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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

LOI DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

                                           2004-452(IT)I

ENTRE :

BRYAN E. SMITH,

                                           appelant;

- et -

SA MAJESTÉ LA REINE,

                                           intimée.

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Appel entendu par M. le juge Little, dans la salle d’audience no 223, 455, rue Columbia, Kamloops (Colombie-Britannique), le mercredi 19 avril 2006.

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COMPARUTIONS :

Pour l’appelant :                 M. E. Smith

Avocate de l’intimée :            Me S. Fairbridge

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Le greffier audiencier : A. Skuce

 

Allwest Reporting Ltd.

302-814, rue Richards

Vancouver (C.-B.)

V6B 3A7

Par : S. Leeburn


MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l’audience

à Kamloops (Colombie-Britannique), le 19 avril 2006.)

JUGE : Je vais prononcer la décision relative à l’appel produit par Bryan E. Smith. Les faits concernent l’année d’imposition 1999 pendant laquelle l’appelant était conducteur de grand routier. En 1999, l’appelant a travaillé pour les sociétés suivantes : Beaver Trucking Service Ltd, à Kamloops, du 1er janvier au 22 février 1999; Cascade Carriers Ltd, à Calgary, du 25 février au 31 décembre 1999. L’appelant a travaillé comme camionneur pendant 161 jours en 1999.

En 1999, l’appelant et son épouse, Heather Smith, exploitaient en outre une entreprise musicale dénommée North 40 Music Studios (« North 40 »). North 40 a été constituée en 1996 afin d’offrir des services de disc‑jockey, de location de matériel de sonorisation ainsi que d’enregistrement mobile aux groupes de musiciens et aux artistes solo dans la région de Kamloops. Lorsque l’appelant a produit sa déclaration de revenus pour 1999, il a déduit une perte d’entreprise de 19 522,68 $ relativement à North 40. La situation financière de North 40 peut se résumer de la façon suivante : revenu brut d’entreprise déclaré de 2 500,00 $; dépenses courantes, 6 595,08 $; déduction pour amortissement (DPA) demandée, 13 493,60 $; utilisation du domicile à des fins commerciales, 1 933,00 $.

Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi, à l’égard de l’appelant, une nouvelle cotisation selon laquelle l’appelant pouvait déduire une perte d’entreprise de 1 429,10 $ au titre de North 40. Voici comment cette perte a été établie :

a) un revenu d’entreprise de 2 500,00 $ a été accepté;

b) des dépenses courantes de 3 243,10 $ et une DPA de 683,00 $ ont été admises.

Les questions fiscales en litige sont les suivantes :

a) Les dépenses excédant la somme admise par le ministre ont‑elles été engagées par l’appelant en vue de tirer un revenu d’une entreprise?

b) Le ministre a‑t‑il à juste titre refusé la DPA de 12 807,60 $?

c) L’appelant peut-il déduire une dépense au titre d’un bureau à domicile?

Je vais maintenant exposer mon analyse et ma décision.

Comme l’appelant n’a pu se présenter à l’audience en raison d’un engagement professionnel, son père, M. Ed Smith, l’a représenté. Ce dernier a également témoigné au sujet des activités commerciales de l’appelant.

Au début de l’audience, M. Smith a produit un affidavit signé par l’appelant. L’avocate de la Couronne, Me Sara Fairbridge, s’est opposée à la production d’une preuve par affidavit, et je suis d’accord avec les observations qu’elle a présentées. Cependant, afin de tenter de résoudre la présente affaire sans autre retard (l’appel a déjà été reporté à deux reprises), j’accepte d’entendre l’appel, mais j’ai informé M. Smith qu’il pourrait avoir de la difficulté à établir le bien‑fondé des prétentions de son fils puisque la preuve qu’il présentera constituera du ouï‑dire, une preuve dérivée qui n’a parfois que peu, ou pas, de poids.

Je vais maintenant me pencher sur chacun des éléments en litige en utilisant l’affidavit de l’appelant pour m’orienter.

(1) Déduction pour amortissement. La somme déduite s’élève à 13 493,00 $; la somme admise par le ministre est de 686,00 $. Pendant l’audience, le représentant de l’appelant a produit la pièce A-4, qui comporte de plus amples renseignements au sujet de nouveaux achats de matériel totalisant 11 261,00 $. Ce matériel a été acheté en 1999. Si nous appliquons la règle du 50 pour 100 à cette dépense, le montant exact des acquisitions ajoutées à la catégorie s’élève à 5 630,00 $. Pendant l’audience, le représentant a convenu que l’automobile de marque Mercedes, dont le coût excédait 32 000,00 $, était une voiture de luxe et il a renoncé à la déduction pour amortissement relative à ce véhicule.

Après avoir minutieusement examiné le témoignage du représentant, je suis arrivé à la conclusion que la déduction pour amortissement demandée pour 1999 devait être admise comme il est mentionné ci‑dessous.

