Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

 

Dossier : 2008‑512(IT)I

ENTRE :

STEPHEN DOUGHERTY,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 10 juillet 2008, à Calgary (Alberta)

 

 

Devant : L’honorable juge T. O’Connor

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocat de l’intimée :

Me Margaret McCabe

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

Les appels sont rejetés. Il n’est pas adjugé de dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2008.

 

 

« T. O’Connor »

Juge O’Connor

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 24e jour de septembre 2008.

 

Christian Laroche, juriste-traducteur

 


 

 

 

 

Référence : 2008CCI436

Date : 20080731

Dossier : 2008‑512(IT)I

ENTRE :

STEPHEN DOUGHERTY,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge O’Connor

[1]              Le présent appel devait être entendu à Calgary (Alberta) le 10 juillet 2008. Avant l’audition de l’appel sur le fond, l’avocate de l’intimée a présenté une requête en autorisation de déposer une réponse modifiée à l’avis d’appel.

 

[2]              Les modifications demandées dans la requête furent jugées conformes et ne causaient aucun préjudice à l’appelant. La requête a donc été accordée et la réponse modifiée a été déposée. Les modifications figurent dans les paragraphes 19 et 25 de la réponse modifiée.

 

[3]              Les faits pertinents énoncés dans la réponse modifiée sont extrêmement détaillés et sont attestés dans les pièces déposées par l’intimée et/ou dans le témoignage de l’appelant. Ils se présentent ainsi :

 

[traduction]

 

5. Dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition 2003, l’appelant déclarait un revenu locatif brut de 500 $ et une perte locative nette de 16 149 $, comme il suit :

 

 

Revenu locatif                                                 $       500

Moins : intérêts                          $11 051

     Taxes foncières                    $  2 631

     Services publics                    $  2 967

 $  16 649

 

Perte locative nette                                          ($ 16 149)

 

6. La déclaration de revenus de l’appelant pour 2003 a d’abord été l’objet d’une cotisation le 25 mai 2004, et la perte locative a été admise telle qu’elle.

 

7. Dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition 2004, l’appelant déclarait un revenu locatif brut de 0 $ et une perte locative nette de 21 617 $, comme il suit :

 

Revenu locatif                                                  $          0

Moins : intérêts                          $12 600

     Taxes foncières                    $  3 176

     Services publics                    $  1 949

     Réparations et entretien        $  3 892

 $  21 617

Perte locative nette                                          ($ 21 617)

 

8. La déclaration de revenus de l’appelant pour 2004 a d’abord été l’objet d’une cotisation le 9 juin 2005, et la perte locative a été admise telle qu’elle.

 

9. Après nouvelle cotisation établie pour l’année d’imposition 2003 de l’appelant, le ministre a, par avis daté du 23 mars 2006, refusé les dépenses locatives et changé la perte locative nette de 16 149 $ en un revenu locatif net de 500 $.

 

10. Après nouvelle cotisation établie pour l’année d’imposition 2004 de l’appelant, le ministre a, par avis daté du 23 mars 2006, rejeté la perte locative nette de 21 617 $.

 

11. Après nouvelle cotisation établie pour l’année d’imposition 2003 de l’appelant, le ministre a, par avis daté du 5 avril 2007, fait passer de 500 $ à 0 $ le revenu locatif net.

 

12. L’appelant a signifié le 25 juin 2007 au ministre un avis d’opposition pour les années 2003 et 2004.

 

13. L’appelant n’a pas déposé l’avis d’opposition pour l’année 2004 à l’intérieur du délai fixé par le paragraphe 165(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi).

 

14. Par lettre datée du 26 juillet 2007, le ministre a informé l’appelant que l’avis d’opposition pour l’année 2004 était tardif et qu’une prorogation du délai ne serait pas accordée, en application de l’alinéa 166.1(7)a) de la Loi.

 

15. En réponse à l’avis d’opposition, le ministre a confirmé la cotisation pour l’année d’imposition 2003, au moyen d’un avis de confirmation daté du 20 novembre 2007, les dépenses locatives n’ayant pas été engagées en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien.

