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Référence : 2008CCI597

Date : 20081105

Dossier : 2008-1610(IT)I

 

ENTRE :

JULIETTE MARIE FOUILLARD,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 10 septembre 2008.)

 

Le juge suppléant Beaubier

 

[1]              Les témoins qui ont déposé dans le cadre du présent appel, interjeté sous le régime de la procédure informelle, ont été entendus à Thompson, au Manitoba, le 8 septembre 2008. L’appelante a témoigné et a appelé son mari, Armand Pitre, à comparaître. L’intimée a cité Robert Boland, ex‑mari de l’appelante et père de son fils, Ross.

 

[2]              Les questions à trancher sont énoncées dans la réponse à l’avis d’appel, aux paragraphes 13 à 16 inclusivement. Elles sont ainsi formulées :

 

[traduction]

 

13. Pour établir les nouvelles déterminations concernant les montants de la PFCE et du SPNE auxquels l’appelante avait droit pour les années de base 2003, 2004 et 2005, le ministre a émis les hypothèses de fait suivantes :

 

a)      l’appelante est mère de trois enfants, Olivia, née le 28 décembre 1988, Dominique, née le 15 avril 1990, et Ross, né le 17 juin 1993;

 

b)      l’appelante était le parent qui assumait principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation d’Olivia et de Dominique;

 

c)      Robert Boland est le père de Ross;

 

d)      l’appelante et Robert Boland se sont séparés en 2000 et ont vécu séparés depuis;

                                                                                 

e)      de juillet 2003 à mars 2007, Ross a surtout vécu chez son père;

 

f)        de juillet 2003 à mars 2007, l’appelante n’était pas la personne qui assumait principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de Ross;

 

g)      pour les années de base 2003, 2004 et 2005, le revenu familial de l’appelante était le suivant :

2003                                                           7 692 $

2004                                                        18 988 $

2005                                                        17 709 $

 

B. LA QUESTION À TRANCHER

 

14. La question à trancher est de savoir si le ministre a correctement calculé les montants auxquels l’appelante avait droit au titre de la PFCE et du SPNE à l’égard de Ross pour les années de base 2003, 2004 et 2005.

 

C. LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES, LES MOYENS INVOQUÉS ET LA CONCLUSION RECHERCHÉE

 

15. Il se fonde sur le paragraphe 248(1) et les articles 122.6, 122.61 et 122.62 de la Loi ainsi que sur l’article 6302 du Règlement de l’impôt sur le revenu, tel que modifié pour les années d’imposition 2003, 2004 et 2005.

 

16. Il fait valoir que le ministre a décidé à juste titre que, pour les périodes allant de juillet 2004 à mars 2007, l’appelante n’avait pas droit à la PFCE à l’égard de Ross étant donné qu’elle n’était pas le « particulier admissible » au sens de la définition qu’en donne l’article 122.6 de la Loi. Le ministre a à juste titre demandé que l’appelante rembourse les paiements de PFCE et de SPNE qu’elle a reçus en trop pour les années de base 2003, 2004 et 2005.

 

[3]              Les hypothèses 13e) et f) constituent le cœur du litige. Les autres hypothèses ont été confirmées par la preuve ou n’ont pas été réfutées.

 

[4]              La question dont la Cour est saisie repose essentiellement sur les témoignages de M. Boland et de Mme Fouillard. J’énoncerai ci‑dessous les conclusions auxquelles la Cour en arrive concernant les critères énumérés à l’article 6302 du Règlement de l’impôt sur le revenu (le « Règlement ») :

 

6302. Pour l’application de l’alinéa h) de la définition de « particulier admissible » à l’article 122.6 de la Loi, les critères suivants servent à déterminer en quoi consistent le soin et l’éducation d’une personne à charge admissible :

 

a) le fait de surveiller les activités quotidiennes de la personne à charge admissible et de voir à ses besoins quotidiens;

 

b) le maintien d’un milieu sécuritaire là où elle réside;

 

Ross a fait le va‑et‑vient entre les domiciles de ses parents, qui en assumaient la [traduction] « garde également partagée » en vertu d’une ordonnance rendue par la Cour le 18 décembre 2003 (pièce A-1, point A). Cette ordonnance est restée en vigueur jusqu’en mars 2008, quand la garde exclusive de Ross a été accordée à Mme Fouillard. L’appelante est enseignante suppléante tandis que M. Boland est formateur au niveau collégial; il a ponctuellement été entraîneur de soccer et de hockey quand Ross s’adonnait aux sports. Ross a fait le va‑et‑vient entre les domiciles de ses parents, en fonction des circonstances et des saisons, mais la Cour conclut que chaque parent a surveillé ses activités, a vu à ses besoins et a maintenu pour lui un milieu sécuritaire. L’appelante avait la garde des deux sœurs de Ross. M. Boland gagnait un revenu nettement supérieur à celui de l’appelante. Il entraînait les équipes dont Ross faisait partie, s’impliquait davantage sur ce plan, fournissait plus d’équipement et payait une plus grande partie des frais engagés pour les diverses activités de Ross. Toutefois, pour l’application des alinéas 6302a) et b) du Règlement, sa contribution était équivalente à celle de l’appelante.

