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Dossier : 2008-314(IT)I

ENTRE :

CLAUDINE LACHAPELLE,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

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Appel entendu le 8 septembre 2008, à Montréal (Québec)

 

Devant : L'honorable juge Lucie Lamarre

 

Comparutions :

 

Représentant pour l'appelante :

M. Serge Cloutier

Avocate de l’intimée :

Me Justine Malone

 

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JUGEMENT

 

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2003 et 2004 sont rejetés.

 

 

Signé à Montréal, Québec, ce 10e jour de septembre 2008.

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 


 

 

 

 

Référence : 2008 CCI 504

Date : 20080910

Dossier : 2008-314(IT)I

ENTRE :

CLAUDINE LACHAPELLE,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Lamarre

 

[1]              L’appelante en appelle de deux cotisations établies par le ministre du Revenu national (ministre) en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (Loi) pour les années d’imposition 2003 et 2004, par lesquelles le ministre a refusé les dépenses réclamées à l’encontre des honoraires professionnels déclarés dans ses déclarations de revenus. Le ministre a également imposé une pénalité aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi.

 

[2]              L’appelante a effectivement déclaré des honoraires professionnels de 6 000 $ en 2003 et en 2004 et a réclamé des dépenses totalisant 6 309,46 $ en 2003 et 7 105,93 en 2004, réclamant ainsi une perte de 309,46 $ et de 1 105,93 $ à l’encontre de ses autres revenus pour chacune des années 2003 et 2004 respectivement.

 

[3]              De fait, l’appelante travaillait à temps plein au cours de ces années pour la Fiducie Desjardins inc. comme adjointe administrative, et a généré de cet emploi, un revenu de 43 840,35 $ en 2003 et de 49 066,79 $ en 2004. Les honoraires professionnels déclarés, et qui font l’objet du présent litige, sont reliés à l’entreprise de camionnage de son ex-conjoint avec qui elle cohabitait toujours en 2003 et 2004. Le couple s’est séparé en décembre 2005 et elle a quitté le logis conjugal à la même époque.

 

[4]              Lors de la vérification, M. Mourad Djebrouni, de l’Agence du revenu du Canada (ARC), a demandé à plusieurs reprises à l’appelante et à son comptable, M. Serge Cloutier, qui la représentait en cour, des explications sur les dépenses réclamées et des pièces justificatives. Il ressort du témoignage de M. Djebrouni que l’appelante l’a référé à M. Cloutier. Ce dernier lui a d’abord dit qu’il vérifierait auprès de son associé, puis ensuite auprès de l’ex-conjoint, puis M. Cloutier a lui-même fait sa propre recherche pour finalement dire à M. Djebrouni qu’il n’avait plus possession des factures et pièces à l’appui justifiant les dépenses.

 

[5]              L’appelante a dit que lors de son déménagement en 2005 elle n’avait pas pris ces documents et qu’elle les avait par la suite demandés à son ex-conjoint, lequel ne les avait pas non plus en sa possession. Il semble que M. Cloutier ait subi une saisie à son bureau et que tout document pertinent n’était plus disponible.

 

[6]              M. Djebrouni a également dit en cour qu’il avait demandé à l’appelante en quoi consistaient les honoraires professionnels déclarés. Elle aurait répondu qu’elle faisait des tâches de secrétariat pour son mari. Elle payait les factures de l’entreprise de son mari à même le compte conjoint du couple, du compte de l’entreprise, de son propre compte personnel et par carte de crédit. Elle faisait également des courses pour son mari, lequel travaillait de nuit, et n’était pas disponible le jour pour faire différentes petites tâches.

 

[7]              Le jour de l’audition, l’appelante a expliqué qu’elle n’était pas une employée de son ex-conjoint. M. Cloutier a soutenu que l’appelante n’avait jamais été rémunérée pour effectuer ces tâches de secrétariat et que les sommes reçues de l’ordre de 6 000 $ chaque année avaient servi à rembourser l’appelante des dépenses qu’elle avait payées pour l’entreprise de son ex-conjoint. C’est la première fois que cette explication est donnée. Ni lors de la vérification, ni dans l’avis d’opposition, ni au niveau des appels auprès de l’ARC, non plus que dans l’avis d’appel, la théorie du remboursement des dépenses n’a été mentionnée.

