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Dossier : 2005-3705(IT)G

ENTRE :

KAREN EHRHARDT,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 7 novembre 2007, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

Devant : L’honorable C.H. McArthur

 

Comparutions :

 

Avocats de l’appelante :

Mes Daniel Kiselbach et Sarah Hansen

Avocate de l’intimée :

Me Linda Bell

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu, dont l’avis est daté du 7 avril 2004 et porte le numéro 28037, est accueilli, et la cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

          Les dépens sont adjugés à l’appelante.

 

      


Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de février 2008.

 

« C.H. McArthur »

Juge McArthur

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour d’avril 2008.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice

 


 

 

 

 

Référence : 2008CCI112

Date : 20080220

Dossier : 2005-3705(IT)G

ENTRE :

KAREN EHRHARDT,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge McArthur

 

[1]     Il s’agit d’un appel interjeté à l’égard d’une cotisation établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») en application du paragraphe 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). La cotisation vise de l’impôt fédéral sur le revenu qui a été retenu à la source mais non versé, ou qui n’a été ni retenu à la source ni versé, par Hometek Manufactured Home Builders Inc. (la société « Hometek »), ainsi que des intérêts et des pénalités. La principale question en litige se résume à savoir si l’appelante a agi avec un degré de soin, de diligence et d’habileté suffisant pour prévenir le manquement de Hometek à la déduction et au versement de l’ensemble des retenues fédérales, y compris l’impôt sur le revenu, les cotisations d’assurance‑emploi et les cotisations au Régime de pensions du Canada relatives à ses employés pour la période du 1er octobre 2001 au 30 juin 2002.

 

[2]     L’appelante a initialement fait l’objet d’une cotisation visant l’entière période allant du 1er janvier 2001 au 30 juin 2002. Toutefois, pendant l’audition de l’appel, le ministre a modifié la date du début de la période pour qu’elle passe du 1er janvier 2001 au 1er octobre 2001. Comme il est mentionné plus haut, la période pertinente est donc celle du 1er octobre 2001 au 30 juin 2002 et le montant de la cotisation est réduit de façon importante au regard de la somme initiale de 322 869,88 $. L’appelante conteste en outre l’exactitude de la cotisation. Je reviendrai sur ce point avant de conclure les présents motifs. L’audience a duré six jours, l’appelante a fait témoigner cinq personnes et deux témoins ont été appelés à la barre pour le compte du ministre. La preuve a dans une grande partie été présentée par David Ehrhardt et Ken Bayntun.

 

Faits

 

[3]     Certains des faits énoncés par l’appelante dans son avis d’appel ont, pour l’essentiel, été prouvés et intégrés, en partie, dans le résumé qui suit. En 1995, David Ehrhardt, son associé en affaires, Louis Bortolazzo, et Ken Bayntun ont constitué en société Real Engineered Homes Inc. (la société « Real ») pour fabriquer et vendre des maisons modulaires dans des locaux situés à Penticton (Colombie‑Britannique). La société a assez bien réussi pendant les premières années et elle a évolué en trois sociétés affiliées, à savoir Real Engineered Homes Inc., Harbour Manufactured Homes Inc. (la société « Harbour ») et Hometek, ci‑après collectivement le « groupe ». Pendant les mois les plus occupés, de mai à octobre, Hometek comptait jusqu’à 100 employés. Les effectifs des deux autres sociétés étaient beaucoup plus restreints. M. Bayntun détenait 50 pour 100 des actions émises de Hometek tandis que M. Ehrhardt et M. Bortolazzo détenaient une participation de 25 pour 100 chacun. M. Bayntun agissait comme directeur général de l’exploitation à plein temps et, avec son ancienne épouse, Laurell, il consacrait toute son énergie et des talents appréciables au succès de l’entreprise.

 

[4]     M. Ehrhardt et M. Bortolazzo étaient des hommes d’affaires et parfois des associés en affaires, poursuivant tous deux des activités liées à l’aménagement et au placement immobiliers. Ils jouaient le rôle nécessaire de financiers et de conseillers auprès de la société et, dans l’ensemble, ils constituaient une équipe solide et complète.

 

[5]     M. Ehrhardt a témoigné pendant presque deux jours. C’est un homme d’affaires intelligent, compétent et calculateur. Il a mentionné qu’après une année ou deux d’exploitation, leur associé[1], M. Bayntun, avait gagné leur confiance et qu’ils lui avaient donc confié le contrôle total de l’exploitation sans qu’il leur soit nécessaire d’exercer une surveillance plus importante que celle de la direction générale de l’entreprise. Cela n’est pas tout à fait exact puisqu’ils tenaient régulièrement des réunions organisées qui duraient habituellement deux jours ou plus[2]. Au fil des ans, ils en sont venus, en compagnie de leurs épouses, à établir des relations sociales fréquentes. M. Ehrhardt a affirmé qu’il examinait soigneusement les états financiers annuels et mensuels et qu’il surveillait la situation financière de la société régulièrement avec M. Bayntun. Ce dernier et l’appelante étaient les seuls administrateurs de Hometek. L’appelante agissait à ce titre à la demande de son époux.