 

c) l’obtention de soins médicaux pour elle à intervalles réguliers et en cas de besoin, ainsi que son transport aux endroits où ces soins sont offerts;

 

M. Boland accompagnait Ross chez le dentiste et Mme Fouillard l’accompagnait chez le médecin. M. Boland semble avoir bénéficié d’une assurance dentaire qui couvrait les frais engagés pour Ross (voir la pièce R-3).

 

d) l’organisation pour elle d’activités éducatives, récréatives, athlétiques ou semblables, sa participation à de telles activités et son transport à cette fin;

 

Pour les raisons déjà mentionnées, et du fait qu’il avait plus de moyens que l’appelante, M. Boland s’impliquait davantage dans les activités athlétiques de Ross. Toutefois, en ce qui a trait aux activités éducatives et récréatives en général, la Cour conclut que les deux parents étaient également impliqués, chacun de leur côté.

 

e) le fait de subvenir à ses besoins lorsqu’elle est malade ou a besoin de l’assistance d’une autre personne;

 

f) le fait de veiller à son hygiène corporelle de façon régulière;

 

g) de façon générale, le fait d’être présent auprès d’elle et de la guider;

 

La contribution des deux parents était équivalente en ce qui a trait à ces aspects de l’éducation de Ross pendant la période en cause. Aucun d’eux ne s’est plaint de l’autre ou n’a témoigné de manière explicite à cet égard. M. Boland a payé les frais du camp d’été dispensant un enseignement biblique que Ross a fréquenté, mais la Cour voit cela comme une conséquence du fait que M. Boland gagnait un revenu supérieur à celui de l’appelante, et non comme une preuve du fait que son rôle de guide auprès de Ross était plus important que celui de l’appelante.

 

h) l’existence d’une ordonnance rendue à son égard par un tribunal qui est valide dans la juridiction où elle réside.

 

L’ordonnance de la Cour que j’ai évoquée ci‑dessus, accordant la garde partagée aux parents (pièce A-1, point A), était en vigueur pendant la période en cause. C’est en se fondant sur l’ordonnance en question et sur la preuve alors disponible que les parents de Ross se sont partagé la Prestation fiscale pour enfants.

 

[5]              En matière fiscale, la charge de la preuve repose sur l’appelant. Toutefois, l’alinéa f) de la définition de « particulier admissible » qui se trouve à l’article 122.6 de la Loi de l’impôt sur le revenu prévoit que la mère est présumée être le parent d’une personne à charge admissible qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de celle‑ci quand cette personne à charge réside avec elle. Ainsi, les critères que je viens de passer en revue ne sont pas déterminants. Toutefois, il faut aussi prendre en considération le fait que les seuls frères et sœurs de Ross, ses sœurs en l’occurrence, résidaient avec l’appelante. Il s’agit d’un critère familial significatif dans la mesure où en cas de séparation ou de divorce, les enfants viennent à constituer une unité familiale importante. Cet élément contrebalance les considérations mineures susceptibles de faire pencher la balance en faveur de M. Boland. L’appelante n’avait pas beaucoup d’argent, l’espace disponible à son domicile était restreint, et du fait que Ross était un garçon, il avait des amis différents de ses sœurs, mais il n’en reste pas moins que, même si elle ne figurait pas dans la liste des critères énumérés dans le Règlement, la présence des sœurs représentait un élément important de ce qui restait de la cellule familiale de Ross.

 

[6]              L’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse une nouvelle cotisation conformément aux présents motifs.

 

[7]              Afin de présenter sa cause à 9 h 30, l’appelante a dû se rendre de The Pas, au Manitoba, à Thompson, ce qui représente de quatre à cinq heures de route. Il lui est accordé un montant forfaitaire de 300 $ au titre de ses débours.

 

         Signé à Saskatoon (Saskatchewan), ce 5e jour de novembre 2008.

 

« D. W. Beaubier »

Juge suppléant Beaubier

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour de janvier 2009.

 

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


 

RÉFÉRENCE :                                  2008CCI597

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2008-1610(IT)I

 

INTITULÉ :                                       Juliette Marie Fouillard et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Thompson (Manitoba) et Winnipeg (Manitoba)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Les 8 et 10 septembre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge suppléant Beaubier

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 10 septembre 2008

 

DATE DES MOTIFS ÉCRITS

DU JUGEMENT :                              Le 5 novembre 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

Avocate de l’intimée :

Me Melissa Danish

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                        Nom :                       

 

                    Cabinet :

 

           Pour l’intimée :                        John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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