 

[8]              Lors de ses représentations en cour, M. Cloutier a expliqué que l’appelante avait insisté pour déclarer le remboursement de ses dépenses. De ce que je comprends, l’ex-conjoint aurait réclamé, dans ses dépenses d’entreprise, les montants payés à l’appelante, et celle-ci croyait devoir inclure ces montants dans ses déclarations de revenus.

 

[9]              Ne voyant pas comment il pouvait inscrire ces remboursements dans les déclarations de revenus de l’appelante, M. Cloutier a décidé, avec l’accord de celle-ci, de déclarer des honoraires professionnels pour les montants remboursés et de réclamer comme dépenses les factures qu’elle avait payées. Ce faisant, il se trouvait à réclamer une perte d’entreprise qu’il a déduite à l’encontre des autres revenus de l’appelante.

 

[10]         Celle-ci a témoigné qu’elle ne savait pas comment M. Cloutier avait calculé les dépenses réclamées. Par exemple, des dépenses de véhicule moteur ont été déduites par l’appelante à l’encontre de ses revenus, alors qu’elle ne se servait pas d’un véhicule moteur. Elle n’a pu expliquer aucune des autres dépenses réclamées.

 

[11]         À mon avis, en acceptant de signer ses déclarations de revenus telles quelles, l’appelante s’exposait aux cotisations auxquelles elle fait face aujourd’hui. En déclarant volontairement des revenus de profession libérale (secrétariat) et en réclamant des dépenses, elle devait être prête à justifier ses propres énoncés. Elle plaide aujourd’hui qu’il s’agissait d’un remboursement de dépenses et qu’elle n’a jamais été rémunérée pour ses services. Si tel était le cas, elle n’avait pas de source de revenu provenant de l’entreprise de son ex-conjoint, et n’avait rien à déclarer au point de vue fiscal. Si elle n’a pas été remboursée par son ex-conjoint de toutes les dépenses qu’elle a engagées pour son entreprise, ce n’est pas au fisc à en assumer les frais. Elle devait se retourner contre son ex-conjoint et lui réclamer ce qu’il lui devait.

 

[12]         Le seul fait d’inscrire dans ses déclarations de revenus qu’elle avait gagné des revenus de profession libérale contre lesquels elle réclame des dépenses plus élevées que les revenus déclarés, tout en sachant que ce n’était pas la situation réelle, constitue des fausses représentations. Ceci ouvre la porte à l’intimée pour plaider une indifférence face au respect de la Loi, équivalant à faute lourde. Il s’agit là d’un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable (voir Venne c. Canada (ministre du Revenu national – M.R.N.)(C.F. 1re inst.), [1984] A.C.F. no 314 (QL).

 

[13]         Le rôle d’un conseiller professionnel, plus particulièrement d’un comptable professionnel, est, entre autres, d’instruire son client sur la façon de remplir sa déclaration de revenus, si tel est ce qui lui est demandé. Ce n’était pas à l’appelante à dicter à son comptable la façon de faire mais le contraire. L’appelante ainsi que M. Cloutier ont non seulement agi de façon imprudente en remplissant les déclarations de revenus comme ils l’ont fait, mais ont délibérément induit les autorités fiscales en erreur, et s’exposaient ainsi à une pénalité, aux termes de la Loi.

 

[14]         Lorsqu’on soumet des informations au fisc, il faut être prêt à justifier ce qui est déclaré dans la déclaration de revenus. Faire une fausse déclaration comporte des risques et périls. Ici, je n’ai vraiment pas assez d’éléments pour accepter la théorie de l’appelante.

 

[15]         Non seulement, l’appelante ne m’a pas convaincue qu’elle n’a pas reçu de rémunération de son ex-conjoint et qu’elle a effectivement engagé les dépenses en question pour le compte de ce dernier (n’ayant aucune preuve à l’appui), mais en plus, l’intimée m’a convaincue que la pénalité imposée en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi est justifiée.

 

[16]         Les appels sont rejetés.

 

Signé à Montréal, Québec, ce 10e jour de septembre 2008.

 

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2008 CCI 504

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2008-314(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              CLAUDINE LACHAPELLE ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 8 septembre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Lucie Lamarre

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 10 septembre 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant pour l'appelante :

M. Serge Cloutier

Avocate de l’intimée :

Me Justine Malone

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Montréal (Québec)

 

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