 

[6]     Les Ehrhardt vivaient à Burnaby (Colombie‑Britannique) tandis que les Bayntun vivaient dans l’Okanagan. À la fin de l’été 1999, M. Ehrhardt et M. Bortolazzo ont fait appel à un cabinet comptable, KPMG, à Penticton, où le groupe était situé. Ils souhaitaient que le cabinet établisse des rapports mensuels par mesure de protection à la fois pour leurs placements personnels et leurs garanties personnelles et pour les conditions de banque. Ils voulaient que le cabinet soit à l’affût de ce qui passait dans l’entreprise.

 

[7]     Ces rapports révélaient que les retenues prévues par la loi et devant être versées aux diverses autorités gouvernementales étaient régulièrement effectuées dans le cours normal des affaires. Un employé de KPMG se rendait aux locaux du groupe pour accomplir les travaux requis, et l’appelante croyait légitimement que c’était ainsi qu’on procédait. L’ensemble de toutes les autres retenues gouvernementales (impôt sur le revenu de l’entreprise, cotisations provinciales au titre des accidents du travail, cotisations au RPC, retenues au titre de l’AE) visant le groupe figurait sur les rapports bancaires.

 

[8]     L’appelante ne s’est rendue aux locaux du groupe qu’à deux occasions parce que les renseignements habituels lui étaient transmis par son mari avec les rapports de KPMG, lesquels comprenaient la feuille de paye et les renseignements connexes relatifs au passif. Elle croyait qu’on s’acquittait de façon appropriée de l’ensemble des obligations en matière de retenues et que celles‑ci étaient versées dans le cours normal des affaires. Elle n’a jamais reçu de renseignement à l’effet contraire.

 

[9]     M. Bayntun assurait à ses associés que tout se passait bien et que les dettes du groupe étaient acquittées en temps opportun, à l’exception d’insuffisances occasionnelles et saisonnières touchant la paie. Les relevés bancaires de janvier et de février 2002 ainsi que les états financiers mensuels n’ont pas été fournis parce que les documents relatifs à la fin de l’exercice 2001 étaient en cours d’élaboration et que le temps et l’attention de l’aide‑comptable du groupe, Laurell Bayntun, et de KPMG étaient consacrés à cette tâche.

 

[10]    À la mi‑mars 2002, on a informé l’appelante de la véritable et inquiétante situation financière du groupe. La plupart des comptes débiteurs n’avaient aucune valeur réelle. Peu après, les Bayntun sont partis au Mexique pour un voyage de deux semaines déjà prévu. Un séquestre a été nommé pour Real, qui a subséquemment fait faillite. Comme la banque, HSBC, avait réalisé ses garanties, les biens de la société n’étaient pas disponibles pour remplir les obligations de Hometek en matière de retenues.

 

[11]    Plus simplement, l’appelante fait valoir qu’avant mars 2002, elle n’a à aucun moment eu connaissance d’un quelconque versement en souffrance ayant trait à Hometek. Elle soutient qu’elle a agi avec le degré de soin, de diligence et d’habileté qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables puisqu’elle a pris toutes les mesures de précaution requises.

 

[12]    L’intimée soutient plutôt que l’appelante, parce qu’elle était au courant de l’existence de certaines difficultés financières, aurait dû faire un examen plus approfondi pour s’assurer que tous les versements avaient été effectués. Comme elle ne l’a pas fait, elle n’a pas agi avec le degré de diligence pour prévenir le manquement de Hometek au versement des retenues qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables.

 

 [13]   Le paragraphe 227.1(1) est ainsi rédigé :

 

227.1(1)           Lorsqu’une société a omis de déduire ou de retenir une somme, tel que prévu au paragraphe 135(3) ou à l’article 153 ou 215, ou a omis de remettre cette somme […], les administrateurs de la société, au moment où celle-ci était tenue de déduire, de retenir, de verser ou de payer la somme, sont solidairement responsables, avec la société, du paiement de cette somme, y compris les intérêts et les pénalités s’y rapportant.

 

 

Un administrateur peut se dégager de sa responsabilité personnelle s’il réussit à établir qu’il a agi avec « diligence raisonnable », ce qui est prévu au paragraphe 227.1(3) de la manière suivante :

 

(3)        Un administrateur n’est pas responsable de l’omission visée au paragraphe (1) lorsqu’il a agi avec le degré de soin, de diligence et d’habileté pour prévenir le manquement qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables.

           

 

[14]    La jurisprudence touchant ce critère ne manque pas. On renvoie entre autres souvent à la décision Soper c. Canada[3], dont la portée a été modifiée par l’arrêt Magasins à rayons Peoples inc. (Syndic de) c. Wise[4]. En définitive, il s’agit d’une question de fait et de caractère raisonnable. Qu’aurait fait une personne raisonnable pour empêcher le manquement, par Hometek, au versement des sommes en cause?