 

16. Établissant l’obligation fiscale de l’appelant pour les années 2003 et 2004, le ministre s’est fondé sur les hypothèses factuelles suivantes :

 

a)       l’appelant était propriétaire d’un immeuble situé au 108, rue Wilson, à Oakville (Ontario) (ci‑après l’immeuble);

 

b)       l’immeuble était situé dans une zone à la fois commerciale et résidentielle;

 

c)       l’épouse de l’appelant était propriétaire d’un immeuble adjacent (ci‑après l’immeuble adjacent) situé au 61 chemin Lakeshore Ouest, à Oakville (Ontario);

 

d)       l’immeuble adjacent était l’objet d’un bail devant expirer en janvier 2005;

 

e)       l’appelant s’est installé à Calgary, en Alberta, en 1999;

 

f)         l’immeuble n’a été loué qu’en janvier 2003, pour un total de 500 $;

 

g)       l’appelant s’est adressé à un agent immobilier, et les deux immeubles (l’immeuble et l’immeuble adjacent) ont été mis sur le marché en avril 2003;

 

h)       la mise sur le marché tenait compte du bail existant de l’immeuble adjacent;

 

i)         une offre d’achat portant sur les deux immeubles a été signée en décembre 2003;

 

j)         la vente des deux immeubles devait être conclue un an plus tard, pour tenir compte du bail existant de l’immeuble adjacent;

 

k)       la date de conclusion de la vente des deux immeubles fut le 10 février 2005;

 

l)         aucune démarche n’a été faite après janvier 2003 pour louer l’immeuble;

 

m)     les frais d’intérêt déduits, selon la somme de 11 051 $ pour l’année 2003, et selon la somme de 12 600 $ pour l’année 2004, n’ont pas été engagés en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien;

 

n)       les taxes foncières déduites, selon la somme de 2 631 $ pour l’année 2003 et selon la somme de 3 176 $ pour l’année 2004, n’ont pas été engagées dans le dessein de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien;

 

o)       les frais de services publics qui ont été déduits, selon la somme de 2 967 $ pour l’année 2003 et selon la somme de 1 949 $ pour l’année 2004, n’ont pas été payés dans le dessein de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien;

 

p)       les dépenses de réparations et d’entretien, déduites à raison de 3 892 $ pour l’année 2004, n’ont pas été engagées dans le dessein de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien.

 

B. LES AUTRES FAITS PERTINENTS

 

17. L’appelant a déduit les pertes locatives suivantes au cours des années antérieures :

 

2002        (21 521 $)

2001        (21 320 $)

2000        (13 717 $)

1999        ( 9 645 $)

 

18. L’appelant a déduit un total de 248 744 $ en pertes locatives depuis 1991 et n’a pas déclaré un revenu locatif net pour une année quelconque.

 

19. Le ministre a accordé à l’appelant un report de perte en capital pour l’année d’imposition 2005, selon la somme de (2 343,50 $) après avoir autorisé la capitalisation de dépenses locatives selon les sommes de 12 968,71 $ et 14 486,29 $, pour les années d’imposition 2003 et 2004 respectivement.

 

C. LES POINTS À DÉCIDER

 

20. Les points à décider sont les suivants :

           

a)        l’appelant a‑t‑il droit à une perte locative dépassant le montant accordé par le ministre pour l’année d’imposition 2003?

b)       l’appel relatif à l’année d’imposition 2004 est‑il validement porté devant la Cour canadienne de l’impôt?

 

C. LES DISPOSITIONS LÉGALES, LES MOYENS INVOQUÉS

ET LE REDRESSEMENT DEMANDÉ

 

21. L’intimée se fonde sur l’article 9, le paragraphe 165(1) et les alinéas 18(1)a), 18(1)h) et 166.1(7)a) de la Loi, et leurs modifications, pour les années d’imposition 2003 et 2004.

