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Dossier : 2006-3332(IT)G

ENTRE :

DOMINIQUE RICHER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appels entendus le 4 avril 2008, à Montréal (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Réal Favreau

 

Comparutions :

 

Avocats de l'appelant :

Me Jean Groleau et

Me Jacques Plante

Avocat de l'intimée :

Me Yanick Houle

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          Les appels à l’encontre des nouvelles cotisations établies en date du 6 décembre 2004 en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, sont rejetés avec dépens, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de novembre 2008.

 

 

 

« Réal Favreau »

Juge Favreau


 

 

 

Référence : 2008 CCI 547

Date : 20081114

Dossier : 2006-3332(IT)G

 

ENTRE :

DOMINIQUE RICHER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Favreau

 

[1]              Il s’agit d’appels à l’encontre des nouvelles cotisations établies par le ministre du Revenu national (le « ministre ») en date du 6 décembre 2004 par lesquelles les revenus d’entreprise suivants ont été ajoutés au revenu de l’appelant pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 :

 

          a) 27 779 $ pour l’année d’imposition 2001;

          b) 10 130 $ pour l’année d’imposition 2002;

          c) 21,580 $ pour l’année d’imposition 2003.

 

[2]              Les revenus d’entreprise qui ont été ajoutés au revenu imposable de l’appelant résultent de bénéfices générés par des transactions effectuées par l’appelant sur des actions accréditives. Le litige porte sur le traitement fiscal de bénéfices réalisés par un conseiller en placement dans le cadre de transactions sur des actions accréditives effectuées pour son propre compte.

 

[3]              L’intimée soutient que les bénéfices résultant des transactions effectuées sur des actions accréditives constituent du revenu d’entreprise pour l’appelant au même titre que les bénéfices ou pertes résultant des transactions effectuées sur des valeurs mobilières, autres que des actions accréditives, constituent du revenu ou des pertes d’entreprise pour l’appelant.

 

[4]              Le ministre a établi les cotisations pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 en se basant sur les faits suivants décrits aux alinéas a) à q) du paragraphe 15 de la réponse à l’avis d’appel :

 

a)   La Financière Banque Nationale Inc. exploite une entreprise de courtage en valeurs mobilières.

b)   L’appelant est l’un des conseillers en placement de la Financière Banque Nationale Inc.

c)   Les conseillers en placement de la Financière Banque Nationale Inc. sont des professionnels dont le rôle est d’assister les clients de la Financière Banque Nationale Inc. dans leurs décisions de placement en leur offrant des conseils éclairés, fondés sur une recherche objective et solidement documentée, pour les aider à prendre les bonnes décisions financières.

d)   L’appelant est rémunéré par la Financière Banque Nationale Inc., en totalité ou en partie, sous forme de commissions fixées selon le volume de placements effectués.

e)   L’appelant a reçu de la Financière Banque Nationale les sommes suivantes à titre de revenu d’emploi au cours des années d’imposition 2001, 2002 et 2003 :

 

 

2001

 2002

2003

Revenu d’emploi

564 758 $

633 358 $

473 332 $

 

f)        En marge de ses activités de conseiller en placement de la Financière Banque Nationale Inc., l’appelant transige régulièrement des valeurs mobilières (actions accréditives ou autres) pour son propre compte.

g)      L’appelant profite des connaissances et de l’expérience des marchés des valeurs mobilières (actions accréditives ou autres) qu’il a acquises à titre de conseiller en placement.

h)      Les transactions de valeurs mobilières (actions accréditives ou autres) font partie des activités habituelles de l’appelant.

i)        L’appelant a un historique d’achats et de ventes intensifs de valeurs mobilières (actions accréditives ou autres).

j)        Les valeurs mobilières (actions accréditives ou autres) sont habituellement détenues par l’appelant pour une courte période.

k)      Les valeurs mobilières (actions accréditives ou autres) sont principalement achetées par l’appelant sur marge ou financées par un autre genre de dette :

 

 

2001

2002

2003

Frais financiers et intérêts

41 000 $

  16 553 $

8 729 $

 

l)        La revente avec profit des valeurs mobilières acquises (actions accréditives ou autres) est un motif déterminant de leur acquisition par l’appelant.

m)    Les transactions de valeurs mobilières (actions accréditives ou autres) effectuées par l’appelant sont spéculatives.

n)      Pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, l’appelant a d’ailleurs déclaré des pertes d’entreprise résultant de transactions sur des valeurs mobilières, autres que sur des actions accréditives :

 

 

