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Dossier : 2007-3531(IT)I

ENTRE :

BERNARD FAIBISH,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

Appel entendu le 16 avril 2008 à Toronto (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge J. E. Hershfield

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

 

Avocat de l’intimée :

Me Laurent Bartleman

 

____________________________________________________________________

 

 

JUGEMENT

L’appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2005 est accueilli, sans frais, et la nouvelle


cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour d’avril 2008.

 

 

 

« J. E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de juillet 2008.

 

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


 

 

 

 

Référence : 2008CCI241

Date : 20080430

Dossier : 2007-3531(IT)I

ENTRE :

BERNARD FAIBISH,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Hershfield

 

[1]     L’unique question en litige à l’audience était celle de savoir si, au cours de l’année d’imposition 2005, l’appelant a engagé des frais de déménagement déductibles au sens de l’alinéa 62(3)e) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). Le montant réclamé et refusé est de 4 552 $.

 

[2]     Aux termes de l’alinéa 62(3)e), sont compris dans les « frais de déménagement » « les frais relatifs à la vente de son ancienne résidence ».

 

[3]     Personne ne nie que l’appelant se soit réinstallé et qu’il ait été autorisé à déduire des frais de déménagement engagés en 2005 relativement à cette réinstallation, puisque l’on a reconnu qu’il s’agissait d’une « réinstallation admissible » au sens de l’article 248 de la Loi.

 

[4]     Le contribuable a déclaré qu’il avait conclu une offre d’achat d’une nouvelle résidence le 2 juillet 2005 et qu’à partir de ce moment‑là, il avait préparé la mise en vente de son ancienne résidence.

 

[5]     Il savait qu’il y avait de la moisissure dans la salle de bain située à l’étage de son ancienne résidence, et il craignait que cela nuise à sa vente, voire même l’empêche. Il a donc retenu les services d’un entrepreneur pour corriger le problème.

 

[6]     Selon le témoignage non contesté de l’appelant, la moisissure apparente semblait mineure à l’œil nu; lorsque le panneau de revêtement entourant la fenêtre de la salle de bain et la baignoire a été retiré, on y a découvert beaucoup de moisissure, et il a fallu exécuter des travaux pour l’éliminer.

 

[7]     L’appelant a témoigné qu’au cours de l’exécution de ces travaux, des dommages ont été causés à une colonne de plomberie, ce qui a causé une fuite d’eau et donc, des dommages au plancher de la salle de bain, puis au plafond de la pièce située sous la salle de bain, et enfin au plancher de cette pièce.

 

[8]     Les travaux destinés à éliminer la moisissure et à réparer les dommages causés par l’eau ont été achevés quelques semaines seulement avant que l’appelant ne conclue une offre d’achat de la nouvelle résidence et découlaient de sa réinstallation. Les travaux de détection de la moisissure et d’élimination de celle‑ci ainsi que les travaux de réparation des dommages causés par l’eau ont coûté au total 4 552 $, montant que l’appelant a déduit à titre de frais de déménagement en vertu de l’alinéa 62(3)e).

 

[9]     L’appelant a évalué le coût des travaux se rapportant à la salle de bain (moisissure et dommages causés par l’eau) à quelque 1 100 $, plus le coût du carrelage pour la salle de bain, et estimé que le reste des frais se rapportaient aux travaux de réparation effectués dans la pièce située sous la salle de bain, ce qui incluait les travaux de réparation du plafond et le remplacement de la moquette endommagée par un plancher en bois franc. L’appelant a déclaré que le plancher en bois franc n’était pas plus cher à installer que ne l’aurait été une nouvelle moquette.

