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Dossier : 2000-3420(IT)G

ENTRE :

DAVID RAJCHGOT,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

_________________________________________________________________

 

Appels entendus sur preuve commune, en même temps que l’appel de

Jacqueline Lacey (2000-3445(IT)G) le 11 février 2004 à Montréal (Québec)

 

Devant : L'honorable Gerald J. Rip

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelant :

Nicolas Cloutier

 

Avocat de l'intimée :

 

Alain Gareau

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard de l'année d'imposition 1997 est rejeté, avec dépens.

 

Signé à Ottawa (Canada), le 11 août 2004.

 

 

 "Gerald J. Rip"

Le juge Rip

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de mars 2005

 

François Brunet, traducteur

 

 


 

 

 

 

 

Dossier : 2000-3445(IT)G

ENTRE :

JACQUELINE LACEY,

appelant,

Et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

 

Appels entendus sur preuve commune, en même temps que l’appel de

David Rajchgot (2000-3420(IT)G) le 11 février 2004 à Montréal (Québec)

 

Devant : L'honorable Gerald J. Rip

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelante :

Nicolas Cloutier

 

Avocat de l'intimée :

 

Alain Gareau

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard de l'année d'imposition 1997 est rejeté, avec dépens.

 

Signé à Ottawa (Canada), le 11 août 2004.

 

 

"Gerald J. Rip"

Le juge Rip

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de mars 2005

 

 

 

François Brunet, traducteur


 

 

 

Référence : 2004CCI548

Date: 2004-08-11

Dossier : 2000-3420(IT)G

ENTRE :

DAVID RAJCHGOT,

appelant,

Et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2000-3445(IT)G

ENTRE :

JACQUELINE LACEY

appelante,

Et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Rip

 

[1]     Les appelants, David Rajchgot et Jacqueline Lacey, en appellent de cotisations d’impôt dans lesquelles le ministre du Revenu national a établi que tous deux avaient subi des pertes en capital lorsqu’ils ont vendu des valeurs mobilières de Tee‑Comm Electronics Inc. (« Tee-Comm »). Les appelants, mari et femme, dans leur déclaration d’impôt, ont déclaré que leurs pertes n’étaient pas des pertes en capital. M. Rajchgot fait appel d’une cotisation pour 1997 et Mme Lacey fait conjointement appel de cotisations pour les années allant de 1994 à 1997 inclusivement.[1]

 

[2]     Ces appels ont été entendus sur preuve commune. M. Rajchgot a témoigné en son nom et en celui de son épouse. À l’ouverture du procès, les parties ont convenu que le contrôle des opérations et des affaires de Mme Lacey au cours des années d’imposition pertinentes avait été exercé par son mari et que les intentions et les activités de M. Rajchgot auraient une incidence sur la détermination de la question de savoir si les pertes des appelants sont imputables au capital ou au revenu.

 

[3]     M. Rajchgot a obtenu son diplôme en finances de l’université McGill avec grande distinction. Après avoir été reçu par l’ordre des comptables agréés en 1983, il a assumé les fonctions de vérificateur junior au service d’un prédécesseur de Ernst & Young.

 

[4]     En 1985, M. Rajchgot a été employé par un grand magasin junior en qualité de directeur financier. Il a été rapidement promu et il est devenu vice‑président aux finances et il a été nommé au conseil d’administration en qualité de secrétaire et de trésorier. Il était notamment chargé de toutes les questions comptables et de la gestion du portefeuille des valeurs mobilières détenu par son employeur.

 

[5]     Ultérieurement, M. Rajchgot est entré au service d’une société du nom de Laura's Shoppe (P.V.) Inc. (« Laura »). Laura est une chaîne de vente au détail de produits pour dames, spécialisée dans les vêtements et accessoires pour dames. Chez  Laura, M. Rajchgot était actionnaire minoritaire et Kalman Fisher, le président de Laura, était l’actionnaire majoritaire. M. Rajchgot était chargé de tous les aspects de l’entreprise, à l’exception de l’achat même des produits. Lorsqu’il est entré au service de Laura, elle était au bord de la faillite et propriétaire de six magasins à Montréal. En 1998, la société était prospère et exploitait environ 200 magasins.

 

[6]     Au mois de juillet 1998, M. Rajchgot a démissionné de chez Laura pour constituer sa propre société de consultation, Bunra Investment Inc. (« Bunra »). Bunra propose des solutions sur les questions de commerce au détail et de technologie aux grandes sociétés au Canada et aux États-Unis.