2001

2002

2003

Pertes d’entreprise

(288 814 $)1

(34 746 $)1

(22 656 $)

 

1         une partie des pertes d’entreprise pour les années d’imposition 2001 et 2002 résulte notamment de la disposition d’actions de Ressources Majescor et/ou de Ressources Freewest

 

o)      Pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003, l’appelant a cependant déclaré des gains en capital résultant de transactions sur des actions accréditives :

 

 

2001

2002

2003

Gain en capital

11 863 $1

6 081 $2

10 790 $3

 

1         résulte de la disposition d’actions de Ressources Freewest

2         résulte de la disposition d’actions de Ressources Majescor

3         résulte de la disposition d’actions de Banque Nationale, de Ressources Majescor et de Ressources Freewest

 

p)      L’appelant n’avait aucune raison de traiter, au plan fiscal, ses transactions sur des actions accréditives différemment de ses transactions sur des valeurs mobilières, autres qu’actions accréditives.

q)      D’autant plus que certaines de ces transactions visaient les mêmes actions (i.e. de Ressources Freewest et de Ressources Majescor) et que l’appelant les a traitées différemment au plan fiscal selon qu’elles se qualifient ou non au titre d’actions accréditives.

 

[5]              Les alinéas a) à q) du paragraphe 15 de la réponse à l’avis d’appel correspondent aux paragraphes 9 à 23 de la demande d’aveux du 27 juin 2007 de l’intimée. Dans sa réponse à cette demande d’aveux, l’appelant a reconnu la véracité des faits allégués aux paragraphes 1 à 15 et aux paragraphes 19 à 23. L’appelant a refusé de reconnaître la véracité des faits allégués au paragraphe 16 (alinéa h de la réponse à l’avis d’appel) pour les motifs suivants : les transactions relatives aux actions accréditives ne font pas partie des activités habituelles de l’appelant puisque ce dernier transige rarement des actions accréditives, approximativement entre une et quatre transactions par année. L’appelant a également refusé de reconnaître la véracité des faits allégués au paragraphe 17 (alinéa i de la réponse à l’avis d’appel) pour les motifs suivants : l’appelant, en raison du volume des transactions qu’il effectue relativement aux actions accréditives, n’a pas d’historique d’achats et de ventes intensifs d’actions accréditives. Enfin, l’appelant a refusé de reconnaître la véracité des faits allégués au paragraphe 18 (alinéa j de la réponse à l’avis d’appel) pour les motifs suivants : les actions accréditives transigées par l’appelant étaient détenues par ce dernier pour une période minimale d’un an lors de la période visée par les avis de cotisation faisant l’objet du présent litige.

 

[6]              Les déclarations de revenu produites par l’appelant pour les années d’imposition en litige font état des frais d’exploration et d’aménagement suivants attribuables aux actions accréditives :

 

 

          2001

   2002

   2003

Frais d’exploration

 

 

 

et d’aménagement

15 996 $

24 000 $

32 000 $

 

[7]              Dans sa réponse à l’interrogatoire préalable effectuée par écrit, l’appelant a de plus confirmé les informations suivantes :

 

a)      sa clientèle comptait environ 500 clients composés essentiellement de particuliers ainsi que de fondations, de fiducies et d’entreprises;

b)     l’actif sous gestion était de l’ordre de 500 millions de dollars, principalement investis dans des obligations gouvernementales, obligations et débentures corporatives, actions canadiennes et américaines, indices étrangers (Europe, Asie, Amérique du Sud) et certains fonds d’investissement. La portion des actions des sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles représentait environ 8% de l’actif sous gestion;

c)      les sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles dont les actions (accréditives ou non) qui ont été recommandées à ses clients sont les suivantes : Alcan Inc., Inco Limitée, Canadian Oil Sands Trust, Canadian Natural Resources Limited, Talisman Energy Inc., Sherritt International Corporation, Falconbridge Limitée, Mines d’Or Virginia Inc., Ressources Majescor Inc., Ressources Murgor Inc., Ressources Freewest Canada Inc., Calvaley Petroleum International Inc., Dia Bras Exploration Inc., Ashton Mining Canada Inc., Ressources Metco Inc., Teck Cominco Limitée;

d)     lors de l’année 2001, son portefeuille personnel était constitué surtout de titres américains liés au secteur technologique; la portion relative aux titres de ressources naturelles (actions accréditives ou non) représentait probablement 10 à 15% de la valeur totale. En 2002 et 2003, cette portion devait représenter plus de 50% de la valeur totale de son portefeuille;

e)      les transactions portant sur des valeurs mobilières de sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles (actions accréditives) effectuées dans son portefeuille personnel sont les suivantes :