 

[10]    L’appelant a fait valoir que tous ces coûts avaient été engagés aux fins des travaux qui avaient dû être effectués en raison de sa réinstallation et qu’ils avaient été engagés à la seule fin de vendre son ancienne résidence. Pour cette raison, il s’agissait de coûts relatifs à la vente de l’ancienne résidence déductibles à titre de frais de déménagement. Il a fait valoir qu’il serait impossible de vendre une résidence ayant un problème apparent de moisissure, et que les frais engagés pour remédier à ce problème, y compris les frais découlant des travaux de réparation, étaient des dépenses nécessaires, directement liées à sa réinstallation et en découlant.

 

[11]    Il a soutenu que le libellé général de l’alinéa e) (qui permet la déduction des « frais relatifs à la vente de son ancienne résidence ») doit être interprété dans son sens large, de manière qu’il soit donné effet à son objet évident. Il a cité un éminent auteur d’ouvrages de fiscalité à l’appui de la proposition selon laquelle toutes les dépenses seraient admissibles à titre de « frais de déménagement » si elles étaient admissibles au sens ordinaire de cette expression. Ce commentaire découle du fait que la définition de « frais de déménagement » indique expressément que « sont comprises » les dépenses expressément énumérées au paragraphe 62(3), dont les frais relatifs à la vente, mentionnés à l’alinéa e). Il est clair, suivant ce libellé, que la liste n’est pas exhaustive et que d’autres dépenses pourraient et devraient en faire partie si, dans leur sens général, elles pouvaient être considérées comme étant des « frais de déménagement ».

 

[12]    L’appelant a également produit en preuve des documents tirés du site Internet de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) et du département américain du logement et du développement urbain, qui tous deux font mention des problèmes de santé causés par la moisissure et de la nécessité d’y remédier.

 

[13]    L’appelant a produit également une lettre de son agent immobilier, qui affirme que le problème de moisissure aurait nui considérablement à la vente de la maison, au point même d’empêcher cette vente.

 

[14]    L’avocat de l’intimée a fait valoir que les dépenses avaient été effectuées dans le but de hausser la valeur de l’ancienne résidence ou d’en prévenir une baisse, et qu’elles n’étaient pas des dépenses nécessaires qui avaient été engagées pour vendre l’ancienne résidence. Les travaux de réparation n’étaient pas directement liés au déménagement, mais ils avaient été effectués relativement au déménagement pour en préserver ou en accroître la valeur. Il a cité la décision de la Commission de révision de l’impôt John G. Critchley v. The Minister of National Revenue[1] à l’appui de la proposition suivant laquelle les frais de déménagement n’incluaient que les dépenses directement liées à la vente de l’ancienne résidence, et non pas toutes les dépenses ou tous les frais engagés relativement à sa vente.

 

[15]    Dans cette affaire, on cite également la décision Marvin R.V. Storrow v. Her Majesty the Queen[2], où la Cour fédérale a conclu que le terme « frais de déménagement » doit être interprété dans le sens ordinaire et courant qu’il peut avoir dans le contexte dans lequel il est utilisé. L’on pourrait soutenir que les travaux de réparation effectués sur une résidence ne sont pas tant des frais de déménagement qu’ils sont des travaux préparatoires, ce qui constitue une catégorie distincte de dépenses selon leur sens ordinaire et courant. Cette distinction a été relevée dans une autre affaire mentionnée par l’avocat de l’intimée : Merton A. Collin v. The Minister of National Revenue[3].

 

[16]    Dans cette affaire, le juge Bonner, de la Cour canadienne de l’impôt, a comparé les coûts d’améliorations apportées à une maison en vue de la préparer à une vente comme une couche de peinture qui ne sont pas des frais de déménagement, aux frais engagés pour changer les modalités d’un acte hypothécaire en vue de faciliter la vente, qui sont des frais de déménagement. L’avocat a fait valoir que les travaux de réparation effectués dans la présente affaire visaient à apporter des améliorations en vue de la vente, et qu’ils ne constituaient pas des frais de déménagement déductibles.

