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Dossier : 2007-2655(EI)

ENTRE :

SHERRY PAI,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de

Sherry Pai (2007‑2656(CPP))

les 16, 17, 18, 19 et 20 juin 2008, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

Devant : L’honorable juge suppléant D.W. Rowe

 

Comparutions :

 

 

Avocat de l’appelante :

Me Gregory P. Bruce

 

 

Avocats de l’intimé :

Me Bruce Senkpiel et Me Carl Januszczak

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel est accueilli et la décision du ministre est modifiée conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 12e jour d’août 2008.

 

 

« D.W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

 

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de novembre 2008.

 

Julie Boulanger, LL.M.

 


 

 

 

 

Dossier : 2007-2656(CPP)

ENTRE :

SHERRY PAI,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de

Sherry Pai (2007‑2655(EI))

les 16, 17, 18, 19 et 20 juin 2008, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

 

Devant : L’honorable juge suppléant D.W. Rowe

 

Comparutions :

 

 

Avocat de l’appelante :

Me Gregory P. Bruce

 

 

Avocats de l’intimé :

Me Bruce Senkpiel et Me Carl Januszczak

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel est accueilli et la décision du ministre est modifiée conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Sidney (Colombie‑Britannique), ce 12e jour d’août 2008.

 

« D.W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

 

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de novembre 2008.

 

Julie Boulanger, LL.M.


 

 

 

 

Référence : 2008 CCI 456

Date : 20080812

Dossiers : 2007-2655(EI)

2007-2656(CPP)

ENTRE :

SHERRY PAI,

 

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

 

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Rowe

 

[1]     L’appelante a interjeté appel de deux décisions rendues le 12 mars 2007 en application de la Loi sur l’assurance‑emploi (la « Loi ») et du Régime de pensions du Canada (le « Régime ») par lesquelles le ministre du Revenu national (le « ministre ») a décidé que l’appelante, Sherry Pai (« Mme Pai »), n’exerçait pas un emploi assurable ou ouvrant droit à pension auprès de Regions Group of Companies International Trading Ltd. (« Regions ») du 6 mai au 18 octobre 2002.

 

[2]     Les avocats des parties ont convenu que les deux appels pouvaient être entendus ensemble.

 

[3]     Avec le consentement des avocats de l’intimé, l’avocat de l’appelante a produit un classeur (pièce A‑1) réunissant des documents sous les onglets 1 à 27, inclusivement.

 

[4]     Avec le consentement de l’avocat de l’appelante, les avocats de l’intimé ont produit un classeur (pièce R‑1) réunissant des documents sous les onglets 1 à 62, inclusivement.

 

[5]     Gregory Bruce, l’avocat de Mme Pai, a appelé Soraya Motameni à témoigner. Mme Motameni a déclaré qu’elle travaille actuellement comme directrice de magasin à Burnaby, mais qu’elle était employée par Regions à titre de directrice générale (« directrice ») d’une école d’anglais, langue seconde (ALS), située au 900, rue West Hastings, à Vancouver, en Colombie‑Britannique. Elle savait que Samir Fawaz (« M. Fawaz ») était le propriétaire et le dirigeant de Regions, laquelle exploitait en outre l’école de langue sous la dénomination Regions Training Institute (« RTI »). Mme Motameni a commencé à travailler au RTI au début de 2001. Cet établissement comptait alors environ 18 salles de classe et plus de 100 étudiants. En qualité de directrice, Mme Motameni était chargée d’embaucher et de congédier les professeurs de langue, d’établir l’horaire des cours du matin et de l’après‑midi et, de manière générale, de veiller à ce que tout marche rondement. Il y avait environ 20 professeurs, et les étudiants étaient principalement originaires du Japon, de la Corée du Sud, de Taïwan et de Chine. Mme Motameni a affirmé que l’appelante, Mme Pai, était son assistante et qu’elle remplissait des fonctions administratives, comme l’établissement des horaires pour les professeurs et l’attribution des salles de classe. L’avocat a renvoyé Mme Motameni aux documents suivants : une fiche de renseignements (pièce A‑1, onglet 1), dans laquelle on donne des réponses à certaines questions touchant RTI; plusieurs fiches (pièce A‑1, onglet 2), dont l’une comportait un message de bienvenue destiné aux nouveaux étudiants; d’autres pages offrant des renseignements relatifs aux programmes, aux demandes d’inscription et aux contrats, et, enfin, la dernière fiche, où l’on présentait Mme Motameni comme la directrice générale et Sherry Pai comme l’assistante de celle‑ci. Mme Motameni a ajouté que ces documents étaient caractéristiques de certains aspects de l’exploitation de l’école, mais qu’elle n’en avait pas gardé un souvenir précis. Même si elle n’avait pas participé à l’établissement d’un site Web, Mme Motameni était certaine que les documents (pièce A‑1, onglet 3) s’y rapportaient, et elle savait qu’une attrayante brochure avait été élaborée à l’intention de futurs étudiants. Bien qu’elle n’ait pas participé à l’élaboration d’autres documents, comme l’avis aux étudiants (pièce A‑1, onglet 4), ni du document rédigé en caractères chinois (pièce A‑1, onglet 5), ni des documents relatifs au programme d’accueil (pièce A‑1, onglet 6), ni de la politique et des modalités en matière de refus (pièce A‑1, onglet 7), Mme Motameni savait qu’ils faisaient partie de l’ensemble de documents fourni aux étudiants. Elle se souvenait que Regions lui avait remis plusieurs chèques de paye qui lui ont été retournés faute de provision suffisante, mais qui ont par la suite été honorés. À d’autres occasions, sa paye lui avait été versée tardivement, en particulier pendant la période ayant débuté environ six mois après l’attaque du World Trade Center le 11 septembre 2001 parce que le nombre d’inscriptions d’étudiants étrangers avait connu une nette diminution. Mme Motameni se souvenait que Mme Pai travaillait aussi de 8 h à 17 h pendant la semaine.

 

[6]     Bruce Senkpiel, l’un des avocats de l’intimé, a contre‑interrogé Mme Motameni. Cette dernière a précisé que sa mémoire des dates n’était pas très bonne, mais qu’elle croyait avoir commencé à travailler pour RTI en 2000. Elle se souvenait d’une entrevue téléphonique avec Susan Lazic (« Mme Lazic »), enquêteure, en mai 2005, qui lui avait posé des questions au sujet de son emploi chez RTI. L’avocat a signalé que, lorsqu’on lui avait demandé de donner le nom de collègues, Mme Motameni avait fait mention de Maria, une réceptionniste, et de Cyrus Zahedi (« M. Zahedi »), mais qu’elle n’avait pas parlé de Mme Pai. Mme Motameni a déclaré qu’elle avait la mémoire courte, mais elle a affirmé que Mme Pai travaillait bel el bien pour RTI. L’avocat a informé Mme Motameni que, lorsqu’elle avait ultérieurement parlé avec Carin Amber (« Mme Amber »), agente des appels, elle avait dit à cette dernière que Mme Pai travaillait chez RTI avant son embauche à titre de directrice. L’avocat a en outre informé Mme Motameni que, selon les notes d’entrevue prises par Mme Amber, elle avait déclaré qu’elle n’avait pas de communications avec Mme Pai dans le cadre de son travail. Mme Motameni a répondu que [TRADUCTION] « sept ou huit années se sont écoulées depuis ce temps et mon expérience à la Regions Training School a été la pire de toute mon existence. Je tente d’oublier tout ce qui s’est passé à cet endroit et j’ai tourné la page. J’ai peut‑être dit quelque chose qui contredit ce que j’affirme aujourd’hui, mais Sherry Pai travaillait au Regions Training Institute. Qu’elle ait travaillé comme mon assistante ou celle de quelqu’un d’autre, elle travaillait et elle était sous ma responsabilité ». Mme Motameni a déclaré qu’elle confiait des tâches à Mme Pai et qu’elle supervisait son travail, mais, dans le cadre de son témoignage, il lui est arrivé de ne pas pouvoir se souvenir de nombreux aspects des activités de RTI tant qu’on ne lui montrait pas certains documents pour lui rafraîchir la mémoire. Mme Motameni a précisé qu’elle n’avait pas embauché Mme Pai et qu’elle ne lui avait pas fait passer d’entrevue puisque M. Fawaz s’en était chargé.

 

[7]     Pendant le réinterrogatoire effectué par l’avocat de l’appelante, Mme Motameni a mentionné qu’elle était incapable de se souvenir qu’un fonctionnaire avait demandé une liste complète des personnes qui travaillaient aux bureaux occupés par le groupe de sociétés faisant affaire sous le nom de Regions.

 

[8]     Dans son témoignage, Hassan Yazdani (« M. Yazdani ») a déclaré qu’il est machiniste qualifié et époux de Sherry Pai. Ils se sont mariés en 2000, mais ils se connaissaient depuis 1993. Bien qu’il ait travaillé pour le même employeur pendant 15 ans, du lundi au vendredi, M. Yazdani a constitué en société RHS Services Ltd. (« RHS ») en février 2003 afin d’exploiter une entreprise d’usinage, et il a construit un atelier dans leur résidence familiale. Mme Pai s’occupe des travaux d’écriture nécessaires liés aux services que RHS fournit à ses clients. Cet emploi secondaire fournit actuellement environ le tiers du revenu annuel de M. Yazdani. Vers 1994, M. Yazdani a retenu les services de M. Fawaz comme expert‑comptable pour qu’il se charge de la tenue des comptes et de la production de ses déclarations de revenus. Il le rencontrait trois ou quatre fois par année. On a renvoyé M. Yazdani à un rapport (pièce A‑1, onglet 27) établi par Susan Lazic relativement à une entrevue téléphonique tenue le 3 mai 2005 au sujet d’un relevé d’emploi (« RE ») délivré par RHS à Lilian Liu (« Mme Liu »). Selon ce relevé, Mme Liu aurait travaillé 267 heures et elle aurait reçu une rémunération assurable de 4 980 $. M. Yazdani se souvenait de l’entrevue et du fait qu’il avait informé Mme Lazic que RHS n’avait aucun employé et qu’il ne connaissait pas Lilian Liu. Il a expliqué à Mme Lazic que, lorsqu’on l’a mis au courant de l’affaire, il a appelé M. Fawaz. Ce dernier lui a affirmé qu’il s’agissait d’une erreur et que Mme Liu avait travaillé sur des dossiers relatifs à RHS pour les aspects comptables et fiscaux, mais qu’elle y avait consacré 26,7 heures et non 267, contrairement à ce qui avait été inscrit par erreur dans le RE. M. Yazdani a déclaré que M. Fawaz lui avait affirmé que cette erreur serait corrigée. Il a ajouté qu’après cet incident, il n’a plus voulu que M. Fawaz travaille sur ses déclarations de revenus. M. Yazdani a mentionné que Mme Pai avait fait divers travaux de traduction, mais qu’elle cherchait un emploi stable lorsqu’elle lui a montré une annonce placée dans un journal par une école de langue sise au 900, rue West Hastings, à Vancouver. M. Yazdani a ajouté qu’il avait reconnu le nom Regions parce qu’il s’était rendu aux bureaux de cette entreprise de services comptables pour apporter ses documents fiscaux et comptables à M. Fawaz. Pendant ces visites, il a remarqué que plusieurs personnes se trouvaient là. Lorsque Mme Pai a été engagée par RTI pour travailler à l’école, son rôle consistait, selon lui, à coordonner les horaires et à aider les étudiants relativement aux questions administratives. Comme il parle également le persan, il a eu quelques conversations avec Mme Motameni, laquelle travaillait à l’école. Il savait que Kathleen Owens, l’épouse de M. Fawaz, occupait également un emploi à cet endroit. À un certain moment en 2002, Mme Pai a mentionné qu’il n’y avait pas suffisamment d’étudiants à l’école par suite des restrictions concernant les voyages imposées après le 11 septembre 2001 et que cela avait entraîné une réduction des rentrées de fonds. M. Yazdani a déclaré qu’il était préoccupé parce qu’ils avaient acheté une maison en 2002, puis entrepris de coûteuses rénovations, et que deux revenus étaient nécessaires pour régler le solde de la carte de crédit utilisée pour payer les personnes de métier certifiées. En novembre 2002, leur fils est né, et la mère de M. Yazdani est venue au Canada pour aider à prendre soin de l’enfant pendant que Mme Pai, son congé de maternité terminé, cherchait du travail.

 

[9]     Hassan Yazdani a été contre‑interrogé par Me Carl Januszczak, l’un des avocats de l’intimé. M. Yazdani a reconnu être l’unique dirigeant et actionnaire de RHS et il a déclaré que M. Fawaz se chargeait de tous les documents et de tous les dépôts requis au titre de la société. On a renvoyé M. Yazdani à un RE (pièce R‑1, onglet 53) apparemment délivré par RHS Services Ltd., Coquitlam (C.‑B.), entreprise située à la même adresse que celle enregistrée auprès du Ministry of Finance, Corporate and Personal Property Registries de la Colombie‑Britannique. Selon le RE, Lilian Liu aurait été employée par RHS du 15 décembre 2003 au 16 avril 2004. Un numéro de paye pour RHS était inscrit dans le RE qui, selon M. Yazdani, a été rempli et signé par une personne autre que lui. Il n’avait demandé aucune formule en blanc à Développement des ressources humaines Canada (« DRHC ») (tel était le nom de ce ministère à l’époque) et il n’avait pas non plus demandé à M. Fawaz d’obtenir un numéro de paye. Il se souvenait d’avoir obtenu une formule qu’il a remplie et retournée à l’Agence du revenu du Canada (« ARC ») pour l’informer que RHS n’avait aucun employé. Lors de son entrevue avec Mme Lazic aux bureaux de DRHC à Burnaby, il a produit divers documents afin de prouver que la signature figurant sur le RE n’était pas la sienne. Il se souvenait d’avoir informé quelqu’un pendant une entrevue du fait qu’il était mécontent de M. Fawaz, qu’il avait tenté à maintes reprises de le joindre, qu’il lui avait laissé des messages à ce sujet et que M. Fawaz lui avait plus tard assuré que cette erreur concernant le RE de Lilian Liu serait corrigée. L’avocat a informé M. Yazdani que Nazrin Yazdani (« Nazrin ») aurait travaillé pour Aberdeen Financial Services (« Aberdeen »), une des entités exploitées par l’intermédiaire de Regions. M. Yazdani a confirmé que Nazrin était sa sœur et que cette dernière avait vécu dans la même maison que lui et Mme Pai. Selon M. Yazdani, quand Mme Pai lui a montré l’annonce relative à Regions, il a reconnu le nom, et, lorsqu’il a téléphoné au numéro inscrit et entendu la voix de la réceptionniste, il a su qu’il s’agissait de Maria, avec laquelle il a fixé un rendez‑vous pour l’entrevue de son épouse. Il a informé Mme Pai que l’école de langue était exploitée par le même groupe de sociétés, Regions, que celui auquel il confiait sa comptabilité. M. Yazdani se rappelait qu’il y avait beaucoup moins d’activités aux locaux de Regions quand il s’y est rendu à la fin de février 2002 pour faire remplir sa déclaration de revenus relative à l’année d’imposition 2001. Il a reconnu que M. Fawaz avait également rempli une déclaration de revenus T‑1 pour Mme Pai (pièce R‑1, onglet 47) relativement à l’année d’imposition 2004. Mme Pai a signé cette déclaration, que l’ARC a reçue le 1er juin 2005. Selon la déclaration de revenus, le préparateur était Aberdeen Financial Services Inc. M. Yazdani croyait qu’il s’agissait de l’une des sociétés associées à Regions et utilisées par M. Fawaz pour fournir des services comptables à ses clients, et que M. Fawaz n’avait pas lui‑même travaillé sur ces déclarations. M. Yazdani a affirmé qu’il savait que DRHC tentait de se faire rembourser environ 20 000 $ de prestations d’assurance‑emploi (« AE ») versées au titre du congé de maternité en raison de la décision du ministre voulant que Mme Pai n’ait pas exercé un emploi chez Regions pendant la période en cause.