 

[15]    Par l’intermédiaire de son mari, l’appelante se fiait au cabinet comptable KPMG, lequel leur fournissait des relevés mensuels. Peter MacIntosh, de KPMG, se rendait aux locaux du groupe pour aider à la tenue de la comptabilité et examiner la situation financière. Il n’a jamais eu vent de la possibilité que les retenues ou les versements ne soient pas effectués. À la fin de 2001 et au début de 2002, la situation était la suivante : le groupe était principalement sous le contrôle de M. Bayntun, lequel rendait compte à M. Ehrhardt et à M. Bortolazzo. M. Bayntun occupait le poste de directeur général sur place. Dans les faits, il était le patron de tous les employés, y compris son épouse, Laurell, qui était responsable de la tenue des comptes et de la comptabilité.

 

[16]    L’appelante agissait à titre d’administratrice de Hometek à la demande de son mari et elle discutait couramment de l’entreprise avec ce dernier. Elle n’avait pas de pouvoir de signature et ne possédait aucune formation en comptabilité. Elle savait que M. Ehrhardt parlait régulièrement avec le directeur général, M. Bayntun, lequel était sur place aux locaux du groupe. Outre les appels téléphoniques, des rencontres en personne avaient lieu entre les trois actionnaires pour que les Ehrhardt et les Bortolazzo soient tenus au courant des activités commerciales du groupe. M. Ehrhardt informait régulièrement l’appelante des faits révélés à l’occasion de ces rencontres et de ces discussions. J’arrive à la conclusion de fait que, jusqu’à la mi‑mars 2002, l’appelante et son mari ignoraient tout du manquement au versement des retenues salariales.

 

[17]    L’appelante était digne de foi et son témoignage n’a pas été ébranlé pendant le contre‑interrogatoire. Les éléments fournis par le témoignage de l’appelante ont été corroborés au moyen de documents et du témoignage de David Ehrhardt, de Louis Bortolazzo, de Peter MacIntosh du cabinet KPMG, de l’expert‑comptable chargé de dresser les états financiers et de Dino Infanti, comptable agréé. Dans son témoignage à titre d’expert, ce dernier a mentionné que les rapports financiers mensuels ne faisaient état d’aucune difficulté financière susceptible d’alerter l’appelante quant à l’arriéré visant les retenues salariales ou les versements. Dans leur témoignage, les actionnaires, M. Ehrhardt et M. Bortolazzo, ont déclaré qu’à aucun moment M. Bayntun ou Laurell Bayntun, auxquels ils étaient justifiés de se fier, ne leur avait dit que le groupe avait de quelconques difficultés financières.

 

[18]    L’appelante a affirmé ce qui suit au sujet de la période postérieure à la cessation des activités du groupe en mars 2002. Ces propos sont tirés d’une partie de la transcription de son interrogatoire principal :

 

[traduction]

 

Réponse :         Après cela, j’ai n’ai pas personnellement reparlé à Ken ou à Laurell. David et Louis allaient – après leur retour – nous avons découvert après coup qu’ils étaient allés au Mexique. Je ne sais donc pas avec exactitude pendant combien de temps ils sont partis, mais, lorsqu’ils sont revenus, ils se sont organisés pour qu’il soit très difficile de les joindre, d’après ce que j’ai su de David. David et Louis étaient toujours en train d’essayer de les localiser. Il n’y avait aucun numéro de téléphone. Personne ne réussissait à les trouver.

 

Question :         Avec le recul, pensez-vous qu’il y a quoi que ce soit que vous auriez pu faire, dans les circonstances, pour prévenir le manquement de Hometek au paiement des impôts?

 

Réponse :         Non, je ne vois pas, je ne vois pas ce que j’aurais pu faire. Je n’étais pas là quotidiennement. J’étais à Burnaby, l’usine était à Penticton. Elle existait déjà depuis un certain temps. Ce n’était pas comme s’il s’agissait d’une toute nouvelle entreprise fondée en 2000. C’était une entreprise viable depuis 1995. Les choses se passaient bien jusque‑là. D’après ce que je pouvais tirer des états financiers, l’entreprise était en croissance chaque année. Ken est un excellent vendeur, vous savez, il peut vendre de la neige aux Eskimaux. Et il donnait toujours une image des plus optimistes de la situation de la société. C’était un homme très charismatique. Donc, si – je ne sais pas pourquoi il ne nous a rien dit. Je veux dire que, nous étions des associés et– outre le fait que nous étions des amis, nous voulions que la société continue de croître et, vous savez, s’il nous avait dit quelque chose, nous aurions pu nous organiser. Mais nous n’avons eu aucun indice avant la mi‑mars du fait que la société était en difficulté. Je croyais que tout était régulièrement payé. D’après ce que je pouvais voir dans les rapports que Ken remettait à David, et que David me transmettait, les discussions que nous avions au sujet de la société étaient toutes optimistes, de sorte que je ne sais vraiment pas ce que nous aurions pu faire d’autre[5].

