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Dossier : 2006-2078(IT)G

ENTRE :

DALRON CONSTRUCTION LIMITED,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 25 février 2008, à Sudbury (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge M.A. Mogan

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Gregory Ducharme

Avocat de l’intimée :

Me Ronald MacPhee

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en application de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard de l’année d’imposition 2002 est rejeté, avec dépens.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour d’août 2008.

 

 

 

« M.A. Mogan »

Juge suppléant Mogan

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de décembre 2008

 

 

Hélène Tremblay, traductrice

 


 

 

 

 

Référence : 2008 CCI 476

Date : 20080826

Dossier : 2006-2078(IT)G

ENTRE :

DALRON CONSTRUCTION LIMITED,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge suppléant Mogan

[1]     L’appelante est une société de l’Ontario qui exploite une entreprise dans la ville de Sudbury. Les activités de l’entreprise de l’appelante sont l’achat et l’aménagement de terrains par la construction d’édifices résidentiels et commerciaux. Certains des édifices sont vendus à des acheteurs sans lien de dépendance. D’autres sont transférés à une société associée pour être conservés et mis en location. Chaque année, l’exercice de l’appelante se termine le 28e jour de février. L’année d’imposition 2002 de l’appelante (la seule année d’imposition en cause) comprend des opérations ayant été effectuées au printemps et à l’été 2001.

[2]     Aux alentours du 30 août 2001, l’appelante a transféré à Prime Property Inc. (la société « Prime ») une parcelle de fonds de terre désignée comme le 1361, rue Paris, à Sudbury. Pour simplifier, cette parcelle de fonds de terre sera ci‑après appelée le « 1361, rue Paris » et la parcelle de fonds de terre adjacente au nord, située au 1347, rue Paris, sera ci‑après appelée le « 1347, rue Paris ». Pendant toute la période en cause, l’appelante détenait, directement ou indirectement, 80 % des actions émises de Prime. En ce qui concerne le transfert en question, l’appelante et Prime ont présenté un choix conjoint en application du paragraphe 85(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») selon lequel la juste valeur marchande du 1361, rue Paris, était de 494 900 $ et la valeur agréée était de 186 500 $.

[3]     À la suite de la présentation du choix conjoint fait en application du paragraphe 85(1) de la Loi, l’appelante a déclaré aux fins de l’impôt sur le revenu un gain de 79 500 $ résultant de la disposition du 1361, rue Paris. Le montant du gain a été calculé en soustrayant la valeur comptable du 1361, rue Paris, (107 000 $) du montant agréé (186 500 $). Selon la position adoptée par l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »), comme il était entre les mains de l’appelante en août 2001, le 1361, rue Paris, était un bien à porter à l’inventaire et, par conséquent, n’était pas un « bien admissible » au sens de la Loi.   

[4]     Dans la nouvelle cotisation qu’elle a établie, l’ARC a traité le choix conjoint fait en application du paragraphe 85(1) comme n’étant pas valide. Elle a donc conclu que l’appelante a réalisé un profit de 387 900 $ à la suite du transfert du 1361, rue Paris, à Prime. Le montant du profit et le revenu additionnel visé par la nouvelle cotisation ont été calculés comme suit :

 

Produit de disposition

                    494 900 $

 

Valeur comptable du 1361, rue Paris

                   107 000 $

 

Profit résultant de la disposition

                   387 900 $

 

Gain déjà déclaré

                     79 500 $

 

Revenu additionnel calculé dans la cotisation

                   308 400 $

[5]     Le bien désigné dans le choix conjoint est en fait le 1347, rue Paris (voir la pièce 1, onglet 4), mais les parties s’entendent pour dire que cette désignation est erronée. L’intention de l’appelante et de Prime a toujours été de faire le choix conjoint à l’égard du 1361, rue Paris. L’ARC a pris acte de l’erreur et a établi la nouvelle cotisation en partant du principe que l’appelante a disposé du 1361, rue Paris, aux alentours du 30 août 2001. Dans certains des documents qui ont été déposés en preuve, le fonds de terre désigné comme le 1347, rue Paris, devrait plutôt, selon le contexte, être désigné comme le 1361, rue Paris.