 

[7]     De 1984 à 1993, M. Rajchgot a aussi enseigné à temps partiel à l’école supérieure de commerce de l’université McGill. Il a donné des cours aux étudiants du programme d’études comptables supérieures; il a d’abord dirigé des études de cas, et il a ensuite donné des cours sur les fusions et acquisitions, ainsi que sur le financement des entreprises.

 

[8]     M. Rajchgot a commencé à investir à la fin des années 80. Il a déclaré qu’il n’avait initialement pas beaucoup de fonds et qu’il achetait surtout des actions de e premier ordre, dans des sociétés comme B.C.E. Enterprises Inc. et des banques à charte canadiennes. Il a investi de manière prudente. Il voulait protéger son capital. À l’origine, son portefeuille n’était ni très développé ni financé par le recours à l’emprunt; il mettait surtout l’accent sur des sociétés sûres versant des dividendes ou des valeurs donnant droit à des avantages fiscaux garantis.

 

[9]     M. Rajchgot a dit que, avec le temps, il a commencé à investir dans des actions de nature plus spéculative. Il a adopté une stratégie d’investissement à plus haut risque. Il a acheté des actions en ayant recours à diverses formes de financement, en se servant souvent de comptes sur marge avec son courtier. M. Rajchgot s’est livré à des opérations de couverture et d’options d'achat d'actions, et il a aussi suivi des stratégies d’investissement comportant à la fois des écarts et des stellages. Pour faciliter ses acquisitions, M. Rajchgot a étudié les marchés, a lu un grand nombre de livres et de documents de recherche, comme des magazines boursiers, et des sites internet. Au cours des années, M. Rajchgot a récolté les profits de ses investissements, qui ont été déclarés comme gains en capital. Cependant, en 1996, il a subi des pertes, qu’il a déclarées comme pertes en capital. En 1997, lui et sa femme ont subi des pertes importantes s’élevant respectivement à 364 600 $ et à 441 091$ et ils ont déclaré ces pertes comme des pertes en capital.

 

[10]    La plus grande part des pertes de 1996 et de 1997 se rapportait à la disposition des valeurs mobilières de Tee-Comm. Tee-Comm était une société ouverte cotée à la bourse de Toronto. Elle fabriquait et distribuait des systèmes analogiques de télévision par satellite à domicile. En 1995, Tee-Comm a modifié sa stratégie commerciale et elle est entrée dans le marché de radiodiffusion directe par satellite-(« RDS »). Tee-Comm a élaboré le matériel ainsi que les logiciels destinés à appuyer un nouveau système de télévision par satellite. M. Rajchgot a déclaré que Tee-Comm espérait être le premier fournisseur de service de télévision par transmission digitale au Canada. En février 1997, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a approuvé la demande d’exploitation d’un service canadien de distribution par satellite RDS. Le 28 février 1997, Tee-Comm a commencé à expédier des boîtes de téléviseur et des antennes paraboliques partout au Canada. Cependant, en mars 1997, Tee-Comm a déclaré une perte importante et les investisseurs ont commencé à prendre leurs distances avec ses actions. La même année, en mai, les administrateurs de Tee-Comm ont démissionné et la bourse de Toronto a cessé de coter les actions de Tee-Comm. À l’époque, la Banque de Montréal a exigé le remboursement immédiatement de ses prêts de Tee-Comm et a nommé un syndic intérimaire.

 

[11]    Dans son témoignage, M. Rajchgot a déclaré que lui et, on peut le supposer, Mme Lacey, et M. Fisher ont commencé à investir dans les actions de Tee-Comm à la fin de l’année 1995.

 

[12]    M. Rajchgot a rappelé que ses premiers investissements dans Tee-Comm étaient « passifs ». Cependant, il a déclaré que les choses sont devenues plus fébriles en 1996 et qu’il a joué un rôle plus actif. À ce moment, son investissement était couvert par un endettement très élevé et il surveillait de près chaque bribe d’information relative à Tee‑Comm. Il a aussi déclaré que son rang chez Tee-Comm s’est considérablement élevé en 1997, quand il s’est livré à diverses opérations, comme l’acquisition d’options en grand nombre. Le tableau suivant expose les opérations effectuées par M. Rajchgot relativement aux actions de Tee-Comm au cours de la période allant de 1995 à 1997[2]:     

Date de clôture

M/J/A

Achats/

ventes

Description

Prix

Quantité

11/03/1995

2 000P

Tee-Comm Electronics Inc.

12,750

25 700,37

11/07/1995

1 000P

Tee-Comm Electronics Inc.

13,375

13 475,37

04/26/1996

3 000P

Tee-Comm Electronics Inc.

11,500

34 800,50

05/01/1996

10 000P

Tee-Comm Electronics Inc.

