué pour conclure que celui‑ci est valide.

 

[29]    De plus, il ressort des termes employés dans la convention qu'il était de l'intention des parties que les avantages et les obligations découlant de la coentreprise soient ceux des coentrepreneurs et non de GL Trust. Les passages suivants sont particulièrement pertinents :

 

[TRADUCTION]

 

2.4       La présente convention ne vise pas à créer une quelconque société en nom collectif ou un quelconque mandat entre les coentrepreneurs, et ne doit pas être interprétée comme si elle créait l'un ou l'autre. Aucune des stipulations énoncées aux présentes n'a pour effet que le projet soit réputé être un bien d'une société en nom collectif. Aucune des parties n'est, en raison de l'une ou l'autre des stipulations aux présentes, réputée être l'associée, la mandataire ou la représentante légale d'une autre partie, que ce soit pour l'application de la présente convention, pour les besoins du projet ou autrement. Sauf stipulation contraire expresse des présentes, aucune des parties n'a le pouvoir d'agir ou d'assumer des obligations ou des responsabilités pour le compte de l'une ou l'autre des parties, ni ne peut déclarer qu'elle a un tel pouvoir, que ce soit relativement au projet ou autrement.

 

2.5       Sauf entente écrite expresse signée par les deux coentrepreneurs, les obligations de ces derniers au titre du projet ainsi que les contrats conclus et les obligations assumées par eux relativement au projet sont, dans tous les cas, individuels au prorata de l'intérêt proportionnel de chaque partie, et non conjoints ni conjoints et individuels.

 

2.6       Ni la fiduciaire de Golden Leaf ni aucun de ses dirigeants ou employés ne peuvent être déclarés personnellement responsables aux termes de la présente convention ou autrement relativement au projet ou à la coentreprise, sauf dans la mesure où l'obligation découlant de cette responsabilité peut être exécutée ou acquittée au moyen du seul intérêt proportionnel de Golden Leaf.

 

8.3       Tous les intérêts, profits et avantages découlant des terrains et toutes les coûts engagés au titre des terrains ou se rapportant à ceux‑ci sont reçus, détenus ou engagés par la fiduciaire [GL Trust] pour l'utilisation et le bénéfice et pour l'avantage ou aux frais des coentrepreneurs dans les proportions respectives mentionnées au paragraphe 8.2 ci‑dessus. La fiduciaire dépose toutes les rentrées de fonds quelles qu'elles soient relatives aux terrains dans un compte détenu auprès d'une banque à charte canadienne et elle gère les fonds de ce compte conformément aux instructions reçues des coentrepreneurs.

 

[30]    En définitive, je conviens avec l'appelant que le paragraphe 273(4) ne s'applique pas dans la présente affaire, puisque les parties n'ont pas effectué le choix exigé par cette disposition. Compte tenu de mes conclusions voulant que l'article 273 ne s'applique pas en l'espèce, GL Trust n'était pas responsable de la perception et du versement de la taxe pour le compte des coentrepreneurs et, à ce titre, la cotisation établie à l'égard d'un tiers relativement à l'appelant ne doit pas être maintenue pour ces motifs.

 

[31]    Comme j'ai conclu que GL Trust n'était nullement responsable de la taxe, il est inutile de poursuivre, mais par souci de minutie je vais brièvement examiner la question subsidiaire soulevée par l'appelant. Dans l'hypothèse où GL Trust aurait été responsable de la taxe, l'appelant aurait‑il agi avec diligence raisonnable au sens du paragraphe 323(3) de la Loi?

 

[32]    Selon le paragraphe 323(3), l'administrateur n'encourt pas de responsabilité pour le défaut de versement s'il a agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement que ne l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

 

[33]    Le moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable tient pour l'essentiel à la prévention et il faut décider si l'appelant a agi avec diligence dans l'exercice de son pouvoir afin de prévenir le défaut de verser la taxe. Le ministre soutient qu'en raison de la situation d'administrateur interne de l'appelant, le fardeau qui incombait à ce dernier de prouver la diligence raisonnable est plus lourd. Or, je souscris plutôt à l'argument de l'appelant selon lequel le critère consiste à se demander si l'administrateur a agi de façon raisonnable dans les circonstances.

 

[34]    La question de savoir si la norme de soin se fonde sur le critère à la fois subjectif et objectif énoncé dans l'arrêt Soper c. Canada[10] ou sur le critère objectif énoncé par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Magasins à rayons Peoples inc. (Syndic de) c. Wise[11] suscite de nombreux débats. Vraisemblablement, il convient de « qualifier » ce critère d'objectif, compte tenu de la situation et des compétences précises de l'administrateur en cause, ce qui donne naissance à un élément à caractère subjectif.