Le montant initial de la déduction était de 31 171,00 $ : c’est le montant initial du coût en capital disponible. Il faut y ajouter la somme de 5 630,00 $, soit la moitié des acquisitions pour 1999. Le montant total de la déduction pour amortissement selon l’annexe se chiffre donc à 36 701,00 $. La demande initiale pour 1999 était de 2 748,50 $. Je vais ajouter une autre somme de 7 240,00 $ de sorte que la DPA totale disponible pour l’année 1999 s’élève à 10 008,00 $.

(2) Déplacements. En ce qui concerne le paragraphe 20 de l’affidavit, le représentant de l’appelant affirme avoir commis une erreur en déduisant seulement 113,85 $ au titre des déplacements. Il affirme maintenant que ces frais totalisaient 860,41 $ et il a produit la pièce A-9 pour étayer son allégation. Lorsqu’il a effectué les calculs visés dans cette pièce, le représentant de l’appelant s’est servi du taux de 45,5 cents le kilomètre. Il s’agit du taux en vigueur en 2006, qu’il a obtenu auprès de l’Agence du revenu du Canada. Je crois que ce taux devrait être réduit à 35 cents le kilomètre. Après avoir appliqué le taux réduit aux chiffres énoncés dans la pièce et fournis par le représentant de l’appelant, je conclus que le montant des déplacements devant être admis se chiffre à 661,00 $, au lieu de 860,41 $. La nouvelle somme s’élève donc à 661,00 $ au titre des déplacements.

Catégorie suivante : les repas et l’hébergement concernant les spectacles montés par North 40. L’appelant a déduit 350,00 $ lorsqu’il a produit sa déclaration de revenus pour 1999. Le ministre a refusé la totalité de ces frais. Le représentant de l’appelant a soutenu que cette somme devrait être de 12 015,00 $ et il a produit la pièce A-10 à l’appui de son allégation. Cependant, la déduction de l’appelant se fondait sur une somme de 45,00 $ par jour pour les indemnités de repas, ce qui correspond aux taux applicables en 2006. Dans la déclaration pour 1999 et dans le témoignage rendu par le représentant, l’appelant reconnaît que la déduction pour 1999 devrait être de 33,00 $ par jour pour l’indemnité de repas, et non de 45,00 $. Si l’on utilise les chiffres fournis par l’appelant, il s’agit de 18 jours à raison de 33,00 $ par jour pour un total de 594,00 $. Il faut ensuite déduire 50 pour 100, conformément aux exigences de la Loi, ce qui donne une somme de 297,00 $. Comme il y avait trois spectacles, on multiplie 297,00 $ par trois, ce qui donne 891,00 $ au lieu de la somme de 12 015,00 $ précisée dans la pièce A‑10. Par conséquent, la nouvelle somme relative aux repas et au divertissement s’élève à 891,00 $ au taux de 33,00 $ par jour.

Élément suivant : les repas à titre de conducteur. Selon la pièce R-1, soit la déclaration de revenus de l’appelant, la déduction au titre des frais de repas est de 5 213,00 $. Je ne suis pas convaincu à la lumière de la preuve qu’une autre somme devrait être ajoutée dans cette catégorie.

Élément suivant : les frais de bureau à domicile. L’appelant a demandé 1 933,00 $ au titre des frais qu’il estimait pouvoir déduire pour 1999. Le paragraphe 18(12) de la Loi de l’impôt sur le revenu interdit la déduction de dépenses relatives à un bureau à domicile dans les cas, comme en l’espèce, qui donnent lieu à une perte. J’estime donc qu’aucune somme ne doit être admise en ce qui touche cette catégorie.

Élément suivant : l’intérêt. Le paragraphe 25 de l’affidavit mentionne que l’appelant a déduit 1 547,00 $ à ce titre lorsqu’il a produit sa déclaration de revenus. Le ministre a admis 1 006,37 $. Cette déduction visait de l’intérêt payé par l’appelant sur un emprunt de 21 000,00 $ obtenu de la Community Futures Development Corporation. Le représentant de l’appelant a joint des formules de la Community Futures Development Corporation concernant l’intérêt montré sur l’affidavit. J’ai calculé l’intérêt facturé à l’appelant par Community Futures et je conclus que la somme calculée par le ministre est exacte tandis que celle calculée par le représentant ne l’est pas. La somme exacte s’élève à 1 006,37 $ pour 1999 et aucun rajustement ne doit être apporté à ce chiffre.

Le représentant de l’appelant a également soutenu que des intérêts supplémentaires auraient dû être ajoutés au titre de sommes que l’appelant a omis de déduire pour les années 1996, 1997 et 1998 (voir le paragraphe 27 de l’affidavit). Ces années sont frappées de prescription et l’appelant ne peut retourner dix ans en arrière pour déduire des intérêts sur un emprunt qui était exigible à cette époque. On ne peut reprocher au ministre les erreurs qui ont été commises par l’appelant et son représentant quant à des intérêts non déduits.