 

22. L’intimée dit que les dépenses locatives, pour l’année 2003, selon la somme de 16 649 $ n’ont pas été engagées en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien, au sens de l’alinéa 18(1)a) de la Loi. L’intimée dit que les dépenses locatives ont été validement refusées en application du paragraphe 18(1) de la Loi.

 

23. L’intimée dit que l’appelant n’a pas droit à une perte locative dépassant le montant accordé par le ministre, pour l’année d’imposition 2003.

 

24. L’intimée dit aussi que, puisque l’appelant n’a pas déposé un avis d’opposition pour l’année 2004 à l’intérieur du délai fixé par le paragraphe 165(1) de la Loi, ni déposé, à l’intérieur du délai fixé par l’alinéa 166.1(7)a) de la Loi, une demande de prorogation du délai de dépôt d’un avis d’opposition, la Cour n’est pas validement saisie de la cotisation de l’année d’imposition 2004.

 

25. L’intimée dit que les sommes engagées par l’appelant au titre des intérêts, des services publics, ainsi que des réparations et de l’entretien de l’immeuble pour les années d’imposition 2003 et 2004 ont été validement reconnues comme coût en capital pour l’appelant et qu’elles font donc partie du prix de base rajusté de l’immeuble.

 

[4]              Les dispositions suivantes de la Loi de l’impôt sur le revenu sont applicables :

 

18. (1) Dans le calcul du revenu du contribuable tiré d’une entreprise ou d’un bien, les éléments suivants ne sont pas déductibles :

Restriction générale

a) les dépenses, sauf dans la mesure où elles ont été engagées ou effectuées par le contribuable en vue de tirer un revenu de l’entreprise ou du bien;

 

     […]

 

Frais personnels ou de subsistance

h) le montant des frais personnels ou de subsistance du contribuable — à l’exception des frais de déplacement engagés par celui‑ci dans le cadre de l’exploitation de son entreprise pendant qu’il était absent de chez lui ;

[…]

Opposition à la cotisation

165. (1) Le contribuable qui s’oppose à une cotisation prévue par la présente partie peut signifier au ministre, par écrit, un avis d’opposition exposant les motifs de son opposition et tous les faits pertinents, dans les délais suivants :

a) lorsqu’il s’agit d’une cotisation relative à un contribuable qui est un particulier (sauf une fiducie) ou une fiducie testamentaire, pour une année d’imposition, au plus tard le dernier en date des jours suivants :

(i) le jour qui tombe un an après la date d’échéance de production qui est applicable au contribuable pour l’année,

(ii) le 90e jour suivant la date de mise à la poste de l’avis de cotisation;

b) dans les autres cas, au plus tard le 90e jour suivant la date de mise à la poste de l’avis de cotisation

[…]

Prorogation du délai par le ministre

166.1 (1) Le contribuable qui n’a pas signifié d’avis d’opposition à une cotisation en application de l’article 165 ni présenté de requête en application du paragraphe 245(6) dans le délai imparti peut demander au ministre de proroger le délai pour signifier l’avis ou présenter la requête.

 

 

[…]

Appel

169. (1) Lorsqu’un contribuable a signifié un avis d’opposition à une cotisation, prévu à l’article 165, il peut interjeter appel auprès de la Cour canadienne de l’impôt pour faire annuler ou modifier la cotisation :

a) après que le ministre a ratifié la cotisation ou procédé à une nouvelle cotisation;

b) après l’expiration des 90 jours qui suivent la signification de l’avis d’opposition sans que le ministre ait notifié au contribuable le fait qu’il a annulé ou ratifié la cotisation ou procédé à une nouvelle cotisation;

toutefois, nul appel prévu au présent article ne peut être interjeté après l’expiration des 90 jours qui suivent la date où avis a été expédié par la poste au contribuable, en vertu de l’article 165, portant que le ministre a ratifié la cotisation ou procédé à une nouvelle cotisation.