 

[10]    Au cours de son témoignage, Sherry Shih‑Wei Pai a déclaré qu’elle est actuellement une personne au foyer qui s’occupe de trois jeunes enfants, tous âgés de moins de six ans, et qu’elle vit avec son époux, Hassan Yazdani, à Coquitlam, en Colombie‑Britannique. Elle est née à Taïwan, mais elle a immigré au Canada en 1991. Elle est devenue citoyenne canadienne en 1997. Elle a obtenu un baccalauréat ès arts de l’Université de la Colombie‑Britannique avec une double spécialisation en psychologie et en études chinoises. Elle est retournée à Taïwan pendant trois ans, au cours desquels elle a travaillé pour un cabinet de consultation international et enseigné l’anglais. Elle a suivi des cours en ressources humaines à l’Université Sun Yat‑Sen à Taïwan. Cet établissement offre des programmes d’échange avec l’Université de Victoria. Ses antécédents professionnels sont présentés dans son curriculum vitæ (pièce A‑1, onglet 9). Après son mariage avec M. Yazdani en 2000, elle est demeurée au Canada et elle a travaillé comme entrepreneure indépendante dans le domaine de la traduction pour un cabinet de gestion immobilière. Elle cherchait du travail à l’aide des journaux et d’Internet. Elle a vu l’annonce placée par Regions et elle a reconnu le nom, mais uniquement parce qu’il s’agissait de l’entreprise de services comptables qui remplissait les déclarations de revenus de son mari. Mme Pai a affirmé qu’elle avait passé une entrevue avec Mme Motameni, laquelle l’avait par la suite appelée pour l’informer qu’elle était embauchée. Mme Pai a précisé qu’elle avait commencé à travailler pour RTI le 6 mai 2002, dans les locaux du 4e étage de l’immeuble situé au 900, rue West Hastings. À cet étage se trouvaient plusieurs petites pièces pouvant chacune accueillir entre six et huit personnes. Il y avait un espace de bureau central pourvu d’ordinateurs et d’autre matériel. L’école de langue a ultérieurement déménagé dans d’autres locaux situés au 889, rue West Pender. Mme Pai a participé au déménagement de quelques objets et elle a travaillé dans les nouveaux locaux pendant un certain temps, jusqu’à la cessation de son emploi. Elle a ajouté que l’immeuble du 900, rue West Hastings, abritait d’autres entreprises en plus de l’école de langue qui y était exploitée. Son bureau se trouvait à l’arrière du bâtiment et elle travaillait comme assistante de Mme Motameni. Les cours de langue changeaient toutes les deux semaines et cette transition nécessitait des discussions avec les professeurs, qui évaluaient les aptitudes linguistiques de chaque étudiant avant de lui permettre d’accéder à un niveau de formation supérieur. Entre 20 et 25 professeurs travaillaient soit le matin, soit l’après‑midi. Mme Pai a ajouté qu’elle avait en outre travaillé sur le site Web de RTI, qu’elle avait effectué des traductions et qu’elle avait élaboré une brochure et d’autres documents de promotion. Elle s’occupait des demandes de renseignements faites par des agences locales qui cherchaient des écoles de langue à Vancouver et elle veillait à la livraison des brochures pour qu’elles soient distribuées à des clients potentiels en Asie. Elle a élaboré le matériel contenu dans la pièce A‑1, onglet 1, elle a procédé à la révision des fiches de renseignements (pièce A‑1, onglet 2) et du contenu du site Web (pièce A‑1, onglet 3), et elle a élaboré l’avis aux étudiants (pièce A‑1, onglet 4) ainsi que d’autres documents se trouvant aux onglets subséquents 5 à 8 (pièce A‑1), inclusivement. Mme Pai a mentionné qu’il y avait des tâches administratives à accomplir en ce qui touche les étudiants. Elle relevait de Mme Motameni, qui lui assignait ses tâches. Mme Pai se souvenait que M. Fawaz se trouvait dans l’immeuble et savait qu’il était propriétaire de Regions, société qui englobait RTI, l’école de langue. Elle a affirmé qu’elle a travaillé chez RTI jusqu’à ce qu’elle approche de la fin de sa grossesse, et qu’elle a reçu un RE (pièce A‑1, onglet 10) le 18 octobre 2002. Mme Pai recevait parfois ses chèques de paye en retard et quelques‑uns lui ont été retournés faute de provision suffisante, mais elle a confirmé qu’elle avait reçu la somme de 19 494,40 $, comme en fait foi son RE, et qu’elle avait travaillé pendant 964,8 heures assurables. Ses talons de chèques de paye (pièce A‑1, onglet 11) se fondaient sur un taux horaire de 20,20 $ et, sur les deux photocopies de quatre chèques de paye, trois chèques portent la mention [TRADUCTION] « avance » sur la ligne réservée à une note. L’avocat de Mme Pai a renvoyé cette dernière aux états (pièce A‑1, onglet 13) délivrés par son institution financière, President’s Choice Financial, membre du groupe de sociétés CIBC. Le 28 août 2002, elle a déposé un chèque s’élevant à 540 $ (pièce A‑1, onglet 12) émis par Regions Group of Certified Accountants W.L.L. Samir Fawaz. Elle utilisait parfois le guichet automatique bancaire pour faire des dépôts dans son compte et, d’autres fois, elle demandait des espèces afin de payer les entrepreneurs qui rénovaient leur maison ou de régler les autres dépenses du ménage, y compris les achats relatifs à leur nourrisson. Mme Pai a déclaré qu’en raison de son éducation asiatique, le fait de négocier un chèque de paye de 3 402,24 $, comme celui du 7 août 2002 montré à la pièce A‑1, onglet 12, contre des espèces ne sort nullement de l’ordinaire. Elle a ajouté que le règlement de factures en espèces n’est pas inhabituel dans les mœurs taïwanaises et que, même si elle a tenté de s’adapter aux habitudes commerciales du Canada après s’y être établie, elle n’est pas [TRADUCTION] « complètement canadienne » à certains égards et elle utilise souvent des espèces pour payer des factures ou effectuer des achats. Le compte était ouvert au nom de Shih S. Pai et Mme Pai a mentionné qu’il se pouvait qu’il y ait eu des transferts de fonds entre ce compte et le compte conjoint qu’elle détenait avec son mari, Hassan Yazdani. Un autre état de compte (pièce A‑1, onglet 14) concernait un compte d’épargne à la même institution financière et visait la période du 28 mars 2002 au 31 mars 2003. Un autre état (pièce A‑1, onglet 15) se rapportait à un compte détenu chez President’s Choice, apparemment au seul nom de Hassan Yazdani. Mme Pai a affirmé que ce compte était en réalité un compte conjoint et que son époux détenait, outre son propre compte, un compte commercial qu’il utilisait pour son entreprise, RHS. Elle a reconnu une lettre (pièce A‑1, onglet 16) qu’elle a envoyée à Susan Lazic, DRHC, le 23 février 2005, parce qu’elle n’était pas satisfaite de l’entrevue qui avait eu lieu le 9 décembre 2004. Elle contestait l’exactitude des notes de Mme Lazic (pièce R‑1, onglet 6) parce qu’elle était contrariée à l’époque et qu’elle avait deux jeunes enfants avec elle. Selon Mme Pai, elle a fourni, au sujet de sa relation avec M. Fawaz, des renseignements plus complets que ceux consignés dans les notes de Mme Lazic. En effet, elle aurait signalé qu’elle ne connaissait pas M. Fawaz personnellement, mais qu’elle savait qu’il était propriétaire de Regions et qu’il exploitait une entreprise de services comptables. Mme Pai a déclaré qu’elle avait également travaillé pour Aberdeen Financial Services (« Aberdeen ») du 2 février au 31 août 2004, mais qu’elle ne traitait qu’avec Pierre Lopez et que ce n’est qu’ultérieurement qu’elle a appris que M. Fawaz avait des liens avec cette entité. Elle savait que M. Lopez avait un emploi à plein temps comme vendeur de fournitures et d’appareils médicaux. Elle a mentionné qu’elle travaillait à la maison et qu’elle rendait compte à M. Lopez en se présentant de temps en temps au bureau de ce dernier situé au 666, rue Burrard, à Vancouver. Mme Pai a ajouté qu’elle n’avait jamais vu M. Fawaz à cet endroit, et qu’elle travaillait huit heures par jour à la maison et parfois tard le soir lorsqu’elle téléphonait à des gens en Asie, souhaitant respecter les heures de bureau de cette région compte tenu du décalage horaire. Elle a précisé qu’elle avait reçu de Mme Lazic, de DRHC, une lettre du 9 février 2005 (pièce R‑1, onglet 8) relative à sa demande de prestations d’AE suivant la cessation de son emploi chez Aberdeen. Mme Pai a répondu le 23 février 2005 par une lettre (pièce A‑1, onglet 16) à laquelle elle avait joint toutes ses fiches de paye et tous ses bordereaux de dépôt bancaire pour la période se terminant en août 2004. Le 1er septembre 2006, Mme Pai a eu une entrevue avec Beverly Smith (« Mme Smith »), agente des appels, dont les notes se trouvent à la pièce R‑1, onglets 21 et 22. Mme Pai a également répondu à une demande de renseignements que Carin Amber, agente des appels, lui a adressée sous forme de lettre le 22 janvier 2007 (pièce A‑1, onglet 17), relativement à sa demande au titre de son emploi chez Aberdeen. Mme Pai a affirmé qu’elle recevait un salaire mensuel de 3 650 $ pour les services qu’elle fournissait à Aberdeen. Elle a signalé que le ministre avait décidé qu’elle n’exerçait pas un emploi assurable chez Aberdeen; elle a interjeté appel de cette décision, mais elle a retiré celui‑ci sur le conseil de son avocat peu de temps avant l’instruction parce que sa relation de travail avec Aberdeen comportait un nombre appréciable d’indices permettant de penser qu’elle agissait à titre d’entrepreneure indépendante plutôt que comme employée.

 

