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Dossier : 2007-3803(IT)I

ENTRE :

W. ROSS WHITE,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

__________________________________________________________________

Appel entendu le 27 février 2008 à North Bay (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge M.A. Mogan

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelant :

Gerald Potvin

Avocat de l’intimée :

Me George Boyd Aitken

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en application de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard de l’année d’imposition 2005 est accueilli, et la nouvelle cotisation est déférée au ministre du Revenu national afin qu’il procède à un nouvel examen et établisse une nouvelle cotisation en partant du principe que le montant devant être inclus dans les revenus de l’appelant doit être réduit et passer de 24 909 $ à 23 888 $.

 

 

 

 

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour de juillet 2008.

 

 

« M.A. Mogan »

Juge Mogan

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour d’octobre 2008.

 

 

Hélène Tremblay, traductrice

 


 

 

 

 

Référence : 2008CCI414

Date : 20080724

Dossier : 2007-3803(IT)I

ENTRE :

W. ROSS WHITE,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Mogan

 

[1]     L’appelant a acquis une police d’assurance‑vie (temporaire) le 16 septembre 1983, alors qu’il était âgé de 48 ans. La police comportait une indemnité de « restitution de prime » pour laquelle l’appelant payait une prime distincte. La police a expiré le 16 septembre 2005, alors que l’appelant était âgé de 70 ans. Étant donné que l’appelant a survécu à l’expiration de la police, en 2005, il a reçu de l’assureur un chèque de 24 909 $ à titre d’indemnité de « restitution de prime ».

 

[2]     Dans sa déclaration de revenus pour l’année 2005, l’appelant a déclaré des revenus de 21 200 $, principalement issus de prestations de la Sécurité de la vieillesse, du Régime de pensions du Canada ainsi que d’un régime de pension provenant d’un emploi. Dans un avis de nouvelle cotisation daté du 6 novembre 2006, le ministre du Revenu national a ajouté le montant de 24 909 $ aux revenus de l’appelant pour l’année 2005, appliquant ainsi l’impôt à la restitution de prime reçue par celui‑ci. L’appelant interjette appel de cette nouvelle cotisation sous le régime de la procédure informelle. La seule question dont la Cour est saisie est de savoir si le montant de 24 909 $ doit être inclus dans les revenus de l’appelant pour l’année d’imposition 2005.

 

[3]     Lors de l’audience, l’intimée a présenté une reliure contenant 12 documents (soit 12 onglets). L’appelant a accepté la reliure et cette dernière a été déposée sous la cote R‑1. Je citerai certains de ces documents afin de fournir davantage de détails. L’onglet 4 de la pièce R‑1 est le contrat d’assurance initial (la police portant le numéro 425,654) daté du 16 septembre 1983 dans lequel on qualifie l’appelant d’[traduction] « assuré de la vie » et de [traduction] « propriétaire », et l’assureur était la Compagnie d’Assurance‑Vie Canadienne Générale. L’onglet 6 est une lettre avisant l’appelant qu’à la suite d’une fusion de sociétés effectuée en juillet 2000, l’assureur de sa police portant le numéro 425,654 était maintenant la Compagnie d’assurance‑vie RBC. Aucune autre modalité de la police n’a été modifiée.

 

[4]     L’onglet 5 est un résumé des modalités de la police que la Compagnie d’assurance‑vie RBC (la « RBC Vie ») a envoyé à l’appelant le 4 décembre 2000. Il s’agit d’un résumé des modalités de base de la police portant le numéro 425,654. Ce document contient l’affirmation suivante :

 

[traduction]

 

Restitution de prime – Le présent avenant (RDP) prévoit le remboursement total, au décès de l’assuré ou au moment où ce dernier atteint l’âge de 70 ans, des primes, des droits de police et des primes pour l’avenant (sans les intérêts).

 

[5]     L’onglet 10 est une lettre datée du 20 septembre 2005 que la RBC Vie a envoyée à l’appelant, accompagnée d’un chèque de 24 909,20 $. La lettre énonce qu’il se peut que le montant soit imposable, et qu’un formulaire T5 serait envoyé au début de l’année 2006. L’onglet 3 est un feuillet T5 de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») que la RBC Vie a envoyé à l’appelant pour l’année d’imposition 2005. Le montant de 24 909,20 $ figure à la case 13 du feuillet, soit la case « intérêts de source canadienne ». Je tiens pour acquis que la RBC Vie a envoyé le feuillet T5 à l’appelant et à l’ARC, parce que l’avis de nouvelle cotisation daté du 6 novembre 2006 (onglet 1) envoyé à l’appelant comportait l’ajout de 24 909 $ aux revenus déclarés par l’appelant pour l’année 2005. 