 

[19]    Les actionnaires s’étaient rencontrés pour discuter des affaires du groupe au début décembre 2001, pendant deux jours, et à nouveau à la fin janvier 2002, pendant trois ou quatre jours. M. Ehrhardt et M. Bortolazzo ont affirmé qu’à la suite de ces réunions, ils étaient arrivés à la conclusion que tout se passait bien et ils avaient parlé d’expansion pour 2002. Cela était étayé, en particulier, par des notes prises par M. Ehrhardt lors de ces rencontres. Dans l’ensemble, j’accepte leur témoignage.

 

[20]    Dans son témoignage, M. Bayntun a déclaré qu’ils avaient parlé de difficultés financières à ces deux réunions et qu’il avait soulevé la nécessité d’obtenir un apport en numéraire pour pouvoir poursuivre les activités de l’entreprise. En réalité, M. Bortolazzo a consenti des avances de fonds en janvier 2001 et en janvier 2002 pour les besoins de la paie. M. Bayntun a ajouté qu’ils avaient de la difficulté à payer leurs créanciers à la fin de 2001 et au début de 2002. La ligne de crédit atteignait ou dépassait sa limite de 550 000 $.

 

[21]    Je ne suis pas persuadé que M. Bayntun, à un quelconque moment, a eu une attitude assurée, vigoureuse et convaincante pour informer les autres que l’entreprise se trouvait dans une situation financière désastreuse, ni même difficile. S’il l’avait fait, je n’ai aucun doute que ses associés et sa co‑administratrice auraient réagi de manière prompte et résolue en décembre 2001 ou à la fin janvier 2002. Ils m’ont fait l’impression d’être des gens d’affaires d’action. Cela ressort de la façon dont ils ont réagi aux lettres que M. Bayntun leur a adressées en février et en mars 2002. M. Bortolazzo a téléphoné et s’est rendu aux bureaux de Penticton; il a rencontré M. Bayntun dès qu’il a entendu parler de l’intention de fermer l’entreprise. M. Ehrhardt a retenu les services d’un expert‑conseil en affaires, M. Rogers, lequel s’est rendu aux locaux du groupe à la fin mars et l’a informé de l’existence d’une offre d’achat visant le groupe à titre d’entreprise en exploitation. Il a en outre informé M. Ehrhardt du fait que la valeur des stocks avait été surestimée de plusieurs centaines de milliers de dollars et que les comptes débiteurs n’avaient que peu de valeur, contrairement à ce qu’on avait laissé entendre à l’appelante et à son époux.

 

[22]    Selon l’intimée, les états financiers mensuels peuvent ne pas refléter les problèmes de flux de trésorerie et ils n’étaient d’aucune utilité en ce qui concerne les versements. Aucune preuve d’expert n’a été présentée pour corroborer cette assertion. L’avocate a ajouté que, si une société éprouve des difficultés liées au flux de trésorerie et que les administrateurs sont au courant de la situation, des mesures doivent être prises pour prévenir le défaut d’effectuer les retenues salariales et leur versement. Je crois qu’elle estime que l’appelante, parce qu’elle connaissait l’existence du problème de flux de trésorerie lié à la paie qui s’est posé en janvier 2002, aurait dû prendre des mesures plus rigoureuses, probablement une vérification, pour veiller à ce qu’il n’y ait pas de retenues en souffrance.

 

[23]    L’intimée reconnaît que l’appelante ne participait pas aux activités quotidiennes et qu’elle était une administratrice externe, mais elle ajoute qu’elle aurait pu, à titre d’administratrice, demander la tenue d’une réunion afin de présenter des propositions sur la façon dont ils pouvaient régler le découvert de trésorerie qui était apparu pendant la période creuse d’octobre 2001 à mars 2002. L’avocate a également soutenu que l’appelante et son mari auraient dû avoir connaissance du découvert de trésorerie. L’élément central de la thèse de l’avocate tient peut‑être au fait qu’il importe peu que l’appelante ou son mari ait su si les retenues salariales étaient effectuées ou non. Pour réussir à prouver qu’ils avaient agi avec un degré de diligence raisonnable alors qu’ils étaient au courant des problèmes de flux de trésorerie, ils devaient faire des vérifications précises pour déterminer si les versements fiscaux étaient à jour. Elle ajoute qu’à tout le moins, ils devaient avoir donné pour instructions à M. Bayntun de veiller à ce que les retenues salariales soient versées en premier. Dans son témoignage, M. Bortolazzo a déclaré qu’il avait à plusieurs occasions donné à M. Bayntun des instructions explicites pour qu’il fasse en sorte que les retenues salariales et les versements soient effectués en temps opportun.