[11]    Sherry Pai a été contre‑interrogée par Me Bruce Senkpiel. Elle a déclaré qu’elle pensait avoir informé Mme Motameni pendant l’entrevue aux locaux de RTI qu’elle était enceinte, puisque sa grossesse ne deviendrait évidente que bien plus tard. Nazrin Yazdani, la belle‑sœur de Mme Pai, vivait avec cette dernière et son époux. Elle fournissait à Aberdeen des services liés à certains projets de commerce électronique. Mme Pai a mentionné qu’elle et Nazrin ne parlaient pas de leur travail parce que leur relation n’était pas très amicale. Elle a affirmé qu’elle savait depuis le début que la responsable d’école chez RTI était Kathleen Owens, laquelle était mariée à M. Fawaz à ce moment. L’école a déménagé à la fin d’août 2002 et Mme Pai a contribué à celui‑ci, mais, en raison de sa grossesse, elle n’a transporté que des livres de cours et d’autres objets légers. En ce qui a trait aux bureaux d’Aberdeen en 2004, Mme Pai a précisé qu’ils se trouvaient au 34e étage de l’immeuble et que des escaliers menaient à un autre étage, où il lui arrivait de travailler dans un petit bureau. Elle a mentionné qu’au moment de son entrevue avec Mme Lazic touchant à sa situation d’emploi chez Aberdeen, elle avait signalé qu’elle recevait ses instructions de M. Lopez, qu’elle ignorait que M. Fawaz avait des liens avec cette entreprise et que, si elle l’avait su, elle aurait refusé le poste. À un certain moment pendant la relation de travail, elle a eu connaissance du fait que M. Lopez rendait compte à un propriétaire. On a renvoyé Mme Pai à sa déclaration de revenus générale T‑1 relative à l’année d’imposition 2002 de même qu’à l’état des dépenses d’emploi qui y est joint et selon lequel une somme totale de 1 609,50 $ a été déduite comme dépenses au titre du revenu. Mme Pai a ajouté que, même si elle avait fourni certains reçus à son mari, elle ne se souvenait pas précisément d’avoir déduit ces dépenses, notamment celles liées au stationnement, soit 360 $, à l’affranchissement, soit 362 $, et à un bureau à domicile, soit 887,50 $. Elle a reconnu avoir signé la déclaration de revenus le 3 juin 2003 et avoir par le fait même certifié que les renseignements qui y figuraient étaient exacts. Bien qu’aucun feuillet T‑4 délivré par Regions n’ait accompagné sa déclaration de revenus, Mme Pai a déclaré un revenu d’emploi de 19 494,80 $ sur le fondement du montant de la rémunération assurable inscrit dans son RE. Mme Pai a reconnu sa déclaration de revenus relative à l’année d’imposition 2004 (pièce R‑1, onglet 47), document qu’elle a signé et que l’ARC a reçu le 1er juin 2005. Cette déclaration comportait un état des dépenses d’emploi donnant des précisions sur diverses dépenses totalisant 10 145,25 $, laquelle somme a été défalquée d’un revenu de 23 459,02 $, ce qui donnait lieu à un remboursement de 3 579,88 $ compte tenu des renseignements donnés dans la déclaration. Ces dépenses comprenaient les frais suivants : frais comptables et juridiques, 1 800 $, publicité et promotion, 2 726,59 $, déplacement, 717 $, téléphone cellulaire, 1 928,62 $, et stationnement, 183,13 $. Mme Pai a précisé qu’elle utilisait des fournitures au bureau d’Aberdeen et à son domicile, et que cette somme lui était remboursée. Elle n’a déduit aucune somme pour un bureau à domicile en 2004. Elle a reconnu sa signature sur le questionnaire du 13 novembre 2006 (pièce R‑1, onglet 31) relatif à son emploi chez RTI en 2002. Dans ce questionnaire, elle a déclaré à la page 7 que tout le matériel requis pour exécuter ses tâches était fourni par son employeur, Regions, et qu’elle n’avait engagé aucune dépense à cet égard. Lorsqu’elle a rempli le questionnaire (pièce R‑1, onglet 32) relatif à sa situation d’emploi chez Aberdeen, elle a affirmé qu’elle travaillait principalement à partir de son domicile, mais qu’elle travaillait aussi au bureau d’Aberdeen, et que tout était fourni par le payeur. Elle n’avait donc engagé aucune dépense au titre de l’utilisation d’une automobile ou de déplacements et toutes ses dépenses liées au travail lui étaient remboursées. Elle a ajouté que le bureau situé dans la pièce 3509, au 666, rue Burrard, comportait une table de travail, une armoire et trois chaises. M. Lopez lui a dit qu’Aberdeen avait d’autres bureaux situés ailleurs et il quittait l’endroit lorsqu’elle avait besoin d’utiliser la table de travail. Le bureau mesurait environ 100 pieds carrés, mais il comptait un ordinateur, une imprimante, des classeurs et un téléphone. Mme Pai a confirmé que sa déclaration de revenus de 2003 (pièce R‑1, onglet 46) avait été remplie par Aberdeen Financial, entreprise dont les locaux se trouvaient dans la pièce 3400, au 666, rue Burrard. Elle a reconnu qu’elle avait signé cette déclaration de revenus le 8 mars 2004 et qu’elle avait commencé à travailler chez Aberdeen le 2 février. La déclaration de revenus ne faisait aucune mention de M. Fawaz, mais le RE (pièce A‑1, onglet 10) reçu par la poste de Regions était signé par M. Fawaz. On a renvoyé Mme Pai à l’état de compte (pièce A‑1, onglet 15) et à une mention datée du 8 mai 2002 selon laquelle un dépôt de 2 000 $ avait été fait au guichet automatique bancaire. Un autre dépôt, s’élevant à 3 000 $, avait également été fait au guichet automatique le 14 mai 2002, suivi d’un transfert, le 15 mai, d’une somme de 2 000 $ de ce compte à Regions et d’un transfert au compte d’une source non précisée le 17 mai 2002. Mme Pai a déclaré qu’elle avait commencé à travailler chez RTI le 6 mai 2002 et qu’elle ne savait donc pas pourquoi elle aurait reçu un chèque de Regions cinq jours plus tard. Elle a ajouté qu’elle ne savait pas pourquoi on avait inscrit la mention [TRADUCTION] « avance » sur la ligne réservée à une note de certains de ses chèques. Elle a en outre affirmé que le chèque de 540 $ (pièce A‑1, onglet 12) émis par Regions Group of Certified Accountants W.L.L. Samir Fawaz et portant la mention « In Acc » n’avait aucun lien avec un quelconque service qu’elle aurait fourni à l’une ou l’autre des entreprises de services comptables exploitées par M. Fawaz. On a renvoyé Mme Pai à ses talons de chèques de paye (pièce A‑1, onglet 11) qui montrent que son adresse se trouvait sur la rue French, à Vancouver, jusqu’à la période de paye du 24 mai 2002, pour ensuite indiquer l’adresse de la rue Linton, à Coquitlam. Mme Pai a déclaré que Mme Motameni lui remettait un talon de chèque de paye visant une période de paye donnée même lorsque ce talon n’était pas accompagné d’un chèque de paye. L’avocat a signalé que, selon les talons de chèque de paye produits par Mme Pai et se trouvant à la pièce A‑1, onglet 11, pour la période suivant mai 2002, les locaux de RTI étaient situés au 889, rue West Pender, pièce 800, même si cet endroit n’avait pas été utilisé avant le mois d’août. Mme Pai a avancé qu’elle avait peut‑être demandé à Mme Motameni d’imprimer tous ses talons de chèque de paye après le déménagement et que c’est donc la nouvelle adresse de RTI qui avait été utilisée. Mme Pai a ajouté qu’elle n’avait reçu aucun talon de chèque après le 28 juin 2002. Selon les notes prises par Mme Lazic (pièce R‑1, onglet 6), Mme Pai n’a pas mentionné qu’elle avait travaillé dans les nouveaux locaux de la rue West Pender de RTI et elle aurait plutôt déclaré qu’elle avait travaillé dans les bureaux situés au 900, rue West Hastings, jusqu’à la fin de son emploi le 18 octobre 2002. Mme Lazic a consigné les réponses dans lesquelles Mme Pai déclarait qu’elle pouvait seulement nommer deux autres employés, outre Mme Motameni, et qu’elle déposait des chèques de paye à intervalles réguliers. Mme Pai a affirmé que Mme Lazic ne lui avait pas demandé de nommer des professeurs de RTI et qu’elle n’avait pas examiné les notes prises par celle‑ci à la suite de l’entrevue. Mme Pai a ajouté qu’elle connaissait les noms des professeurs de RTI, leur pays d’origine ainsi que leur situation familiale. Elle a mentionné qu’elle doute d’avoir répondu à Mme Lazic qu’elle avait été embauchée par [TRADUCTION] « l’ami d’un ami » lorsqu’on lui a posé des questions au sujet de son emploi chez Aberdeen en 2004, et qu’elle ne connaît personne du nom de Queena. Elle ne se souvient vraiment pas d’avoir dit à Mme Lazic que Queena était son amie. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas eu l’intention de donner l’impression qu’elle ne connaissait pas M. Fawaz et elle n’a conservé aucun souvenir de cette partie de l’entrevue. Elle ajoute qu’il se peut que M. Fawaz ait donné à M. Lopez des instructions que ce dernier était ensuite chargé de lui transmettre, mais qu’elle n’avait aucune communication avec M. Fawaz lorsqu’elle travaillait pour Aberdeen. Elle a affirmé qu’il lui arrivait parfois de remplacer Maria Malabanan et d’assumer les fonctions de réceptionniste de celle‑ci pour qu’elle puisse prendre son repas du midi, ou à d’autres moments, selon les besoins. La réceptionniste répondait aux appels téléphoniques des divers locataires des petits bureaux situés dans les locaux de Regions, y compris les numéros assignés à RTI, à l’école de langue et aux autres sociétés faisant partie du groupe appelé Regions. Mme Pai a mentionné que M. Lopez l’avait informée qu’Aberdeen souhaitait importer des produits de la Chine, notamment du matériel électronique, et qu’il y avait au Canada des gens intéressés à investir dans une telle entreprise. Elle a précisé qu’elle avait effectué des études de marché relatives aux téléphones cellulaires, aux petits électroménagers et aux fournitures médicales, qu’elle avait visité de nombreux sites Web et qu’elle avait téléphoné à certaines personnes‑ressources en Chine pour s’enquérir des prix et de l’offre quant aux modèles, aux couleurs, aux fonctions et aux qualités de différents téléphones cellulaires. Selon elle, Aberdeen avait l’intention de réaliser un profit en important des lots de 1000 à 4000 unités que l’entreprise aurait achetés à un prix réduit directement de leur fabricant chinois. Mme Pai a ajouté que, comme elle parlait le mandarin et connaissait bien le commerce international, elle pouvait obtenir un meilleur prix. Elle a reconnu qu’elle avait peut‑être dit à Beverly Smith, agente des appels, qu’elle était enceinte au moment où M. Lopez l’avait engagée pour travailler chez Aberdeen et que ce dernier connaissait son état. Mme Pai a reconnu avoir dit à Mme Smith qu’elle n’avait eu aucune communication avec M. Fawaz au sujet du projet d’Aberdeen en Chine. Elle a déclaré qu’elle avait fait de son mieux pour produire des états de compte bancaires, mais que, dans de nombreux cas, ces documents ne fournissaient pas suffisamment de précisions pour permettre de connaître la source d’un dépôt ou d’un transfert visant le compte. Elle a nié l’assertion de l’avocat voulant que le RE relatif à son emploi chez RTI pour Regions soit inexact parce que le nombre d’heures assurables et le montant de sa rémunération assurable y étaient gonflés. Elle a nié qu’elle travaillait uniquement à temps partiel et elle a affirmé qu’elle travaillait à plein temps pendant la période mentionnée dans le RE. Quant au RE délivré pour son emploi chez Aberdeen en 2004, Mme Pai a mentionné qu’il était exact et qu’elle avait reçu paiement pour la somme inscrite sur les talons de chèques de paye produits à la pièce A‑1, onglet 21.

 

[12]    Madame Pai a été réinterrogée par son avocat, Gregory Bruce. Elle a déclaré que sa belle‑soeur, Nazrin Yazdani, avait vécu avec elle et son mari jusqu’en 2004 et que Nazrin était célibataire et détenait une maîtrise d’une université étrangère. Aux locaux de Regions, Mme Pai distribuait le courrier aux différents locataires en le plaçant dans la boîte appropriée. Elle a ajouté qu’elle menait une vie éprouvante en raison des difficultés financières occasionnées par la rénovation de la maison et parce qu’elle devait s’occuper de deux enfants en bas âge, mais qu’elle avait remis à Mme Lazic les documents appropriés et avait tenté de la convaincre que DRHC [TRADUCTION] « s’acharnait contre la mauvaise personne », c’est‑à‑dire elle‑même. Mme Pai a mentionné qu’elle rencontrait M. Lopez pour lui remettre des rapports et elle l’a dépeint comme un homme grand, d’environ 40 à 45 ans, solidement constitué et de teint foncé. Elle a en outre rencontré le père de ce dernier au bureau. Elle a affirmé que son salaire chez Aberdeen se fondait sur une semaine de 40 heures et qu’elle établissait des rapports à l’intention de M. Lopez à l’aide de logiciels comme Microsoft Word ou Excel, qu’elle formulait des commentaires, des observations et des conclusions fondées sur son analyse, mais qu’elle faisait seulement des recommandations et qu’elle ne participait à aucune négociation avec les fournisseurs étrangers.

 

[13]    Dans son témoignage, Samir Fawaz a déclaré qu’il vivait à Vancouver depuis 1988 et qu’il était un homme d’affaires. Il a obtenu un baccalauréat et une maîtrise en administration des affaires de l’Université de Hambourg, où il a étudié après avoir quitté son pays d’origine, la Syrie. Il a lancé une entreprise de services comptables à Vancouver en 1993 et il a utilisé Regions à titre d’agent maritime pour des cargos de ligne. En 1996, Regions a commencé à exploiter une entreprise au 900, rue West Hastings, où elle occupait la totalité du quatrième étage. En 1998, Regions exploitait en outre une entreprise d’excursions s’adressant principalement à des gens d’affaires de l’Allemagne et du Japon. Le 1er février 2001, Regions a ouvert une école de langue, RTI, au 789, rue West Pender. En 2004, Regions a utilisé Aberdeen comme nom commercial pour la recherche de débouchés commerciaux, y compris l’importation de fournitures dentaires, en Chine, à Dubaï et en Irlande. Lorsque RTI a commencé ses activités, l’épouse d’alors de Samir Fawaz, Kathleen Owens, s’est chargée des affaires courantes de l’entreprise jusqu’à ce que Mme Motameni soit engagée pour assumer cette fonction. Mme Owen a ensuite travaillé comme professeur de langue. M. Fawaz a déclaré que Mme Motameni communiquait parfois avec lui au sujet de l’école et qu’il était présent tous les jours ouvrables dans les mêmes locaux, qu’il s’agisse de l’immeuble initial ou des locaux subséquents situés au 900, rue West Hastings, ou, finalement, de ceux du 889, rue West Hastings, après la fin d’août 2002. On a renvoyé M. Fawaz à la brochure de l’école (pièce A‑2) et au certificat d’enregistrement (pièce A‑3) délivré par la Private Post‑Secondary Education Commission de la Colombie‑Britannique ainsi qu’à d’autres documents produits avec cette pièce, notamment une licence commerciale délivrée en 2001 par la Cité de Vancouver. M. Fawaz a affirmé que Regions avait investi environ 400 000 $ pour fonder l’école de langue. Il a mentionné que Mme Pai faisait partie du personnel de RTI présent à l’occasion d’une excursion scolaire aux Harrison Hot Springs, comme le montrent des pages imprimées à partir du site Web de l’école (pièce A‑1, onglet 3). M. Fawaz a déclaré qu’une feuille de calcul (pièce A‑4) avait été élaborée par une personne compétente en la matière et que ce document était utilisé par Mme Motameni et d’autres sous son autorité. Selon l’état du revenu de Regions (pièce A‑5) pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2001, RTI a gagné un revenu total de 661 096,45 $ après déduction des rabais promotionnels s’élevant à 244 836,54 $ et des dépenses engagées de 961 804,37 $, ce qui a donné lieu à une perte d’exploitation de 300 707,92 $. La masse salariale totalisait 379 764,81 $. Elle était principalement versée aux 20 à 25 professeurs de langue et à Mme Motameni, à raison de 3 500 $ par mois, et à son assistante, Mme Pai. M. Fawaz ne se souvenait pas d’avoir embauché Mme Pai et cette tâche relevait des fonctions confiées à Mme Motameni. Il savait que Mme Pai parlait le mandarin et qu’elle assurait la liaison entre les étudiants, les professeurs et les agents intéressés à recruter des étudiants étrangers, principalement asiatiques, pour qu’ils viennent à Vancouver étudier l’anglais. M. Fawaz a reconnu Mme Pai parmi une liasse de photographies photocopiées (pièce A‑6) prises de professeurs ou de professeurs et d’étudiants au cours d’excursions faites en 2002. On a renvoyé M. Fawaz à un répertoire téléphonique de l’organisme (pièce A‑1, onglet 8). Il a reconnu une feuille de calcul élaborée par Mme Pai dans le cadre d’un projet conçu pour trouver des agents disposés à conclure une entente intitulée [TRADUCTION] « Contrat d’agent indépendant » avec RTI en vue de recruter des étudiants pour qu’ils s’inscrivent à des cours offerts par l’établissement. M. Fawaz a mentionné que Mme Pai travaillait chez RTI du lundi au vendredi, de 9 h à 17 h, et qu’elle avait travaillé le nombre d’heures inscrit dans son RE (pièce A‑1, onglet 10). Le RE a été établi par Cyrus Zahedi, un employé de Regions, et l’adresse de la société donnée dans le RE se trouvait au 14e étage, 400, rue Burrard, à Vancouver. M. Fawaz a ajouté que Regions utilisait deux ordinateurs et qu’il était possible que les renseignements contenus dans l’un d’eux soient différents, mais qu’au moment de délivrer le RE, l’école de langue était exploitée au 889, rue West Hastings. Seuls certains étudiants suivaient leurs cours à cet endroit en mai 2002, mais, à la fin du mois d’août, toute l’école avait déménagé du 900, rue West Hastings, au numéro 889 de la même rue. M. Fawaz a ajouté que RTI avait subi des difficultés de trésorerie à cause du nombre moins élevé d’inscriptions et qu’il n’était pas possible de faire honneur aux obligations au titre de la paye en temps opportun. Certains chèques de paye ont été retournés faute de provision suffisante et les lignes de crédit ont été utilisées à pleine capacité pour tenter de permettre à l’école de poursuivre ses activités. Les inscriptions ont chuté de plus de 50 pour 100 dans un court laps de temps en raison de plusieurs facteurs, dont les effets des restrictions concernant les voyages imposées après le 11 septembre 2001, et RTI a fermé l’école à la fin de 2002. M. Fawaz a affirmé qu’il remplissait les déclarations de revenus de Hassan Yazdani depuis les années 90 et qu’il le voyait deux ou trois fois par année pour des questions comptables, mais qu’il n’avait aucune relation d’ordre social avec lui. Quant à l’entreprise appelée Aberdeen, elle louait un petit poste de travail dans un immeuble situé au 666, rue Burrard. Les activités d’Aberdeen touchaient au commerce électronique et des recherches ont été entreprises pour trouver des fournisseurs de matériel médical. M. Fawaz a demandé à Pierre Lopez de s’occuper de cette entreprise et il croit que ce dernier a retenu les services de Mme Pai parce qu’elle possédait les aptitudes nécessaires pour remplir cette tâche : elle était travailleuse et elle connaissait le mandarin et l’anglais. M. Fawaz a mentionné que M. Lopez et lui envisageaient d’importer plusieurs produits, y compris du ciment et des fournitures médicales, comme des gants – communément appelés gants en caoutchouc – utilisés dans les cabinets médicaux et dentaires, dans les hôpitaux et par d’autres personnes préoccupées par les questions d’hygiène et de protection. M. Fawaz a affirmé que M. Lopez avait un emploi à plein temps à titre de vendeur de fournitures médicales et qu’il lui demandait de transmettre des instructions à Mme Pai. M. Fawaz a ajouté qu’il recevait par courrier électronique les renseignements réunis par cette dernière et qu’il avait pris connaissance de rapports où figuraient des noms de personnes‑ressources, des prix et des renseignements connexes qu’il faisait parvenir à certains clients à l’étranger. Il a précisé que ni Aberdeen Financial Services ni Aberdeen Financial Group n’était constitué en société parce que la dénomination Aberdeen n’était pas disponible. Par conséquent, cette dénomination était utilisée comme nom pour désigner une division au sein de Regions. Cependant, une société à responsabilité limitée appelée Abardeen – avec un a – Financial Group Inc. a été constituée et son siège social était situé dans la pièce 3400, au 666, rue Burrard, soit la même adresse que celle utilisée par l’entreprise de services comptables connue sous le nom d’Aberdeen Financial. M. Fawaz a déclaré que Mme Pai était rémunérée par Regions et l’avocat de celle‑ci a envoyé à Susan Lazic, chez Ressources humaines et Développement des compétences Canada (« RHDCC »), ministère antérieurement appelé DRHC, une lettre datée du 14 septembre 2005 (pièce A‑1, onglet 26) accompagnée d’un double du livre de paie. M. Fawaz a ajouté que la division Aberdeen avait poursuivi certaines activités en 2003 et en 2004, y compris l’exportation de quelques véhicules à moteur en Syrie, mais qu’une affaire potentiellement profitable dans le domaine du pétrole brut avait échoué au dernier moment et que l’entreprise avait fini par perdre plusieurs centaines de milliers de dollars.