11,950

120 000,50

07/04/1996

3 000P

Tee-Comm Electronics Inc.

13,500

40 680,50

07/10/1996

1 100P

WTS Tee-Comm Electronics

1,900

2 165,50

08/28/1996

9 600P

Tee-Comm Electronics Inc.

10,346

99 906,74

01/31/1997

50P

Call-100 Tee-Comm expiration le 22 février 1997

0,900

4 650,50

01/31/1997

35P

Call-100 Tee-Comm expiration le 22 mars 1997

1,300

4 700,50

02/21/1997

1 500S

Tee-Comm Electronics Inc. Échange financier

 

10 000,00

02/25/1997

50S

Call-100 Tee-Comm Expired

 

 

03/24/1997

35S

Call-100 Tee Comm Expired

 

 

04/22/1997

5 000S

Tee-Comm Electronics Inc.

3,150

15 499,50

04/28/1997

2 800P

Tee-Comm Electronics Inc. Échange financier

 

4 760,00

04/28/1997

100S

  Tee-Comm Electronics Inc

1,540

 

04/28/1997

7 500S

  Tee-Comm Electronics Inc

1,550

 

04/28/1997

400S

Tee-Comm Electronics Inc

1,600

 

04/28/1997

5 000S

Tee-Comm Electronics Inc.

 

5 488 87

05/14/1997

7 100S

Tee-Comm Electronics Inc.

0,860

6 005,50

05/14/1997

3 000S

Tee-Comm Electronics Inc.

0,860

1 802,45

 

[13]    M. Rajchgot a aussi déclaré que, au cours des années, il a périodiquement des entretiens avec le président et d’autres représentants de Tee-Comm. Il a communiqué avec des dirigeants d’autres sociétés faisant affaire avec Tee-Comm au Canada et aux États-Unis. En outre, lui et M. Fisher ont visité les installations de Tee-Comm à Milton (Ontario), et ils ont eu droit à une visite guidée. Le président de Tee-Comm a alors parlé du produit et a répondu aux questions. MM. Rajchgot et Fisher ont aussi été présentés à M. James Wilkinson, vice-président aux finances, qui occupait auparavant un poste similaire chez Nortel au cours des bonnes années que celle-ci avait connues; selon M. Rajchgot, M. Wilkinson leur a indiqué que la commercialisation du produit prendrait six mois, et que si Tee-Comm ne servait qu’un demi de un pour cent du marché américain, le seuil de rentabilité serait atteint. M. Rajchgot a déclaré que, à la suite de cette rencontre, lui et M. Fisher ont été très impressionnés par le produit et la société et ils ont acheté encore d’autres actions.  Monsieur Rajchgot a aussi déclaré qu’il avait dîné avec le président et le vice-président aux finances de Tee-Comm en septembre 1996.

 

[14]    La question dont je suis saisi est la suivante : les appelants ont-ils subi des pertes d’« entreprise »? Ce terme englobe notamment les projets comportant un risque ou les affaires de caractère commercial : par. 248(1) de la Loi sur l’impôt sur le revenu.

 

[15]    Dans l’arrêt Irrigation Industries Ltd. c. M.R.N., 62 DTC 1131(C.S.C.), le juge Martland, au nom des juges de la majorité, a énoncé les « critères positifs » qui avaient été examinés à l’origine par le juge Thorson dans l’affaire Minister of National Revenue c. Taylor, [1956] C.T.C. 189 :

 

(1) la personne a-t-elle disposé du bien acquis comme le ferait habituellement un commerçant?  (2) la nature et la quantité des biens qui font l'objet de l'opération peuvent-elles exclure la possibilité que leur vente ait été la réalisation d'un placement ou qu'elle ait été de nature capitale ou qu'elle ait pu avoir lieu autrement qu'à titre d'opération commerciale?[3]

 

[16]    Dans l’arrêt in La Reine c. Vancouver Art Metal Works Limited,[4] la Cour d’appel fédérale a énoncé les facteurs pertinents pour déterminer si le contribuable exerce un commerce ou une entreprise de valeurs mobilières :

 