[6]     Avant d’examiner la preuve, il serait utile de présenter un résumé des extraits pertinents de l’article 85 de la Loi. En jargon fiscal, une « opération de roulement » représente un transfert libre d’impôt de bien entre des personnes ayant entre elles un lien de dépendance. Le paragraphe 85(1) permet le roulement d’un « bien admissible » d’un contribuable à une société canadienne imposable, à certaines conditions. Le terme « bien admissible » est défini au paragraphe 85(1.1), qui est rédigé, en partie, en ces termes :

85(1.1)        Pour l’application du paragraphe (1), « bien admissible » s’entend :

a)         d’une immobilisation – à l’exception d’un bien immeuble, d’un droit sur un tel bien, ou d’une option s’y rapportant, dont une personne non‑résidente est propriétaire;

 

b)         […]

 

f)          d’un bien à porter à l’inventaire, à l’exception d’un bien immeuble, d’un droit sur un tel bien et d’une option y afférente;

 

g)         […]

[7]     L’appelante soutient qu’en août 2001, elle détenait le 1361, rue Paris, à titre d’immobilisation. De son côté, l’ARC soutient que pendant toute la période en cause, entre les mains de l’appelante, le 1361, rue Paris, était un bien à porter à l’inventaire. Essentiellement, la question à trancher en l’espèce est celle de savoir quelle était la nature du 1361, rue Paris, entre les mains de l’appelante en date du 30 août 2001. S’agissait‑il d’une immobilisation ou d’un bien à porter à l’inventaire?

[8]     Ronald Arnold, président de la société appelante, est la seule personne venue témoigner à l’audition du présent appel. L’appelante a été constituée en société en 1969. Ronald Arnold détient 51 % des actions émises. L’autre 49 % des actions émises sont détenues par les trois frères de Ronald Arnold : David, Frank et Phil. Une deuxième société, Dalron Leasing Ltd. (la société « DLL »), a été constituée en société en 1977 et est une filiale à 100 % de l’appelante. Au début de l’audience, les avocats des deux parties ont déposé sous la cote 1 un recueil conjoint de documents comportant 52 onglets. Toute mention d’un « onglet » dans les présents motifs renvoie à un document contenu dans la pièce 1. Plus tard, l’appelante a déposé les pièces A‑1 et A‑2, et l’intimée a déposé les pièces R‑1, R‑2 et R‑3.

 

[9]   Comme il est souligné au paragraphe 1 ci‑dessus, les activités de l’entreprise de l’appelante sont l’achat et l’aménagement de terrains par la construction d’édifices résidentiels et commerciaux. M. Arnold a affirmé que normalement, si l’appelante avait l’intention de conserver un édifice en particulier comme source de revenu de location, cet édifice était transféré à DLL. En 1987, l’appelante a acheté le 1361, rue Paris, au coût de 135 000 $ (voir l’onglet 10). La convention d’achat‑vente désigne le bien comme étant le 1361 et le 1365, rue Paris, et comme comportant deux maisons, toutes deux des sources de revenu de location. M. Arnold a affirmé que le bien situé au 1361 et au 1365, rue Paris, avait une superficie d’environ trois ou quatre acres. À Sudbury, la rue Paris est une artère importante qui s’étire du nord au sud et qui n’a pas moins de quatre voies. Selon un examen du fonds de terre en question (pièce A‑2), le bien situé au 1361 et au 1365, rue Paris, a une façade d’environ 145 pieds sur le côté ouest de la rue Paris, et malgré sa forme assez irrégulière, il a une profondeur moyenne d’environ 340 pieds. Le bien situé au 1361 et au 1365, rue Paris, dont il est question dans la convention d’achat‑vente (onglet 10) est le même bien que celui qui est désigné dans les présents motifs comme le « 1361, rue Paris ». 

