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Dossier : 2007-4053(IT)I

ENTRE :

 

MATRIX MANAGEMENT INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

____________________________________________________________________

Appel entendu à Fredericton (Nouveau-Brunswick), le 31 mars 2008

 

Devant : L’honorable juge Wyman W. Webb

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

Gerald David Webster

Avocats de l’intimée :

Me Martin Hickey et Me Kendrick Douglas

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2005 de l’appelante est rejeté, sans dépens.

 

      


Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse) ce 11e jour d’avril 2008.

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de mai 2008.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


 

 

 

 

Référence : 2008CCI201

Date : 20080411

Dossier : 2007-4053(IT)I

 

ENTRE :

 

MATRIX MANAGEMENT INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Webb

 

[1]     L’appelante s’est fait imposer une pénalité en application du paragraphe 162(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») parce qu’elle n’avait pas produit, selon les modalités et dans le délai prévus au paragraphe 150(1) de la Loi, sa déclaration de revenus pour son année d’imposition se terminant le 30 septembre 2005. L’appelante a interjeté appel de cette pénalité. Elle ne conteste pas l’impôt à payer pour cette année d’imposition.

 

[2]     Gerald Webster, le président de l’appelante, est la seule personne à avoir témoigné pour cette dernière. Il a affirmé que la déclaration de revenus pour l’année d’imposition de l’appelante se terminant le 30 septembre 2005 avait été remplie par le cabinet d’experts-comptables de l’appelante, puis envoyée par celui-ci aux bureaux de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») de Saint John (Nouveau‑Brunswick) avant la fin du mois de mars 2006, soit avant l’expiration du délai de six mois imparti pour la production de la déclaration de revenus en question.

 

[3]     Gerald Webster a affirmé que cette déclaration de revenus avait été envoyée en même temps que d’autres déclarations de revenus remplies par le cabinet d’experts‑comptables, notamment les déclarations de revenus de Gerald Webster et de son épouse, de même que celle d’une société affiliée à l’appelante. Je présume que c’est le cabinet d’experts‑comptables qui s’est occupé de l’envoi des déclarations. Deux de ces déclarations, celle de l’épouse de Gerald Webster et celle de la société affiliée, ont été traitées, alors que les deux autres, celle de l’appelante et celle de Gerald Webster, ne l’ont pas été. Par la suite, l’appelante et Gerald Webster ont reçu un avis par lequel l’ARC affirmait que ces deux dernières déclarations n’avaient pas été produites.

 

[4]     En l’espèce, la plus grande difficulté est posée par le fait que l’appelante n’a présenté aucune preuve pour démontrer qu’elle avait produit sa déclaration de revenus. Lors de son témoignage, l’agente de recouvrement de l’ARC a affirmé qu’il n’y avait aucune trace de la production de la déclaration de revenus de l’appelante avant le mois de mars 2007. Elle a aussi dit que l’appelante, à quelques jours de l’audience, n’avait pas encore acquitté son impôt à payer pour son année d’imposition se terminant le 30 septembre 2005.

 

[5]     L’appelante n’a pas appelé le comptable à témoigner. Elle n’a pas non plus fourni de déclaration par laquelle le comptable aurait confirmé avoir produit la déclaration de revenus de l’appelante. La seule preuve présentée par l’appelante provient d’une personne qui n’a pas personnellement produit lui-même la déclaration de revenus. En fait, Gerald Webster a seulement pu affirmer qu’à sa connaissance, la déclaration avait été produite. Gerald Webster a dit ne pas avoir produit la déclaration de revenus, mais il n’a pas fait témoigner la personne qui, selon lui, l’avait produite.

 

[6]     Dans Kennedy v. M.N.R., [1989] 2 C.T.C. 2121, 89 DTC 611, le juge Taylor s’est ainsi exprimé :

 

[12]      Dans l’ordre des choses, les êtres humains et même les machines étant ce qu’ils sont, c’est-à-dire moins que parfaits, il est toujours possible que le genre de situation que l’appelant allègue puisse survenir : une déclaration d’impôt sur le revenu que l’on dépose dans la bonne boîte aux lettres et qui disparaît à tout jamais. Comme l’a fait remarquer avec raison le procureur de l’appelant, le règlement d’un litige concernant un envoi par la poste peut donc être une question de crédibilité. Si l’on considère les deux points extrêmes de la question, cela pourrait vouloir dire, d’un côté, que l’appelant ne pourrait prouver d’aucune manière qu’il a mis sa déclaration d’impôt à la poste. De l’autre côté, on pourrait demander à la Cour d’accepter simplement comme suffisant que l’appelant jure qu’il a bel et bien mis à la poste la déclaration en question. Il est évident que ni l’un ni l’autre de ces deux points extrêmes n’est tout à fait satisfaisant. Cependant, l’audience a permis à la Cour de prendre connaissance de certains arguments qui aident effectivement à prendre une décision. Ainsi qu’il a été noté plus tôt, le témoignage de M. Boyce et de Mme Gauthier est important, bien qu’il ne soit pas directement lié à la question critique.