Je ne doute aucunement que le contribuable dont la profession ou l'entreprise consiste à acheter et à vendre des valeurs mobilières est un commerçant ou un courtier en valeurs mobilières au sens de l'alinéa 39(5)a) de la Loi. Comme l'a dit le juge Cattanach dans l'arrêt Palmer, MA c. La Reine13 13 [1973] CTC 323 (C.F. 1re inst.). , "[o]n reconnaît qu'une personne qui accomplit de manière habituelle des actes susceptibles d'engendrer des bénéfices s'est engagée dans un commerce ou une entreprise"14 14 Id., à la p. 325. La question de savoir si une série d'actes équivaut à l'exploitation d'un commerce ou d'une entreprise constitue toutefois une question de fait. Chaque cas sera jugé selon les faits qui lui sont propres. Il est évident que les facteurs tels que la fréquence des opérations, le temps pendant lequel les valeurs ont été conservées, (pour réaliser un bénéfice rapide ou pour en faire un placement à long terme, par exemple), l'intention d'acheter pour revendre à profit, la nature et la quantité des valeurs mobilières détenues ou qui font l'objet de l'opération, le temps consacré à l'activité en question, sont tous des facteurs pertinents et qui aident à déterminer si une personne exerce un commerce ou une entreprise de courtage.

 

[17]    Le facteur décisif pour déterminer si le contribuable a acquis un bien à des fins d’investissement ou commerciales est son intention au moment de l’acquisition du bien. Il faut déterminer cette intention en se fondant sur l’ensemble de la conduite de l’appelant.

 

[18]    Pour conclure que M. Rajchgot (et sa femme) ont été des entrepreneurs ou que les achats et les ventes des actions étaient de nature commerciale, je dois déterminer quelle était l’intention de M. Rajchgot lorsqu’il a acquis ces actions eu égard à sa conduite. Les parties conviennent que l’intention de Mme Lacey était celle de son mari. Pour déterminer l’intention de M. Rajchgot, les facteurs tels que la fréquence des opérations, le temps pendant lequel les valeurs ont été conservées, (pour réaliser un bénéfice rapide ou pour en faire un placement à long terme, par exemple), la nature et la quantité des valeurs mobilières détenues ou qui font l'objet de l'opération, le niveau de financement des valeurs mobilières, le temps consacré à l'activité en question, ses motifs et ses connaissances particulières, tout cela doit être pris en considération. Ce n’est ni l’absence ni l’existence de l’un au moins de ces critères qui permet de déterminer si une opération est imputable au capital ou au revenu; c’est l’effet combiné de tous ces facteurs qui est important. Il n’y a pas de formule magique pour déterminer quels sont les facteurs qui sont plus ou moins importants. Certains facteurs se complètent. Chaque cas est différent. Le juge doit soupeser tous ces facteurs. Pour statuer sur les appels dont je suis saisi, il faut au moins examiner les facteurs suivants :

 

a) La fréquence des opérations

 

[19]    Selon le témoignage de M. Rajchgot, il a participé à de nombreuses opérations d’achat d’actions de Tee-Comm au fil des ans. En écoutant sa déposition au cours du procès, j’ai eu l’impression que l’appelant achetait et vendait constamment des actions de Tee-Comm. Cependant, selon les pièces produites, M. Rachgot a effectué environ 11 achats au cours de la période allant de 1995 à 1997. Au cours de la période visée par l’appel, il a acquis deux blocs de bons de souscription d'obligations, l’un consistant en 50 options et l’autre de 35 options. Les premiers 50 bons de souscription d'obligations ont expiré sans valeur le 22 février 1997 et le deuxième bloc a expiré sans valeur le 22 mars 1997. De plus, l’appelant a effectué un échange financier de 2 800 actions. L’avocat des appelants soutient que le nombre d’opérations est faible car M. Rajchgot achetait de gros blocs d’actions et que le nombre d’opérations est variable : tout dépend si l’on acquiert un genre de valeur mobilière ou un grand nombre de différentes valeurs mobilières. Ces opérations ne reflètent pas une fréquence qui évoque un entrepreneur en valeurs mobilières.

 

[20]    L’avocat des appelants s’appuie sur la jurisprudence McGroarty c. Ministre du renenu national, [1994] 2 C.T.C. 52. Dans cette cause, la section de première instance de la Cour fédérale a conclu que le contribuable était un entrepreneur. Cependant, elle a déclaré au paragraphe 21 :

 

En l'espèce, le demandeur a effectué de nombreuses opérations comprenant un rapide changement de mains des actions. Comme le montre le Tableau 1, à la page 5, on compte plus de 300 achats d'actions différents au cours de cette période de cinq ans, mettant en cause plus de 300 000 actions. Un nombre encore plus élevé d'actions ont été vendues au cours de la même période. De plus, le demandeur a déposé que davantage de ventes d'actions ont eu lieu pour des considérations liées à leur prix plutôt que pour satisfaire aux appels de marge. Comme l'a dit le juge Pinard dans l'arrêt Placements Bourget Inc. v. The Queen, 88 D.T.C. 6274 (C.F. 1re inst. ):

 

Or, dans le présent cas, la demanderesse, dans le cadre de sa principale activité, a effectué plusieurs centaines de transactions de façon à tirer rapidement profit de l'achat et de la revente d'actions. Il importe peu, dans les circonstances, que la demanderesse n'ait pas été elle-même courtier en valeurs mobilières; elle a néanmoins exercé le commerce de valeurs mobilières et le profit du résultat de ses transactions constitue véritablement un revenu d'entreprise.