 

[10]    L’onglet 50 contient les états financiers consolidés de l’appelante et de ses filiales en date du 28 février 2001. La filiale principale était DLL. Le bilan consolidé présente des biens dont la valeur comptable s’élève à 53 199 969 $. Les cinq biens dont la valeur comptable était la plus élevée sont les suivants :

 

Biens à vendre à porter à l’inventaire

                        6 589 683 $

 

Travaux en cours

                       8 262 588 $

 

Frais reportés

                       3 931 884 $

 

Créances hypothécaires

                       3 228 779 $

 

Immobilisations nettes

                     28 809 475 $

 

[11]    M. Arnold  a examiné le bilan consolidé et a formulé des commentaires sur certains biens. Les biens à vendre à porter à l’inventaire ont été acquis sur une longue période. Certaines parcelles de fonds de terre ont été conservées pendant 25 ans. Les travaux en cours représentaient principalement des maisons à vendre qui étaient encore en construction. La valeur des immobilisations qui était indiquée était non amortie et, selon la note 7 dans les états financiers de l’appelante, elle avait trait au fonds de terre (10 120 000 $) et aux édifices (17 657 000 $).

 

[12]    L’onglet 48 présente les états financiers de DLL en date du 28 février 2001. Il s’agit des états financiers de DLL seulement, ce ne sont pas des états financiers consolidés. Le bilan de DLL, en date du 28 février 2001, présente des immobilisations à une valeur non amortie de 14 481 247 $. Selon la note 3 dans les états financiers de DLL, ces immobilisations comprenaient un fonds de terre (6 076 000 $) et des édifices (7 853 000 $). Si je compare la note 3 des états financiers de DLL à la note 7 des états financiers de l’appelante (les onglets 48 et 50, respectivement, tous deux en date du 28 février 2001), je suis tenu de rapprocher les montants suivants :

 

 

Note 3

DLL

Note 7

Appelante

 

Fonds de terre

6 076 000 $

10 120 000 $

 

Édifice

 7 853 000 $

 17 657 000 $

 

[13]    Étant donné que DLL est incluse dans les états financiers consolidés de l’appelante, je conclus que 60 % du fonds de terre inscrit au bilan de l’appelante à titre d’immobilisation appartient en fait à DLL. De la même façon que 45 % de la valeur non amortie des édifices inscrite au bilan de l’appelante à titre d’immobilisation représente des édifices appartenant en fait à DLL. Sur le bilan de DLL, les immobilisations (14 481 247 $) représentent 84 % de la valeur comptable de tous les biens (17 140 702 $), alors que sur le bilan consolidé de l’appelante, les immobilisations (28 509 475 $) ne représentent que 54 % de la valeur comptable de tous les biens (53 199 969 $). Je conclus donc que DLL est principalement une société de portefeuille, tandis que l’appelante est principalement une société exploitant une entreprise. Cette conclusion est aussi confirmée par le fait que d’importants montants sont inscrits au bilan consolidé de l’appelante sous les rubriques « biens à revendre à porter à l’inventaire » et « travaux en cours ». Le bilan de DLL ne comportait aucun bien du genre.

 

[14]    Les bilans dont il est question aux paragraphes 10 à 13 ci‑dessus viennent appuyer l’affirmation de M. Arnold selon laquelle si un édifice donné était conservé comme source de revenu de location, il était normalement transféré à DLL.

 

[15]    En mars 1997, au début de son exercice 1998, l’appelante était toujours propriétaire du 1361, rue Paris. La valeur comptable du bien avait augmenté, passant de 135 000 $ (soit le prix d’achat en 1987, voir l’onglet 10) à 186 481 $. M. Arnold a expliqué que cette augmentation était due à deux choses. D’abord, les deux maisons qui étaient des sources de revenu de location et qui se trouvaient sur le fonds de terre au moment de l’achat avaient depuis été démolies, moyennant des frais assez importants. Ensuite, l’appelante avait été tenue de payer un certain montant à la Ville de Sudbury pour avoir accès aux canalisations d’eau et d’égout plus importantes qui avaient été installées le long de la rue Paris.