 

[13]      Examinons tout d’abord les éléments de preuve suivants qui ont directement trait à la mise à la poste des documents en question :

 

      (1)  Le témoignage de M. Kennedy, selon lequel la déclaration avait été produite.

 

      (2)  Le témoignage corroborant de Mme Kennedy, selon lequel la déclaration avait été produite.

 

[14]      Je ne connais pas de décision jurisprudentielle qui justifierait que la Cour fasse droit à l’appel du contribuable en se fondant uniquement sur l’argument de ce dernier, selon lequel la déclaration en question a été mise à la poste (encore qu’il ne faille pas prendre à la légère cet élément de preuve), quand il n’existe aucune pièce montrant que les documents en question ont été reçus ou renvoyés. Le témoignage corroborant de Mme Kennedy a un effet très persuasif, puisque cela donne deux témoins qui attestent du même acte, à savoir la mise à la poste de la déclaration. Il s’agit d’un point qui mérite une sérieuse réflexion : ce simple témoignage non contesté de deux personnes ou plus, dans des circonstances comme celles qui sont présentées ici, suffit-il pour libérer un contribuable du fardeau de la preuve? Il est certain que j’inclinerais fortement à croire que oui si les circonstances de l’espèce et les éléments de preuve extérieurs, peu importe leurs limites, étayaient la prétention du couple. Cependant, dans la présente affaire, je ne puis le faire car le peu d’autres éléments de preuve pertinents dont nous disposons indiquent le contraire. Cela ne veut pas dire que M. et Mme Kennedy n’ont peut-être pas raison de prétendre ou de supposer que la déclaration a été mise à la poste, ou du moins qu’ils croient avoir raison. Cela signifie simplement qu’à mon avis ce résultat, c’est-à-dire la mise à la poste de la déclaration, ne peut être facilement lié à la situation entourant la déclaration et le chèque en question.

 

[7]     Dans cette affaire, le juge Taylor avait entendu témoigner les personnes qui affirmaient avoir mis les déclarations de revenus à la poste. En l’espèce, la personne qui, selon Gerald Webster, a produit la déclaration de revenus n’a fourni aucun élément de preuve.

 

[8]     L’appelante a soutenu qu’il est possible d’opposer une défense fondée sur la diligence raisonnable aux pénalités prévues par le paragraphe 162(1) de la Loi. Dans Pillar Oilfield Projects Ltd. v. The Queen, [1993] G.S.T.C. 49, le juge Bowman a conclu que le contribuable peut se soustraire à une pénalité imposée en vertu de la Loi sur la taxe d’accise s’il réussit à « établir qu’il n’a commis aucune faute et qu’il a fait preuve de diligence raisonnable ». Dans un certain nombre de décisions, cette défense fondée sur la diligence raisonnable a également été rendue applicable aux pénalités imposées en vertu de l’article 162 de la Loi. Il s’agit des décisions suivantes : Ford v. The Queen, [1994] 2 C.T.C. 2395, 95 DTC 848; Bennett v. The Queen, [1995] 2 C.T.C. 2308, 96 DTC 1630; Stuart Estate v. The Queen, [2003] 3 C.T.C. 2232, 2003 DTC 329, et Bateman v. The Queen, [2007] 2 C.T.C. 2020, 2007 DTC 156.

 

[9]     Toutefois, comme l’a fait remarquer le juge Bowman dans Pillar Oilfield Projects Limited :

 

Comme je l'ai mentionné ci-dessus, la bonne foi dans le contexte d'erreurs commises involontairement n'équivaut pas à la diligence raisonnable. Cette défense exige la preuve positive que toutes les précautions raisonnables ont été prises pour qu'aucune erreur ne soit commise.

 

[10]    En l’espèce, l’appelante n’a pas présenté de preuve permettant de démontrer qu’elle avait fait preuve de diligence raisonnable. Comme je l’ai précédemment mentionné, la seule preuve présentée par l’appelante est le témoignage d’une personne qui n’avait pas personnellement produit la déclaration de revenus. Le comptable qui, selon le témoignage de Gerald Webster, aurait rempli et produit la déclaration de revenus n’a pas témoigné. De plus, l’appelante n’a pas présenté de déclaration ou de document provenant de ce comptable. La preuve présentée par l’appelante ne permet pas de conclure qu’elle a fait preuve de diligence raisonnable.

 

[11]    L’appel est rejeté, sans dépens.

 


       Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse) ce 11e jour d’avril 2008.

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de mai 2008.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.



RÉFÉRENCE :

2008CCI201

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2007-4053(IT)I

 

INTITULÉ :

Matrix Management Inc. et

Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Fredericton (Nouveau-Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 31 mars 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Wyman W. Webb

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 11 avril 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

Gerald David Webster

Avocats de l’intimée :

Me Martin Hickey et Me Kendrick Douglas

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 

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