 

[6]     Lorsqu’il a reçu l’avis de nouvelle cotisation, l’appelant a téléphoné la RBC Vie pour se plaindre du fait que le montant de 24 909 $ avait été ajouté à ses revenus déclarés. L’onglet 12 est une lettre datée du 13 décembre 2006 envoyée par la RBC Vie à l’appelant. (Remarque : dans la citation ci‑dessous, « RDP » signifie « restitution de prime » et « CNAP » signifie « coût net de l’assurance pure ») :

 

[traduction]

 

J’ai vérifié les calculs et remarqué qu’une erreur s’est glissée dans le feuillet T5 qui vous a été envoyé. Notamment, un examen détaillé de votre dossier de police a révélé que votre police avait été initialement établie en fonction d’une valeur nominale moins élevée et qu’elle prévoyait plusieurs augmentations de cette valeur nominale et des primes pendant les premières années. Le feuillet T5 que nous avons établi initialement ne tenait pas dûment compte des  valeurs nominales moins élevées. Les calculs révisés sont énoncés ci‑dessous. De plus, vous trouverez en pièce jointe un T5 modifié selon lequel le produit de disposition à déclarer est le montant moins élevé, soit 23 888,04 $.

 

Selon l’Agence du revenu du Canada (ARC), le paiement de la RDP est réputé être une disposition. L’ARC a des lignes directrices très précises sur le calcul du montant imposable. Le montant imposable est désigné comme un produit de disposition et non un gain en capital. Les compagnies d’assurance‑vie sont tenues de déclarer le produit de cette disposition à titre de revenu imposable en application de l’alinéa 58(1)j) de la Loi de l’impôt sur le revenu, et conformément aux règles de l’ARC, nous devons déclarer le montant à la case 13 du feuillet T5.

 

La formule servant à calculer le montant du produit de disposition est la suivante : le montant de la disposition moins le prix de base rajusté (PBR). L’ARC a des lignes directrices précises pour le calcul du PBR. En bref, il s’agit de la somme des primes payées moins le coût net de l’assurance pure (CNAP). Toutefois, les lignes directrices de l’ARC ne nous permettent pas d’inclure les primes de double indemnité et l’exonération des primes dans la somme des primes. Le calcul du CNAP est fourni par l’ARC en fonction de l’article 308 du Règlement de l’impôt sur le revenu.

 

Le calcul du produit de disposition imposable concernant votre police est le suivant :

 

Somme des primes payées, à l’exception de la

double indemnité et de l’exonération de primes              22 090,37 $

 

CNAP total                                                                              21 069,17 $

 

PBR de la police                                                                         1 021,20 $

 

 

Montant de la disposition                                                          24 909,20 $

Moins le PBR de la police                                                           1 021,20 $

Produit de la disposition à déclarer                                            23 888,04 $

 

Nous avons envoyé une copie de votre police, identique à celle que nous vous avons envoyée, à l’ARC pour obtenir son interprétation avant d’établir le feuillet T5. L’ARC nous a répondu directement que le paiement de la RDP constitue une disposition en fonction de l’alinéa 148(9)c) de la Loi de l’impôt sur le revenu

 

[7]     Lors de l’audition du présent appel, l’avocat de l’intimée a convenu que le montant initial (24 909 $) ajouté dans le calcul des revenus de l’appelant pour l’année 2005 était trop élevé. L’assureur affirme que le montant aurait dû être 23 888 $.