 

[14]    Samir Fawaz a été contre‑interrogé par Me Carl Januszczak. Il a déclaré qu’il y avait eu échec de son mariage avec Kathleen Owens en 2002. Il connaissait une personne nommée Qin Han, également connue sous le nom de Queena, mais il ne vivait pas avec elle à l’adresse située sur Russet Way, à West Vancouver, en 2004, lorsque Mme Han a émis en faveur de Lilian Liu un chèque personnel de 800 $, dont un double se trouve à la pièce R‑1, onglet 61. M. Fawaz a précisé que certains documents de Regions étaient demeurés aux bureaux du 900, rue West Hastings, lorsque toute l’entreprise avait déménagé à la fin du mois d’août 2002. Une entente avait été conclue avec une entreprise de déménagement pour que d’autres objets soient transportés au cours du mois de septembre. M. Fawaz a mentionné que l’absence d’un ensemble complet de documents était attribuable aux circonstances suivantes. Regions avait un bail de 10 ans pour ses locaux, mais un litige est survenu avec le nouveau propriétaire lorsque l’immeuble est passé du classement « C » à « B », un niveau plus élevé, en raison de certains travaux de rénovation. De nouveaux espaces ont donc été loués au taux de 22 $ le pied carré au lieu du tarif beaucoup moins élevé payable selon le bail détenu par Regions. La dispute a éclaté lorsque le nouveau propriétaire a décidé que l’école n’était pas autorisée à poursuivre ses activités dans cet espace même si les autres entreprises exploitées par Regions pouvaient y demeurer. M. Fawaz a déclaré qu’il avait abandonné le bail dans l’attente qu’un acquéreur prenne le relais et exploite l’école, mais cela ne s’est pas produit et le propriétaire a donné un avis selon lequel les locaux utilisés par RTI pour l’école de langue seraient verrouillés à la fin du mois d’août 2002. Certaines des entreprises particulières qui louaient des locaux de Regions au 4e ou au 5e étage de l’immeuble situé au 900, rue West Hastings, ont déménagé plutôt que de se retrouver au milieu d’une dispute entre Regions et le nouveau propriétaire. M. Fawaz a mentionné que tout le système téléphonique installé par Regions avait été abandonné, mais que certains ordinateurs avaient été déménagés à la nouvelle adresse située au 889, rue West Hastings. À ce moment, Regions exerçait en outre des activités commerciales à des bureaux situés à Kelowna, et ailleurs en Colombie‑Britannique, et M. Fawaz supervisait ces établissements de son bureau au 900, rue West Hastings. Au plus fort de l’exploitation de l’école de RTI, il y avait chaque jour entre 10 et 12 cours comptant chacun cinq ou six étudiants. M. Fawaz a affirmé avoir vu Mme Pai à plusieurs reprises dans les locaux au cours de 2002 et que, même s’il avait son propre bureau, il pensait que la plupart des employés devaient le connaître. À ce moment, Regions employait environ 50 personnes en plus des 20 à 25 professeurs de langue qui travaillaient pour la division RTI, mais une grande partie du personnel travaillant sur des projets pour Regions ne se trouvait dans les locaux que pendant quelques minutes seulement puisqu’il accomplissait ses tâches ailleurs. M. Fawaz a reconnu un avis de faillite (pièce R‑2) produit pour son compte par un syndic en matière de faillites le 27 février 2008. Le passif totalisait 3 032 359,13 $, y compris une somme de près de 1 500 000 $ due à l’ARC, et l’actif totalisait 2 611 $. Le revenu mensuel tiré de l’entreprise s’élevait à 3 000 $, moins un acompte provisionnel théorique de 600 $ au titre de l’impôt sur le revenu. M. Fawaz a admis que, parmi les créanciers énumérés à la page 5 de l’avis, se trouvaient Soraya Motameni et Frank Motameni, lesquels alléguaient avoir une créance de 45 200 $. M. Fawaz a ajouté que cette somme n’avait pas de lien avec les fonctions de Mme Motameni à titre de directrice de l’école de langue et qu’elle découlait plutôt d’un investissement fait par cette dernière et son mari dans une entreprise de taxis alors qu’elle travaillait chez RTI. M. Fawaz a reconnu qu’en signant sa demande de mise en faillite, il attestait sous serment ou affirmation solennelle que les renseignements qui y figuraient étaient exacts. Il a mentionné qu’il vivait au Canada depuis 1991 et qu’il avait produit des déclarations de revenus des particuliers à partir de ce moment jusqu’en 1996, mais qu’il n’avait pas produit de déclarations de revenus subséquentes avant 2008. Le groupe de sociétés de Regions n’a produit aucune déclaration de revenus des sociétés. M. Fawaz a reconnu sa signature sur une convention de bail (pièce R‑3) intervenue entre Aberdeen Financial Group Inc. et Insignia Corporate Establishments (Eight) Inc. relativement aux locaux définis comme la pièce 3509, 35e étage, Park Place, 666, rue Burrard, Vancouver (Colombie‑Britannique). Le bail est daté du 26 janvier 2004 et M. Fawaz a également signé d’autres documents, dont ceux produits sous cette même cote qui ont trait à la connexion Internet, aux installations de télécommunication et à la demande de laissez‑passer et de code de sécurité. M. Fawaz a admis que le preneur à bail, Aberdeen, n’existait pas en tant que personne morale puisque la dénomination avait été refusée par la direction générale des sociétés. Il a ajouté que, même si la formule précisait qu’il était le seul détenteur d’un laissez‑passer et d’un code de sécurité, il avait obtenu un laissez‑passer et un code supplémentaires pour lui‑même et en avait donné un à M. Lopez. M. Fawaz a déclaré que M. Lopez venait à l’occasion à ce bureau pour travailler à leur entreprise d’importation et qu’il se servait parfois d’un poste de travail pour lequel le propriétaire chargeait un taux horaire ou journalier. Une demande d’utilisation était envoyée à la réceptionniste au 34e étage. M. Fawaz a reconnu qu’il avait plaidé coupable à quatre chefs de fraude visant la TPS sous le régime de la Loi sur la taxe d’accise le 12 septembre 2005 et qu’il avait ensuite tenté de modifier son plaidoyer devant le juge provincial présidant l’instruction, puis par voie d’appel à la Cour suprême de la Colombie‑Britannique. L’appel a été rejeté conformément aux motifs du jugement (pièce R‑4) rendus par M. le juge Goepel. La fraude s’élevait à 82 537,23 $ et a été perpétrée entre le 31 décembre 1996 et le 29 février 2000. M. Fawaz a été condamné à payer une amende de 82 000 $, à purger une peine avec sursis dans sa résidence et à respecter certaines restrictions à sa liberté de mouvement. M. Fawaz a déclaré qu’il avait rempli et signé le RE (pièce A‑1, onglet 10) délivré à Mme Pai et qu’il avait inscrit le nombre d’heures assurables et le montant de la rémunération assurable sur le fondement des renseignements que lui avait fournis Cyrus Zahedi. Certains documents et renseignements avaient été transférés aux nouveaux locaux avant que Regions et RTI soient obligées de quitter l’immeuble du 900, rue West Hastings. M. Fawaz a ajouté qu’il ne savait pas que Mme Pai était enceinte au moment où elle a commencé à travailler pour RTI et qu’il l’avait peut‑être rencontrée antérieurement lorsqu’il avait fourni des services comptables à son mari, M. Yazdani. Il a convenu qu’il devait probablement savoir qu’ils avaient acheté une nouvelle maison. Il a nié l’allégation de l’avocat selon laquelle les heures et la rémunération assurables figurant dans le RE de Mme Pai étaient gonflées ou par ailleurs erronées. Il a affirmé que Mme Pai accomplissait ses tâches chez RTI et qu’ils n’avaient conclu aucune entente fictive visant à permettre à Mme Pai de recevoir des prestations d’AE au titre d’un congé de maternité. Il a admis qu’il avait rempli et délivré un RE à Lilian Liu (pièce R‑1, onglet 53) selon lequel cette dernière aurait travaillé 267 heures et gagné une rémunération de 4 980 $ dans le cadre de son emploi chez RHS Services Ltd. Le RE était signé par Jumah (Jack) Sultan, un des administrateurs de Regions, mais M. Fawaz a inscrit son propre nom comme personne‑ressource. M. Fawaz a mentionné qu’il savait que RHS était une société à responsabilité limitée appartenant à l’époux de Mme Pai, M. Yazdani, et qu’il avait décidé de délivrer le RE au nom de cette société parce que Mme Liu avait travaillé sur les dossiers généraux, comptables et fiscaux de RHS et qu’Aberdeen, la division de Regions offrant des services comptables, l’avait embauchée pour le compte de RHS. M. Fawaz a ajouté que le nombre d’heures inscrit dans le RE de Mme Liu (267 heures) était erroné, tout comme le montant de sa rémunération assurable, et qu’il avait établi un RE modifié (pièce R‑5), également au nom de RHS, dans lequel le nombre d’heures assurables s’élevait à 26,92 et le montant de la rémunération assurable à 498 $. Il a nié avoir su que Mme Liu était enceinte lorsqu’il l’a engagée pour faire quelques travaux comptables. Il a nié avoir eu avec Mme Liu de quelconques discussions quant à la possibilité de lui délivrer un RE pouvant servir à maximiser le montant de ses prestations d’AE au titre de son congé de maternité et il a nié qu’elle lui avait payé la somme de 1 369,50 $, laquelle serait censée constituer la contribution de Regions, en qualité d’employeur, à ses cotisations d’AE, à ses cotisations au Régime de pensions du Canada et à son impôt sur le revenu. M. Fawaz a déclaré qu’il n’avait reçu aucun chèque de Mme Liu et qu’il ne lui avait pas retourné la somme de 520 $ en espèces vers le mois de mai 2005. Il a convenu qu’un chèque de 800 $ daté du 31 décembre 2002 avait été émis par Qin Han en faveur de Lilian Liu, que cet effet portait, sur la ligne réservée à une note, la mention [TRADUCTION] « 80 heures » et qu’il avait peut‑être été établi par Mme Han parce qu’il ne détenait pas de compte bancaire à ce moment. Selon le RE modifié que RHS est censée avoir délivré, le dernier jour de travail de Mme Liu était le 18 avril 2004. Or, le RE non signé était daté du 23 décembre 2004.

 

[15]    Samir Fawaz a été réinterrogé par l’avocat de l’appelante. Il a convenu que M. Yazdani était mécontent qu’il ait délivré un RE à Lilian Liu sur le fondement d’un prétendu emploi chez RHS.

 

[16]    En réponse aux questions posées par la Cour, M. Fawaz a déclaré qu’il ne trouvait pas inhabituel ou incorrect de délivrer un RE en utilisant le nom de l’un des clients de son entreprise de services comptables comme prétendu employeur d’une personne employée par des entités offrant des services comptables au sein de Regions et qui avait travaillé de nombreuses heures sur des dossiers relatifs à cette personne morale ou physique particulière. Il avait donc délivré un RE à Mme Liu en utilisant le nom de RHS, la société à responsabilité limitée de M. Yazdani, parce qu’elle avait fait du travail lié à la comptabilité et à l’impôt sur le revenu de RHS. Cependant, il avait commis une erreur quant au nombre d’heures assurables et au montant de la rémunération assurable et il l’avait corrigée ultérieurement en délivrant un RE modifié sur lequel figurait encore le nom de RHS à titre d’employeur.

 

[17]    L’avocat de l’intimé, Bruce Senkpiel, a procédé à l’interrogatoire principal de Pierre Lopez. Ce dernier a déclaré qu’il était vendeur dans une entreprise d’approvisionnement en fournitures médicales pour laquelle il avait travaillé à plein temps pendant environ 14 ans. M. Fawaz avait agi comme son expert‑comptable et spécialiste en déclarations de revenus pendant environ huit ans et ils avaient discuté de la création d’une entreprise susceptible de produire des revenus au moyen de l’importation de fournitures médicales. Il a rencontré M. Fawaz aux locaux de Regions sis au 900, rue West Hastings, et il a traité avec Maria Malabanan, la réceptionniste. Il a mentionné qu’une société, Abardeen, avait été constituée en société afin de servir comme intermédiaire pour poursuivre des activités commerciales à partir d’un petit bureau installé dans un immeuble situé au 666, rue Burrard, lequel offrait des bureaux clés en main dotés du matériel et des services de télécommunication nécessaires. Il y avait un espace de réception commun et de nombreux bureaux. M. Lopez a précisé que l’espace en question, la pièce 3509, était loué par M. Fawaz et qu’il n’utilisait pas de bureau ni ne louait aucun des postes de travail. Il ne se souvenait pas de Mme Pai et, lorsqu’il a vu celle‑ci à l’extérieur de l’immeuble situé au 701, rue West Georgia, la veille de son témoignage, il lui a demandé si elle était Sherry Pai parce qu’elle se tenait à côté de son avocat et de M. Fawaz. M. Lopez a ajouté qu’il n’avait ni engagé ni supervisé Mme Pai et qu’elle n’avait jamais travaillé pour lui. Il a affirmé qu’il ne se souvenait pas du tout de l’avoir rencontrée. Il a convenu qu’il avait été question que la Chine puisse éventuellement fournir des fournitures médicales et qu’il avait obtenu quelques renseignements à cet égard de M. Fawaz, mais qu’il n’avait eu aucune communication avec Mme Pai et qu’il ne lui avait jamais transmis d’instructions.

 

[18]    Pendant son contre‑interrogatoire par l’avocat de l’appelante, M. Lopez a précisé qu’il travaillait comme vendeur d’un large éventail de produits jetables utilisés dans le domaine médical. Dans le passé, il avait tenté de lancer sa propre entreprise et il avait envisagé de le faire avec M. Fawaz, mais [TRADUCTION] « cela ne s’est jamais concrétisé ». Ils ne sont parvenus à aucun résultat. M. Lopez avait examiné des brochures publicitaires, et il a reconnu qu’en l’absence d’un produit final susceptible de générer un profit, ou à tout le moins un quelconque revenu, rien d’appréciable n’avait eu lieu. M. Lopez a admis qu’il avait été en colère contre Mme Pai et qu’il l’avait injuriée la veille à l’extérieur de l’immeuble situé au 701, rue West Georgia, parce qu’il estimait qu’elle l’avait impliqué dans sa cause et qu’il en avait subi des inconvénients. Il a également reconnu qu’il avait engagé M. Fawaz pour introduire à la Cour canadienne de l’impôt un appel relatif à une nouvelle cotisation fiscale, mais qu’il s’était désisté de l’appel et était en communication avec l’ARC pour régler les arriérés d’impôt. Il a nié qu’il éprouvait du ressentiment envers M. Fawaz, bien qu’il ait admis avoir également injurié ce dernier lorsqu’il s’est répandu en invectives contre Mme Pai.