 

[21]    En l’espèce, la quantité des opérations n’était pas importante au point d’exclure la possibilité que les ventes des actions constituaient la réalisation d’un investissement. Les appelants n’ont pas effectué des opérations fréquentes et de grande envergure. Avant 1997, les appelants ont déclaré leurs dispositions d’actions comme des opérations en capital. M. Rajchgot a signé sa déclaration d’impôt pour  1996 le 4 avril 1997. Dans la déclaration d’impôt pour 1996, les dispositions des actions de Tee-Comm sont déclarées comme des pertes en capital. Vers le 4 avril 1997, il était conscient de la situation financière difficile de Tee-Comm. En 1997, M. Rajchgot a acheté des options, a effectué deux échanges financiers, et il a commencé à vendre des actions de Tee-Comm, déclarant ces opérations au titre de revenu d’exploitation dans sa déclaration d’impôt.

 

b) Le temps pendant lequel les valeurs ont été conservées

 

[22]    Les pertes subies par les appelants ont été subies relativement aux valeurs mobilières de Tee-Comm achetées en 1995, 1996 et 1997. Les 85 options Tee-Comm achetées en 1997 ont été conservées pendant une période allant de un à deux mois. Dans la plupart des cas, les actions elles-mêmes ont été conservées par M. Rajchgot pendant des périodes allant de un à deux ans.

 

[23]    Ces durées de conservation des actions ne montrent pas l’intention d’effectuer des « opérations éclair » ou un profit rapide. Les options et les actions de 1997 n’ont été conservées que pendant une courte période, jusqu’à l’effondrement du marché.

 

[24]    M. Rajchgot a déclaré qu’à un certain moment, le cours des actions de Tee-Comm a atteint 16 $ et qu’il aurait pu réaliser un profit important, mais qu’il a choisi de ne pas vendre. Ces faits ne traduisent pas l’attitude d’un entrepreneur voulant faire un profit rapide.

 

c) La nature et la quantité des valeurs mobilières détenues

 

[25]    Selon les preuves produites, Tee-Comm n’a jamais versé de dividendes et n’a jamais été en mesure de le faire. En raison de sa situation financière, Tee-Comm a été incapable de verser des dividendes.

 

[26]    Les appelants ont soutenu que leur intention n’était pas de recevoir des dividendes, mais de faire un profit rapide. Les appelants ne cherchaient pas un investissement rapide ou à long terme; leur avocat a soutenu qu’ils voulaient faire des opérations rapides tout en faisant un profit. Les appelants ont plaidé que les actions de Tee-Comm ne constituaient pas des placements conservateurs, mais qu’ils étaient de nature spéculative. Les appelants affirment qu’ils se sont livrés à une spéculation effrénée. Ils étaient conscients que Tee-Comm n’avait pas de produit, que la société construisait son produit, ils espéraient qu’il marcherait, et il a d’ailleurs bel et bien marché quelques 10 ans plus tard.

 

[27]    Pour déterminer si des actions ont été acquises à des fins de capital ou de revenu d’exploitation, la probabilité qu’elles produiront des dividendes n’est pas très significative. Une personne peut acheter des actions dans l’espoir et la prévision que leur valeur montera. Comme l’a dit Lord Buckmaster, si le cours des actions « [traduction] s’élève comme prévu, leur vente ne donne pas lieu à un revenu d’exploitation »[5]. Nombreux sont ceux qui investissent dans les sociétés « à démarrage » ou celles qui sont prometteuses; ils ne recherchent pas forcément des dividendes. Ces investisseurs prévoient une hausse du cours des actions qu’ils ont achetées et il est fréquent qu’ils n’exercent pas une activité commerciale.

 

[28]    L’avocat des appelants attire aussi mon attention sur l’extrait suivant de la décision Woods c. Sa Majesté la reine, 96 DTC 1995, dans lequel je disais, au paragraphe 19 :

 

Aux fins de l'espèce, le critère de la nature du bien acheté et revendu revêt également de l'importance.  Lorsqu'un bien ne produit pas de revenu et que la seule façon de réaliser un bénéfice à son égard est de le vendre, on peut déduire qu'une telle opération est un projet comportant un risque de caractère commercial : voir Taylor v. M.N.R., 56 D.T.C. 1125, et Ruthridge v. C.I.R., 14 T.C. 490.