 

f)      les transactions portant sur des valeurs mobilières de sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles (actions autres qu’accréditives) effectuées dans son portefeuille personnel sont les suivantes :

 

g)     pour ce qui est des actions accréditives, il n’existait aucun rapport de recherche ou analyse financière relativement aux différentes sociétés d’exploration. Les décisions d’investissement dans ces sociétés étaient basées sur la lecture  des prospectus;

h)     pour ce qui est des actions autres qu’accréditives, les décisions d’investissement étaient basées, notamment, sur les analyses financières, les avis d’offres, l’historique des sociétés ou les différents communiqués de presse publiés par les sociétés d’exploration;

i)       le principal motif de l’acquisition de l’ensemble des valeurs mobilières de sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles (actions accréditives) était la déduction fiscale. Le second motif était la possibilité de participer à une découverte minérale qui puisse entraîner la hausse desdites valeurs mobilières;

j)       les motifs d’achat de l’ensemble des valeurs mobilières de sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles (autres qu’accréditives) étaient l’appréciation du capital basée sur la spéculation boursière entourant une « possible » découverte minérale sur leurs propriétés.

 

[8]              L’appelant soutient que les cotisations sont mal fondées en faits et en droit pour les motifs suivants énoncés aux sous-alinéas (i) à (ix) du paragraphe 12 a) de l’avis d’appel :

 

(i)      La nature d’un gain ou d’une perte réalisée sur la disposition d’une valeur mobilière est une question de faits;

(ii)     Le fait que l’Appelant soit un courtier ne fait pas en sorte que la totalité de ses transactions relatives à des valeurs mobilières produise un revenu ou une perte d’entreprise;

(iii)    L’ARC devait analyser les faits spécifiques relatifs à l’achat et à la vente d’actions accréditives avant de déterminer si celles-ci ont été réalisés dans le cadre d’une entreprise ou plutôt dans le cadre d’une transaction de nature capitale;

(iv)    En effet, les transactions portant sur des actions accréditives ne sont habituellement pas faites dans le but principal de vendre le titre à un prix supérieur à celui payé et ce, que l’acheteur soit un courtier en valeurs mobilières ou non;

(v)     Le but recherché par l’Appelant au moment de l’acquisition des actions accréditives était principalement de profiter de l’avantage fiscal octroyé par la LIR et non pas de les revendre à profit;

(vi)    En l’absence de l’intention de revendre à profit, le bien acquis sera normalement détenu à titre d’immobilisation et sa disposition sera à titre de capital;

(vii)   De plus, le profit tiré de la disposition d’actions accréditives est un profit fictif puisque le paragraphe 66.3(1) de la LIR répute l’Appelant d’avoir acquis lesdites actions pour un coût nul;

(viii)   Le profit fictif ne peut être traité à titre de revenu d’entreprise tel qu’énoncé par le juge Hugessen dans l’affaire Loewen c. The Queen, 94 DTC 6265 (C.A.F.);

(ix)    De plus, la juge Lamarre énonçait dans l’affaire Petit c. The Queen, 2003 DTC 1419 (C.C.I.), que si un investissement n’est pas motivé par la possibilité d’une revente à profit mais plutôt par l’obtention d’un avantage fiscal, cet investissement est effectué à titre d’une immobilisation et non d’un inventaire.

 

Analyse

 

[9]              Il peut être utile de rappeler que le coût réputé d’une action accréditive est nul en vertu du paragraphe 66.3(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e supplément) ch. 1, telle que modifiée (la « Loi »), qui se lit comme suit :

 

(3) La personne qui acquiert une action accréditive – au sens du paragraphe 66(15) – auprès d’une société et qui est partie à la convention relative à l’émission de l’action est réputée acquérir celle-ci à un coût nul.

 

[10]         Les actions accréditives acquises et/ou aliénées par l’appelant dans les années 2001, 2002 et 2003 ne sont pas sujettes au choix prévu au paragraphe 39(4) de la Loi par l’application de la définition de l’expression « titre canadien » au paragraphe 39(6) de la Loi, qui exclut un titre prescrit. En vertu des dispositions de la Partie LXII du Règlement de l’impôt sur le revenu ayant pour titre « Actions et titres prescrits », l’action accréditive est un titre prescrit.