18. (1) In computing the income of a taxpayer from a business or property no deduction shall be made in respect of

General limitation

(a) an outlay or expense except to the extent that it was made or incurred by the taxpayer for the purpose of gaining or producing income from the business or property;

     …

Personal and living expenses

(h) personal or living expenses of the taxpayer, other than travel expenses incurred by the taxpayer while away from home in the course of carrying on the taxpayer’s business;

    

Objections to assessment

165. (1) A taxpayer who objects to an assessment under this Part may serve on the Minister a notice of objection, in writing, setting out the reasons for the objection and all relevant facts,

 

(a) where the assessment is in respect of the taxpayer for a taxation year and the taxpayer is an individual (other than a trust) or a testamentary trust, on or before the later of

 

(i) the day that is one year after the taxpayer’s filing‑due date for the year, and

(ii) the day that is 90 days after the day of mailing of the notice of assessment; and

(b) in any other case, on or before the day that is 90 days after the day of mailing of the notice of assessment.

 

Extension of time by Minister

166.1 (1) Where no notice of objection to an assessment has been served under section 165, nor any request under subsection 245(6) made, within the time limited by those provisions for doing so, the taxpayer may apply to the Minister to extend the time for serving the notice of objection or making the request.

Appeal

169. (1) Where a taxpayer has served notice of objection to an assessment under section 165, the taxpayer may appeal to the Tax Court of Canada to have the assessment vacated or varied after either

(a) the Minister has confirmed the assessment or reassessed, or

(b) 90 days have elapsed after service of the notice of objection and the Minister has not notified the taxpayer that the Minister has vacated or confirmed the assessment or reassessed,

but no appeal under this section may be instituted after the expiration of 90 days from the day notice has been mailed to the taxpayer under section 165 that the Minister has confirmed the assessment or reassessed

 

 

[5]              Il ressort clairement des dispositions susmentionnées qu’un appel ne peut être interjeté devant la Cour de l’impôt que si un avis d’opposition a été déposé. Aucun avis d’opposition n’a été déposé pour l’année d’imposition 2004, et, pour cette unique raison, la Cour n’est pas validement saisie de la cotisation de cette année d’imposition. Par conséquent, l’appel se rapportant à l’année d’imposition 2004 est rejeté et/ou annulé.

 

[6]              Je suis également convaincu que les pièces déposées par l’intimée et les preuves découlant du contre‑interrogatoire de l’appelant par l’intimée établissent qu’il n’y a eu, durant les années 2003 et 2004, aucune opération locative qui puisse légitimer la déduction de dépenses pour ces années. L’alinéa 18(1)a) est manifestement applicable aux deux années 2003 et 2004. Par ailleurs, la Cour n’est pas validement saisie de la cotisation de l’année 2004.

 

[7]              Je ne crois pas que l’appelant ait été de mauvaise foi lorsqu’il a voulu déduire les dépenses. Peut‑être a‑t‑il obtenu d’un comptable ou d’un autre professionnel un avis selon lequel les dépenses en question pouvaient être déduites.

 

[8]              Je suis par ailleurs persuadé de la conclusion selon laquelle l’alinéa 18(1)a) est applicable si l’on considère qu’il n’y a jamais eu, durant aucune des années depuis 1991, un revenu locatif net et que d’énormes pertes locatives ont été déduites pour les années 1999 à 2002. Par ailleurs, l’appelant a été traité équitablement par le ministre du Revenu national puisque celui‑ci a permis que certaines dépenses soient capitalisées et utilisées pour réduire le gain en capital réalisé par l’appelant lors de la vente de l’immeuble.

 

[9]              En conclusion, les appels sont rejetés. Il n’est pas adjugé de dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2008.

 

 

« T. O’Connor »

Juge O’Connor

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 24e jour de septembre 2008.

 

Christian Laroche, juriste-traducteur


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI436

 

DOSSIER DE LA COUR :                 2008‑512(IT)I

 

INTITULÉ :                                       STEPHEN DOUGHERTY c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 10 juillet 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge T. O’Connor

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 31 juillet 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Margaret McCabe

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                      Stephen Dougherty, en son propre nom

 

                          Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.