 

[19]    Maria Malabanan (« Mme Malabanan ») a fait l’objet d’un interrogatoire principal par Me Bruce Senkpiel. Dans son témoignage, elle a déclaré qu’elle est actuellement employée à titre de représentante des ventes à la clientèle, mais qu’elle a travaillé comme réceptionniste pour Regions de l’automne 1998 jusqu’à environ septembre 2002. Elle répondait au téléphone pour plusieurs entreprises qui étaient connectées au système téléphonique et elle s’occupait du courrier. Elle dactylographiait des documents pour différents locataires qui louaient de petits bureaux dans l’immeuble, elle fixait des rencontres et elle accomplissait certaines tâches administratives pour Dean Powers, l’un des locataires. Elle a passé une entrevue avec M. Powers et une autre avec M. Fawaz, mais ce dernier a décidé de l’engager pour travailler aux locaux de Regions situés au 900, rue West Hastings, puis plus tard au 889, rue West Pender, pendant une brève période suivant le déménagement à la fin d’août 2002. Mme Malabanan a mentionné qu’elle savait que M. Fawaz était responsable du bureau administratif de Regions et qu’elle le voyait presque quotidiennement. L’école de langue, RTI, a été exploitée à partir du 900, rue West Hastings, jusqu’au déménagement aux locaux situés rue West Pender. Quant à Regions, ce groupe ne comptait que M. Fawaz, M. Zahedi et Mme Malabanan comme employés, mais l’école embauchait plusieurs professeurs. Elle était payée par chèque aux deux semaines et elle travaillait à plein temps, mais il est arrivé que ses chèques soient retournés faute de provision suffisante et, vers la fin de son emploi, sa paie ne lui a pas été versée pendant quelques périodes de travail. M. Zahedi était responsable de la comptabilité et de la paie. Mme Malabanan a ajouté que, durant sa période de repas ou d’autres pauses où elle s’absentait du comptoir de la réception, elle était remplacée par Kathleen Owens ou par Mme Pai. Elle savait que Mme Owens, qui était mariée à M. Fawaz à cette époque, travaillait aussi comme professeur. Mme Malabanan se souvenait que Pierre Lopez s’était rendu aux bureaux de Regions pour rencontrer M. Fawaz. Elle a affirmé que Soraya Motameni et son mari, Frank, venaient aux bureaux et rencontraient M. Fawaz dans l’une des pièces. Dans son souvenir, ce n’est qu’occasionnellement que Mme Motameni se rendait seule aux bureaux et Mme Pai se chargeait de [TRADUCTION] « nombreux travaux d’écriture », triait les factures et les classait puis les remettait à M. Fawaz. Elle se souvenait que Mme Pai venait travailler plusieurs fois par semaine et qu’[TRADUCTION] « à la fin, elle était devenue, je pense, une employée permanente jusqu’à ce qu’elle accouche ». On a renvoyé Mme Malabanan aux notes prises par Mme Lazic (pièce R‑1, onglet 13) relativement à son entrevue du 17 juin 2005. Lorsque Mme Lazic lui a demandé de nommer ses collègues, Mme Malabanan a mentionné Mme Owens, M. Zahedi ainsi qu’une femme prénommée Rose et elle a dit à Mme Lazic que Mme Motameni ne travaillait pas là et qu’elle ne faisait que rencontrer M. Fawaz au sujet de questions fiscales. Mme Malabanan a affirmé qu’elle voyait Mme Pai travailler au bureau afin d’aider M. Fawaz au moment des impôts et qu’à d’autres occasions, elle l’avait vue aller et venir, mais qu’elle ne connaissait pas ses heures de travail puisque cela relevait soit de M. Zahedi, soit de M. Fawaz.

 

[20]    Madame Malabanan a été contre‑interrogée par l’avocat de l’appelante. Elle a affirmé qu’au début de 2002, il y avait entre 60 à 80 étudiants à l’école de même que plusieurs professeurs qui devaient tous passer à côté de son comptoir à la réception. À cette époque, M. Fawaz paraissait exploiter l’école de langue avec un associé, à savoir Pierre Nadeau (« M. Nadeau »). Ce dernier s’est présenté périodiquement aux bureaux pendant une certaine période. Elle se rappelait que Mme Pai ramassait au comptoir de la réception le courrier relatif à RTI et qu’il lui était arrivé de parler avec elle.

 

[21]    En réponse aux questions posées par la Cour, Mme Malabanan a déclaré que, selon elle, les travaux administratifs touchant RTI étaient faits dans le bureau occupé par M. Fawaz ou celui utilisé par M. Nadeau lorsqu’il faisait partie de cette entreprise, ou près de ceux‑ci. Même s’il n’y avait que six locataires commerciaux dans l’espace de bureaux, Regions exploitait en outre un service de réponse téléphonique et, pendant la saison des impôts, de nombreuses personnes venaient voir M. Fawaz. Mme Malabanan a ajouté que, lorsque RTI avait entrepris ses activités, les locaux du 4e étage de l’immeuble situé au 900, rue West Hastings, étaient devenus des endroits forts occupés. Elle se souvenait que Mme Pai attendait son premier enfant et qu’elle était excitée à cette perspective, et elle croyait qu’elle avait travaillé jusqu’à peu de temps avant l’accouchement. Lorsqu’elle a été informée que, selon le RE, Mme Pai avait travaillé jusqu’au 18 octobre 2002, Mme Malabanan a précisé qu’elle avait quitté son emploi chez Regions en septembre et qu’elle ne savait pas pendant combien de temps par la suite Mme Pai avait continué de travailler.

 

[22]    Dans son témoignage, Susan Lazic a déclaré qu’elle était employée par Service Canada, l’actuel nom de l’organisme auparavant connu sous plusieurs appellations, dont RHDCC et DRHC. Elle a travaillé pour Service Canada et ses prédécesseurs pendant 20 ans. Elle occupait au début un poste de commis aux écritures pour se voir ensuite confier un rôle de supervision. Elle travaille actuellement comme enquêteure, soit l’ancien poste d’agent d’enquêtes et de contrôle ou AEC. Mme Lazic a mentionné qu’elle avait effectué une enquête relative à une demande de prestations d’AE faite par M. Fawaz au titre de son emploi allégué chez Regions. La difficulté tenait au fait que le NAS utilisé par M. Fawaz avait été attribué à une femme nommée Jones. Mme Lazic a reconnu un imprimé (pièce R‑1, onglet 1) qui consistait en une demande de distribution de relevés d’emploi suivant laquelle M. Fawaz, le 23 septembre 2002, était personnellement passé prendre 15 RE ainsi qu’un guide et dix enveloppes, pour lesquels il a signé un reçu. Selon l’information figurant sur la formule, Regions avait 45 employés à ce moment. Les renseignements consignés par DRHC montraient que le 25 mai 2001, M. Fawaz avait commandé 20 RE. Les RE portaient des numéros de série et celui délivré à Mme Pai le 9 septembre 2004 (pièce A‑1, onglet 20) faisait partie des formules remises à M. Fawaz le 23 septembre 2002. Le prétendu employeur était Aberdeen Financial Group et le numéro de référence inscrit par l’Agence des douanes et du revenu du Canada (« ADRC ») (tel était alors le nom de cet organisme) dans la case no 5 du RE ne correspondait pas au numéro antérieurement assigné à Regions. Le RE censément délivré par RHS à Lilian Liu (pièce R‑1, onglet 53) portait un numéro de série faisant partie des formules de RE remises à M. Fawaz le 25 mai 2001. Après avoir examiné les numéros des RE délivrés et l’identité des demandeurs de prestations d’AE, Mme Lazic a découvert qu’il s’agissait de Lilian Liu, de Sherry Pai, de Kathleen Owens, de Christine Appelt et de Samir Fawaz. Elle a déclaré qu’il lui avait paru évident qu’une enquête était nécessaire. Des questions ont été élaborées à l’avance et modifiées selon les besoins en fonction de la personne interrogée. Elle avait pour pratique de dactylographier les réponses directement dans son ordinateur pendant l’entrevue. Elle a reconnu les notes relatives à son entrevue du 9 décembre 2004 avec Mme Pai (pièce R‑1, onglet 6). Cette dernière avait amené ses deux enfants qui, selon Mme Lazic, étaient bien élevés et n’avaient causé aucun dérangement. Mme Lazic a déclaré qu’elle avait été préoccupée par le fait que Mme Pai affirme qu’elle ne connaissait pas M. Fawaz. Mme Lazic a ajouté qu’après avoir interrogé Pierre Lopez, Soraya Motameni et Maria Malabanan, elle avait conclu que ces personnes avaient menti au sujet de l’identité de leur superviseur ou employeur. Le 6 mai 2005, en présence de Michael Kingsley, AEC, elle a interrogé Lilian Liu et, selon ses notes (pièce R‑1, onglet 57), cette dernière aurait admis qu’elle ne travaillait pas pour le prétendu employeur, RHS, contrairement à ce qui était énoncé dans son RE. Mme Liu avait plutôt travaillé pour M. Fawaz seulement à quelques occasions en janvier 2004 pour entrer des données et elle avait gagné environ 500 $. Mme Lazic a déclaré que, le 16 mai 2005, Mme Liu lui avait envoyé un courriel (pièce R‑1, onglet 50) dans lequel elle expliquait qu’elle avait rencontré M. Fawaz vers 2002, qu’il lui avait été présenté comme le petit ami de sa meilleure amie et qu’elle avait cru comprendre que M. Fawaz était un comptable de profession exploitant des entreprises à l’étranger. Mme Liu ajoutait dans son courriel qu’elle avait entré des données tirées de trois boîtes de documents; qu’elle avait reçu 450 $ en espèces; que M. Fawaz savait qu’elle était alors enceinte, qu’elle avait obtenu un prêt étudiant et qu’elle avait en outre obtenu un prêt hypothécaire relativement à la maison nouvellement acquise; et qu’il avait laissé entendre qu’elle pourrait accroître ses prestations d’AE au titre de son congé de maternité à la somme de 499 $ par semaine, au lieu de 413 $, soit la somme à laquelle elle avait droit sur le fondement de son emploi antérieur en Ontario. Mme Liu expliquait qu’en échange d’un RE lui permettant d’obtenir cette somme plus élevée, M. Fawaz lui avait demandé 1 369,50 $ afin de couvrir les portions de l’employeur devant être retenues au titre des cotisations d’AE, des cotisations du RPC et de l’impôt sur le revenu. Mme Liu mentionnait dans le courriel qu’elle avait demandé à M. Fawaz de lui préciser comment cette somme avait été ventilée entre ces différentes retenues, mais qu’elle n’avait jamais obtenu de réponse à cet égard. Dans son courriel, Mme Liu affirmait qu’elle avait émis en faveur de M. Fawaz un chèque pour la somme qu’il lui avait demandée. Mme Lazic a produit sept demandes de décision relative au caractère assurable (pièce R‑1, onglet 14), dont l’une visant Mme Liu et une autre visant Mme Pai.

 

[23]    L’avocat de l’appelante a contre‑interrogé Mme Lazic. Cette dernière a déclaré que la demande de prestations d’AE du 26 juin 2003 que M. Fawaz a présentée en usurpant l’identité d’une femme nommée Jones se fondait sur un emploi allégué d’une durée de dix ans chez Regions. Mme Lazic a mentionné que l’examen des données révélait que M. Fawaz n’était pas un résident permanent du Canada et qu’il ne détenait pas d’autorisation d’emploi. Mme Lazic a ajouté que certaines des formules de RE fournies à M. Fawaz n’ont pas été utilisées. Elle a déclaré qu’elle ne savait pas où Regions effectuait ses opérations bancaires et que les renseignements précis sur ce point constituent une condition préalable à la délivrance d’une demande péremptoire concernant la communication de documents à une institution financière. Elle a reconnu avoir reçu la lettre que lui adressait Mme Pai le 23 février 2005 (pièce A‑1, onglet 16) et à laquelle étaient joints les fiches de paye et les bordereaux de dépôt bancaire relatifs à son emploi en 2004 chez Aberdeen. Dans ce document, Mme Pai mentionnait qu’elle était incapable de retrouver toutes les fiches de paye et tous les chèques que lui avait remis Regions presque trois ans plus tôt. Mme Lazic a convenu qu’elle avait examiné les trois chèques (pièce A‑1, onglet 11) tirés sur la Banque de Montréal, à la succursale First Bank Tower, et émis par le Regions Training Institute. Il y avait en outre un chèque émis par RTI sur la Vancouver City Savings Credit Union, à la succursale Pender and Hornby Community. Mme Lazic a précisé que la demande de prestations d’AE de Mme Malabanan ne soulevait pas de difficulté, mais qu’elle considérait que Mme Pai avait été vague sur plusieurs points et qu’elle n’avait pas répondu franchement à des questions simples. Mme Lazic estimait que l’entrevue avec Mme Pai avait duré de 30 à 40 minutes, et elle était certaine que celle‑ci n’avait pas mentionné que M. Fawaz faisait partie des personnes participant aux activités de l’école de langue. Mme Lazic a reconnu que, dans sa lettre (pièce A‑1, onglet 16), Mme Pai déclarait que M. Fawaz était propriétaire de Regions, mais qu’elle ignorait qu’il existait un lien entre lui et Aberdeen, son employeur en 2004. Le 9 février 2005, Mme Lazic a envoyé une lettre à Mme Pai (pièce R‑1, onglet 8) pour l’informer que sa demande de prestations d’AE était suspendue en raison de la tenue d’une enquête et que sa demande antérieure fondée sur son emploi chez Regions faisait également l’objet d’une enquête. Mme Lazic a affirmé que, lorsqu’elle avait reçu la lettre de Mme Pai du 23 février 2005, elle avait déjà transmis à l’ADRC la demande de décision relative au caractère assurable.