 

Analyse

 

[17]    La thèse de l’appelant compte un certain nombre de failles qui entraîneront le rejet de son appel, à tout le moins une partie substantielle de celui‑ci. Premièrement, je ne puis admettre que le problème de moisissure ait pu empêcher complètement la vente de la résidence. Si l’on avait caché le problème ou omis d’en divulguer l’existence et qu’il s’était révélé un risque pour la santé, il aurait pu en découler une lourde responsabilité. Or, il était visible, et une inspection en vue de déterminer la portée et le coût des travaux aurait probablement été requise à un moment ou à un autre dans le cadre de la vente de la maison. Les travaux effectués ne deviennent pas des frais nécessaires ou relatifs à la vente du seul fait qu’il est sage d’avoir réglé le problème à l’avance. À cet égard, l’interprétation que donne l’appelant du sens général qu’ont les frais de vente dans le contexte de la disposition en cause pose problème.

 

[18]    En fait, appliquer son argument et donner aux dépenses leur sens général devrait permettre d’établir que les dépenses qu’il a engagées sont, pour la plupart, non déductibles. Je dis cela pour deux raisons. Premièrement, le terme « frais » ne désigne pas, dans son sens général, des dépenses en immobilisation au titre de réparations ou d’améliorations. Deuxièmement, si l’on applique la doctrine d’interprétation ejusdem generis, il n’y a rien dans la liste des dépenses qui sont comprises dans la définition des frais de déménagement qui puisse être de quelque manière que ce soit interprété comme incluant les dépenses relatives à des travaux de réparation ou d’amélioration d’une ancienne résidence engagées en raison d’une réinstallation.

 

[19]    La thèse de l’appelant est problématique également du fait que la plupart des dépenses liées aux travaux de réparation découlaient de dommages causés par une exécution fautive des travaux par la personne dont les services avaient été retenus pour éliminer le problème de moisissure. Le lien entre la vente de l’ancienne résidence et la résolution de ce problème est très ténu. Cette dépense n’est pas aussi étroitement liée à la vente que ne l’est le coût de la peinture qui, selon ce qu’a statué le juge Bonner dans la décision Collin, ne serait pas admissible à titre de frais de déménagement.

 

[20]    La seule portion des dépenses engagées qui puisse être raisonnablement considérée comme étant admissible à titre de frais relatifs à la vente de l’ancienne résidence est ce que je pourrais appeler la portion des dépenses qui se rapporte à l’inspection.

 

[21]    L’appelant a affirmé qu’une inspection seule aurait entraîné notamment le retrait du panneau de revêtement sous la fenêtre de la salle de bain et autour de la baignoire. La portée inattendue du problème qui a ensuite nécessité des travaux de réparation aurait alors été révélée. À mon avis, le coût de l’inspection aurait été déductible soit en tant que dépense non énumérée au paragraphe 62(3), soit à titre de frais relatifs à la vente, en vertu de l’alinéa 62(3)e). Les coûts des travaux de réparation auxquels l’inspection aurait donné lieu ne sont pas déductibles.

 

[22]    Lorsque je l’ai interrogé sur cette opinion et que je lui ai demandé de proposer un montant au titre du coût d’une inspection, l’appelant a déclaré qu’il était d’avis que l’inspection seule aurait coûté entre 300 $ et 500 $. Autrement dit, sur le montant de 1 100 $, qu’il a estimé être le coût des travaux dans la salle de bain, lequel comprenait le coût de la détermination de l’étendue du problème de moisissure, il a indiqué qu’un montant de 300 $ à 500 $ serait attribuable à la détermination du problème, c.‑à‑d. à la tenue d’une inspection.

 

[23]    À ce moment‑ci, je me dois d’exprimer le sentiment de frustration que j’ai éprouvé à l’égard de la conduite de l’avocat de l’intimée à l’audience. Lorsque j’ai demandé à l’appelant ce qu’il pensait être le coût d’une inspection, l’avocat de l’intimée s’est opposé à ma question au motif que l’appelant n’était pas un expert. Lorsque j’ai indiqué que j’allais permettre la question en dépit de son objection et que je considérerais le poids à accorder à la réponse donnée, l’avocat de l’intimée a insisté, avec ce que je pourrais appeler une persistance troublante, pour s’opposer « pour le dossier de la Cour », a‑t‑il dit.