 

[8]     L’appelant a présenté un avis d’opposition à l’égard de la nouvelle cotisation datée du 6 novembre 2006 (onglet 1). En réponse à l’opposition, l’ARC a envoyé une lettre (onglet 7) à l’appelant. Cette lettre, datée du 24 avril 2007, précise notamment ce qui suit :

 

[traduction]

 

L’utilisation de l’expression « restitution de prime » porte à confusion. Le montant que reçoit le titulaire de police représente une partie des revenus de placement gagnés par l’assureur grâce au placement des primes. Les primes ont été mises en commun et utilisées par l’assureur pour payer les réclamations relevant d’autres polices émises. Par conséquent, les primes payées ont été utilisées par l’assureur pour fournir une protection, c’est‑à‑dire, pour fournir un service. Le montant restitué au titulaire de police représente une partie des revenus de placement gagnés avec l’argent mis en commun. Ceci peut souvent confondre les titulaires de police parce que le montant d’intérêts qu’ils reçoivent est quantifié en fonction du montant des primes qu’ils ont payé.

 

Le paragraphe cité ci‑dessus est autoréférentiel en ce qui a trait à la nouvelle cotisation, mais il n’arrive pas à expliquer la raison pour laquelle le montant de 23 888 $ (soit presque la totalité des primes, qui s’élèvent à 24 909 $) doit être inclus dans les revenus de l’appelant.

 

[9]     L’onglet 9 est une lettre datée du 14 novembre 2006 que la RBC Vie a envoyée à l’appelant. Elle présente la répartition de toutes les primes payées par l’appelant en application de la police portant le numéro 425,654 pendant la période prévue de 22 ans, soit de septembre 1983 à septembre 2005. Le total de ces primes s’élève à 24 909,20 $. L’onglet 4 donne une description des quatre types d’indemnité prévus dans le contrat d’assurance initial datant de septembre 1983 :

 

            Montant assuré (indemnité de décès)                             75 000 $

 

            Indemnités complémentaires

-         Exonération de paiement de primes

-         Double indemnité

-         Restitution de prime

 

Au cours des deux premières années d’application de la police, le montant assuré a été augmenté de 12½ % par année. Donc, en septembre 1985, le montant assuré (indemnité de décès) était de 93 750 $. Ce montant est confirmé à l’onglet 5.

 

[10]    L’intimée a appelé Herbert Huck, un cadre à la RBC Vie, à témoigner. M. Huck travaille dans le domaine des assurances depuis 24 ans et est directeur des services de conseils professionnels de la RBC Vie. Son témoignage s’est avéré très utile pour ce qui est de comprendre la façon dont la RBC Vie utilisait les primes payées par le titulaire d’une police et la façon dont la RBC Vie a calculé le montant qui a été ajouté aux revenus de l’appelant pour l’année 2005 concernant sa « restitution de prime ». Dans les paragraphes 11 à 15 ci‑dessous, j’essaierai de résumer les principaux éléments du témoignage de M. Huck.

 

[11]    Lorsque l’assureur reçoit le paiement d’une prime d’assurance‑vie, deux montants sont retenus dès le départ : (i) une taxe de 2 % de la province d’Ontario; (ii) la commission du courtier qui a vendu la police. Une partie de ce qu’il reste du paiement de la prime sert à payer certains frais administratifs relatifs à l’émission et à l’entretien de la police, soit un examen médical, une attestation d’un médecin, l’envoi postal des avis de primes, le recouvrement et l’application des primes. Le reste de la prime sert de fonds où on va puiser le montant assuré et les indemnités complémentaires qui peuvent être à payer. L’assureur peut tirer une certaine marge de profit de ce fonds.

 

[12]    En 2000, l’appelant payait une prime mensuelle de 95,28 $ (voir onglet 5). Sa prime annuelle s’élevait donc à 1 143,36 $. De ce montant annuel, 66 $ servaient à payer l’indemnité de restitution de prime (RDP) qui était payable soit au décès de l’appelant s’il devait décéder pendant la période de 22 ans prévue dans la police, soit au moment où l’appelant atteindrait l’âge de 70 ans, à la fin de la durée du contrat. Il est clair que la valeur de l’indemnité de RDP a augmenté pendant la durée du contrat, étant donné que les primes ont augmenté. L’indemnité de RDP a atteint sa valeur maximale lorsque l’appelant a fêté son 70e anniversaire de naissance et que le contrat a pris fin.

 

[13]    En fonction de l’indemnité de RDP, l’assureur verse au titulaire de la police (à la fin du contrat) ou à sa succession (si le titulaire décède avant la fin du contrat) un montant équivalent au total de toutes les primes payées suivant le contrat à ce moment‑là. M. Huck a expliqué comment l’assureur assemblait les fonds pour couvrir l’indemnité de RDP.

