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Dossier : 2007-2623(GST)G

ENTRE :

VILLE DE GATINEAU,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 12 février 2009 à Ottawa (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge B. Paris

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Michael Kaylor

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Benoît Denis

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel relatif à la cotisation établie en application de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise, et dont l’avis est daté du 1er mars 2006, est accueilli en partie, avec dépens en faveur de l’intimée, et la cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de mars 2009.

 

 

« B. Paris »

Juge Paris

 

Traduction certifiée conforme

ce 22e jour de juin 2009.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 130

Date : 20090304

Dossier : 2007-2623(GST)G

ENTRE :

 

VILLE DE GATINEAU,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Paris

 

[1]              Il s’agit d’un appel relatif à une cotisation établie en application de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi ») et par laquelle les crédits de taxe sur les intrants (« CTI ») demandés par l’appelante aux termes du paragraphe 169(1) de la Loi ont été refusés.

 

[2]              L’appelante a été constituée le 1er janvier 2002 par la fusion des villes d’Aylmer, de Buckingham, de Gatineau, de Hull et de Masson-Angers. Par suite de la fusion, l’appelante a pris la relève de la Communauté urbaine de l’Outaouais (« CUO ») à titre de propriétaire et d’exploitante d’une station d’épuration des eaux usées provenant d’Aylmer, de Gatineau et de Hull. Par ailleurs, des installations rajoutées à cette station transforment les déchets solides (appelés « boues ») produits à partir des eaux usées en granules d’engrais qui sont vendus à des tiers. La vente de ces granules rapporte à l’appelante la somme d’environ 60 000 $ par année.

 

[3]              Le ministre du Revenu national (le « ministre ») admet qu’une partie du processus d’épuration des eaux usées par lequel les boues sont transformées en granules d’engrais constitue une activité commerciale que l’appelante exploite, et il a accordé à l’appelante la totalité des CTI pour la TPS qu’elle paie sur les fournitures utilisées pour exploiter cette partie-là de la station d’épuration. Le ministre lui a également accordé un remboursement consenti aux organismes de services publics, au sens de l’article 259 de la Loi, soit 57,14 % du montant total de la TPS applicable à l’exploitation de la partie restante de la station.

 

[4]              L’appelante a demandé des CTI additionnels de 138 576,83 $ à l’égard des fournitures achetées pour exploiter la station d’épuration de 2002 à 2004, et de 770 119,48 $ à l’égard des fournitures achetées pour des rajouts immobiliers à l’usine de 1991 à 2004. Ces sommes représentent la différence entre les CTI que le ministre a déjà consentis et la totalité de la TPS que l’appelante a payée sur les dépenses engagées pour exploiter la station tout entière ainsi que sur les dépenses d’immobilisation connexes.

 

[5]              Le ministre a rejeté la demande relative aux CTI additionnels au motif que les activités d’épuration des eaux (à l’exception de celles qui s’appliquaient à la production des granules d’engrais) constituaient la fourniture d’un service municipal effectuée par l’appelante aux propriétaires ou aux occupants d’immeubles présents sur son territoire et que cette fourniture était donc exonérée aux termes de l’article 21 de la partie VI de l’annexe V de la Loi.

 

[6]              L’appelante est d’avis qu’aucune des activités exploitées à la station d’épuration n’est une fourniture exonérée.

 

Les concessions

 

[7]              À l’audience, l’intimée a admis qu’il y avait une erreur dans le calcul des CTI admissibles concernant la transformation des boues en granules d’engrais et que l’appelante avait droit à un montant de CTI additionnel de 2 421,69 $ pour cette partie-là du processus.

 

[8]              L’appelante a reconnu qu’elle n’avait droit à aucun CTI à l’égard des dépenses d’immobilisation concernant la station d’épuration des eaux usées de 1991 au 31 décembre 2001, car, durant cette période, elle n’était pas la propriétaire de cette station. Selon l’avocat de l’intimée, si l’ancienne propriétaire - la CUO - avait droit à des CTI quelconques en rapport avec les dépenses d’immobilisation concernant la station d’épuration de 1991 à 2002, cela se refléterait dans un calcul de la teneur en taxe de la station à l’époque où celle-ci avait été transférée à l’appelante. Les parties conviennent que, si je conclus que les activités d’épuration des eaux qui sont en litige n’étaient pas des fournitures exonérées, il y aurait lieu de renvoyer l’affaire au ministre pour que la teneur en taxe de la station, à l’époque en cause, soit déterminée à nouveau.