 

[24]    Examinons maintenant les témoignages de David Ehrhardt et de Louis Bortolazzo, lesquels étaient parfois diamétralement opposés à celui de M. Bayntun. M. Ehrhardt a affirmé qu’il n’était pas au courant des problèmes de flux de trésorerie survenus à la fin 2001 et au début 2002. M. Bayntun a quant à lui allégué que M. Ehrhardt et M. Bortolazzo savaient tous deux qu’il éprouvait des difficultés à payer les factures et que le groupe se trouvait dans une situation désastreuse.

 

[25]    Lorsqu’elles tentent de se souvenir d’événements passés, les personnes honnêtes voient souvent les faits, inconsciemment, à la lumière de leurs propres intérêts actuels. C’est le cas dans la présente affaire. L’examen de la preuve produite par les deux parties révèle une position mitoyenne quelque peu imprécise. L’appelante et son époux savaient ou auraient dû savoir, sauf un mépris aveugle, que le groupe éprouvait des difficultés à honorer ses obligations salariales en janvier 2001 et en janvier 2002. En revanche, M. Bayntun, peut‑être en raison de sa nature optimiste et de sa personnalité agréable, n’a pas agi d’une façon assurée ou franche lorsqu’il a exposé la situation financière du groupe. Quoi qu’il en soit, je conclus que l’appelante et son mari n’avaient pas connaissance du problème de versement et qu’il était raisonnable pour eux d’estimer que les versements étaient à jour et que le groupe se trouvait dans une situation financière saine pendant la période du 1er octobre 2001 à février ou mars 2002.

 

[26]    Je ne suis pas d’accord avec l’assertion du ministre selon laquelle l’appelante, pour établir qu’elle a agi avec diligence raisonnable, aurait dû examiner de manière plus approfondie les affaires financières du groupe. De toute évidence, l’appelante a montré par les actes mentionnés plus haut et résumés ci‑dessous, qu’elle avait agi avec la diligence requise :

 

a)       Elle se fiait aux rapports comptables mensuels établis par KPMG, lesquels n’ont jamais donné d’avertissements quant au fait que des factures et, en particulier, des versements étaient en souffrance.

 

b)      Par l’intermédiaire de son mari et de M. Bortolazzo, elle entretenait une relation très étroite avec les Bayntun, qui ne les ont jamais informés des problèmes de versement.

 

c)       Ils étaient justifiés de se fier à Ken Bayntun, lequel était un dirigeant d’entreprise compétent et expérimenté dans le domaine des maisons modulaires.

 

d)      Par l’intermédiaire de son mari, elle pouvait raisonnablement conclure que la période pertinente correspondait à une période creuse saisonnière, laquelle avait donné lieu à des problèmes de flux de trésorerie qui n’étaient pas inhabituels. L’avancement de fonds par M. Bortolazzo en janvier 2001 et en janvier 2002 pour le paiement des salaires ne constituait pas une situation inattendue dans le secteur de la construction résidentielle, et il est raisonnable que les associés ne faisant pas parti de la direction n’aient pas estimé nécessaire d’agir différemment.

 

e)       En mars 2002, il était trop tard pour faire des pieds et des mains pour trouver du financement ou tenter de vendre des éléments d’actif grevés en faveur de la banque afin de payer l’intimée.

 

f)       Le groupe n’avait aucun antécédent d’impôt impayé et avait connu une croissance continue depuis sa constitution en 1995.

 

[27]    À la mi‑mars 2002, l’appelante a découvert avec étonnement que M. Bayntun était sur le point de fermer l’usine. Il a plus tard été mis au jour que les stocks avaient été gonflés de plusieurs centaines de milliers de dollars à son insu. La valeur des actifs avait probablement été gonflée pour justifier un financement supplémentaire pour lequel elle n’était nullement responsable. J’arrive à la conclusion de fait que M. Ehrhardt, auquel elle se fiait, ne savait pas que les stocks avaient été gonflés. À nouveau, la thèse de l’intimée semble reposer sur le fait que, comme l’appelante, par l’intermédiaire de son mari, devait avoir connaissance de la piètre situation financière du groupe à la fin 2001, elle aurait pu faire en sorte que M. Bayntun paye l’arriéré d’impôt, selon toute vraisemblance, avant les salaires et les fournisseurs. Cela aurait entraîné la fermeture du groupe avant même le mois de mars, et le ministre n’aurait peut‑être pas été dans une meilleure situation que celle où il s’est trouvé après la mi‑mars. Le fait que M. Bortolazzo a avancé des fonds en janvier 2002 pour couvrir la paie, même s’il les a repris dans les deux ou trois semaines suivantes, corrobore sa croyance voulant que l’entreprise éprouvait seulement un problème temporaire de flux de trésorerie. Comme il est précisé plus haut, les états financiers récents montraient des éléments d’actif appréciables, en particulier au titre des stocks et des comptes débiteurs.