 

[11]         L’avocat de l’intimée a dégagé des facteurs tirés de la jurisprudence à considérer aux fins de déterminer si des gains ou des pertes ont le caractère de revenu ou de capital. En résumé, ces facteurs sont les suivants :

 

a)      la question de savoir si des gains ou des pertes ont le caractère de revenu et non le caractère de capital est une conclusion de fait et la conduite du contribuable doit être examinée dans son ensemble;

 

b)     l’un des facteurs les plus importants dans la classification d’un bien comme bien en immobilisation ou comme bien figurant dans l’inventaire est l’intention première du contribuable au moment de l’acquisition du bien. L’intention secondaire du contribuable au moment de l’acquisition du bien est également importante et la preuve objective concernant la conduite du contribuable doit indiquer que la perspective de revendre la propriété du bien était un « motif déterminant » de son acquisition;

 

c)      l’intention principale ou secondaire, de revendre le bien avec profit indique l’acquisition d’un bien à porter à l’inventaire dont la revente engendre un revenu (ou une perte) d’entreprise. La possibilité de réaliser une vente à profit doit avoir motivé l’acquisition du bien. L’existence d’une telle motivation devrait reposer sur des inférences découlant de circonstances entourant la transaction.

 

[12]         L’avocat de l’intimée a également fait référence au bulletin d’interprétation IT-479R portant sur les transactions de valeurs mobilières qui indique, qu’outre l’intention au moment de l’achat, d’autres facteurs peuvent être considérés afin de déterminer si une perte ou un gain en capital découlant de la disposition d’une valeur mobilière est un titre de revenu ou de capital. Les facteurs qui tendent à indiquer que la disposition d’une valeur mobilière a engendré un gain (ou une perte) d’entreprise sont :

 

a)     les répétitions de transactions semblables;

b)    les périodes de détention;

c)     la connaissance des marchés des valeurs mobilières;

d)    les activités habituelles du contribuable;

e)     le temps consacré à l’étude du marché des valeurs mobilières et à la recherche d’achats éventuels;

f)      le financement (sur marge ou un autre genre de dettes);

g)     la publicité; et

h)     dans le cas d’actions, leur nature (spéculative, avec ou sans dividendes).

 

Application des critères aux faits en l'espèce

 

[13]         L’appelant est un conseiller en placement qui a, au cours de la période en litige, effectué de très nombreuses transactions pour son compte personnel. Au cours des années 2002 et 2003, plus de 50 % des transactions effectuées par l’appelant pour son compte personnel ont porté sur des valeurs mobilières de sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles.  Les transactions effectuées ont porté sur des actions de sociétés minières dont les actions étaient cotées à une bourse prescrite au Canada. Il s’agissait donc de placements très risqués et très spéculatifs. L’obtention d’un rendement sous forme de dividendes n’était pas un des objectifs recherchés par l’appelant.

 

[14]         Les investissements de l’appelant sous forme d’actions accréditives ont porté sur les actions de Ressources Freewest CDA Inc., Ressources Majescor Inc., Ressources Metco Inc. et Ressources Pershimco alors que les investissements de l’appelant sur des valeurs mobilières, autres que des actions accréditives, ont porté sur des titres de Ressources Freewest, Mines d’Or Virginia, Ressources Majescor, Ashton Mining Canada, Patrician Diamonds, Teck Cominco,  Primewest Energy et Tri Origin Ressources. Des actions de Ressources Freewest CDA Inc. et de Ressources Majescor Inc. ont donc été  acquises par l’appelant en tant qu’actions accréditives et en tant qu’actions autres qu’accréditives.

 

[15]         Les investissements de l’appelant en actions, autres que des actions accréditives, ont surtout été motivés par les possibilités de réaliser un profit important lors de la revente en cas de découverte d’un nouveau gisement minier. Pour les actions accréditives, l’intention première de l’appelant, au moment de l’acquisition, était de bénéficier de l’avantage fiscal conféré et son intention secondaire était de réaliser un profit lors de la revente en cas de découverte d’un nouveau gisement minier (voir l’alinéa 7(i) ci‑dessus).

 

[16]         L’appelant a détenu la majorité des actions accréditives pendant plus d’une année, soit une période généralement plus longue que la détention des actions autres qu’accréditives acquises par ce dernier. Ceci s’explique par une exigence législative voulant que les actions accréditives acquises dans le cadre d’un placement privé soient conservées pendant une année avant qu’elles ne puissent être revendues sur le marché. Cette règle a été en application jusqu’au mois de décembre de l’année 2002 et, à compter de janvier 2003, la période de détention obligatoire a été ramenée à quatre mois. Les actions accréditives de Ressources Freewest CDA Inc. et de Ressources Majescor Inc. ont été acquises par l’appelant dans le cadre de placements privés.