 

[24]    Au cours de son témoignage, Carin Amber a déclaré qu’elle avait travaillé pour l’ARC et ses organismes prédécesseurs pendant 22 ans et qu’elle occupait depuis 17 ans le poste d’agente des appels relatifs à l’AE et au RPC. Elle a précisé que sa charge de travail découlait principalement des appels formés à l’égard de décisions rendues par un agent des décisions et qu’elle était saisie de plusieurs appels touchant Regions, dont celui interjeté par Mme Pai. Mme Amber a précisé qu’elle examinait plusieurs dossiers et documents et qu’elle recueillait des renseignements en vue de bénéficier d’une nouvelle perspective. Malgré les questionnaires envoyés à Regions, aucune réponse n’a été fournie. Mme Pai a rempli et retourné deux questionnaires, l’un relatif à son emploi chez Regions (pièce R‑1, onglet 31) concernant l’école de langue, RTI, et l’autre relatif à des services fournis à Aberdeen en 2004 (pièce R‑1, onglet 32). Le 2 janvier 2007, Mme Amber a envoyé à Mme Pai une lettre (pièce R‑1, onglet 33) dans laquelle elle lui demandait des renseignements supplémentaires. Mme Amber a ajouté qu’elle avait eu des conversations téléphoniques avec M. Fawaz, avec M. Lopez et avec Mme Motameni dans le cadre de son examen et qu’elle avait pris des notes (pièce R‑1, onglet 36) résumant ces conversations. Elle a conclu que M. Lopez était l’unique administrateur de la société dénommée Abardeen Financial Group Inc. Elle a signalé dans ses notes que M. Lopez lui avait dit qu’il tentait de faire des affaires, qu’il demandait parfois à Mme Pai de lui faire des travaux de traduction et qu’il traitait avec elle principalement par téléphone, mais qu’il ne connaissait pas l’étendue de ses fonctions puisqu’elle n’avait pas à lui rendre compte. Mme Amber a renvoyé à une photocopie d’un feuillet T‑4 (pièce R‑1, onglet 37) délivré par Regions à Mme Pai relativement à l’année d’imposition 2002. Selon ce document, le revenu brut de Mme Pai s’élevait à 19 494 $ et un impôt sur le revenu de 3 442,35 $ avait été retenu de même que des cotisations au RPC de 751,76 $ et des cotisations d’AE de 428,89 $ qui, suivant les allégations formulées en l’espèce, ont été remises pour le compte de Mme Pai. Mme Amber a mentionné qu’à sa connaissance, Regions n’avait remis aucune somme à l’ARC pour le compte d’un employé, quel qu’il soit, pendant les périodes en cause. Mme Amber a établi un rapport CPT 110 (pièce R‑1, onglet 39) relativement à l’emploi de Mme Pai en 2002 ainsi qu’un autre rapport (pièce R‑1, onglet 40) visant le travail fait pour Aberdeen en 2004 dans le cadre des entreprises de Regions. Mme Amber a signalé (pièce R‑1, onglet 39, page 4) que la remise alléguée d’impôt ne correspondait pas au prétendu salaire versé à Mme Pai selon son feuillet T‑4. Elle a conclu que trop de renseignements contradictoires lui avaient été fournis, à elle et à d’autres, et qu’un grand nombre des personnes interrogées n’étaient pas dignes de foi. À son avis, aucun élément de preuve matériel ne permettait de croire que le salaire allégué, ou un quelconque salaire, avait été payé. En conséquence, elle a recommandé au ministre de rendre une décision selon laquelle Mme Pai n’exerçait pas un emploi assurable chez Regions en 2002 et en 2004.

 

[25]    Pendant son contre‑interrogatoire par l’avocat de l’appelante, Mme Amber a déclaré qu’elle était au courant de la lettre que Mme Pai avait fait parvenir à Mme Lazic en 2005 (pièce A‑1, onglet 16), mais qu’elle n’en avait pas tenu compte dans l’élaboration de son rapport. Elle n’arrivait pas à se souvenir si la déclaration de revenus de Mme Pai relative à 2002 comprenait un double du feuillet T‑4, et elle pensait que ce n’était peut‑être pas le cas puisque Regions avait fermé l’école de langue à compter du 31 décembre 2002 et que les feuillets T‑4 sont délivrés par les employeurs en février de l’année suivante. Mme Amber a envoyé une lettre à Mme Pai (pièce A‑1, onglet 18) afin d’obtenir certains renseignements au sujet de son emploi en 2004; elle a reçu une réponse (pièce A‑1, onglet 19) et reconnu que Mme Pai avait collaboré au processus. Mme Amber a mentionné que, selon le livre de paie que lui ont remis les avocats de Regions, Mme Pai avait gagné 21 900 $, mais que le feuillet T‑4 délivré à cette dernière faisait état d’un salaire brut de 18 250 $ et de la déduction d’un impôt sur le revenu de 4 306,75 $. Elle a convenu que le montant de la rémunération assurable précisé dans le RE de Mme Pai (pièce A‑1, onglet 10) s’élevait à 19 494,40 $, que le RE (pièce A‑1, onglet 20) relatif à l’emploi de 2004 chez Aberdeen montrait une rémunération assurable de 25 550 $ et que cette somme avait été déclarée par Mme Pai dans sa déclaration de revenus de 2004. Mme Amber a reconnu avoir affirmé dans son rapport CPT 110 (pièce R‑1, onglet 40) que les doubles des documents bancaires présentés par Mme Pai lui avaient permis de repérer sept dépôts de Regions, faisant affaire sous le nom de Aberdeen, entre le 2 février et le 31 août 2004. Mme Amber a en outre signalé dans son rapport qu’une autre traite de banque datée du 28 juillet 2004 et s’élevant à 2 318,12 $ ne paraissait pas avoir été déposée dans le compte bancaire de Mme Pai. Dans la lettre adressée à Mme Amber le 22 janvier 2007, Mme Pai donnait les noms de plusieurs professeurs de langue enseignant chez RTI et elle précisait que Soraya Motameni était directrice de l’école et qu’elle relevait et recevait des instructions de cette dernière. Mme Amber a reconnu que ces renseignements étaient compatibles avec les assertions faites en ce sens par Mme Pai dans le cadre de son entrevue avec Mme Lazic. Elle a consigné dans ses notes (pièce R‑1, onglet 36, page 12) des précisions touchant sa conversation téléphonique avec Mme Motameni au cours de laquelle cette dernière a mentionné que Mme Pai travaillait déjà à l’école de langue à son arrivée, et elle a convenu que cette assertion était erronée. Mme Motameni lui a également dit que Mme Pai travaillait dans un bureau différent et qu’elle n’avait elle‑même aucune relation avec elle, qu’elle ne la supervisait pas et qu’elle ne lui confiait pas de tâches. Mme Amber a affirmé que, selon elle, Regions se trouvait dans une situation délicate et était exploitée par l’entremise d’un groupe d’entités reliées. Elle estimait que l’école de langue, RTI, était une entreprise commerciale légitime ou à tout le moins une entité en activité. À un certain moment, M. Fawaz lui a dit que Regions disposait d’une source de revenu provenant de la Chine, mais aucun document ne prouve la véracité de cette assertion. M. Fawaz blâmait l’ARC d’avoir saisi certains documents relatifs à l’enquête administrative concernant l’infraction de fraude liée à la TPS dont il a ultérieurement été déclaré coupable.

 

[26]    Carin Amber a été réinterrogée par Me Bruce Senkpiel. Ce dernier l’a renvoyée à la pièce A‑1, onglet 22, comportant des doubles des traites de la Banque Royale du Canada payables à Mme Pai à divers moments en 2004. Mme Amber a déclaré qu’elle n’était nullement préoccupée par la légitimité des traites de la banque, mais qu’elle estimait que Mme Pai avait peut‑être retourné ces paiements à Regions ou à M. Fawaz ou à l’une des entités de ce dernier dans le cadre d’un stratagème visant à frauder le régime d’AE.

 

[27]    Dans son témoignage, Beverly Smith a mentionné qu’elle était au service de l’ARC depuis 23 ans à différents titres, dont agente d’observation, et qu’elle travaille actuellement comme agente des décisions relatives au RPC et à l’AE. Dans le cadre de son emploi, elle doit décider si une relation de travail constitue un emploi assurable et, pour y arriver, elle examine divers éléments matériels et recueille divers renseignements. Elle a reçu une demande (pièce R‑1, onglet 18) de Michael Kingsley, de DRHC, visant l’emploi prétendu de Mme Pai chez Regions en 2002, et une autre demande (pièce R‑1, onglet 19) concernant son travail chez Aberdeen en 2004. Il y a eu d’autres demandes relatives à d’autres employés qui affirmaient avoir travaillé pour Regions. Mme Smith a déclaré qu’elle avait interrogé Mme Pai le 1er septembre 2006 et qu’elle avait dactylographié des notes (pièce R‑1, onglet 20) pendant que Mme Pai répondait aux questions qu’elle avait antérieurement consignées dans un fichier informatique. Mme Smith a également interrogé M. Fawaz et Mme Liu. Elle avait pris connaissance de la demande de prestations d’AE présentée par Mme Pai (pièce R‑1, onglet 2) au titre de son emploi chez RTI et dans laquelle elle déclarait que son salaire mensuel s’élevait à 3 500 $. Mme Smith a affirmé qu’à son avis, il y avait trop de renseignements contradictoires et pas assez de documents à l’appui pour la fonder à rendre une décision voulant que Mme Pai ait été employée par Regions dans l’une ou l’autre de ces situations.

 

[28]    L’avocat de l’appelante a contre‑interrogé Mme Smith. Celle‑ci a reconnu qu’à titre d’agente des décisions, elle était autorisée par la loi à exiger que les documents bancaires de Regions soient produits. Elle a admis que Mme Pai avait toujours collaboré avec elle. Dans le résumé établi dans le cadre du système de gestion des cas relatif au dossier de Mme Pai (pièce R‑1, onglet 30), Mme Smith a mentionné que, selon certains des renseignements recueillis, soit les éléments 040 à 043, M. Fawaz avait été déclaré coupable de fraude relativement à la TPS, il avait présenté une demande de prestations d’AE en utilisant le nom et le numéro d’assurance sociale d’une autre personne, il n’avait jamais produit de déclarations de revenus des sociétés, soit le formulaire T‑2, pour aucune des sociétés faisant partie de Regions, son propre numéro d’assurance sociale était expiré, il ne détenait pas d’autorisation de travail valide et il se présentait comme un comptable en management accrédité, ce qui était faux. D’autres renseignements révélaient que M. Fawaz avait présenté plusieurs demandes de statut de réfugié au Canada, lesquelles avaient toutes été refusées.

 

[29]    Lilian Liu a déclaré dans son témoignage qu’elle réside à Burnaby et qu’elle travaille à titre de conseillère financière. Elle ne connaît ni Mme Pai, ni le mari de cette dernière, M. Yazdani. Elle a rencontré M. Fawaz en 2003 lorsqu’une amie intime le lui a présenté comme son petit ami. Quelques mois plus tard, cette amie a téléphoné à Mme Liu pour lui demander si elle était intéressée à faire de la saisie de données pour M. Fawaz. Mme Liu a ajouté qu’elle avait rencontré M. Fawaz, qui lui avait affirmé qu’il était comptable général accrédité (« CGA ») et qu’il avait de nombreux clients. Mme Liu a commencé à travailler pour M. Fawaz aux bureaux du 35e étage de l’immeuble Park Place sis au 666, rue Burrard. Elle s’est rendue au domicile de M. Fawaz pour aller chercher une boîte de documents, et elle s’est servie de son ordinateur à elle pour effectuer la saisie de données et sauvegarder le fichier sur une disquette qu’elle a remise à M. Fawaz avec la boîte de documents. En tout, elle a travaillé à saisir des données tirées de documents contenus dans trois boîtes. Le travail a été accompli entre le 3 novembre 2003 et février 2004. Elle était enceinte à l’époque et elle devait accoucher en avril. M. Fawaz lui a payé une somme de 150 $ en espèces par boîte de documents, pour un total de 450 $. Mme Liu a mentionné que son époux et elle avaient des emplois à plein temps, mais que les dépenses de leur ménage étaient élevées et qu’elle avait parlé avec M. Fawaz de certaines questions touchant leur impôt sur le revenu. Au cours de ces discussions, ils ont soulevé la question du congé de maternité de Mme Liu. M. Fawaz a procédé à quelques calculs et il a déterminé le montant maximal des prestations hebdomadaires d’AE que pourrait toucher Mme Liu, mais il n’a pas expliqué comment il était possible d’arriver à ce résultat. Après la naissance du fils de Mme Liu à la mi‑avril, M. Fawaz a rendu visite à cette dernière à l’hôpital et il a de nouveau soulevé cette question, puis il a parlé avec le mari de Mme Liu. M. Fawaz a précisé qu’il pouvait délivrer à Mme Liu un RE qui lui donnerait droit au montant maximal de prestations d’AE au titre du congé de maternité, mais que Mme Liu devrait lui payer la partie de l’employeur de l’impôt sur le revenu, du RPC et de l’AE, ce qui totalisait une somme de 1 369,50 $. Quelques semaines après ces discussions, elle a reçu par la poste un RE (pièce R‑1, onglet 53) selon lequel elle avait travaillé 267 heures assurables pour RHS Services Ltd. et avait reçu une rémunération assurable de 4 980 $. Mme Liu a déclaré qu’elle ne connaissait rien de RHS et qu’elle n’avait jamais vu ce nom lorsqu’elle avait entré les données tirées des trois boîtes de documents. Elle a tenté de téléphoner au numéro fourni sur le RE, mais personne n’a répondu. Elle a téléphoné à M. Fawaz pour obtenir la ventilation du paiement de 1 369,50 $, mais sa demande est restée sans réponse et, pendant sa conversation avec lui, il lui a dit que RHS était sa cliente. Plus tard, lorsque DRHC a commencé à faire enquête au sujet de sa demande de prestations d’AE, elle a tenté de communiquer avec M. Fawaz et elle lui a laissé des messages, mais il n’a pas répondu. Mme Liu a été interrogée par Mme Lazic et M. Kingsley, chez DRHC, le 6 mai 2005, et elle a confirmé que les notes prises par Mme Lazic reflétaient bien la teneur de leur conversation. Au bas de la page 3 de ces notes (pièce R‑1, onglet 57), Mme Liu a reconnu un passage écrit de sa main où elle mentionnait ce qui suit à propos de M. Fawaz : [TRADUCTION] « [Il] savait que je serais bientôt en congé de maternité, et il a fait cette suggestion. » Elle a affirmé qu’elle avait examiné les notes relatives à l’entrevue du 1er septembre 2006 (pièce R‑1, onglet 49) prises par Beverly Smith et qu’elle reconnaissait leur exactitude, et elle a confirmé que ses réponses étaient sincères. Elle a déclaré qu’en raison de la piètre qualité de la photocopie de son chèque portant le numéro 276 (pièce R‑1, onglet 60), il était difficile de voir que la somme de 1 369,50 $ avait été payée à M. Fawaz, mais le relevé bancaire se trouvant à l’onglet précédent (pièce R‑1, onglet 59) précise que le chèque numéro 00000276 visant exactement cette somme a été débité de son compte, et elle a ajouté que ce paiement se rapporte au chèque émis en faveur de M. Fawaz. Mme Liu a mentionné qu’elle avait droit à des prestations d’AE au titre de son congé de maternité sur le fondement de son emploi, comme il est constaté dans le RE (pièce R‑1, onglet 52) délivré par son employeur en Ontario, mais qu’elle avait seulement gagné environ 9 $ l’heure pour ce travail. Selon le feuillet T‑4 délivré à Mme Liu (pièce R‑1, onglet 58), elle a gagné la somme de 4 980 $, dont 240 $ ont été retenus au titre de l’impôt sur le revenu. Mme Liu a affirmé que le feuillet T‑4 était inexact et qu’à la suite de l’entrevue avec Mme Lazic, elle avait parlé au téléphone avec M. Fawaz. Elle était en colère contre lui et elle a exigé qu’il justifie le fait de lui avoir délivré un RE au nom de RHS et qu’il lui remette l’argent qu’elle lui avait versé. Mme Liu a ajouté qu’elle s’était rendue au bureau situé au 666, rue Burrard, que la réceptionniste lui avait remis une enveloppe contenant 500 $ en espèces et un chèque de 800 $ et qu’elle avait déposé ces sommes le 9 mai 2005. Ces transactions sont consignées dans son relevé bancaire à la pièce R‑1, onglet 62. Le chèque qu’elle a reçu était daté du 31 décembre 2004 et avait été émis par Qin Han.