 

Les dispositions législatives applicables

 

[9]              Pour avoir droit à des CTI, un inscrit doit avoir payé la TPS sur un bien ou un service qu’il acquiert pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales. Cette condition est énoncée au paragraphe 169(1) de la Loi :

 

169. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, un crédit de taxe sur les intrants d’une personne, pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit, relativement à un bien ou à un service qu’elle acquiert, importe ou transfère dans une province participante, correspond au résultat du calcul suivant si, au cours de cette période, la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable :

A × B

A représente la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert, selon le cas, qui, au cours de la période de déclaration, devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable;

B :

a) dans le cas où la taxe est réputée, par le paragraphe 202(4), avoir été payée relativement au bien le dernier jour d’une année d’imposition de la personne, le pourcentage que représente l’utilisation que la personne faisait du bien dans le cadre de ses activités commerciales au cours de cette année par rapport à l’utilisation totale qu’elle en faisait alors dans le cadre de ses activités commerciales et de ses entreprises;

b) dans le cas où le bien ou le service est acquis, importé ou transféré dans la province, selon le cas, par la personne pour utilisation dans le cadre d’améliorations apportées à une de ses immobilisations, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne utilisait l’immobilisation dans le cadre de ses activités commerciales immédiatement après sa dernière acquisition ou importation de tout ou partie de l’immobilisation;

c) dans les autres cas, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne a acquis ou importé le bien ou le service, ou l’a transféré dans la province, selon le cas, pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

 

[10]         Une « activité commerciale » englobe une entreprise qu’exploite une personne, sauf dans la mesure où cette entreprise consiste à réaliser des fournitures exonérées. La définition complète de ce terme figure au paragraphe 123(1) de la Loi :

« activité commerciale » Constituent des activités commerciales exercées par une personne :

a) l’exploitation d’une entreprise (à l’exception d’une entreprise exploitée sans attente raisonnable de profit par un particulier, une fiducie personnelle ou une société de personnes dont l’ensemble des associés sont des particuliers), sauf dans la mesure où l’entreprise comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

b) les projets à risque et les affaires de caractère commercial (à l’exception de quelque projet ou affaire qu’entreprend, sans attente raisonnable de profit, un particulier, une fiducie personnelle ou une société de personnes dont l’ensemble des associés sont des particuliers), sauf dans la mesure où le projet ou l’affaire comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

c) la réalisation de fournitures, sauf des fournitures exonérées, d’immeubles appartenant à la personne, y compris les actes qu’elle accomplit dans le cadre ou à l’occasion des fournitures.

 

[11]         L’expression « fourniture exonérée » est définie au paragraphe 123(1) de la Loi et elle désigne une « fourniture figurant à l’annexe V » de la Loi.

 

[12]         Aux termes de l’article 21 de la partie VI de l’annexe V, toutes les fournitures d’un service municipal qui est effectué par une municipalité au profit des occupants d’un immeuble situé sur son territoire et que ces derniers ne peuvent refuser constituent des fournitures exonérées. Le texte exact de cette disposition est le suivant :

 

21. La fourniture d’un service municipal si, à la fois :

a) la fourniture est effectuée :

(i) soit par un gouvernement ou une municipalité au profit d’un acquéreur qui est le propriétaire ou l’occupant d’un immeuble situé dans une région géographique donnée,

(ii) soit pour le compte d’un gouvernement ou d’une municipalité au profit d’un acquéreur, autre que le gouvernement ou la municipalité, qui est le propriétaire ou l’occupant d’un immeuble situé dans une région géographique donnée;

b) il s’agit d’un service, selon le cas :

(i) que le propriétaire ou l’occupant ne peut refuser,

(ii) qui est fourni du fait que le propriétaire ou l’occupant a manqué à une obligation imposée par une loi;

c) il ne s’agit pas d’un service d’essai ou d’inspection d’un bien pour vérifier s’il est conforme à certaines normes de qualité ou s’il se prête à un certain mode de consommation, d’utilisation ou de fourniture, ou pour le confirmer.