 

[29]    M. Rajchgot a déclaré que, en 1995, Tee-Comm constituait un investissement passif. À l’origine, il a investi en acquérant plusieurs milliers d’actions. Cependant,  M. Rajchgot prétend que, vers 1997, cet investissement est devenu actif et fébrile. Cependant, la preuve ne réflète pas de grandes activités fébriles d’achat et de vente. Je n’ai aucun doute sur le fait que M. Rajchgot a méticuleusement enquêté sur les activités et les perspectives de Tee Comm, mais je suis d’avis qu’il n’y a pas nécessairement que les entrepreneurs qui vont agir ainsi; il peut aussi arriver que les investisseurs prudents font des recherches fouillées concernant des investissements aux fins d’achat ou de vente. En l’occurrence, on ne peut parler d’affaire à caractère commercial.

 

d) Le temps consacré à l’activité en question

 

[30]    M. Rajchgot a déclaré qu’il consacrait beaucoup d’énergie à Tee-Comm et qu’il passait beaucoup de temps à acheter et à vendre des actions de Tee-Comm. Il était au téléphone chaque jour avec son courtier, il vérifiait minute par minute sur Internet les opérations relatives à ces actions, et il lisait les communiqués de presse. Dans son témoignage, il a déclaré qu’il parlait au président de Tee-Comm quotidiennement. M. Rajchgot a déclaré que, en 1996 et 1997, il a consacré plus de temps à Tee-Comm qu’à gérer Laura, même s’il en était le vice-président et actionnaire, alors qu’elle avait plus de 100 magasins. Dans son témoignage, il a déclaré que, en 1997, il consacrait de trois à quatre heures par jour aux actions de Tee-Comm, essayant de saisir les informations, parlant aux personnes ayant affaire avec Tee-Comm, et rassemblant les informations dont il avait besoin pour justifier son investissement.

 

[31]    Je conviens que M. Rajchgot est une personne très éduquée et versée dans son domaine. Cependant, dans le monde d’aujourd’hui, il n’est pas inusité de voir des investisseurs consacrer beaucoup de temps à faire des recherches relatives à des achats éventuels, devant leur ordinateur ou au téléphone avec un courtier. Les activités de M. Rajchgot en 1997 visaient à éviter des pertes ou à réduire ses pertes relativement à son investissement. Lors des premières acquisitions en 1995 et 1996, il ne consacrait pas trois ou quatre heures par jour à Tee-Comm.

 

e) Le financement

 

[32]    Les appelants ont financé leurs actions dans Tee-Comm avec leurs comptes sur marge. M. Rajchgot a fait des emprunts à son courtier et à Laura. Sa déclaration d’impôt confirme le fait que son taux d’endettement était très élévé et il payait 14 000 $ d’intérêts sur ses emprunts pour financer ses actions.

 

f) Ses connaissances particulières

 

[33]    M. Rachgot a déclaré qu’il était très versé dans les opérations boursières, que ses connaissances en la matière sont équivalentes à celles de la plupart des courtiers. Il a les connaissances, les qualifications, l’expérience pour gérer des actions et des valeurs mobilières, tout comme un courtier ou un entrepreneur en valeurs moblières.

 

[34]    M. Rachgot lisait aussi les magazines spécialisés, comme Audiophile et Tech Buff, et il a remarqué que le digital constituerait la vague suivante, et il était en contact avec les personnes dirigeant la société. Il a rencontré le président ainsi que le vice-président aux finances de Tee-Comm et il a eu des entretiens avec eux. Il a aussi communiqué avec des éventuels associés commerciaux de Tee ‑Comm.

 

[35]    Dans la décision Kane c. La Reine,[6] précité, la Cour a appliqué les facteurs énoncés dans la décision Vancouver Art Metal et elle a jugé que les connaissances particulières du contribuable constituaient un facteur décisif :

 

En l'espèce, le demandeur avait une connaissance spéciale du marché sur lequel les actions d'Orell étaient négociées. Il était l'un des administrateurs de la corporation, son président, et un initié étant donné les valeurs mobilières qu'il détenait, ainsi qu'un promoteur au sens où ce mot est défini dans la Securities Act de la Colombie-Britannique. Cependant, fait encore plus important, il prenait directement part aux entreprises minières d'Orell et aidait à organiser les offres de financement public. Cela étant, il était en mesure de prévoir quelle serait la réaction du marché aux activités continues d'Orell. Tel est le contexte dans lequel le demandeur achetait et vendait les actions d'Orell. Ses activités boursières portaient non seulement les marques habituelles qui caractérisent les activités des preneurs habituels de risques, mais elles étaient aussi effectuées par rapport à la connaissance spéciale que le demandeur avait du marché sur lequel les actions d'Orell étaient négociées et elles étaient fondées sur cette connaissance. A mon avis, il s'agit d'activités d'un commerçant ou d'un courtier en valeurs mobilières au sens où ces mots sont employés au paragraphe 39(5) de la Loi.