 

[30]    Pendant le contre‑interrogatoire par l’avocat de l’appelante, Mme Liu a affirmé qu’elle était titulaire d’un baccalauréat en sciences de l’Université de Wuxi en Chine, qu’elle vivait au Canada depuis dix ans et que son mari occupait un poste de technicien de laboratoire.

 

[31]    L’avocat de l’appelante a soutenu que la question fondamentale en l’espèce touche à la crédibilité et que l’appelante et son mari ont rendu des témoignages dignes de foi qui étaient étayés par d’autres témoins, dont certains appelés par l’intimé. L’avocat a signalé que, selon Mme Amber et Mme Smith, toutes deux agentes des appels, Mme Pai avait apporté sa collaboration au processus et leur avait toujours donné des renseignements pendant les entrevues et au moyen des lettres par lesquelles elle leur fournissait de l’information et des documents. L’avocat a reconnu qu’il y avait une divergence entre le témoignage de sa cliente et les éléments de preuve présentés par Mme Lazic tant à la barre que dans ses notes relatives à l’entrevue avec Mme Pai. Il a signalé que, même si Mme Pai avait retiré son appel concernant sa relation de travail en 2004 avec Regions, qui faisait affaire sous le nom d’Aberdeen, parce qu’elle était probablement une entrepreneure indépendante plutôt qu’une employée, beaucoup de temps avait été consacré à l’instruction à examiner les détails de cette situation de travail. L’intimé a avancé que la situation d’emploi de Mme Pai en 2004 était une répétition de celle de 2002 puisque, dans les deux cas, Mme Pai était enceinte et qu’il s’agissait simplement d’une reprise d’un stratagème visant à frauder le système d’AE élaboré par M. Fawaz et Mme Pai et auquel d’autres avaient participé. L’avocat a renvoyé à la preuve relative aux traites et aux dépôts bancaires figurant sur les relevés de compte de Mme Pai et selon lesquels cette dernière avait été payée pour son travail en 2004 consistant à effectuer une étude de marché pour le compte de l’entité qu’elle connaissait uniquement sous le nom d’Aberdeen et dont elle ignorait les liens avec Regions. Quant au témoignage de M. Lopez, l’avocat l’a qualifié d’hostile et il a renvoyé à l’admission de ce dernier voulant qu’il ait exprimé son hostilité envers Mme Pai et M. Fawaz en leur adressant des injures à l’extérieur de l’immeuble situé au 701, rue West Georgia, avant de se présenter à la Cour pour témoigner. L’avocat a fait valoir qu’on ne pouvait ajouter foi au témoignage de M. Lopez selon lequel il ne connaissait pas Mme Pai antérieurement et n’avait pas eu de rapport avec elle relativement à une quelconque question commerciale touchant la recherche de divers produits en vue de leur importation de la Chine par Aberdeen.

 

[32]    Quant à l’emploi en 2002 auprès de l’école de langue, RTI, exploitée par Regions, l’avocat a soutenu que la preuve étayait amplement l’allégation voulant que Mme Pai ait été employée à cet endroit pendant la période précisée dans son RE et qu’elle ait gagné le montant de la rémunération assurable déclaré dans ce document. Dans son témoignage, la directrice de l’école, Mme Motameni, a affirmé que Mme Pai travaillait là et même la réceptionniste, Mme Malabanan, a convenu que Mme Pai était présente et qu’elle la remplaçait parfois à son comptoir pour le repas du midi ou d’autres pauses. Mme Malabanan avait toutefois l’impression que les fonctions de Mme Pai consistaient à aider M. Fawaz, principalement pendant la saison des impôts. L’avocat a fait remarquer que l’omission de DRHC d’obtenir les documents bancaires relatifs aux comptes détenus par Regions avait causé un préjudice à l’appelante et que le fait que celle‑ci avait à l’occasion retiré des sommes en espèces relativement importantes au moment de négocier des chèques de paye était compatible avec son héritage taïwanais et avec le fait que son mari et elle rénovaient leur maison et avaient besoin d’argent supplémentaire pour payer les matériaux et la main‑d’œuvre. L’avocat a avancé qu’aucun élément de preuve ne permettait d’établir un lien entre Mme Pai et la participation de Mme Liu au stratagème élaboré par M. Fawaz pour que cette dernière reçoive le montant maximal de prestations d’AE au titre de son congé de maternité, ni une quelconque participation de M. Yazdani au fait que M. Fawaz ait utilisé la société à responsabilité limitée RHS comme prétendu employeur de Mme Liu pour les besoins du stratagème. L’avocat a fait état des antécédents, de l’éducation et de l’emploi antérieur de Mme Pai, lesquels étaient compatibles avec son emploi en 2002 et avec les services qu’elle a fournis à Aberdeen en 2004. Il a en outre affirmé qu’il était établi par la preuve que Mme Pai était, en 2002, employée par Regions, laquelle exploitait une école de langue, RTI, qui a finalement échoué. Il a soutenu que les activités frauduleuses de M. Fawaz et ses échecs commerciaux ne devaient pas servir à impliquer Mme Pai puisque celle‑ci n’était qu’une travailleuse prise dans le réseau global de fraude et de tromperie tramé par M. Fawaz sur plusieurs années.

 

[33]    L’avocat de l’intimé, Carl Januszczak, a avancé la thèse selon laquelle les heures et la rémunération assurables avaient été gonflées dans le RE délivré à Mme Pai relativement à son emploi en 2002. En outre, sa relation de travail avec Aberdeen en 2004 n’était, selon lui, qu’une reprise du stratagème antérieur, sauf que, dans ce cas‑ci, M. Lopez était nommé comme le superviseur au lieu de Mme Motameni. L’avocat a signalé que ni Mme Owens, l’ancienne épouse de M. Fawaz, ni M. Zahedi, l’aide‑comptable interne de Regions, n’avait été appelé à témoigner par l’appelante. L’avocat a reconnu que la mémoire de Mme Motameni était quelque peu défaillante en ce qu’elle avait de la difficulté à se souvenir quand elle avait travaillé pour cet employeur et qu’elle pensait que Mme Pai était entrée en fonctions à une date antérieure, mais il a affirmé que son témoignage à l’instruction devait être apprécié dans le contexte de son entrevue avec Mme Lazic, au cours duquel elle n’a pas mentionné Mme Pai comme employée de l’école de langue et encore moins comme son assistante. La situation était davantage compliquée par le témoignage de la réceptionniste, Mme Malabanan, qui a déclaré que Mme Pai ne faisait qu’aider M. Fawaz à l’occasion, qu’elle ne pouvait compter sur Mme Pai pour la remplacer pendant le repas du midi et que Mme Motameni n’était pas si souvent présente chez RTI compte tenu de son rôle prétendu de directrice. L’avocat a admis qu’il y avait eu de nombreuses contradictions dans le témoignage de la plupart, voire la totalité, des personnes ayant témoigné à l’instruction. Mme Malabanan a dit à Mme Lazic que Mme Motameni ne travaillait pas dans les locaux situés au 900, rue West Hastings. L’avocat a reconnu que DRHC/Services Canada n’avait pas obtenu les documents bancaires de Regions, mais il a signalé que Mme Pai avait omis de fournir l’ensemble des relevés bancaires et des renseignements sur la paie relatifs à son emploi de 2002. Il a également soutenu que le témoignage de Mme Pai avait soulevé des difficultés à plusieurs égards et que le témoignage de Mme Motameni ne corroborait pas de nombreux aspects de la description donnée par Mme Pai de son travail chez RTI. Il a fait état de la réticence de Mme Pai à dévoiler une quelconque connaissance des liens existant entre M. Fawaz et Aberdeen en 2004, et de son assertion à Mme Lazic voulant qu’elle ait travaillé dans les locaux situés au 900, rue West Hastings, jusqu’à la fin de son emploi le 18 octobre 2002, alors que l’école avait déménagé aux locaux de la rue West Pender à la fin du mois d’août et qu’en septembre, l’ancien propriétaire avait, selon M. Fawaz, cadenassé le bureau de la rue West Hastings. L’avocat a laissé entendre qu’il était raisonnable d’inférer que Mme Pai n’avait jamais travaillé dans les nouveaux locaux, et qu’elle n’aurait su, en toute légitimité, nommer Mme Malabanan comme l’une de ses collègues pendant son entrevue avec Mme Lazic.

 

[34]    Son confrère, Me Bruce Senkpiel, a mentionné que l’avocat de Mme Pai n’avait fourni les relevés délivrés par President’s Choice (pièce A‑1, onglet 12) que le premier jour de l’instruction et que ces documents montraient qu’aucun des six chèques reçus par Mme Pai en 2002 n’avait été déposé dans le compte. De plus, aucune raison n’a été donnée pour expliquer la mention, sur le relevé se trouvant dans la même pièce (pièce A‑1, onglet 15), d’un transfert de 2 000 $ effectué le 15 mai 2002 de ce compte ouvert au nom du mari de Mme Pai, M. Yazdani, à Regions, et du transfert d’une autre somme de 3 000 $ à ce compte le 17 mai 2002 à partir d’une source non précisée. Quant aux six chèques (pièce A‑1, onglet 11) que Regions aurait remis à Mme Pai, trois d’entre eux portait la mention [TRADUCTION] « avance » sur la ligne réservé à une note et aucun élément présenté en l’espèce ne permet d’établir de quelle façon ni à quel endroit ces chèques ont été négociés. Il n’y avait pas de mention correspondante dans les relevés bancaires (pièce A‑1, onglet 14) montrant que deux chèques de 2 501,12 $ et de 3 402,24 $ respectivement, totalisant 5 903,36 $ et émis le 7 août, ont été déposés dans l’un ou l’autre des comptes de Mme Pai, même si le relevé faisait état de dépôts correspondant au chèque de 600 $ du 24 mai 2002, au chèque de 1 000 $ du 17 juin et au chèque de 600 $ du 12 juillet, lesquels ont été retournés faute de provision suffisante. L’avocat a admis que cette somme avait été remboursée par Regions et reçue par Mme Pai, et que celle‑ci avait en outre déposé dans son compte le chèque de 540 $ daté du 28 août. Il a affirmé que le total de ces chèques pouvant être reliés à des dépôts effectués par Mme Pai s’élevait uniquement à 2 740 $, ce qui incite à se demander pourquoi elle aurait périodiquement déposé des chèques d’une somme peu élevée pour ensuite retirer près de 6 000 $ en espèces en négociant deux chèques le même jour. Selon l’avocat, les faits établissaient que Mme Motameni ne travaillait pas pour Regions à titre de superviseure ou de directrice et que M. Lopez n’a joué aucun rôle en ce qui concerne l’emploi prétendu de Mme Pai chez Aberdeen en 2004. Suivant la thèse de l’intimé, M. Fawaz entretenait déjà une relation avec l’époux de Mme Pai, M. Yazdani, du fait qu’il avait rempli ses déclarations de revenus pendant plusieurs années. Ayant appris que Mme Pai était enceinte en 2002 et que son mari et elle avaient récemment acheté une maison qu’ils rénovaient, il a offert à ces derniers l’occasion de participer à un stratagème dans le cadre duquel Mme Pai travaillerait quelques heures pour RTI et recevrait un RE qui lui permettrait de demander des prestations d’AE au titre de son congé de maternité. En 2004, un plan analogue a été mis en œuvre, mais on s’est alors servi de M. Lopez comme superviseur. La ruse utilisée en l’espèce ressemble de façon frappante à celle à laquelle a eu recours M. Fawaz afin que Mme Liu obtienne des prestations d’AE plus élevées et dans le cadre de laquelle on a délivré à celle‑ci un RE nommant RHS, société à responsabilité limitée appartenant à M. Yazdani, comme payeur. L’avocat a renvoyé aux éléments de preuve relatifs aux déclarations de revenus remplies par M. Fawaz et dont Mme Pai a attesté l’exactitude. Grâce à ces documents, Mme Pai a reçu un remboursement qui ne lui était pas dû puisqu’elle avait déduit des dépenses qu’elle n’avait pas engagées pour gagner un revenu, contrairement à ce qui est avancé dans la déclaration jointe à ses déclarations de revenus relatives à 2002 et à 2004.

 

[35]    L’avocat de l’appelante a précisé qu’il avait signifié une assignation à témoigner à Kathleen Owens, que celle‑ci avait communiqué avec lui pour lui faire part de sa colère et de sa grande réticence à se présenter devant un tribunal en même temps que son ex‑mari, M. Fawaz, et qu’il avait donc choisi de ne pas la faire témoigner.

 

[36]    Les hypothèses de fait pertinentes qui sont énoncées dans la réponse à l’avis d’appel touchant le dossier 2007‑2655(EI) et qui intéressent Mme Pai sont les suivantes :

 

[TRADUCTION]

 

(d)        l’appelante est mariée à Hassan Yazdani (« Hassan »);

 

(g)        Hassan et M. Fawaz faisaient des affaires ensemble;

 

(h)        l’appelante a allégué qu’elle ne savait pas qui était M. Fawaz;

 

(i)         l’appelante a reçu du payeur un relevé d’emploi (« RE ») pour l’année d’imposition 2002 faisant état d’un revenu allégué de 19 494,40 $;

 

(j)         le RE relatif à 2002 délivré à l’appelante par le payeur fait état de 964,8 heures assurables d’emploi alléguées;

 

(m)       l’appelante a allégué qu’en 2002, elle était sous la supervision de Soraya Motameni (« Mme Motameni »); or, cette dernière a allégué qu’elle ne supervisait pas l’appelante;

 

(o)        en 2002, l’appelante a présenté une demande de prestations de maternité sur le fondement de son emploi auprès du payeur;

 

(p)        le RE délivré par le payeur à l’appelante correspondait au nombre d’heures approximatif nécessaire pour avoir droit à des prestations de maternité;

 

(w)       le payeur a omis de fournir des documents à l’appui du versement allégué de salaire à l’appelante;

 

(x)        le payeur et l’appelante ont fourni des renseignements incompatibles et contradictoires à chacune des étapes de l’enquête;

 

(y)        l’appelante n’a pas travaillé le nombre d’heures allégué dans le RE délivré par le payeur pour la période;

 

(z)        le RE délivré par le payeur à l’appelante pour la période est faux.

 

Emploi 2004 – Aberdeen

 

[37]    La relation de travail existant en 2004 entre Mme Pai et l’entité Aberdeen était pertinente pour examiner la question de la crédibilité à la lumière de la thèse avancée par l’intimé voulant qu’il s’agisse d’une reprise du stratagème de 2002 visant l’école de langue, RTI, exploitée par Regions. La thèse de l’intimé a été renforcée lorsqu’on a constaté que M. Fawaz avait délivré à Mme Liu un faux RE nommant la société de M. Yazdani, RHS, comme employeur de sorte qu’elle reçoive le montant maximal de prestations d’AE au titre de son congé de maternité. Dans le cadre d’une enquête plus poussée, les agentes des appels de l’ARC ont découvert que M. Fawaz avait déjà été déclaré coupable de fraude touchant la TPS et qu’il avait tenté d’obtenir pour lui‑même des prestations d’AE en utilisant le nom et le NAS d’une femme.