 

[traduction]

 

            Essentiellement, l’indemnité de restitution de prime est fournie par une compagnie d’assurance qui demande une prime supplémentaire aux titulaires de polices pour en couvrir le montant. Nous effectuons des placements avec cette prime afin de tirer un certain revenu, mais de toute évidence, le revenu tiré de cette prime n’est pas suffisant pour payer la restitution de prime prévue au contrat, alors nous comptons sur d’autres titulaires de polices qui choisissent une indemnité semblable et qui abandonnent leur contrat ou dont le contrat devient caduc. À ce moment-là, ils renoncent à leur droit concernant cette indemnité.

 

            La restitution de prime est donc constituée en partie du revenu tiré du placement des 66 $ et est aussi subventionnée en partie par les autres titulaires de polices qui ont renoncé à leur droit concernant la restitution de prime. 

                                                                            (Transcription, page 9, lignes 11‑25)

 

[14]    Le coût net de l’assurance pure (le « CNAP ») est le montant prévu à l’article 308 du Règlement de l’impôt sur le revenu. Il s’agit du coût de la mortalité établi en fonction de la table de mortalité de 1969‑1975 de l’Institut canadien des actuaires. Voir la pièce R‑3. Il faut tenir compte du CNAP parce qu’il s’agit d’un rajustement du coût nominal de la police. M. Huck a parlé du calcul ci‑dessous, établi à l’onglet 12 et cité au paragraphe 6 ci‑dessus : 

         

 

          Somme des primes payées, à l’exception de la

double indemnité et de l’exonération de primes              22 090,37 $

 

Moins le CNAP                                                                       21 069,17 $

 

PBR de la police                                                                         1 021,20 $

 

 

 

Produit versé à l’appelant                                                          24 909,20 $

Moins le PBR de la police                                                           1 021,20 $

 

Produit de disposition de l’appelant                                           23 888,04 $

 

[15]    Dans le calcul ci‑dessus, la RBC Vie a exclu les deux petites primes concernant la double indemnité et l’exonération de primes. Le montant de 22 090,37 $ représente la somme du total des primes payées pour l’assurance‑vie pure et de l’indemnité de RDP. La plus importante partie de cette somme concernait l’assurance‑vie pure. De plus, l’appelant a reçu une assurance‑vie pour une période de 22 ans en contrepartie des primes payées pour l’assurance‑vie pure. Par conséquent, le CNAP ne peut pas faire partie du PBR de l’indemnité de RDP qui était payable à l’appelant à la fin du contrat. Lorsqu’on déduit le CNAP de la somme des primes (22 090,37 $), le montant restant, soit 1 021,20 $, devient le PBR du produit que l’appelant a reçu à titre d’indemnité de RDP. Ensuite, lorsqu’on déduit le PBR (1 021,20 $) du produit qu’il a reçu à titre d’indemnité de RDP (24 909 $), le montant restant, soit 23 888 $, représente ce qu’il a gagné à la disposition de son intérêt dans la police. Ceci conclut mon résumé du témoignage de M. Huck.

 

[16]    Les dispositions suivantes de la Loi de l’impôt sur le revenu sont pertinentes pour ce qui est de trancher le présent appel :

 

56(1)    Sans préjudice de la portée générale de l’article 3, sont à inclure dans le calcul du revenu d’un contribuable pour une année d’imposition : 

            […]

j)          toutes sommes qui, en vertu du paragraphe 148(1) ou (1.1), doivent être incluses dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année;

[…]

148(1) Dans le calcul du revenu du titulaire d’une police d’assurance pour une année d’imposition, il faut inclure, à l’égard de la disposition d’un intérêt dans une police d’assurance‑vie autre qu’une police qui est établie en vertu de :

            a)         […]

l’excédent éventuel du produit de disposition de son intérêt dans la police que le titulaire […] a acquis le droit de recevoir au cours de l’année sur le coût de base rajusté, pour le titulaire de la police, de cet intérêt immédiatement avant la disposition.

[…]

Définitions

148(9) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article et à l’alinéa 56(1)d.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, chapitre 148 des Statuts révisés du Canada de 1952.