 

[35]    L'appelant avance qu'il a fait ce qu'on pouvait raisonnablement attendre de lui. À titre d'exemple, il a obtenu des conseils professionnels quant à un éventuel assujettissement à la TPS découlant de la location des unités, il a tenté de réunir des fonds auprès d'investisseurs et de la banque, tous les investisseurs avaient été informés de l'imminence de l'assujettissement à la TPS par une mention dans les états financiers de Global visant 1999, il s'est assuré avant son départ de Global que son successeur et le conseil d'administration soient informés de la TPS impayée, et, enfin, au moment de son départ, Global disposait d'éléments d'actif suffisants pour payer la TPS. Comme l'a déclaré le juge Sharlow dans l'arrêt Gordon E. Smith c. La Reine[12] de la Cour d'appel fédérale :

 

La seule obligation d'un administrateur est celle d'agir raisonnablement dans les circonstances. Le fait que ses efforts n'ont pas donné de résultats ne vient pas démontrer qu'il n'a pas agi de façon raisonnable.

 

[36]    Il ressort des diverses lettres produites par l'appelant et du libellé très restrictif de la convention que l'appelant devait manifestement obtenir l'approbation des coentrepreneurs pour l'ensemble des activités. Les décisions qui avaient une incidence sur la coentreprise devaient être approuvées à l'unanimité par le comité constitué à la fois de M. Moh et de l'appelant.

 

[37]    L'appelant n'avait pas le pouvoir de faire des paiements à l'ARC sans l'autorisation et l'acceptation de M. Moh, de sorte qu'il ne lui restait plus qu'à informer toutes les parties de la TPS impayée et à leur recommander d'acquitter cette dette.

 

[38]    Même si on a mentionné à la Cour que l'appelant était ingénieur civil de son état, peu importe son expérience en matière commerciale, rien ne pouvait être fait sans le consentement et l'approbation de M. Moh. De plus, même si M. Moh a été informé de l'assujettissement à la TPS, il n'a pas donné son autorisation pour que la situation soit réglée par le paiement de la dette. Or, c'est lui qui avait le pouvoir de prendre cette mesure, non l'appelant.

 

[39]    En outre, au cours de deux réunions du conseil d'administration tenues en août et en septembre 2000 et auxquelles l'appelant a assisté, M. Tai Chen, le successeur de l'appelant, a assuré à toutes les parties qu'un plan de versement de la taxe impayée avait été élaboré et que, grâce à ses compétences en pareilles situations, la question allait être résolue.

 

[40]    Le ministre a entrepris la vérification en mars 2001 et le vérificateur de l'ARC n'a jamais communiqué avec l'appelant. Soixante‑dix‑sept unités ont été vendues entre mars et août 2001 — soit la période de vérification — pour un produit total de 11 845 200 $. Cependant, diverses négociations ont été entamées pendant cette période entre le vérificateur et M. Chen, le nouveau gérant. Compte tenu de la vente des unités et de la menace d'une faillite, comme le prétendait M. Chen, le seul recours encore possible consistait à établir une cotisation à l'égard de l'appelant.

 

[41]    À la lumière des circonstances très restrictives dans lesquelles l'appelant exerçait ses fonctions à titre d'administrateur de GL Trust et des mesures prises pour veiller à ce que la question de la TPS impayée soit réglée et examinée en priorité par les coentrepreneurs, j'estime que l'appelant a agi avec diligence et comme l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

 

[42]    L'appel est accueilli, avec dépens, et la cotisation est annulée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de décembre 2007.

 

 

« C. H. McArthur »

Le juge McArthur

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour de mars 2008.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI718

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2004-3699(GST)G

 

INTITULÉ :                                       JAMES NING LAU c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                  Le 25 juin 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L'honorable juge C.H. McArthur

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 5 décembre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l'appelant :

MMarjorie E. Brown et

MBrian J. Wallace, c.r.

Avocate de l'intimée :

MLinda L. Bell

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant :

 

                          Nom :                      MMarjorie E. Brown et

                                                          MBrian J. Wallace, c.r.

 

                          Cabinet :

 

       Pour l'intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1]           Monsieur Za‑Chieh Moh a obtenu un doctorat du Massachusetts Institute of Technology.

 

[2]           Entreprise de fiducie d'investissement à participation unitaire constituée le 29 décembre 1989 par MM. Za‑Chien Moh, Ching Tien Chou, Jimmy Tseng et James Ning Lau.

 

[3]           Conformément au paragraphe 1.9 de la convention.

 

[4]           En réalité, elle n'a jamais détenu de biens à son propre compte.

 

[5]           Bulletin d'information technique TIB B‑068 – Simples fiducies, 20 janvier 1993.

 

[6]           no 96‑434(GST)G, 1er avril 1998, 1998 G.S.T.C. 34 (C.C.I.).

 

[7]           [2005] 2 R.C.S. 601, 2005 Carswell Nat 3212.

 

[8]           Énoncé de politique P‑187 – Forme déterminée de choix concernant les coentreprises, 16 octobre 1997.

 

[9]           Observations écrites de l'intimée, page 8, paragraphe 37.

 

[10]          [1998] 1 C.F. 124, 97 D.T.C. 5407 (C.A.F.).

 

[11]          [2004] 3 R.C.S. 461.

 

[12]          no A‑154‑00, 26 mars 2001, 2001 CAF 84, 2001 G.T.C. 3516 (C.A.F.).

 

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