 

[16]    À la fin de l’exercice 1998 de l’appelante (soit le 28 février 1998), l’appelante a amorti la valeur de certains fonds de terre à son inventaire et a appliqué l’amortissement global dans le calcul de ses profits. L’onglet 12 est une page tirée des livres de l’appelante présentant une partie des amortissements. L’onglet 12 présente l’amortissement de 18 lots sur les rues Roselawn et Sandlewood Court, de 42 lots sur les rues Donald et Jack, ainsi que 5 autres lots, y compris le 1361, rue Paris, amorti de 186 481 $ (voir le paragraphe 15 ci‑dessus) à 107 000 $. Il est inscrit que l’amortissement net du 1361, rue Paris, est de 79 481 $. Il est clair qu’à la fin de son exercice 1998, l’appelante considérait que le 1361, rue Paris, faisait partie des fonds de terre à vendre à porter à son inventaire.

 

[17]    J’examine maintenant les circonstances dans lesquelles l’appelante a transféré à Prime le 1361, rue Paris, en août 2001, et a choisi conjointement d’effectuer l’opération de roulement en application du paragraphe 85(1) de la Loi. À l’automne 2000, l’appelante a entrepris des pourparlers avec la société RBC Dominion Securities Inc. (la société « RBC-DS ») concernant la location de 6 500 pieds carrés d’un édifice qui devait être construit sur la rue Paris. L’onglet 21 est une offre de bail datée du 2 octobre 2002 dans laquelle on désigne la RBC‑DS comme le locataire et l’appelante comme le locateur. L’offre de bail désigne un fonds de terre dont la façade se trouve sur la rue Paris comme la parcelle 7935 S.E.S. et la parcelle 49415 S.E.S. La désignation de la deuxième parcelle est vraisemblablement erronée parce que, selon l’examen (pièce A‑2) et le témoignage de M. Arnold, la parcelle 49410 S.E.S. contient le fonds de terre désigné dans les présents motifs comme le 1361, rue Paris, le fonds de terre adjacent, au nord, est la parcelle 7935 S.E.S. appartenant à Prime et désignée ici comme le 1347, rue Paris, et le fonds de terre adjacent, au sud, est la parcelle 48415 S.E.S. appartenant à un inconnu. En l’espèce, il est seulement question de la parcelle 49410, appartenant à l’appelante (soit le 1361, rue Paris) et du fonds de terre adjacent, au nord, la parcelle 7935, appartenant à Prime (soit le 1347, rue Paris).

 

[18]    Comme il a déjà été dit au paragraphe 2 ci‑dessus, l’appelante détient 80 % des actions émises de Prime. L’autre 20 % de la participation de Prime est détenu par Andy Humbert, un homme qui n’avait aucun lien avec les frères Arnold. Selon M. Arnold, Andy Humbert était aussi propriétaire du fonds de terre adjacent au 1347, rue Paris et au 1361, rue Paris, à l’ouest. Comme Andy Humbert (ci‑après « M. Humbert ») était propriétaire à 20% de Prime, qui était à son tour propriétaire du 1347, rue Paris, il avait un certain intérêt pour tout aménagement qui pourrait avoir lieu au 1361, rue Paris. M. Arnold a affirmé que M. Humbert a toujours voulu travailler avec les frères Arnold à un quelconque projet d’aménagement immobilier ou à y investir de l’argent.

 

[19]    Le fonds de terre au 1347, rue Paris, avait été acheté par Prime en 1991. Sa façade était bien située sur la rue Paris et il fournissait un accès légal de la rue Paris au fonds de terre de M. Humbert, qui était adjacent au 1347 et au 1361, rue Paris, à l’ouest. L’appelante n’avait pas besoin du 1347, rue Paris, pour aller de l’avant avec le projet de l’édifice de la RBC-DS au 1361, rue Paris, mais en combinant le 1347 et le 1361, rue Paris, il était plus facile pour l’appelante de vendre ou de louer un deuxième édifice au même endroit et d’y prévoir amplement de places de stationnement. Étant donné qu’il y avait un véritable avantage commercial à combiner les deux biens, et étant donné que M. Humbert avait toujours voulu collaborer avec l’appelante à un projet, l’appelante a décidé de transférer le 1361, rue Paris, à Prime.