 

[24]    L’objection telle qu’elle a été formulée donnait à penser que seul un expert pouvait répondre à la question posée. Or, il est bien établi en droit que les questions de connaissance commune ou générale ne nécessitent pas le témoignage d’expert[4]. En fait, un tel témoignage d’expert n’est pas admissible. J’estime juste de dire qu’il n’est pas admissible au motif qu’il tend à distraire ou à confondre dans les cas où le juge des faits (comme un jury) pourrait être tenté de s’en remettre à cette opinion d’expert. Il devrait être exclu, à moins qu’il ne soit d’une nature telle que le juge des faits en a besoin pour tirer une conclusion juste. Par ailleurs, l’admission est inoffensive lorsque, suivant celle‑ci, le juge des faits détermine que l’aide ainsi offerte n’est pas nécessaire. Il n’accordera simplement aucun poids à la preuve. L’incidence de cette détermination ne diffère à mon avis en rien du cas où un juge seul entend un témoignage et met la question de son admissibilité en délibéré[5].

 

[25]    Si je donne à l’avocat le bénéfice du doute, je suppose qu’il pourrait avoir voulu s’opposer au motif que je demandais un « témoignage d’opinion » qui n’était pas admissible. En effet, sur la question du coût des travaux visant à arracher le panneau de revêtement sous la fenêtre de la salle de bain de l’appelant et autour de la baignoire, l’objection ne visait pas à déterminer si l’appelant était un expert qualifié, mais elle reposait plutôt sur le fait que l’opinion de profane de l’appelant était sans pertinence et non fiable et qu’elle ne devait pas être admise. Pour cette raison, l’avocat s’est opposé, « pour le dossier de la Cour », à ma volonté d’entendre et probablement de prendre en considération un « témoignage d’opinion ».

 

[26]    Il est bien établi en droit, sur le plan historique à tout le moins, que l’opinion d’un profane sur une question de connaissance commune ou autre est sans pertinence ou soulève des doutes sur le plan de sa fiabilité, et qu’elle est, sous réserve d’une certaine discrétion judiciaire, non admissible. Là encore, cependant, je me hasarderai à dire que l’admission est inoffensive lorsqu’il n’est pas nécessaire de rappeler au juge des faits son absence de valeur probante. Encore une fois, aucun poids ne peut être accordé à cette preuve.

 

[27]    Ces observations illustrent la manière dont on applique aujourd’hui les règles de preuve, qui consiste à « admettre la preuve et à discuter du poids à lui donner ». Cette règle « moderne » a été relevée pour la première fois dans l’affaire R. v. Birmingham Overseers[6] en 1861. La marge de manœuvre dont jouissent les juges, qui a pour effet de miner la règle stricte à l’encontre du témoignage d’opinion, a graduellement pris de l’ampleur et accorde au juge de première instance une discrétion de plus en plus grande, ainsi qu’il a été noté dans l’arrêt de la Cour suprême du Canada R. c. Graat[7].

 

[28]    L’assouplissement de la règle à l’encontre du témoignage d’opinion a évolué grandement eu égard à la notion pratique qui consiste à permettre aux témoins de témoigner sur des questions dont ils ont une connaissance personnelle sous la forme d’une opinion. Il s’agit d’une manière de transmettre une preuve sous une forme qui pourrait être transmise plus précisément ou plus facilement par un témoin[8]. L’affaire en l’espèce en est un exemple très simple. Le témoin a une connaissance directe des éléments requis pour effectuer la répartition raisonnable d’un coût. Il connaît la superficie de la pièce inspectée, la manière dont l’inspection a été effectuée, l’entrepreneur qui a effectué l’inspection et le taux réclamé par l’entrepreneur pour accomplir le travail. Une opinion sur le coût pourrait bien témoigner du contenu de cette connaissance personnelle et le juge pourrait bien lui accorder du poids ou non, selon sa perception de la question de savoir si le témoin est mieux placé pour se former une opinion et s’il a formé celle‑ci d’une manière qui est conforme à la façon dont le juge des faits l’aurait formée ou aurait dû la former[9]. Cela se traduit par le poids que le juge accordera à une telle preuve exprimée sous forme d’opinion.