 

[36]    Les connaissances de M. Rajchgot n’étaient pas particulières au point qu’il pouvait prévoir la réaction du marché. Aucun élément de preuve n’indique que ses connaissances aient contribué à son succès sur le marché financier ou aient eu une influence quelconque sur le marché. Je ne vois en l’occurrence quelque connaissance particulière que ce soit. Il n’avait aucun lien avec Tee-Comm, il n’était pas employé par Tee-Comm; il a simplement acheté les actions de la société après avoir soigneusement effectué des recherches concernant ces actions. Il n’avait donc aucune connaissance particulière qu’autrui n’aurait pu acquérir.

 

Conclusion

 

[37]    La plupart des actions de Tee-Comm ont été achetées par les appelants en 1995 et en 1996. Ils ont déclaré les gains et les pertes découlant de la disposition  de ces actions pour ces années comme gains et pertes en capital. En 1997, ils ont déclaré leur pertes comme des pertes d’entreprise. L’avocat des appelants s’appuie sur la jurisprudence Harrison c. Ministre du Revenu national[7] pour soutenir que le fait de qualifier les pertes comme pertes en capital ou en revenu d’exploitation dans une déclaration d’impôt n’est pas décisif quant à la nature des opérations en cause. Le principe de la décision Harrison peut faire l’objet d’une distinction. Dans cette affaire, le contribuable avait fait sa déclaration d’impôt pour la période visée par l’appel et avait déclaré une perte en capital. Après avoir changé de comptables, le contribuable avait fait une déclaration modifiée dans laquelle il avait déclaré une perte d’entreprise. En l’espèce, il ne s’agit pas de requalifier les pertes en capital de 1995 et de 1996; il faut étudier l’intention déclarée par le contribuable au cours de cette période. Si les déclarations d’impôt antérieures ne sont pas forcément déterminantes, elles peuvent donner des indications quant à l’intention du contribuable. Il doit y avoir une certaine cohérence dans les déclarations concernant les opérations boursières. Si un contribuable, qui déclarait des opérations en capital, se met tout à coup à les requalifier d’opérations en revenu d’exploitation, ou vice-versa, on peut y voir une indication du changement de la nature des actions. Dans certains cas, il peut être utile de voir si les actions détenues à titre de capital et les actions détenues à titre de revenu d’exploitation étaient détenues dans des comptes de courtage différents. Le contribuable doit être en mesure de montrer quelque chose qui distingue son capital des opérations de revenu d’exploitation, que ses opérations ne sont pas semblables. Cela doit être fait lorsqu’il effectue pour la première fois une opération qui n’est pas conforme avec des opérations antérieures. (Certains éléments de preuve indiquent que M. Rajchgot a bien fait l’acquisition de 85 bons de souscription d'obligations en 1997 d’un autre courtier.)[8]

 

[38]    En l’espèce, aucun élément de preuve n’indique que les appelants, en faisant l’acquisition d’actions de Tee-Comm, aient modifié leur intention initiale et principale. La pièce R-6, l’inventaire d’ouverture et de fermeture pour 1997 d’actions détenues par M. Rajchgot, comprenait notamment des actions de Bell Canada, de la Banque de Montréal et de la Banque Royale du Canada, ainsi que de Tee-Comm. Ces actions d’institutions bancaires, qu’il détenait, selon ses dires, à titre d’immobilisations et qui sont restés à ce titre dans le portefeuille de M. Rajchgot, sont mêlées aux actions of Tee-Comm. Toutes les actions sont énumérées sour la rubrique d’« inventaire ». Je n’accorde pas beaucoup d’importance à la désignation d’inventaire pour ces actions; cependant, une personne qui a l’instruction et l’expertise de M. Rajchgot n’est certainement pas sans savoir que le terme « inventaire » connote un actif commercial. Je ne pense pas que M. Rajchgot estimait que les actions de la Banque Royale et de la Banque de Montréal constituaient des éléments d’inventaire. Il a déclaré que seules les actions de Tee-Comm constituaient des biens de commerce, que ses autres actions sont demeurées des biens en immobilisation. Ce qui est arrivé en 1997 est que la valeur des actions de Tee-Comm a commencé à chuter et M. Rajchgot, en février, lorsqu’il s’est rendu compte que les cours étaient en chute et qu’ils ne remonteraient plus aussi haut, a commencé à les vendre. Cependant, cela n’a rien changé à son objectif général: il avait acheté ces actions à titre d’immobilisation.