 

[17]         Les valeurs mobilières (actions accréditives et actions autres qu’accréditives) ont été principalement financées sur marge ou par un autre genre de dettes comme en fait foi les charges de frais financiers et d’intérêts réclamées par l’appelant au cours de chacune des années sous appel.

 

[18]         Tel qu’indiqué à l’alinéa 4(n) ci-dessus, l’appelant a déclaré au cours de chacune des années d’imposition 2001, 2002 et 2003 des pertes d’entreprise importantes, résultant de transactions sur des valeurs mobilières, autres que sur des actions accréditives, et une partie des pertes réclamées en 2001 et 2002 ont résulté de la disposition d’actions de Ressources Majescor Inc. et/ou de Ressources Freewest CDA Inc. Au cours des années en litige, l’appelant a réalisé cinq transactions sur des actions accréditives dont deux ont résulté en un profit commercial, i.e. dans le cas où le produit de disposition a été supérieur au coût d’acquisition initial des actions. Dans la plupart des cas, il y a eu réalisation d’un profit fictif, i.e. que le produit de disposition a été supérieur au coût d’acquisition après déduction de l’avantage fiscal.

 

[19]         Compte tenu des circonstances ci‑dessus relatées, il est clair que le principal motif qui a amené l’appelant à acheter les actions accréditives était la déduction fiscale rattachée à la détention de telles actions. Par contre, selon l’aveu même de l’appelant, un second motif déterminant l’a amené à acheter les actions accréditives, soit la possibilité de participer à une découverte minérale qui puisse entraîner la hausse desdites actions accréditives.

 

[20]         Contrairement à l’arrêt  Paquet c. Sa Majesté La Reine, [1995] C.T.C. 2941, en l’espèce, la revente avec profit des actions accréditives et des actions autres qu’accréditives des mêmes sociétés émettrices était un motif déterminant de leur acquisition.

 

[21]         Si les actions accréditives n’avaient eu d’intérêt pour l’appelant que pour les déductions auxquelles elles donnaient droit, ce dernier n’aurait jamais acquis des valeurs mobilières (autres que des actions accréditives) de sociétés exploitant une entreprise dans le secteur des ressources naturelles dont certaines ont émises des actions accréditives qui ont été acquises par l’appelant.

 

[22]         Les décisions rendues par la Cour d’appel fédérale dans Loewen c. Sa Majesté La Reine, [1994] 3 C.F. 83 et Moloney c. Sa Majesté La Reine, 92 D.T.C. 6570, ne peuvent trouver application en l’espèce, parce que la seule motivation de l’appelant n’était pas uniquement l’obtention d’un avantage fiscal et parce que l’appelant avait ici  une réelle possibilité de réaliser un profit commercial par opposition à un profit fictif équivalent à la récupération de l’avantage fiscal obtenu. Il peut être utile de rappeler que le prix de revente des actions accréditives n’était pas fixé d’avance comme c’était le cas pour la débenture dont il était question dans l’arrêt Loewen précité. Dans le cas présent, la décision de vendre les actions accréditives appartenait exclusivement à l’appelant et le prix de vente desdites actions était nécessairement la valeur au marché des actions ordinaires de la société émettrice, donc sujet aux fluctuations du marché et au prix des métaux.

 

[23]         Si le législateur avait voulu que la récupération de l’avantage fiscal afférent aux actions accréditives (profits fictifs) soit uniquement assujettie au traitement de gain en capital, il l’aurait clairement prévu dans la législation. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, jusqu’en 1981, la récupération de l’avantage fiscal afférent aux actions accréditives était traitée comme un revenu d’entreprise (voir l’alinéa 66.3(1)(a) de la Loi).

 

[24]         Pour tous ces motifs, les appels sont rejetés avec dépens.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de novembre 2008.

 

 

« Réal Favreau »

Juge Favreau

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2008 CCI 547

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2006-3332(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Dominique Richer et La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 4 avril 2008

 

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Réal Favreau

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 14 novembre 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l'appelant :

Me Jean Groleau et Jacques Plante

Avocat de l'intimée :

Me Yanick Houle

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant :

 

                     Noms :                          Me Jean Groleau et Me Jacques Plante

 

                 Cabinet :                           Fraser Milner Casgrain S.E.N.C.R.L.

                                                          Montréal (Québec)

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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