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COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

2004-4802(IT)I

ENTRE :

FRANCIS C.Y. CHEN,

appelant,

- et -

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu par M. le juge Hershfield, dans la salle d’audience no 603, 6e étage, 701, rue Georgia Ouest, à Vancouver (C.‑B.), le lundi 12 décembre 2005.

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COMPARUTIONS

M. Francis Chen                    Pour son propre compte

M. Kevin McGillivary               Pour l’intimée

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LE GREFFIER : C. DeSantos

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Allwest Reporting Ltd.

855, rue Homer

Vancouver (C.-B.)

V6B 2S5

Par : S. Leeburn


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

(Prononcés à l’audience tenue à Vancouver.)

JUGE : Tout d’abord, vous avez dit à maintes reprises aujourd’hui devant moi, y compris dans vos observations préliminaires, que personne du ministère ne vous a jamais répondu, et que vous auriez pu fournir ces éléments de preuve ou d’autres éléments de preuve. Et je vous ai dit à maintes reprises que l’omission du ministère de vous donner la réponse que vous espériez, la réponse que n’importe qui aurait souhaité obtenir, n’empêche pas de vous faire assumer le fardeau de la preuve ici aujourd’hui.

Et ce fardeau de la preuve, vous ne vous en êtes pas acquitté. Et la raison pour laquelle vous n’avez pas réussi à vous acquitter de ce fardeau ne tient pas au fait que personne ne vous a répondu. Vous avez échoué parce que vous n’avez pas tenu de registres. Vous êtes comptable. Vous devriez dire à tous vos clients de tenir des registres consignant leurs dépenses et vous avez le nom de tous les postes visés, tenir un registre de – voilà ce que vous n’avez pas fourni. Vous n’avez pas fourni ces documents parce que vous n’aviez pas de registres.

Vous donnez des reçus. Ces reçus ne concernent pas des dépenses que vous avez vous‑même directement engagées. Vous avez des reçus qui ont été payés par d’autres personnes, votre associé, votre associé qui ne peut utiliser ces dépenses. Je sais bien que vous affirmez qu’il s’agit là de l’hypothèse avancée par quelqu’un, mais personne n’est ici pour dire autre chose. Vous ne vous êtes pas acquitté de votre obligation de prouver que vous avez réellement engagé ces dépenses en vue de tirer un revenu. Vous devez avoir ces documents. Vous devez avoir ces registres. Si vous ne les avez pas, et que vous fournissez des reçus d’autres personnes, vous ne réussissez qu’à faire naître un doute au sujet de toute votre affaire. Il s’agit entièrement d’opérations au comptant. Personne ne peut s’y retrouver.

Et, si j’ai bien compris, votre carte de crédit a été suspendue. C’est votre témoignage. Je peux même accepter cela, mais il y a quand même d’autres éléments de preuve que vous auriez pu me fournir. Et vous êtes comptable. Vous devez vous présenter ici et représenter des gens. Vous devez comprendre que vous ne pouvez pas juste venir ici et dire [TRADUCTION] « Oh, quelques milliers de dollars en frais de promotion devraient constituer une somme acceptable simplement parce que je le dis. Et je ne préciserai pas à qui les cadeaux étaient destinés ». Ou [TRADUCTION] « Peut‑être que j’aurais pu vous dire à qui étaient destinés les cadeaux si vous me l’aviez demandé avant ». Vous ne pouvez vous fier au fait qu’on vous posera la question. Il s’agit d’un régime d’autocotisation. Vous devez conserver ces documents. Ainsi, que ce soit le vérificateur ou moi qui vous le demande, vous avez l’obligation de me montrer les registres que vous avez tenus pendant l’année en cause et de nommer les clients auxquels vous avez donné les cadeaux.

Et je n’accepte pas que vous ayez inscrit quatre noms dans vos formulaires alors qu’il n’y a en réalité que deux personnes. Il s’agit de votre autre associé. Son nom se trouve sur ces formulaires en ce qui concerne une agence de voyages. Vous dites que ce sont toutes des dépenses que vous avez engagées et tous des cadeaux que vous avez achetés. À mon avis, tout cela a l’air suspect.