 

[28]    Le fondement factuel de la thèse du ministre est conjectural. L’appelante n’a eu connaissance de la désastreuse situation financière du groupe qu’en mars 2002. M. Bayntun et son épouse, Laurell, avaient peut‑être conscience de la tempête qui se préparait, mais ils ont omis d’en faire part à l’appelante, à son mari et à M. Bortolazzo. On ne pouvait s’attendre de ces derniers qu’ils fassent plus que ce qu’ils ont fait. Anticipant une production accrue en 2002, M. Ehrhardt cherchait des occasions d’augmenter le financement avant que M. Bayntun n’écrive ses lettres de février et de mars 2002.

 

[29]    La lettre rédigée par M. Bayntun le 5 février 2002, peu après une réunion de quatre jours tenue à la fin janvier 2002, corrobore dans une faible mesure son témoignage selon lequel M. Ehrhardt et M. Bortolazzo étaient au courant des problèmes financiers. Elle est toutefois loin de refléter l’assurance à laquelle on aurait pu s’attendre de la part d’un directeur général qui a subséquemment affirmé dans son témoignage que le groupe était sur le point de faire faillite à la fin 2001 ou au début 2002. La précision et l’urgence font défaut à cette lettre, qui est ainsi libellée :

 

[traduction]

 

Dest. :  Mes associés

Objet :  Restructuration du capital social                                       Le 5 février 2002

Exp. :   Votre associé

 

            J’ai fait certaines réflexions dernièrement lorsque j’ai rédigé la lettre à la banque, conformément aux instructions reçues du conseil, et je souhaite vous en faire part. La présente proposition a été formulée à la fin de notre réunion de décembre et j’étais sérieux, mais votre réponse ne m’a pas paru très claire.

 

[…]

 

            À mon avis, la nécessité d’obtenir des fonds d’exploitation supplémentaires pourrait se révéler temporaire à la lumière des résultats prévus en 2002. Plutôt que d’augmenter notre dette envers la banque (fonds qui ne sont disponibles que lorsque des comptes débiteurs peuvent soutenir cette mesure), j’estime que les intérêts de la société seraient mieux servis, de façon permanente, par une injection de capitaux.

 

            Parallèlement, j’ai de sérieuses préoccupations (comme je l’ai déjà signalé) quant à l’importance de ma participation dans la société et aux éventuels obstacles susceptibles d’en découler au regard des possibilités de croissance de cette dernière. Ne vous méprenez pas, je suis tout à fait disposé à être un des principaux actionnaires d’une grande société prospère. Je me préoccupe toutefois du fait que mes « ressources » puissent constituer un frein à cette croissance.

 

            J’ai réfléchi à ces deux questions et, comme je suis encore confronté à une nouvelle période creuse avec un faible flux de trésorerie et que je dois vous demander de l’argent, je me dis : « Ça suffit ».

 

[…]

 

Je suis davantage intéressé à détenir une plus petite participation dans une entreprise importante qu’une grande participation dans une société en difficulté. Vous pourriez dire que j’encaisserais mes REER.

 

Nous évitons une dette accrue.

Nous améliorons notre flux de trésorerie et je n’ai plus à toujours demander de l’argent.

 

[…] J’espère que vous réfléchirez sérieusement à ces propositions et j’attends avec impatience l’occasion de pouvoir discuter franchement des possibilités. […]

 

[30]    Ses « associés » ne semblent pas lui avoir répondu par écrit. M. Ehrhardt a déclaré qu’il avait informé M. Bayntun qu’ils n’étaient pas intéressés à détenir une participation majoritaire. De toute évidence, ils ne souhaitaient pas avancer d’autres fonds personnels à ce stade.

 

[31]    La communication écrite subséquente consiste en un courrier électronique que M. Bayntun a envoyé le 18 mars 2002 à ses associés. En voici le texte :

 

[traduction]

 

SOLUTIONS DE RECHANGE AUX ACTUELLES DIFFICULTÉS TOUCHANT LE FONDS DE ROULEMENT

 

La situation déficitaire du fonds de roulement de la société nécessite une solution immédiate. Dans le cas contraire, je me verrai dans l’obligation de fermer l’usine au plus tard le vendredi 22 mars afin de réduire autant que possible les incidences financières défavorables.

 

Une solution de rechange viserait principalement à minimiser le risque financier qu’entraînerait l’absence de toute mesure.

 

SOLUTIONS DE RECHANGE

 

1.         Maintenir la structure actuelle et injecter des capitaux suffisants pour mettre l’accent sur la direction de l’entreprise plutôt que sur la position de trésorerie. Cette injection de capitaux doit être d’au moins 350 000 $, comme nous en avons discuté il y a trois semaines.

 

2.         Injecter une somme minimale de capitaux pour permettre de terminer les produits et de recouvrer le produit des ventes […] minimiser la responsabilité financière des actionnaires avant leur départ, y compris les créanciers garantis, les organismes gouvernementaux, etc.