 

[20]    L’onglet 7 est l’accord de transfert de biens, daté du 30 août 2001, conclu entre l’appelante, à titre de vendeur, et Prime, à titre d’acheteur. Dans cet accord, les parties ont convenu : (i) que la juste valeur marchande du 1361, rue Paris, était de 494 900 $; (ii) que le prix d’achat serait la juste valeur marchande; (iii) que 186 500 $ du prix d’achat seraient payés par un billet à ordre de Prime, et 308 400 $ seraient payés par l’émission de 100 actions ordinaires de Prime. Les parties ont également convenu (au paragraphe 2.6) de faire un choix conjoint en application du paragraphe 85(1) à l’égard du 1361, rue Paris. L’onglet 8 est l’acte de cession donnant effet au transfert. L’onglet 4 est le choix conjoint fait en application du paragraphe 85(1) tel qu’il a été présenté à l’ARC. L’onglet 8 et l’onglet 4 désignent tous deux, à tort, le 1361, rue Paris, comme étant le 1347, rue Paris.

 

[21]    L’onglet 9 est un échange d’actions entre l’appelante et Prime selon lequel l’appelante a convenu d’échanger 100 actions ordinaires de Prime contre 308 400 actions de catégorie B de Prime. L’échange d’actions était nécessaire pour conserver la proportion de 80‑20 des capitaux propres de Prime entre l’appelante et M. Humbert.

 

[22]    L’onglet 45 est le bail définitif conclu entre la RBC‑DS et Prime, daté du 7 février 2001. L’appelante a dû céder son droit en faveur de Prime dans l’offre de bail (onglet 21). Je souligne que dans le bail définitif de février 2001, Prime est désigné comme le locateur, même si le transfert du 1361, rue Paris, n’a eu lieu que le 30 août 2001. L’appelante aurait donc convenu de façon officieuse avec M. Humbert en février 2001 que les deux parcelles de fonds de terre (soit le 1361 et le 1347, rue Paris) seraient amalgamées afin qu’on puisse construire l’édifice pour la RBC‑DS. Dans le bail définitif, le deuxième étage (6 500 pieds carrés) d’un édifice à bureaux de deux étages sur la rue Paris, est désigné comme l’espace loué par la RBC-DS.

 

[23]    L’onglet 22 est une proposition de bail datée du 31 mai 2001 faite par Manuvie à l’intention de Royal LePage (Sudbury). Manuvie cherchait à louer 2 600 pieds carrés au rez‑de‑chaussée d’un édifice à bureaux de deux étages situé au 1361, rue Paris. Dans la proposition, DLL est désignée comme l’éventuel locateur. L’onglet 24 est le bail conclu entre Manuvie et DLL (non daté) en vertu duquel Manuvie devient le locataire de 2 600 pieds carrés au 1361, rue Paris, à compter du 31 août 2001. L’onglet 23 est une cession de bail datée du 31 août 2001 selon laquelle DLL cède à Prime le bail de Manuvie concernant le 1361, rue Paris.

 

[24]    Comme il a déjà été établi au paragraphe 7 ci‑dessus, la principale question en l’espèce est de savoir si, entre les mains de l’appelante en date du 30 août 2001, le fonds de terre situé au 1361, rue Paris, était une immobilisation ou un bien à porter à l’inventaire. C’est une question de fait. Si je tiens compte de toute la preuve dont j’ai été saisi, je peux facilement conclure qu’entre les mains de l’appelante, pendant toute la période en cause, le 1361, rue Paris, était un bien à porter à l’inventaire. Il est clair que le 1361, rue Paris, était un bien à porter à l’inventaire en date du 28 février 1998, lorsque l’appelante a amorti la valeur d’un grand nombre de parcelles de fonds de terre à la fin de son exercice 1998 (voir le paragraphe 16 ci‑dessus).

 

[25]    La pièce R‑3 est une reliure contenant certains extraits de l’interrogatoire préalable d’Andrew Sostarich témoignant au nom de l’appelante, reliure qui a été consignée en preuve par l’avocat de l’intimée. La pièce R‑3 contient la confirmation n°18 dans laquelle l’intimée a demandé à l’appelante de confirmer un fait en particulier et l’appelante a répondu. Je présente ici la confirmation n°18 telle qu’elle apparaît à la pièce R‑3 :

 

[traduction]

 

18.       Pour confirmer que le bien en question, en date du 28 février 2001, était détenu dans les livres de Dalron Construction Limited comme un bien à porter à l’inventaire.