 

Le point en litige

 

[13]         Le point qui est en litige dans le présent appel consiste à savoir si l’activité d’épuration des eaux effectuée à la station (sauf dans la mesure où celle-ci produit des granules d’engrais) est une fourniture « effectuée […] au profit d’un acquéreur qui est le propriétaire ou l’occupant d’un immeuble situé dans une région géographique donnée », aux termes du sous-alinéa 21a)(i) de la partie VI de l’annexe V. Si c’est le cas, il s’agit d’une fourniture exonérée, et non d’une activité commerciale de l’appelante, et elle ne donne pas lieu à des CTI.

 

[14]         L’appelante admet que, s’il est conclu que l’activité d’épuration des eaux est une fourniture effectuée au profit des propriétaires ou des occupants d’immeubles situés sur le territoire de l’appelante, les conditions restantes de l’article 21 ont été remplies et la fourniture constituerait une fourniture exonérée; elle n’aurait donc pas droit aux CTI en litige.

 

[15]         L’intimée a tenté de faire valoir, subsidiairement, que l’activité d’épuration des eaux était une fourniture exonérée au sens de l’article 10 de la partie VI de l’annexe V de la Loi, lequel porte sur les fournitures effectuées à titre gratuit par un organisme du secteur public, mais ce point n’a pas été évoqué dans la réponse à l’avis d’appel et aucune demande de modification de la réponse n’a été soumise. Je refuse donc de traiter de ce point.

 

Les faits

 

[16]         Dans un appel antérieur relatif à la TPS[1], la propriétaire et exploitante initiale et précédente de la station d’épuration, la CUO, contestait le fait que le ministre refuse sa demande de CTI pour la totalité de la TPS payée sur les fournitures utilisées dans le cadre de l’exploitation complète de la station pour les années 1998, 1999 et 2000. La station fonctionnait de la même façon qu’au cours des années visées par le présent appel, et elle fabriquait et vendait des granules d’engrais. Cependant, à cette époque, la CUO était une entité juridique distincte des villes d’Aylmer, de Hull et de Gatineau et la disposition en vertu de laquelle les CTI avaient été refusés était différente de celle qui est en litige devant moi. Le ministre s’était fondé sur l’article 28 de la partie VI de l’annexe V de la Loi, lequel dispose que « les fournitures entre […] une municipale régionale et ses municipalités locales ou les organisations paramunicipales de celles-ci » constituent des fournitures exonérées. Depuis que la CUO et les cinq municipalités ont été fusionnées en 2002 en une seule entité – l’appelante – l’article 28 ne s’applique plus aux activités de la station d’épuration des eaux.

 

[17]         Les parties ont convenu d’utiliser à titre de preuve en l’espèce la preuve utilisée dans le cadre de l’appel précédent, laquelle décrivait le fonctionnement de la station d’épuration des eaux. Une copie de la transcription du témoignage de M. Jacques Nadeau, qui exerçait à l’époque les fonctions de directeur des Services d’épuration des eaux de l’appelante, a été versée au dossier.

 

[18]         Selon M. Nadeau, les eaux usées sont recueillies par l’intermédiaire du réseau d’égouts à Aylmer, à Gatineau et à Hull et acheminées jusqu’à la station d’épuration. Dans cette dernière, les eaux usées sont soumises à un double filtrage en vue de se débarrasser des débris, et elles traversent des dessableurs pour éliminer les gravillons, le sable et les particules minérales. Les eaux s’écoulent ensuite dans des bassins de décantation. Les boues qui s’accumulent au fond de ces bassins sont pompées jusqu’à une unité de traitement, où elles sont aérées pour favoriser la croissance de micro-organismes. On fait ensuite décanter le mélange, et l’eau qui est séparée et purifiée durant ce temps est déversée par pompage dans la rivière des Outaouais. Les boues décantées sont extraites, épaissies au moyen de divers procédés, concentrées et séchées. La majeure partie des boues asséchées sont transformées en granules qui sont vendus pour un usage agricole, mais une partie d’entre elles - de 13 % à 27 % - est enfouie. Avant l’ajout des installations de granulation et du matériel connexe, la totalité des boues asséchées était enfouie. Les ventes de granules d’engrais rapportaient de 30 000 $ à 60 000 $ par année.