 

3.         Permettre à la banque d’effectuer et d’administrer une vente forcée des éléments d’actif, y compris les ventes de maisons, à la même fin, les actionnaires étant responsables des dettes connexes autres que bancaires.

 

4.         Trouver un acheteur disposé à prendre nos dettes en charge et à injecter les capitaux nécessaires pour assurer la croissance et le succès des sociétés. Cette négociation nécessitera l’aval des actionnaires de sorte qu’ils soient liés par l’entente, quelle qu’elle soit, que l’associé négociateur pourra conclure en vue, à tout le moins, de libérer les actionnaires de leurs obligations envers les créanciers garantis.

 

Évidemment, il est tout à fait essentiel de procéder le plus rapidement possible si nous voulons maximiser la valeur de la vente par le maintien de la survaleur antérieurement établie.

 

[32]    Le 11 mars 2002, Kevin Grady, employé respecté de Real ayant de l’ancienneté (directeur des ventes), a donné sa démission dans une lettre cinglante[6] adressée à Ken. Cette lettre mentionne notamment :

 

[traduction]

 

Le 11 mars 2002

 

Ken,

 

[…]

 

Les raisons pour cela sont nombreuses. Je vais néanmoins préciser certains des points qui m’ont incité à conclure que je n’ai plus confiance en vous ni en vos associés pour prendre les difficiles décisions ou engagements qui sont nécessaires pour remettre la société dans la bonne voie et lui permettre de survivre, encore moins de réussir.

 

Il m’est impossible de continuer en toute honnêteté à promouvoir votre société auprès de nos clients alors que j’ai moi‑même des doutes quant à notre capacité de respecter nos engagements. Je serais personnellement très étonné que Real Homes, dans son état actuel, réussisse à passer l’année. Les plaies sont trop profondes et on refuse de les traiter.

 

[…]

 

Vous n’avez pas respecté, ni tenté, par un quelconque effort appréciable, de respecter les engagements que vous aviez pris envers moi si j’acceptais d’agir à titre de directeur des ventes. Le plus flagrant exemple concerne le fait que vous n’ayez même pas fait l’effort de me laisser utiliser le camion pour mon déplacement à Grand Prairie. Au lieu de quoi j’ai dû prendre ma vieille camionnette de douze ans. Il était plus important de ne pas vous importuner pour votre voyage à Vancouver que de veiller à ma sécurité ou à mon bien‑être pendant un déplacement de 2 200 km dans les intempéries.

 

[…]

 

La façon dont les installations de production sont gérées, inspectées et contrôlées constitue, dans le meilleur des cas, de l’amateurisme. Il n’y a aucune direction, aucune planification et aucun contrôle. L’entreprise est vouée à l’échec. Le dernier incident avec la CSA le montre bien.

 

[…]

 

[33]    Si quelqu’un doit être blâmé pour la situation ou en assumer la responsabilité, je crois que ce doit être chacun des trois associés. Il s’agit d’une affaire plutôt triste. Les associés m’ont fait l’impression d’être des hommes compétents et ils étaient de bons amis à une certaine époque. L’entreprise a échoué pour diverses raisons, dont certaines ne sont pas tangibles. Ce que l’on sait, c’est que les partenaires financiers ont décidé, peu importe la raison, de ne pas avancer d’autres fonds pendant les mois difficiles de l’hiver 2001–2002. C’était leur prérogative. Un puriste pourrait prétendre que le fait de savoir que la société n’était pas en mesure d’honorer ses obligations en matière de paie en décembre 2001 et en janvier 2002 aurait dû inciter les administrateurs à s’assurer sans l’ombre d’un doute qu’il n’y avait pas d’arriéré dû à l’Agence du revenu du Canada. J’estime qu’il tombe sous le sens commun que l’appelante n’avait pas l’obligation d’examiner les livres comptables du groupe d’une manière plus approfondie qu’elle ne l’a fait. J’accepte la preuve selon laquelle elle n’a pas été mise au courant de l’arriéré de versement avant que le groupe ne cesse ses activités. Quoi qu’il en soit, comme il a déjà été mentionné, il semble qu’à la fin 2001, il était probablement trop tard. Le groupe n’avait pas les ressources nécessaires pour payer l’arriéré de versement. Encore une fois, les deux associés croyaient fermement que les capitaux propres s’élevaient à des centaines de milliers de dollars compte tenu des comptes débiteurs et des stocks. Les notes prises par M. Ehrhardt pendant la réunion de décembre 2001 comportent la mention suivante : [traduction] « comptes débiteurs 700 000 $, comptes fournisseurs 400 000 $ ».

 

[34]    Pour la période de onze mois qui s’est terminée le 30 novembre 2001, les états financiers de KPMG montrent des éléments d’actif totalisant 2 082 098 $, constitués principalement d’environ 1 200 000 $ au titre des comptes débiteurs et de 870 000 $ au titre des stocks.