 

            La liste des fonds de terre à l’inventaire s’élevant à 5 946 989,38 $ en date du 28 février 2001 comprend le 1361, rue Paris, d’une valeur comptable de 107 000 $.

 

[26]    La confirmation n°18 vient prouver qu’aux fins de l’inventaire, le 1361, rue Paris, était évalué à 107 000 $ en février 2001. L’onglet 12 vient prouver qu’en février 1998, la valeur du 1361, rue Paris, a été amortie à 107 000 $ à titre de bien à porter à l’inventaire. À l’exception de l’offre de bail (onglet 21), il n’y a rien qui puisse prouver que l’appelante, à elle seule, a utilisé le 1361, rue Paris, à des fins commerciales pendant la période de 36 mois entre février 1998 et février 2001. Par conséquent, je conclus que le 1361, rue Paris, était un bien à porter à l’inventaire de l’appelante pendant la période de 36 mois en cause.

 

[27]    La pièce R‑3 comporte certaines affirmations faites par M. Sostarich pendant l’interrogatoire préalable qui laissent clairement entendre que l’appelante ne détenait aucun bien avec des baux à long terme, parce que ces biens commerciaux finissaient toujours par être détenus par DLL. Je cite ici les questions 116, 117 et 141 telles qu’elles sont présentées à la pièce R‑3 :

 

[traduction]

 

Q.        Y a‑t‑il des exemples de transactions semblables où un fonds de terre est transféré à Dalron Leasing après la construction d’un édifice?

 

R.         Je pourrais vérifier et essayer de vous en trouver un, oui.

 

Q.        Plus qu’un. J’aimerais avoir une idée de la façon dont ces transactions étaient normalement menées. Pour mieux comprendre, je veux juste préciser. Au départ, vous m’avez dit qu’en temps normal, c’est Dalron Leasing qui détient les baux commerciaux, les biens… les biens avec des baux à long terme. C’est bien ça?

 

R.         C’est bien ça. Si on compare le bilan de Dalron Construction à celui de Dalron Leasing, on constate qu’aucun bien commercial n’est inscrit au  bilan de Construction. C’est toujours sur celui de Leasing.   

 

Q.        Pourquoi, dans ce cas‑ci, l’appelante tenait‑elle à conserver le bien comme bien commercial et non à faire ce qu’elle faisait d’habitude et le transférer à la société de location? Comment cette transaction était‑elle différente?

 

R.         En fait, je ne crois pas qu’elle était différente. Je peux comprendre que si M. Humbert n’avait pas participé au projet, le tout aurait abouti, à un moment donné, à Dalron Leasing Limited.

 

Me DUCHARME : Nous adoptons la position selon laquelle le cas du bien dont il est question ici suivait le modèle que le témoin nous a présenté en détail, soit que Construction n’était pas pour le conserver. L’intention était plutôt de construire. Construction ne conserve pas de biens commerciaux pour la location.

 

Les réponses ci‑dessus, fournies lors de l’interrogatoire préalable, confirment le témoignage de M. Arnold selon lequel les biens de location commerciale étaient normalement transférés à DLL (voir paragraphe 9 ci‑dessus).

 

[28]    Même si l’offre de bail initiale (onglet 21) entre la RBC‑DS et l’appelante a été signée le 2 octobre 2000, tous les documents qui ont suivi donnent à entendre que l’appelante n’aurait pas continué d’être propriétaire du 1361, rue Paris, à titre de locateur. Le bail définitif (onglet 45) était entre Prime et RBC‑DS et était daté du 7 février 2001. En fonction de ce document, je déduis qu’Andy Humbert était entré dans la transaction bien avant février 2001 et que l’appelante avait convenu de combiner le 1361, rue Paris, et le 1347, rue Paris, par le transfert du 1361, rue Paris, à Prime.