Élément suivant : les frais juridiques. Lorsqu’il a produit sa déclaration de revenus, l’appelant a déduit des frais juridiques de 275,00 $. Le ministre a refusé la totalité de cette déduction. Le représentant de l’appelant a mentionné que ce dernier a payé des frais juridiques ou administratifs équivalant à 1 pour 100 du montant du prêt. Selon la pièce 5 jointe à l’affidavit de l’appelant, le solde du prêt s’élevait à 11 231,13 $ au début de 1999. Je fais droit à 1 pour 100 de 11 231,00 $, à savoir 112,00 $.

Élément suivant : l’assurance. L’appelant a déduit 436,89 $, ce qui correspond à 40 pour 100 de 1 092,22 $. Le ministre a admis 10 pour 100 de cette somme, soit 109,25 $. J’accepte 436,00 $, soit la somme initialement déduite par l’appelant.

L’appelant a en outre déduit des dépenses relatives au téléphone. Il a demandé 907,74 $, soit la portion de 60 pour 100 relative à l’entreprise. Le ministre a refusé cette dépense. J’accorde 50 pour 100 de 907,74 $, soit 453,87 $.

Le représentant de l’appelant a également fait état de crédits d’impôt pour enfants et de prestations fiscales pour enfants, qui ont été retardées à cause de l’appel qu’il a produit, selon lui. Le représentant ou l’appelant devrait faire des vérifications auprès de fonctionnaires de l’Agence du revenu du Canada à ce sujet.

Enfin, je souhaite ajouter que c’est une chance pour l’appelant que le ministre ait reconnu qu’il exploitait une entreprise en 1999. J’apporte cette précision pour deux raisons :

(1) Le revenu reçu de North 40 était minime – c’est‑à‑dire seulement 2 500,00 $ pour l’année en cause – tant au regard des dépenses, du matériel et des véhicules automobiles totalisant près de 200 000,00 $ qu’au regard du revenu prévu de l’entreprise, soit 185 500,00 $ selon la pièce A-1, qui est le document présenté à Community Futures. Les prévisions mentionnées dans ce document s’élevaient, comme je l’ai dit, à 185 500,00 $ pour 1999 alors que la somme réellement gagnée n’est apparemment que de 2 500,00 $.

(2) Je signale en outre que les documents à l’appui étaient très mal préparés; ils n’étaient pas adéquats. Il ne s’agissait que d’une série de reçus sans aucune justification. Par exemple, on fait état d’un poste bande publique. La pièce 3 montre qu’un tel poste a été vendu à Cascade Carriers, non à l’appelant, le 30 juillet 1999.

On a également mentionné que l’épouse de l’appelant, Heather, était une associée de North 40. Or, la totalité de la perte de North 40 a été appliquée à l’appelant et aucune partie n’a été appliquée à Heather. Pour connaître la situation dans son ensemble, il aurait fallu examiner la déclaration de revenus de Heather ou entendre son témoignage. Il convient également d’ajouter qu’il ressort de la pièce A-5 que Heather a apparemment demandé une déduction pour amortissement de 23 651,80 $, mais nulle mention n’est faite de l’année visée.

Selon la pièce R-3, Heather aurait apparemment exploité une entreprise de messagerie à Canmore, d’octobre à décembre 1999, mais il n’y était nullement question d’un revenu reçu ou d’une déduction pour amortissement admise. Ce genre de preuve soulève des questions : Que se passait‑il? Un revenu quelconque a‑t‑il été déclaré? Les dépenses étaient‑elles justifiées? Les éléments de preuve de cette nature soulèvent des questions et des difficultés, mais ne fournissent aucune réponse. Je signale encore que Brian et Heather étaient associés dans North 40. La Cour devrait avoir des renseignements sur la société en nom collectif. Sans cette information, il subsiste des questions sans réponse et des points préoccupants.

Enfin, si l’appelant croit qu’il a droit à des pertes supplémentaires, lui ou son épouse aurait dû comparaître devant la Cour hier et ils auraient dû tenir des documents et des livres comptables appropriés. Leur propre omission à cet égard est à l’origine de leurs difficultés. M. Smith a fait du mieux qu’il pouvait dans les circonstances, mais il avait peu de marge de manœuvre en raison des documents médiocres et totalement insuffisants ainsi que de l’absence de l’appelant ou de son associée, Heather Smith.

L’appel sera accueilli sans dépens et le ministre devra apporter les rajustements mentionnés plus haut. Merci, appel accueilli sans dépens.

(FIN DE L’AUDIENCE)

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de mars 2008.

 

Maurice Audet, réviseur

 


 

 

 

RÉFÉRENCE :

 

 

 

2006CCI516

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2004-452(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

BRYAN E. SMITH

c.

SA MAJESTE LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Kamloops (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 19 avril 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

L’honorable juge L.M. Little

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 19 avril 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

M. E. Smith

 

Avocate de l’intimée :

Me Sara Fairbridge

 

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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