 

[38]    À mon avis, l’intimé a tenu compte d’éléments pertinents, mais il a procédé à l’envers à partir des faits pour formuler après coup des hypothèses conçues pour avoir un effet rétroactif sur le fondement de renseignements qui, à eux seuls, pouvaient étayer la thèse du complot global réunissant Mme Pai, son mari et M. Fawaz. Le fait que la belle‑sœur de Mme Pai travaillait aussi pour Aberdeen en 2004 alors qu’elle vivait avec Mme Pai et son mari est un facteur important dont le ministre a tenu compte. Dans la mesure où le scénario visant 2004 a une incidence sur la question de la crédibilité soulevée en l’espèce, je suis convaincu, pour les motifs suivants, que Mme Pai avait une relation de travail légitime avec Aberdeen. Premièrement, le témoignage de M. Fawaz à cet égard est vraisemblable puisqu’il savait que Mme Pai était travailleuse, qu’elle parlait le mandarin et qu’elle pouvait traiter avec des entreprises étrangères. Deuxièmement, des éléments de preuve établissent qu’elle a été payée pour son travail, comme en font foi les doubles des traites bancaires. Mme Amber, agente des appels, était convaincue que les traites étaient légitimes même si elle soupçonnait Mme Pai d’avoir, d’une façon ou d’une autre, remis une partie ou la totalité de cet argent à M. Fawaz ou à Regions. Rien dans la preuve ne permet d’étayer cette allégation et j’accepte le témoignage de Mme Pai en ce qui concerne le travail qu’elle a fait pour Aberdeen. Je conclus qu’elle a été payée pour son travail au salaire mentionné. Je rejette donc le témoignage de M. Lopez qui, par l’ensemble de son comportement et de son attitude, manifestait une évidente hostilité envers Mme Pai et le présent litige qui, de son point de vue, constituait une perte de son précieux temps. Je conclus que M. Fawaz a chargé M. Lopez d’engager Mme Pai et de lui donner instruction de procéder à une étude des marchés en Chine et ailleurs en Asie dans l’espoir qu’Aberdeen ou, peut‑être la véritable société, Abardeen, puisse produire un revenu substantiel par l’importation de divers biens de la Chine et la vente de ceux‑ci au Canada ou en Europe. Le fait qu’aucun revenu important n’a découlé de l’entreprise Aberdeen/Abardeen n’a pas de quoi étonner quiconque a déjà traité avec M. Fawaz. Or, M. Lopez a choisi de nier l’existence de quelconques activités touchant Mme Liu et d’enlever toute importance à ses propres rapports restreints avec M. Fawaz en affirmant que ceux‑ci n’étaient [TRADUCTION] « rien d’autre que des paroles ». Pendant son témoignage, Mme Pai a décrit M. Lopez de façon précise avant que ce dernier ne la confronte sur le trottoir ou ne témoigne dans le présent appel. M. Lopez a nié avoir à quelque moment que ce soit rencontré Mme Pai.

 

[39]    Dans son témoignage, l’époux de Mme Pai, M. Yazdani, a affirmé qu’il n’avait jamais rencontré Mme Liu et cette dernière a déclaré au cours de son propre témoignage qu’elle n’avait jamais rencontré M. Yazdani ni travaillé sur un dossier relatif à la société de celui‑ci, RHS. Il ne fait aucun doute que M. Fawaz a utilisé RHS comme prétendu employeur pour mettre en œuvre le stratagème visant à maximiser les prestations d’AE versées à Mme Liu au titre de son congé de maternité. Pour ce faire, il a rempli une formule de RE qu’il avait obtenue en personne d’un bureau de DRHC sur le fondement que Regions employait 45 personnes à ce moment. J’accepte le témoignage de M. Yazdani voulant qu’il n’ait jamais autorisé M. Fawaz, expressément ou implicitement, à délivrer un RE au nom de RHS, et qu’il ait été en colère et contrarié à la suite de ses tentatives auprès de M. Fawaz pour obtenir des explications, lequel a finalement promis de corriger la situation. M. Yazdani a fait preuve de franchise pendant son entrevue avec Mme Lazic et M. Kingsley aux bureaux de DRHC, et il a produit des documents où figurait sa propre signature afin d’établir qu’il n’avait pas signé le RE délivré à Mme Liu. Le témoignage de cette dernière et d’autres personnes ainsi que la preuve documentaire m’incitent à conclure que M. Fawaz a élaboré le stratagème seul, sans aucune participation de M. Yazdani, et que Mme Liu et son mari ont été persuadés d’y participer compte tenu du paiement de la somme que M. Fawaz aurait exigée comme compensation pour Regions au titre de la partie de l’employeur du RPC, de l’AE et de l’impôt sur le revenu. L’explication offerte par M. Fawaz au cours de son témoignage selon laquelle il n’était pas anormal pour lui, dans le cadre de son cabinet comptable, de délivrer un RE établi au nom de l’un de ses clients à un commis ou à une personne chargée d’entrer des données ayant travaillé sur le dossier, est ridicule, même pour qui se contenterait simplement de se prétendre comptable agréé.

 

Emploi 2002 – RTI

 

[40]    L’intimé a reconnu qu’il existait des éléments de preuve établissant que Mme Pai travaillait à l’école de langue, mais il a soutenu qu’elle n’avait pas travaillé le nombre d’heures assurables ni gagné le montant de la rémunération assurable inscrits dans son RE. Même si Mme Pai a déposé certains de ses chèques de paye dans son compte, le ministre n’était pas convaincu qu’elle avait gagné la somme déclarée dans son feuillet T‑4. Il croyait également qu’en août 2002, Mme Pai avait négocié deux chèques d’une somme importante contre des espèces afin de payer M. Fawaz ou Regions dans le cadre du stratagème visant à gonfler ses heures et sa rémunération de sorte qu’elle puisse recevoir des prestations d’AE au titre de son congé de maternité.

 

[41]    Comme l’a reconnu l’avocat de l’intimé, le témoignage de M. Fawaz comporte certaines [TRADUCTION] « parcelles de vérité ». À mon sens, la plus grande partie de ce témoignage consistait en un mélange de brume, de fumée et de poussière – un fatras d’autojustification, d’âneries dictées par son amour‑propre et de purs mensonges. Il est évident que Mme Pai était présente à l’école, qu’elle assumait des fonctions liées à l’administration et qu’elle a participé à une excursion scolaire comme le montrent les photographies mises en preuve. Lorsque Mme Motameni a parlé avec Mme Lazic ou, ultérieurement, avec l’agente des appels, elle n’était pas sous serment. À l’évidence, elle n’était pas disposée à examiner sans détour la question de sa relation avec M. Fawaz en tant qu’employée de RTI. Elle a en outre omis de mentionner qu’elle avait participé comme co‑entrepreneure, avec son mari, dans une entreprise de taxi qui a échoué, et qu’ils ont donc eu l’insigne honneur de figurer sur la liste des créanciers jointe à la demande de mise en faillite de M. Fawaz. Mme Motameni a admis que sa mémoire n’est pas fiable en ce qui concerne les dates et le fait qu’elle a dit à Mme Amber que Mme Pai travaillait déjà à cet endroit lorsqu’elle a elle‑même commencé à occuper son poste de directrice a sensiblement miné l’assertion de Mme Pai voulant qu’elle ait été embauchée par Mme Motameni et qu’elle ait travaillé pour elle à titre d’assistante. Le fait est que Mme Motameni travaillait déjà pour RTI depuis 2000 ou le début de 2001, soit plus d’un an avant l’entrée en fonction de Mme Pai. Pendant sa conversation avec Mme Lazic chez DRHC, Mme Motameni n’a pas mentionné que Mme Pai était son assistante, mais elle a précisé dans son témoignage qu’elle avait tout simplement oublié de le faire. Elle a déclaré que Mme Pai travaillait chez RTI et devait lui rendre compte au sujet des horaires. Elle a reconnu que ses souvenirs étaient imparfaits lorsqu’elle avait parlé avec les enquêteurs et qu’elle voulait tout oublier de son expérience chez RTI.

 

[42]    Le témoignage de Mme Malabanan, réceptionniste, était quelque peu étrange. Selon elle, Mme Motameni ne travaillait pas activement chez RTI de façon habituelle; elle se rendait plutôt aux locaux en compagnie de son mari, Frank, et ils rencontraient M. Fawaz dans un des bureaux. Mme Malabanan a confirmé que Mme Pai travaillait aux locaux situés au 900, rue West Hastings et que cette dernière la remplaçait parfois à son comptoir de la réception, mais elle n’estimait pas que Mme Pai aurait pu la remplacer d’une manière habituelle. Mme Malabanan pensait que les fonctions de Mme Pai touchaient à l’entreprise de services comptables exploitée par M. Fawaz, mais elle n’était pas certaine des tâches exactes qu’elle exécutait chez Regions. Dans son témoignage, Mme Malabanan a affirmé que Mme Pai avait travaillé à cet endroit jusqu’au moment du déménagement à la fin du mois d’août. Son propre emploi ayant pris fin peu après, elle n’était pas en mesure de dire pendant combien de temps Mme Pai avait travaillé dans les nouveaux locaux. Il ne fait aucun doute que Mme Malabanan était une personne extrêmement occupée en 2002, lorsque l’exploitation de l’école a atteint un sommet. Plus d’une centaine de personnes fréquentaient l’établissement chaque jour, et de nombreux clients s’y rendaient pour voir M. Fawaz au sujet de questions comptables ou commerciales. Elle devait répondre au téléphone pour RTI et pour les locataires des bureaux administratifs exploités par Regions. Je ne m’attends pas à ce qu’elle ait pu être au courant de ce que faisait Mme Pai, ou d’autres personnes, pendant la journée, et, si elle ne participait pas à l’exploitation proprement dite de l’école, il était inutile pour elle de connaître la nature des tâches confiées à Mme Pai.

 

[43]    Même si la conduite de Mme Pai pendant son entrevue avec Mme Lazic m’incite à la réserve, je suis convaincu qu’elle a dit la vérité pendant son témoignage. Sa façon d’agir par la suite, lorsqu’elle a fourni tous les renseignements et tous les documents possibles à Mme Lazic ou à Mme Amber et Mme Smith, agentes des appels, était irréprochable. Mme Pai est une femme intelligente, cultivée, qui est titulaire d’un diplôme de l’Université de la Colombie‑Britannique et qui possède une expérience professionnelle compatible avec son emploi chez RTI en 2002. Lorsque son témoignage et celui de M. Fawaz ne concordent pas, j’accepte sa version. J’accepte également la description qu’elle a donnée de ses fonctions chez RTI, y compris les divers aspects liés à l’administration, à l’établissement des horaires pour les cours et les professeurs, à l’élaboration des documents de travail pour l’entreprise, au travail relatif au site Web et à ses relations avec des agents en vue du recrutement d’étudiants étrangers pour l’école. J’ajoute foi au témoignage de Mme Pai davantage qu’à celui de Mme Malabanan, qui a laissé entendre que Mme Pai faisait uniquement du travail comptable pour M. Fawaz. Les anomalies, quelles qu’elles soient, présentes dans ses déclarations de revenus relatives aux années d’imposition 2002 et 2004 sont des questions qui apportent de l’eau à un autre moulin, et il n’est pas déraisonnable d’inférer de la conduite générale de M. Fawaz que l’état des prétendues dépenses n’était pas inclus dans les formules lorsque Mme Pai les a signées. Il était légitime pour cette dernière de se fier à l’exactitude de ces formules puisqu’elles avaient été établies par M. Fawaz, un supposé comptable agréé qui était membre d’une association professionnelle et qui avait antérieurement rempli les déclarations de revenus de son mari pendant plusieurs années.

 

[44]    Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les agentes des appels ont recommandé au ministre de décider que l’emploi de Mme Pai auprès de Regions en 2002 et d’Aberdeen en 2004 ne constituait pas un emploi assurable. Les activités qu’exerçait M. Fawaz par l’entremise de diverses entités reliées, sa déclaration de culpabilité pour fraude au titre de la TPS par suite de sa tentative frauduleuse de recevoir des prestations d’AE pour lui‑même et son stratagème impliquant Mme Liu auraient incité n’importe quelle personne raisonnable à examiner minutieusement le dossier de quiconque aurait été employé par lui ou l’une de ses entreprises. Le ministre n’avait aucun doute quant à la légitimité de l’emploi de Mme Malabanan, et moi non plus. C’est la malencontreuse délivrance d’un RE à Mme Liu au nom de RHS, société appartenant à l’époux de Mme Pai, qui, même si elle n’était pas la cerise sur le gâteau, est apparue comme une étincelle flamboyante qui ne pouvait passer inaperçue. À mon avis, l’analyse effectuée par Mme Amber et Mme Smith était raisonnable à la lumière des renseignements qui leur avaient été présentés. Cependant, lorsque des questions sont soumises à la Cour dans le cadre d’une instruction, le processus peut ouvrir une perspective différente et permettre une appréciation approfondie de l’ensemble de la preuve, qu’elle soit documentaire ou qu’elle découle des témoignages. Il arrive souvent qu’un gouffre sépare cette preuve de ce que les gens disent d’une façon cavalière au téléphone un an ou plus après l’événement, ou même dans une entrevue en personne avec un enquêteur de DRHC ou un agent des appels, parce qu’ils souhaitent dissimuler des choses susceptibles de les montrer sous un jour défavorable ou de faire remonter à la surface des souvenirs d’une expérience de travail déplaisante enfouis dans la passé.

 

[45]    J’estime, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante a établi le bien‑fondé de ses prétentions, que son emploi chez Regions, faisant affaire sous le nom de RTI, était réel et que le RE qu’on lui a délivré révélait avec exactitude le nombre d’heures assurables et le montant de la rémunération assurable. J’ai tenu compte de la preuve selon laquelle elle travaillait environ 40 heures par semaine et du fait qu’elle a peut-être consacré quelques heures supplémentaires à accompagner des étudiants et des professeurs au cours d’excursions scolaires. La période d’emploi consiste en 23 semaines et quatre jours, soit 40,5 heures par semaine en moyenne pendant la période de son emploi, comme il est mentionné dans son RE. Son salaire horaire de 20,20 $ est raisonnable compte tenu de ses qualités professionnelles et de sa compétence linguistique, soit sa connaissance du mandarin et sa capacité à lire les caractères japonais. D’après M. Fawaz, les heures travaillées par les employés étaient consignées par M. Zahedi, qui était responsable de la paie. Rien dans la preuve ne laisse croire que les registres tenus par M. Zahedi n’étaient pas exacts, et le nombre d’heures assurables et le montant de la rémunération assurable sont compatibles avec les fonctions particulières exercées par Mme Pai. L’école de langue avait un revenu brut de 856 578,54 $ en 2002 selon l’état du revenu, excluant la somme payée à des agents à titre de rabais promotionnels. Il va sans dire que cette entreprise avait besoin de professeurs et d’administrateurs pour poursuivre ses activités quotidiennes.

 

[46]    Les deux appels, intéressant l’AE et le RPC, sont accueillis et les deux décisions du ministre sont modifiées de façon à constater que Sherry Pai exerçait un emploi assurable et ouvrant droit à pension auprès de Regions Group of Companies International Trading Ltd., du 6 mai 2002 au 18 octobre 2002, conformément à l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance‑emploi et à l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada.

 

 

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 12e jour d’août 2008.

 

 

 

« D.W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de novembre 2008.

 

Julie Boulanger, LL.M.


 

 

RÉFÉRENCE :

2008CCI456

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2007-2655(EI) et

2007-2656(CPP)

 

INTITULÉ :

Sherry Pai et

Le ministre du Revenu national

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 16, 17, 18, 19 et 20 juin 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge suppléant D.W. Rowe

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 12 août 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me Gregory P. Bruce

 

Avocats de l’intimé :

Me Bruce Senkpiel et Me Carl Januszczak

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

Gregory P. Bruce, avocat

 

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour l’intimé :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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