 

[39]    Les appels sont rejetés avec dépens.

 

Signé à Ottawa (Canada), le 11 août 2004.

 

 

 

Le juge Rip

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de mars 2005

 

 

 

François Brunet, traducteur

 

 


 

 

RÉFÉRENCE:

2004CCI548

 

NUMÉROS DE DOSSIERS :

2000-3420(IT)G & 2000-3445(IT)G

 

INTITULÉ DES CAUSES :

David Rajchgot c. La Reine

Jacqueline Lacey c. La Reine

 

LIEU DES AUDIENCES :

Montréal (Québec)

 

DATE DES AUDIENCES :

Le 11 février 2004

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable Gerald J. Rip

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 11 août 2004

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l'appelant :

Nicolas Cloutier

 

Avocat de l'intimée :

Alain Gareau

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant:

 

Nom :

Nicolas Cloutier

 

Cabinet :

Davies Ward Phillips & Vineberg LLP

 

Pour l’intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 



[1]               Mme Lacey en appelle de cotisations antérieures afin de pouvoir faire un report rétrospectif des pertes subies pour les ventes faites en 1997.

[2]               Les éléments de preuve produits au sujet des acquisitions et des ventes des actions de Tee-Comm n’étaient pas clairs. Ces opérations ont été prises dans des relevés faits par une maison de courtage et figurent à la pièce R –1. Je crois comprendre que l’expression « échange financier » vise l’opération selon laquelle une personne fait des transferts entre l’un de ses comptes de courtage et un autre de ses comptes. Il y a encore 1500 actions qui ne figurent pas aux relevés; selon eux, entre le 30 novembre 1995 et le 31 mars 1996, il y a encore 1500 actions de Tee-Comm qui ont été achetées. La pièce

R-2 explicite les opérations faites au nom de Mme Lacey. Selon les éléments de preuve, en 1996, elle a acquis 36 050 actions de Tee-Comm.

La déclaration d’impôt de M. Rajchgot pour l’année 1996 contient les informations suivantes :

Nombre d’actions

Nom de la société et catégorie d’actions

Année d’acquisition

Produit de la disposition

 Prix de base rajusté

Gain (ou perte)

10 000

Tee-Comm

1996

75 999

120 000,50

(44 001,50)

1 800

WTS-Tee-Comm

1996

 

8 855,50

(8 855,50)

10 000

WTS-Tee-Comm

1996

 

34 500,50

(34 500,50)

1 100

WTS-Tee-Comm

1996

 

2 165,50

(2 165,50)

La déclaration d’impôt de Mme Lacey pour l’année 1996 contient les éléments suivants :

Nombre d’actions

Nom de la société et catégorie d’actions

Année d’acquisition

Produit de la disposition

 Prix de base rajusté

Gain (ou perte)

4 000

Tee-Comm

1996

33 349,50

54 250,50

(20 901,00)

La pièce R-6 indique l’inventaire d’ouverture et de clôture, et notamment les éléments suivants :

Date d’achat

Quantité

Description

Montant payé

Date de vente

Produit

08/28/96

20 100

Tee-Comm

227 325

4/28/97

33 798

11/07/96

3 000

Tee-Comm

53 508

5/14/97

3 478

01/07/96

5 000

Tee-Comm

77 422

4/28/97

7 835

 

[3]           À la page 1133.

[4]           93 DTC 5116  aux pages 5119 et 5120.

[5]           Leeming v. Jones, [1930] A.C. 415, p. 420 (H.L.).

[6]           94 DTC 6671, à la page 6675, le juge Noël (C.F. 1re inst.).

[7]               [1976] C.T.C. 2082.

[8]           Les copies des relevés de courtage de M. Rajchgot ont été produites. Il semble qu’il ait traité avec deux courtiers, Deacon, Barclay et Scotia McLeod. Chez Deacon, il avait deux comptes, un en dollars américains, dont faisait partie ses actions de Tee-Comm, et comprenant des actions de Minnesota Mining and Manufacturing et de Jones Apparel Group Inc.; l’autre compte chez Deacon, en dollars canadiens, comprenait les actions de Tee-Comm et des actions d’Abitibi‑Price. Un compte chez Scotia McLeod en dollars américains comprenait 5000 actions de Tee-Comm en janvier 1997. Le compte chez Scotia McLeod en dollars canadiens n’a pas été utilisé pour acquérir quelle action de Tee-Comm que ce soit.

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