 

[19]         Mme Louise Lavoie, directrice des Services environnementaux, a témoigné pour le compte de l’appelante. Elle a confirmé que la description faite par M. Nadeau du procédé d’épuration des eaux était encore exacte pour les périodes visées par l’appel et que les ventes d’engrais étaient du même ordre. Elle a ajouté que les comptes de taxe foncière que l’appelante envoyait aux propriétaires d’immeubles ne précisaient pas le montant à payer pour les services d’épuration des eaux, et que les frais d’exploitation de la station étaient payés sur les recettes générales. Elle a déclaré aussi qu’à son avis, les propriétaires d’immeubles ne se souciaient pas de savoir ce que l’appelante faisait des eaux usées une fois que celles-ci quittaient leurs immeubles.

 

[20]         En contre-interrogatoire, Mme Lavoie a déclaré que les propriétaires d’immeubles n’avaient pas d’autre choix que de faire épurer leurs eaux usées par l’appelante, parce qu’une fois que le réseau d’égouts recueillait ces eaux elles étaient envoyées à l’usine pour y être épurées.

 

Les arguments de l’appelante

 

[21]         L’appelante est d’avis que les activités de collecte des eaux usées auprès des propriétaires ou des occupants d’immeubles situés sur son territoire sont à distinguer de l’épuration ultérieure de ces eaux à la station et que les propriétaires ou les occupants d’un immeuble ne sont pas les « acquéreurs » d’un service quelconque de la part de l’appelante, hormis la collecte des eaux usées. L’avocat s’est reporté à la définition du mot « acquéreur » que donne le paragraphe 123(1) de la Loi :

 


« acquéreur »

a) Personne qui est tenue, aux termes d’une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;

b) personne qui est tenue, autrement qu’aux termes d’une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;

c) si nulle contrepartie n’est payable pour une fourniture :

(i) personne à qui un bien, fourni par vente, est livré ou mis à sa disposition,

(ii) personne à qui la possession ou l’utilisation d’un bien, fourni autrement que par vente, est transférée ou à la disposition de qui le bien est mis,

(iii) personne à qui un service est rendu.

Par ailleurs, la mention d’une personne au profit de laquelle une fourniture est effectuée vaut mention de l’acquéreur de la fourniture.

 

[22]         Comme les parties ont convenu que les propriétaires ou les occupants d’immeubles situés sur le territoire de l’appelante ne payaient pas l’épuration des eaux usées, ils ne pouvaient être les acquéreurs du service que s’ils tombaient sous le coup du sous-alinéa 123(1)c)(iii) de la définition d’un « acquéreur » et étaient des personnes à qui le service était « rendu ». L’avocat de l’appelante a fait référence à la note éditoriale écrite par David Sherman, auteur bien connu sur la TPS, dans la décision Invera Inc. v. The Queen, [2005] G.S.T.C. 163-1; dans cette note, M. Sherman a fait remarquer qu’un service est rendu à un particulier si ce dernier reçoit la fourniture en personne.

 

[23]         Selon l’avocat de l’appelante, les propriétaires ou les occupants d’immeubles situés sur le territoire de l’appelante n’ont reçu aucun service d’épuration des eaux en personne et, de ce fait, aucun service de cette nature ne leur a été « rendu », comme l’exige le sous-alinéa 123(1)c)(iii) de la définition d’un « acquéreur », au paragraphe 123(1) de la Loi; par conséquent, ils ne sont pas l’acquéreur de ce service. L’avocat a fait valoir qu’aucun service n’était rendu aux propriétaires ou aux occupants d’un immeuble en assainissant les eaux usées et en rejetant les eaux épurées dans la rivière. C’était, a-t-il dit, une façon logique de considérer ce qui se déroulait à la station d’épuration, et cette optique était étayée par le témoignage de Mme Lavoie, qui a déclaré que les propriétaires et les occupants ne se souciaient pas de ce qui arrivait aux eaux usées une fois que ces dernières quittaient leur domicile. En outre, ils ne recevaient en retour aucune partie de l’eau épurée.