Votre associée n’est pas ici pour dire qu’elle n’a donné aucun de ces cadeaux, que ces pièces de monnaie n’avaient jamais été destinées à aucun des clients de l’agence de voyages. Cela me paraît suspect. Et que je sois ou non dans l’erreur quant à mes doutes, cela n’est pas pertinent, M. Chen. Ce qui est pertinent, c’est qu’il s’agit d’un régime d’autocotisation, vous devez tenir des documents, et vous devez tout consigner dans vos registres au jour le jour de façon à décrire exactement en quoi consistent ces dépenses. Ce que vous n’avez pas fait.

Quant à votre loyer, qui constitue le principal aspect de la présente affaire, j’accepte qu’il soit établi à votre nom. J’accepte que vous ayez payé votre loyer avec des fonds de votre propre compte bancaire. Et, même si j’accepte que vous n’ayez jamais été remboursé, ce qui, ici encore, dans les circonstances – il y a eu échange ou arbitrage à cet égard. Vous êtes trop lié à cette associée à 50 pour 100 pour que je puisse réellement me fier au fait qu’il n’y avait aucun autre moyen par lequel votre associée aurait pu vous subventionner. Mais même si j’accepte qu’il n’y ait absolument aucune subvention de la part de votre associée, cela n’a rien à voir avec les exigences prévues par la loi, selon lesquelles vous ne pouvez déduire que la partie de votre espace qui se rapporte raisonnablement à l’entreprise à laquelle vous l’avez attribué. Avez-vous compris?

Il importe peu que vous ayez été payé, que vous payiez, que le bail soit établi à votre nom, vous pouvez uniquement déduire la partie de ce bail qui est raisonnablement répartie ou se rapporte raisonnablement à l’entreprise à laquelle elle a été attribuée par vous. Vous dites 95 pour 100. Aucun élément permettant de corroborer ce fait ne m’a été présenté.

Pour être tout à fait franc, votre témoignage sur ce point n’est pas, lui non plus, totalement digne de foi. Et je vais vous dire ce que j’en pense et vous n’avez simplement pas – vous n’avez tout simplement pas réussi à contrebalancer ce point de vue avec votre témoignage. J’imagine un cabinet comptable constitué d’une seule personne dont le principal travail consiste, selon votre propre témoignage, à remplir des déclarations de revenus, et à effectuer tout le travail lié à la qualité de non résident qui est associé aux déclarations de revenus des particuliers. Il se peut que les dates de production de déclarations aux É.‑U. soient légèrement différentes. Mais il y a une période où vous utilisez votre espace de façon importante, et cela coïncide avec les délais de production des déclarations de revenus.

Puis, vous avez une agence de voyages. Rien ne permet de contrebalancer l’hypothèse voulant que cette entreprise soit exploitée durant toute l’année et produise un revenu brut d’un million de dollars par année. On parle ici de grosses affaires. Ce n’est pas nécessairement saisonnier. Ou, dans le cas contraire, ce sont des saisons qui se succèdent toute l’année.

De sorte que je vois une grande entreprise où aucune répartition n’a été effectuée. Aucune répartition parce que le loyer n’était pas payé; cela n’est pas pertinent. Aucune répartition parce que le bail n’est pas à votre nom; non pertinent. Aucune répartition parce qu’ils n’ont pas signé de sous‑bail; cela n’est pas pertinent. La seule question en litige consiste à savoir quel espace se rapporte à votre entreprise, et je ne suis pas convaincu que ce soit 95 pour 100, et je vais donc accepter l’hypothèse avancée par l’intimée selon laquelle cette proportion est de 50 pour 100.

Et s’il vous arrivait encore d’être visé par ce genre d’appel, ou avec vos clients, vous auriez tout avantage à présenter des éléments pour corroborer les affirmations. Il faudrait apporter au ministère des plans d’étage, des photographies, un témoignage pour corroborer une affirmation, si c’est ce qu’il faut pour vous donner davantage de crédibilité, de sorte que, même en cas d’application de la prépondérance des probabilités, votre crédibilité sera étayée. Compte tenu de la preuve que vous avez présentée, je ne suis tout simplement pas convaincu, même selon la prépondérance des probabilités, que 95 pour 100 de l’espace soit attribué au cabinet comptable. Il ressort de la preuve qu’on y exploite une importante agence de voyages.

Les appels sont donc rejetés pour ces motifs. Merci.

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