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Dossier : 2002‑2594(EI)

ENTRE :

RICK DESJARDINS,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 10 mars 2004 à Hamilton (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge G. Sheridan

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelant :

Penny Desjardins

 

Avocat de l’intimé :

Me Joel Oliphant

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L'appel est accueilli et la décision du ministre est annulée, selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour d’avril 2004.

 

 

 

 

« G. Sheridan »

Juge Sheridan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de juin 2004.

 

 

 

 

Daniel E. Renaud, traducteur


 

 

 

 

 

Référence : 2004CCI287

Date : 20040408

Dossier : 2002‑2594(EI)

ENTRE :

RICK DESJARDINS,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Sheridan

 

[1]     En l’espèce, l'appelant, M. Rick Desjardins, interjette appel à l’encontre de la décision du ministre selon laquelle l'emploi qu’il exerçait pour le compte de Tri R Trucking pendant la période du 20 mai 2001 au 31 août 2001 ne constitue pas un emploi assurable. Pour rendre sa décision, le ministre s’est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

 

a)         le payeur exploite une entreprise de camionnage;

 

b)         l’appelant a été embauché par le payeur comme conducteur de camion à benne afin de réaliser le déneigement pendant les mois d’hiver;

 

c)         les registres du payeur indiquent que l’appelant a fourni des services à l’appelant avant la période en litige et que l’appelant avait été rémunéré jusqu’à la semaine de paie se terminant le 20 mai 2001;

 

d)         l’appelant prétend avoir fourni d’autres services au payeur pendant la période en litige;

 

e)         aucun registre ni preuve n’existe pour étayer la prétention de l’appelant selon laquelle il aurait fourni des services pendant la période en litige.

 

[2]     L’issue du présent appel repose sur la question de savoir si, en fait, M. Desjardins a effectivement fourni à la Tri R Trucking des services pour lesquels il a été rémunéré pendant la période en litige. Il incombe à M. Desjardins de réfuter les hypothèses du ministre afin d’obtenir gain de cause, c’est‑à‑dire de faire valoir qu’il exerçait un emploi assurable. L’essentiel de sa prétention est que, nonobstant l’inscription, dans les registres de paie de la Tri R Trucking, du 20 mai 2001 comme sa dernière journée de travail, il a continué de travailler pour l’entreprise après cette date, jusqu’au 31 août 2001, et a été payé en espèces pour sa prestation de services.

 

[3]     La Tri R Trucking fournit, par la prestation de ses camions et de ses conducteurs, des services à des clients sur leurs chantiers de construction de par la province de l’Ontario. M. Desjardins est entré au service de Tri R Trucking en 1989, à titre de conducteur de camion tandem. Pendant les mois d’hiver, il conduisait un camion à benne pour faire du déneigement; pendant l’été, il transportait principalement de l’asphalte. Jusqu’au 20 mai 2001, il avait été rémunéré soit hebdomadairement soit mensuellement, en espèces ou par chèque, selon le mode de paiement fixé de temps à autre par M. Bradt, le président de Tri R Trucking.

 

[4]     Pendant la période en litige, M. Desjardins transportait de l’asphalte à divers chantiers de construction, notamment à Port Darlington, Belleville et London. Lorsqu’il lui arrivait de travailler sur un chantier situé ailleurs que dans la ville où se trouvait son domicile, il devait partager une « chambre » avec un autre membre de l’équipe dans un motel de la localité. Afin d’étayer son témoignage, il a présenté les copies de certains reçus, ou des lettres de confirmation, de certains motels où il a logé de mai à août 2001. Dans ces pièces, il est fait mention, sous diverses formes, de M. Desjardins, de l’entreprise Tri R Trucking, de l’adresse de l’entreprise ou du numéro d’immatriculation du camion de celle‑ci. M. Desjardins a témoigné que même s’il recevait chaque semaine un salaire fixe, ses heures de travail fluctuaient selon les besoins des clients. Il a de plus affirmé que c’était la pratique habituelle de M. Bradt de reporter les heures ouvrées au‑delà de 40 heures pendant une semaine, à une autre semaine pendant laquelle M. Desjardins avait travaillé moins de 40 heures. La Cour est convaincue que, conformément aux normes de procédure informelle applicables aux affaires visées par la Loi sur l'assurance‑emploi, la preuve étayée par M. Desjardins permet de conclure qu’il travaillait pour le compte de la Tri R Trucking à titre de membre de l’équipe, du 20 mai 2001 au 31 août 2001.

 

[5]     Il s’agit maintenant de décider si M. Desjardins a été rémunéré pour cet emploi. Pendant la période visée, M. Desjardins était responsable, outre ses tâches de camionnage, de la perception en espèces auprès de chaque client de la Tri R Trucking, à la fin de chaque semaine, et de la remise de ces sommes à M. Bradt. Ce dernier puisait à même la somme qui lui était remise, 575 $ qu’il remettait à M. Desjardins. M. Bradt n’a, ni remis de bulletin de paie pour les montants ainsi versés, ni réclamé de reçu à M. Desjardins. M. Desjardins a expliqué que cette pratique ne lui avait alors inspiré aucune crainte puisque, selon son expérience, le paiement en espèces est monnaie courante dans le domaine de la construction.

 

[6]     La nature même des transactions en espèces pose une difficulté (ou, selon la perspective qu’adopte le principal intéressé, présente un avantage) : elles ne laissent normalement aucune trace derrière elles. M. Desjardins a raconté sa version des faits de façon crédible. Il a, dans la mesure où cela lui était possible (étant donné que son employeur était en possession des registres des camions et des reçus d’hébergement, de location de véhicule, et autres) rassemblé une documentation raisonnablement fiable dans le but d’étayer sa prétention. Il aurait été bénéfique à la Cour d’avoir pu entendre M. Bradt. Cependant, malgré les efforts déployés par l’avocat de la Couronne, le seul témoin présent de la Tri R Trucking était l’adjointe administrative de M. Bradt, Mme Cindy Campbell. Bien que Mme Campbell ait témoigné avec franchise, la pertinence de son témoignage a été grandement limitée par le fait qu’elle ne travaillait pour le compte de la Tri R Trucking que depuis novembre 2001, soit bien après le départ de M. Desjardins. En conséquence, elle ne possédait aucune connaissance personnelle des transactions conclues entre M. Bradt et M. Desjardins pendant la période visée par le présent appel. Ainsi, Mme Campbell n’a pu faire autrement que de répéter à l’audience les renseignements que M. Bradt, absent à l’audience, avait bien voulu lui divulguer. Étant donné la nature des transactions entre M. Desjardins et M. Bradt, son témoignage n’a donc pas été d’un grand secours à la Cour.

 

[7]     La Cour est convaincue que M. Desjardins a réussi à réfuter les hypothèses sur lesquelles le ministre a fondé sa décision. La Cour conclut que l’appelant a travaillé pour le compte de la Tri R Trucking pendant la période du 20 mai 2001 au 31 août 2001 et qu’il a touché, en contrepartie de sa prestation de travail, la somme hebdomadaire de 575 $. L’appel est accueilli et la décision du ministre est annulée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour d’avril 2004.

 

 

« G. Sheridan »

Juge Sheridan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de juin 2004.

 

 

 

 

 

Daniel E. Renaud, traducteur

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