 

[29]    Par conséquent, je confirme ma décision. Je suis convaincu que l’objection n’était pas particulièrement bien articulée, qu’elle ait été soulevée ou non « pour le dossier de la Cour ». Je n’entends pas ainsi décourager les objections faites « pour le dossier de la Cour ». Il y a cependant lieu de prendre en considération les circonstances de chaque affaire. Lorsqu’il suffit de soulever la question de savoir s’il y a lieu d’accorder du poids à un témoignage d’opinion (particulièrement lorsque le juge qui préside l’audience ordonne à l’avocat de soulever cette question dans le cadre de l’argumentation et que l’avocat a encore l’occasion de contre‑interroger le témoin pour obtenir un témoignage se rapportant au poids à donner à cette preuve), aucune objection « pour le dossier de la Cour » ne devrait être requise. En fait, l’omission de soulever une telle objection ne fermerait pas la porte à un argument relatif au poids ou à la pertinence du témoignage. La question de savoir si, dans une affaire donnée, un tel argument devrait être présenté, est une question distincte. Dans la présente affaire, cet argument pourrait presque être ridicule. Une estimation de quelques centaines de dollars de dépenses aux fins de retirer le panneau de revêtement ne relève ni de la science spatiale ni d’une distraction qui empêcherait un juge de répartir raisonnablement le coût en question. L’objection persistante de l’avocat, que le fait que cette estimation soit faite a froissé, tenait à mon avis dans la présente affaire d’une mise en scène déplacée[10].

 

[30]    C’est d’autant plus vrai qu’il s’agit en l’espèce d’un appel qui a été interjeté sous le régime de la procédure informelle. Le paragraphe 18.15(3) de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt prescrit que la Cour n’est pas liée par les règles de preuve lors de l’audition d’un appel interjeté sous le régime de cette procédure. Faire fi de cette disposition législative contribue considérablement aux difficultés inhérentes du système accusatoire auquel sont assujettis les appels interjetés en matière d’impôt, sous le régime de la procédure informelle, par des personnes qui ne sont pas représentées par avocat. En fait, l’avocat du ministère de la Justice qui fait fi de cette disposition législative dans des circonstances comme celles du présent appel doit repenser son rôle.

 

[31]    Le rôle d’un avocat du ministère de la Justice ne consiste pas à gagner chaque appel[11]. Il ne consiste pas non plus à faire avancer le dossier de son client avec zèle. Ce rôle, particulièrement dans le cas où l’appelant se représente lui‑même, consiste à aider les juges à déterminer la justesse d’une cotisation.

 