[…]

« coût de base rajusté » Le coût de base rajusté des intérêts que possède un titulaire dans une police d’assurance‑vie, à un moment donné, correspond au montant déterminé selon la formule suivante :

(A + B + C + D + E + F + G + G.1) - (H + I + J + K + L)

A représente le total des montants dont chacun est le coût d’un intérêt qu’il a acquis dans la police avant ce moment, à l’exclusion d’un montant visé aux éléments B ou E;

B […]

L :

a)         dans le cas d’un intérêt dans une police d’assurance‑vie (autre qu’un contrat de rente) qui a été acquis pour la dernière fois après le 1er décembre 1982 par le titulaire de la police, le total des sommes dont chacune est le coût net de l’assurance pure défini par règlement et déterminé par l’émetteur de la police conformément au règlement, à l’égard de l’intérêt immédiatement avant la fin de l’année civile se terminant au cours d’une année d’imposition commençant après le 31 mai 1985 et avant ce moment;

b)         […]

« disposition » En ce qui concerne des intérêts dans une police d’assurance‑vie, sont compris dans la disposition :

a)         le rachat de la police;

b)         […]

c)         la dissolution de ces intérêts en raison de l’échéance de la police;

d)         […]

 

« produit de disposition » Relativement à des intérêts dans une police d’assurance‑vie, montant du produit que le titulaire […] a le droit de recevoir lors de la disposition d’intérêts dans la police […]

 

[17]    L’article 148 de la Loi porte sur les polices d’assurance‑vie. Le paragraphe 148(1) traite de la disposition d’un intérêt dans une police d’assurance‑vie et prévoit qu’un montant soit inclus dans le calcul du revenu si le produit de la disposition d’un intérêt excède le coût de base rajusté de cet intérêt. Les termes « produit de disposition » et « coût de base rajusté » sont semblables aux termes utilisés dans la Loi pour définir un gain en capital (voir le sous‑alinéa 40(1)a)(i)). Toutefois, en ce qui concerne une police d’assurance‑vie, le préambule du paragraphe 148(1) et le libellé de l’alinéa 56(1)j) font en sorte que tout gain issu de la disposition d’un intérêt dans la police en question doit être directement inclus dans le revenu du titulaire de la police. Il ne s’agit pas d’un gain en capital.

 

[18]    Le paragraphe 148(9) présente d’importantes définitions. L’échéance de la police de l’appelant en septembre 2005, lorsque l’appelant a atteint l’âge de 70 ans, constitue une « disposition » de ses intérêts dans la police. Le « produit de disposition » de ses intérêts dans la police s’avère être le montant (24 909 $) qu’il avait le droit de recevoir en septembre 2005 lorsque le contrat a pris fin et que son intérêt dans le contrat a été dissous.

 

[19]    La définition de « coût de base rajusté » énoncée au paragraphe 148(9) est complexe. Je me fonde sur la garantie de l’avocat de l’intimée qui affirme que les seuls éléments pertinents de la formule sont, en l’espèce, l’élément « A » (positif) et l’élément « L » (négatif). Par conséquent, aux fins du présent appel, le coût de base rajusté de l’appelant concernant son intérêt dans la police portant le numéro 425,654 est (du côté positif) le total de tous les montants payés à titre de prime d’assurance‑vie pure plus tous les montants payés à titre de prime pour l’indemnité de RDP, moins (du côté négatif) le CNAP, au sens de l’article 308 du Règlement de l’impôt sur le revenu et tel qu’établi par la RBC Vie. Ceci donne le calcul suivant :

 

Somme des primes payées

  (assurance pure plus RDP)                              22 090,37 $

 

Moins le CNAP                                               21 069,17 $

 

CBR de l’appelant pour la police                        1 021,20 $

 

 

[20]    J’applique les termes pertinents définis au paragraphe 148(9) aux faits du présent appel énoncés aux paragraphes 18 et 19 ci‑dessus, et je reviens sur les mots‑clé du paragraphe 148(1). Lorsque l’appelant a disposé de son intérêt dans la police portant le numéro 425,654 en septembre 2005, il était tenu d’inclure dans le calcul de son revenu pour l’année 2005 l’excédent du produit de disposition (24 909 $) sur le coût de base rajusté (1 021,20 $). Par conséquent, le montant à inclure dans le calcul du revenu de l’appelant pour l’année 2005, en application du paragraphe 148(1), s’élève à 23 888 $ et est établi comme suit :