 

[29]    Je n’ai été saisi d’aucune preuve donnant à entendre que l’appelante aurait formulé une quelconque intention d’investissement concernant le 1361, rue Paris. L’appelante a amorti la valeur comptable du 1361, rue Paris, à titre de bien à porter à son inventaire en date du 28 février 1998 (voir paragraphe 16 ci‑dessus). Même si l’offre de bail entre l’appelante et la RBC‑DS est datée du 2 octobre 2000 (onglet 21), le 1361, rue Paris, figurait toujours à l’inventaire de l’appelante cinq mois plus tard, soit en février 2001 (voir confirmation n°18 de l’onglet R‑3). De plus, l’appelante a dû céder l’offre de bail à Prime (comme preuve de son intention de lui transférer le 1361, rue Paris) parce que le bail définitif (onglet 45) est daté du 7 février 2001 et est entre Prime et la RBC‑DS. Enfin, le véritable transfert de l’appelante à Prime du 1361, rue Paris, effectué le 31 août 2001 (onglet 8), est la meilleure preuve que l’appelante n’a jamais eu l’intention de conserver le 1361, rue Paris, comme bien locatif source de revenus. 

 

[30]    Me Ducharme, l’avocat de l’appelante, s’est fondé sur l’arrêt de la Cour d’appel fédérale, Edmund Peachey Limited v. The Queen, 79 DTC 5064. Plus précisément, il s’est fondé sur le passage suivant des motifs unanimes de cette Cour :

 

Comme le savant juge de première instance, j’estime qu’une initiative claire et sans équivoque témoignant d’un changement d’intention serait nécessaire pour modifier le caractère du terrain d’un actif engagé à une immobilisation […] 

 

 

Me Ducharme fait valoir que l’offre de bail (onglet 21) signé par l’appelante était de toute évidence une initiative claire et sans équivoque, parce que l’appelante s’était engagée à faire en sorte que le locataire prenne possession du bien à une date précise.

 

[31]    À mon avis, l’offre de bail (onglet 21) ne peut pas être vue comme prouvant un quelconque changement d’intention de la part de l’appelante, parce qu’il doit être examiné en contexte avec les quatre fais inattaquables suivants :

 

(i)      le 1361, rue Paris, était un bien à porter à l’inventaire de l’appelante en date du 28 février 1998;

 

(ii)              le bail définitif conclu avec la RBC‑DS est daté du 7 février 2001 et a été signé par Prime;

 

(iii)     le 1361, rue Paris, figurait toujours à l’inventaire de l’appelante en date du 28 février 2001;

 

(iv)     l’appelante a transféré le 1361, rue Paris, à Prime le 31 août 2001 (onglet 8).

 

[32]    En plus des quatre faits présentés ci‑dessus, la pièce R‑3 contient un bon nombre d’extraits de l’interrogatoire préalable d’Andrew Sostarich témoignant au nom de l’appelante. M. Sostarich a affirmé invariablement que la politique de l’appelante n’était pas de conserver des biens locatifs. Ces biens étaient normalement transférés à DLL. En effet, à la question 141, M. Sostarich affirme que si Andy Humbert n’avait pas participé au projet, l’édifice situé au 1361, rue Paris, aurait abouti entre les mains de DLL. 

 

[33]    L’appel à l’égard de l’année d’imposition 2002 est rejeté, avec dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour d’août 2008.

 

 

« M.A. Mogan »

Juge suppléant Mogan

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de décembre 2008

 

 

Hélène Tremblay, traductrice

 


RÉFÉRENCE :                                  2008 CCI 476

 

 

N° DE DOSSIER :                             2006-2078(IT)G

 

 

INTITULÉ :                                       DALRON CONSTRUCTION LIMITED et SA MAJESTÉ LA REINE 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Sudbury (Ontario)

 

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 25 février 2008

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L’honorable juge M.A. Mogan

 

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 26 août 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me Gregory Ducharme

Avocat de l’intimée :

Me Ronald MacPhee

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                      Me Gregory Ducharme

 

                         Cabinet :                   Wallace Klein Partners in Law LLP

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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