[32]    Quoi qu’il en soit, je suis d’avis que, dans la présente affaire, il est raisonnable d’effectuer une répartition des dépenses engagées pour ce que j’appellerais la portion des dépenses engagées par l’appelant qui se rapporte à l’inspection. Je ne fais preuve d’aucune déférence à l’égard de l’estimation de l’appelant, mais je conclus qu’une estimation de 300 $ n’est pas déraisonnable. C’est le montant que j’accorderai à titre de frais de déménagement déductibles par l’appelant. À mon avis, l’inspection d’un problème de moisissure est une dépense du type de celles qui sont envisagées au paragraphe 62(3). Dans le contexte de cette disposition, elle ne constitue pas une dépense durable de la nature de celles qui pourraient être considérées comme étant des dépenses visant à améliorer ou à maintenir la valeur de la résidence. Bien que je conclue que, dans les circonstances de la présente affaire, il s’agissait d’une dépense nécessaire, je note que la disposition en question ne renvoie pas à l’obligation qu’une dépense soit nécessaire. Les dépenses raisonnablement engagées et directement liées à la mise en vente d’une maison sont clairement relatives à la vente et constituent des frais de déménagement au sens où cette expression est utilisée au paragraphe 62(3). Je suis d’accord avec l’appelant qu’il a engagé de telles dépenses. Sa décision, en tant que propriétaire sur le point de mettre sa maison en vente, de déterminer la mesure d’un problème de moisissure susceptible d’avoir une incidence considérable sur la vente de cette maison, n’était pas déraisonnable. Je suis convaincu qu’une portion de ses dépenses (300 $) était un coût directement lié à la nécessité de trouver ce problème même. Dans cette mesure, elle est déductible aux termes de la disposition en cause telle qu’elle a été déduite.

 

[33]    En conséquence, l’appel est accueilli pour le montant de 300 $, sans frais.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour d’avril 2008.

 

 

« J.E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de juillet 2008.

 

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI241

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2007-3531(IT)I

 

INTITULÉ :                                       BERNARD FAIBISH ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCEC :              Le 16 avril 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge J.E. Hershfield

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 30 avril 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me Laurent Bartleman

 

PROCUREUR INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                     

 

                            Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] 83 DTC 278.

 

[2] 78 DTC 6551.

 

[3] 86 DTC 1477.

[4] Dans l’arrêt R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9, au paragraphe 17 (QL), la Cour suprême du Canada a requis l’application de quatre critères aux fins de l’admissibilité de la preuve d’expert : a) la pertinence, b) la nécessité d’aider le juge des faits, c) l’absence de toute règle d’exclusion, et d) la qualification suffisante de l’expert.

[5] Voir Sopinka, Lederman & Bryant, The Law of Evidence in Canada, 2e éd. (Toronto : Butterworths Canada, 1999), par. 2.88, où l’on note le droit d’une cour de recevoir une preuve dont l’admissibilité est douteuse, sous réserve du droit de la rejeter pour en arriver à une décision.

 

[6] (1861) 1 B&S 763, p. 767.

 

[7] [1982] 2 R.C.S. 819, p. 839 et 840.

 

[8] Graat, à la page 837, expose une grande partie, si ce n’est la totalité, de ce principe du bon sens.

 

[9] Citant l’ouvrage de Paciocco et Struesser, The Law of Evidence (Concord : Irwin, 1996), Sopinka, supra, note 5, résume la situation dans les termes suivants et de façon utile au par. 12.11 : [TRADUCTION] « Les tribunaux jouissent aujourd’hui d’une liberté accrue d’admettre les témoignages d’opinion des témoins profanes si : (1) le témoin possède une connaissance personnelle; (2) le témoin est dans une meilleure position que le juge des faits pour se former une opinion; (3) le témoin a le bagage d’expérience nécessaire pour tirer la conclusion; et (4) l’opinion est un mode d’expression concis et le témoin ne pourrait décrire de façon aussi exacte et adéquate et avec une facilité raisonnable les faits au sujet desquels il témoigne ».

[10] Ce n’est pas le fait de soulever une objection, qu’elle soit erronée ou non, qui justifie l’étiquette de « mise en scène », mais plutôt la manière dont elle est soulevée et les circonstances qui l’entourent. Même les objections soulevées pour le dossier de la Cour en vue de préserver le droit d’appel doivent être modérées par des considérations pratiques et le bon sens. Sinon, l’objection mesquine, soulevée avec une note d’agressivité et de défi, pourrait inévitablement être considérée comme visant à épater la galerie.

 

[11] Voir les remarques du juge Woods dans la décision Rainforth c. La Reine, 2007 CCI 132, aux paragraphes 61 et 62.

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