 

Produit de disposition                                       24 909,20 $

 

Moins le CBR de la police                                   1 021,20 $

 

Gain de l’appelant                                             23 888,00 $

 

[21]    Essentiellement, l’appel doit être rejeté parce que l’appelant soutient que la totalité du montant (24 909 $) qu’il a reçu en septembre 2005 n’est pas imposable, alors qu’en fait, en application du paragraphe 148(1), 23 888 $ de ce montant sont bel et bien imposables. Par conséquent, l’appel est admis, mais seulement en vue de réduire le montant à inclure dans le revenu de l’appelant pour l’année d’imposition 2005, qui passe de 24 909 $ à 23 888 $. J’ai un dernier commentaire à formuler.

 

[22]    Je peux comprendre la frustration de l’appelant. En fonction de la police portant le numéro 425,654, il a payé un total de 24 909 $ en primes. Ces primes n’étaient pas déductibles dans le calcul de son revenu. Il s’agit de montants qui étaient payés avec de l’argent après impôts. En plus de l’assurance‑vie, l’appelant payait une petite prime supplémentaire pour un avantage de plus, soit une indemnité de « restitution de prime ». Selon la disposition portant sur la RDP, l’assureur était tenu de payer à l’appelant, à l’échéance de la police, un montant équivalent au total de toutes les primes payées pendant la période de 22 ans prévue dans la police.

 

[23]    Par défaut, l’appelant voyait l’indemnité de RDP (24 909 $) comme la restitution d’argent non imposable. À ses yeux, c’était exactement ça le cas. Cependant, aux yeux de l’Agence du revenu du Canada, la plus importante partie (23 888 $) de l’indemnité de RDP faisait partie du revenu gagné par l’assureur pendant la période de 22 ans. L’impôt se serait appliqué à cette partie du revenu, qu’il ait été entre les mains de la RBC Vie à titre d’assureur ou bien entre les mains de l’appelant à titre de personne assurée. L’appelant doit payer l’impôt, parce qu’il a reçu cette partie du revenu.

 

[24]    À mon avis, le terme « restitution de prime » est peut‑être une description exacte de montant maximal reçu par l’appelant à l’échéance de sa police, mais il peut porter à confusion pour la raison suivante. Une très importante partie de toutes les primes payées par l’appelant concernait l’assurance‑vie. Il tirait la valeur intégrale de cette importante partie des primes parce que sa vie était assurée pour une période de 22 ans. Il n’est donc pas raisonnable de prétendre que l’assureur remboursait (à l’échéance de la police) quelque partie que ce soit des primes qu’il avait déjà honorées intégralement. Ce que l’assureur a payé à titre d’indemnité à l’échéance de la police n’avait rien à voir, ni d’un point de vue commercial, ni d’un point de vue fiscal, avec les primes d’assurance‑vie. Il s’agissait d’autre chose. Il s’agissait de gains réalisés par l’assureur. En application du paragraphe 148(1), il s’agissait d’un revenu. 

 

[25]    Selon le témoignage de M. Huck, les dispositions à l’article 148 de la Loi sont entrées en vigueur en 1982 seulement. Avant cette date, l’indemnité de RDP n’était pas imposable entre les mains de la personne assurée. L’appelant a acquis la police portant le numéro 425,654 en septembre 1983. Elle tombe sous le coup du nouveau régime. C’est un coup de malchance pour l’appelant. L’appel est accueilli, mais seulement dans la mesure de l’allégement énoncé au paragraphe 21 ci‑dessus.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour de juillet 2008.

 

 

« M.A. Mogan »

Juge Mogan

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour d’octobre 2008

 

 

Hélène Tremblay, traductrice

 


RÉFÉRENCE :                                  2008 CCI 414

 

 

N° DE DOSSIER :                             2007-3803(IT)I

 

 

INTITULÉ :                                       W. ROSS WHITE et

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   North Bay (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 27 février 2008

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L’honorable juge M.A. Mogan

 

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 24 juillet 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelant :

Gerald Potvin

Avocat de l’intimée :

Me George Boyd Aitken

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                      s.o.

 

                         Cabinet :                   s.o.

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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