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Dossier : 2006-1001(GST)I

ENTRE :

WILLIAM N. SLOVACK,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 1er décembre 2006 à Nanaimo (Colombie-Britannique)

 

Devant : L’honorable juge T. O’Connor

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Sara Fairbridge

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

Conformément aux motifs du jugement ci-joints, l’appel à l’égard de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise portant le numéro 04114512112370009 et datée du 18 mai 2004 est rejeté.

 

          Signé à Ottawa (Canada) ce 18e jour de décembre 2006.

 

 

« T. O’Connor »

Juge O’Connor

 

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de février 2008.

                                      

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.L, LL.B.


 

 

Référence : 2006CCI687

Date : 20061218

Dossier : 2006-1001(GST)I

ENTRE :

WILLIAM N. SLOVACK,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge O’Connor

 

[1]   Dans le présent appel, la question est de savoir si l’appelant, William N. Slovack, et son épouse, Pierrette Cecile Slovack, ont droit au remboursement pour habitation neuve (le « remboursement ») à l’égard de leur nouvelle habitation située à Courtenay (Colombie-Britannique) (laquelle est décrite avec plus de précision ci-après) qu’ils ont achetée le 30 avril 2001. Ce remboursement est prévu à l’article 254 de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi »). Le montant du remboursement est calculé au moyen d’une formule, et il s’élèverait à 6 318,90 $ en l’espèce. L’avis d’appel de l’appelant fait référence à l’article 256 de la Loi, mais cette disposition traite des habitations construites par soi-même. La disposition pertinente de la Loi est l’article 254, lequel traite des immeubles d’habitation vendus à des particuliers par leurs constructeurs.

 

Faits

 

[2]   Les faits essentiels sont les suivants :

 

a)    L’appelant et son épouse ont acheté une nouvelle habitation, dont l’adresse municipale est 3399, promenade Crown Isle, appartement 110, Courtenay (Colombie-Britannique) ( « Crown Isle » ), de la société KCM 2000 Development Ltd. le 30 avril 2001. L’appelant en a pris possession le 1er mai 2001. Il a acquitté les 7% de TPS lors de l’achat.

 

b)    Durant les années 2001, 2002 et 2003, l’appelant et son épouse ont fait la navette entre Crown Isle et leur résidence de Calgary. Pour diverses raisons de santé, ils n’ont pas décidé de faire de Crown Isle leur résidence principale avant l’année 2003.

 

c)    Le 13 avril 2004, ils ont présenté une demande de remboursement pour habitation neuve d’un montant de 6 318,90 $.

 

d)    Le 18 mai 2004, leur demande a été rejetée parce qu’elle n’avait pas été présentée dans les deux ans de l’achat de Crown Isle, comme l’exige le paragraphe 254(3) de la Loi.

 

e)    Le 15 juin 2004, ils ont déposé un avis d’opposition. Le 17 février 2006, le ministre a confirmé son rejet de la demande de remboursement.

 

f)     L’appelant admet que la demande de remboursement a été présentée plus de deux ans après l’achat de Crown Isle. Il affirme toutefois qu’il est injuste de lui refuser le remboursement parce qu’il aurait reçu de l’information incorrecte de son courtier immobilier, du constructeur et du notaire public : on lui aurait dit qu’il avait quatre ans plutôt que deux pour présenter sa demande. De plus, dans son avis d’appel, l’appelant souligne qu’il est assujetti à une norme très stricte alors que le ministre a pris 18 mois pour lui répondre – je présume qu’il veut parler de la période séparant l’avis d’opposition (15 juin 2004) et la confirmation du ministre (17 février 2006).

 

Analyse et discussion

 

[3]     Je ne connais aucune jurisprudence traitant spécifiquement du délai prévu au paragraphe 254(3). Cela est probablement dû au fait que le paragraphe 254(4) permet au constructeur de porter au crédit du particulier le montant du remboursement au moment de l’achat. Généralement, ceux qui ont droit au remboursement l’obtiennent au point de vente, et ceux qui n’y ont pas droit n’en font pas la demande. Ainsi, le risque de voir des acheteurs admissibles ne pas présenter de demande dans les délais prévus est extrêmement faible.

 

[4]     Cependant, il existe une jurisprudence abondante au sujet de la disposition générale de remboursement contenue à l’article 261 et de la disposition portant sur le remboursement pour habitation construite par soi-même contenue à l’article 256, les deux prévoyant des délais[1] comparables à celui du paragraphe 254(3). Compte tenu des similitudes entre les dispositions en question, cette jurisprudence est applicable au délai prévu au paragraphe 254(3).

 

[5]     La jurisprudence traitant de ces dispositions apparentées énonce clairement qu’aucune demande de remboursement ne peut être présentée une fois le délai écoulé.