 

[35]    Les dettes totalisaient 1 447 000 $, dont une somme de 545 000 $ due à la banque et une autre de presque 900 000 $ pour les comptes fournisseurs. Il semble que les capitaux propres du groupe se chiffraient à environ 500 000 $, à la condition que le montant des comptes débiteurs et le montant des stocks soient exacts. En avril 2002, on a découvert que la valeur des stocks avoisinait plutôt 200 000 $ et que les comptes débiteurs avait une valeur bien moindre, même s’ils appartenaient alors, je crois, à la banque.

 

[36]    Quelles mesures l’appelante aurait‑elle pu prendre pour prévenir le manquement de Real au versement de la taxe nette? Elle aurait pu faire faire une vérification pour déterminer avec certitude l’état de la comptabilité de Real. Cela est facile à dire avec le recul, mais ce n’est pas raisonnable. Le groupe faisait face à un flux de trésorerie déficitaire saisonnier et il était raisonnable pour l’appelante de conclure qu’il s’agissait d’une situation temporaire qui se résorberait, comme à chaque année. Il était légitime pour elle de se fier aux mesures de sauvegarde en place. La comptabilité était faite par Laurell, supervisée par l’époux de celle‑ci et vérifiée par KPMG.

 

[37]    Ce qui est troublant, et peut‑être injuste, c’est que M. Bayntun paraît devoir se charger de la totalité de la somme due et être laissé à lui‑même pour payer ce qu’il peut. Je crois qu’il a versé plus de 80 000 $ jusqu’à présent. Ma décision ne s’étend pas à la question de l’équité entre les associés.

 

[38]    Bref, l’appelante s’est fondée sur cette surévaluation des éléments d’actif fournie par un cabinet comptable très réputé, son mari, homme d’affaires compétent et prospère, lui avait assuré que les entreprises du groupe étaient florissantes, et elle avait entièrement confiance en la capacité des Bayntun de gérer et d’honorer en priorité les comptes fournisseurs. Rien ne permet de conclure qu’elle savait ou aurait dû savoir que le groupe ne faisait pas régulièrement les versements de taxe nette ni qu’elle aurait dû examiner la situation de manière plus approfondie.

 

[39]    L’intimée a laissé entendre que je devrais tirer une inférence défavorable à l’appelante du fait que cette dernière a omis d’appeler Laurell Bayntun à témoigner. Le défaut d’appeler à la barre un témoin susceptible de soutenir la thèse avancée par une partie peut effectivement justifier ce genre d’inférence. En l’espèce, je ne sais pas ce que Laurell aurait pu dire mais, compte tenu des relations conflictuelles possibles, sinon probables, existant entre les parties, il aurait peut‑être été dangereux d’appeler Laurell à témoigner, d’autant plus que l’appelante avait présenté par elle‑même une preuve digne de foi. Ces réflexions s’appliquent des deux côtés. Je ne tire aucune inférence ni dans un sens ni dans l’autre.

 

[40]    Comme je suis arrivé à la conclusion que l’appelante a fait preuve de diligence raisonnable, il est inutile d’examiner sa contestation de la cotisation sous‑jacente et de l’exactitude de celle‑ci, quoique, comme il est mentionné plus haut, j’accepte le raisonnement exposé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Gaucher v. The Queen[7]. L’appelante pouvait contester la responsabilité sous‑jacente, et l’intimée n’a droit à aucuns dépens même si la preuve ne fait pas état d’un acte répréhensible ou d’une erreur de la part du vérificateur du ministre.

 

[41]    Je conclus que l’appelante a présenté avec succès un moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable.

 

[42]    L’appel est accueilli avec dépens et la cotisation établie en application du paragraphe 227.1(1) de la Loi est annulée.

 

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de février 2008.

 

 

 

« C.H. McArthur »

Juge McArthur

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour d’avril 2008.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice

 


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI112

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2005-3705(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Karen Ehrhardt c. La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 7 novembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L’honorable C.H. McArthur

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 20 février 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l’appelante :

Mes Daniel Kiselbach et Sarah Hansen

Avocate de l’intimée :

Me Linda Bell

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                      Mes Daniel Kiselbach et Sarah Hansen

 

                          Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1]           En réalité, ils étaient actionnaires même s’ils se qualifiaient d’associés.

 

[2]           Ils se sont réunis le 1er décembre 2001 pendant deux jours et à nouveau pendant quatre jours à la fin janvier 2002.

 

[3]           1997 CanLII 6352 (C.A.F.).

 

[4]           [2004] 3 R.C.S. 461, 2004 CSC 68.

[5]           Transcription, de la page 514, ligne 4, à la page 515, ligne 14.

[6]           M. Grady avait peut-être une arrière-pensée lorsqu’il a formulé ses critiques puisque son frère était intéressé à acquérir le groupe, ce qu’il a d’ailleurs fait quelques mois plus tard.

[7]           2000 D.T.C. 6678.

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