 

L'intention du législateur de fixer un délai pour la présentation d'une demande de remboursement est énoncée en termes non équivoques. […] Lorsque la signification d'un texte est claire, notre cour n'a pas compétence pour en atténuer les conséquences. Bien que notre cour puisse être en droit d'interpréter le libellé d'une loi adoptée par le législateur, elle ne peut le déformer pour le rendre conforme à ce qu'elle peut considérer comme raisonnable[2].

 

[6]     Cette logique est fondée sur le fait que la Loi établit un « code exhaustif » quant aux remboursements.

 

Je pars du principe selon lequel le droit du contribuable d'obtenir un remboursement de TPS doit, du moins en ce qui concerne la compétence de la Cour, être prévu dans la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ), qui comporte un code exhaustif[3].

 

[7]     Que veut dire le passage selon lequel la Loi établit un « code exhaustif »?

 

[8]     L’article 312 de la Loi précise que les droits de recouvrement n’existent que s’ils sont créés par la loi. Il est libellé ainsi :

 

Sauf disposition contraire expresse dans la présente partie, dans la Loi sur les douanes ou dans la Loi sur la gestion des finances publiques, nul n’a le droit de recouvrer de l’argent versé à Sa Majesté au titre de la taxe, de la taxe nette, d’une pénalité, des intérêts ou d’un autre montant prévu par la présente partie ou qu’elle a pris en compte à ce titre.

 

[9]     De plus, la Loi se sert de « termes non équivoques »[4] pour énoncer les conditions et les délais relatifs aux remboursements et la procédure à suivre pour faire appel.

 

L'emploi des termes « ne sont versés » prive tant le ministre que la Cour d'un quelconque pouvoir discrétionnaire de prolonger le délai applicable au dépôt, même lorsque la situation, comme en l'espèce, justifie qu'une telle prorogation soit accordée[5].

 

[10]    En tant que « code exhaustif », le remboursement peut être compris et administré sans avoir recours à d’autres textes législatifs ou lois d’application générale. Donc, tout comme dans le cas des paragraphes 261(3) et 256(3), la Cour n’aurait aucun pouvoir discrétionnaire lui permettant de déroger aux délais prescrits au paragraphe 254(3), ou de décharger le contribuable de l’obligation de les respecter, en se fondant sur l’equity ou la compassion qu’elle éprouverait en raison des circonstances spéciales d’une affaire.

 

Conclusion

 

[11]    L’appelant reconnaît avoir présenté sa demande plus de deux ans après l’achat de l’habitation. Cependant, il soutient qu’il est injuste de lui refuser le remboursement parce qu’il aurait reçu de l’information incorrecte de son courtier immobilier, du constructeur et du notaire public. Cette question est identique à celle qui a été soulevée dans l’affaire Pickering[6], où les nouveaux propriétaires avaient reçu de l’information erronée du constructeur. Le tribunal a conclu que « [c]'est malheureux […] [mais la] Cour n'a pas les pouvoirs, inhérents ou prévus dans la Loi, d'accorder la réparation que demandent les appelants ».

 

[12]    Ainsi, pour ces motifs, l’appel est rejeté.

 

[13]    Sans contredit, les circonstances particulières de la présente affaire – les informations incorrectes fournies à l’appelant par le courtier immobilier, le constructeur et le notaire public, l’état de santé de l’appelant et celui de son épouse qui les ont forcés à attendre avant de faire de Crown Isle leur résidence principale et la lenteur du ministre – lui donnent des apparences d’iniquité. Dans des cas semblables, la Cour a conseillé au contribuable de demander un décret de remise en application de la Loi sur la gestion des finances publiques; je fais la même recommandation à l’appelant.

 

       Signé à Ottawa (Canada) ce 18e jour de décembre 2006.

 

 

 

 

« T. O’Connor »

Juge O’Connor

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de février 2008.

                                      

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.L, LL.B.

 



RÉFÉRENCE :

2006CCI687

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2006-1001(GST)I

 

INTITULÉ :

William N. Slovack et

Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Nanaimo (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 1er décembre 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge T. O’Connor

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 18 décembre 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Sara Fairbridge

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 



[1] Paragraphes 261(3) et 256(3).

[2] Cairns v. R. [2001] G.S.T.C. 52, 2001 G.T.C. 414 (C.C.I.)  au paragr. 11 (au sujet du paragr. 261(3)).

[3] McDonell c. La Reine, 2005CCI301, [2005] G.S.T.C. 134 (C.C.I.) au paragr. 20 (au sujet du paragr. 261(3)).

[4] Précitée, note 2.

[5] Zubic c. La Reine, 2004CCI533, [2004] G.S.T.C. 132 (C.C.I.) au paragr. 7 (au sujet du paragr. 256(3)).

[6] Pickering v. R. [2001] G.S.T.C. 73, 2001 G.T.C. 463 (C.C.I.) (au sujet du paragr. 256(3)).

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