 

Analyse

 

[24]         Je ne suis pas d’accord pour dire que les propriétaires et les occupants d’immeubles situés sur le territoire de l’appelante ne sont pas l’acquéreur du service d’épuration des eaux qui est effectué à la station. Les propriétaires ou les occupants d’immeubles qui sont reliés aux égouts de l’appelante sont obligés d’envoyer leurs eaux usées dans le réseau d’égouts que l’appelante a établi. Ce réseau inclut un procédé d’épuration des eaux usées. Toute l’eau qui entre dans le réseau d’égouts est épurée à la station et, de ce fait, en envoyant des eaux usées dans les égouts, les occupants ou les propriétaires envoient en même temps les eaux pour qu’elles soient épurées. Le propriétaire ou l’occupant d’un immeuble ne peut pas faire recueillir ses eaux usées sans que celles-ci soient épurées à l’usine pour en éliminer les déchets. C’est donc dire que le service fourni aux propriétaires et aux occupants est un service global, qui comporte à la fois la collecte et l’épuration.

 

[25]         N’en déplaise à Mme Lavoie, on aimerait croire que les résidents de l’appelante se soucient bel et bien de ce qui arrive aux déchets qu’ils envoient dans le réseau d’égouts et qu’ils opteraient pour que l’eau soit épurée mais, même s’ils ne s’en préoccupent pas, ils sont quand même obligés d’utiliser un réseau qui inclut la station d’épuration des eaux usées.

 

[26]         Quant au commentaire fait dans la décision Invera que l’appelante a cité, il me semble que M. Sherman cherchait à démontrer qu’un service n’est rendu à une personne au sens du sous-alinéa 123(1)c)(iii) de la définition d’un « acquéreur », laquelle figure à l’article 123, que si cette personne reçoit le service à son propre profit, plutôt qu’à celui de quelqu’un d’autre, comme un employeur. Le passage pertinent du commentaire en question est le suivant :

 

[Traduction]


Les renvois faits à une fourniture « effectuée » à une personne ont trait à la personne qui en est l’« acquéreur », tel que défini au paragraphe 123(1), comme l’indiquent les derniers mots de cette définition. La définition d’un « acquéreur » s’applique à la personne qui est légalement obligée de payer la fourniture. C’est donc dire qu’une fourniture est « effectuée » à une personne si cette dernière est obligée de la payer (la preuve en est habituellement que cette fourniture lui est facturée). Une fourniture est « rendue » à une personne si cette dernière reçoit la fourniture en personne. Néanmoins, lorsqu’un employé reçoit une fourniture pour l’exercice de ses fonctions professionnelles, la fourniture devrait être considérée comme rendue à l’employeur.

 

[27]         En l’espèce, les propriétaires et les occupants tirent profit du système d’épuration des eaux usées en étant capables de se débarrasser dans ce dernier de leurs eaux usées. L’utilisation du système leur évite d’avoir à s’occuper eux-mêmes des déchets. Ils profitent du service d’épuration des eaux que leur fournit l’appelante et ils en sont les acquéreurs au sens où ce terme est employé à l’article 123 de la Loi.

 

[28]         Cette conclusion suffit pour trancher l’appel.

 

[29]         L’appel est accueilli en partie pour accorder un montant de CTI additionnel de 2 421,69 $ que l’intimée a concédé, et les dépens sont accordés à cette dernière.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de mars 2009.

 

« B. Paris »

Juge Paris

 

Traduction certifiée conforme

ce 22e jour de juin 2009.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :                                  2009 CCI 130

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2007-2623(GST)G

 

INTITULÉ :                                       Ville de Gatineau et Sa Majesté La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 12 février 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge B. Paris

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 4 mars 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me Michael Kaylor

Avocat de l’intimée

Me Benoît Denis

 

AVOCATS INSCRITS AU
DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                      Michael Kaylor

 

                          Cabinet :                  Lapointe Rosenstein s.r.l.

                                                          Montréal (Québec)

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] Ville de Gatineau c. La Reine, 2005 CCI 358. Par suite de la fusion survenue le 1er janvier 2002, la Ville de Gatineau a succédé à la CUO à titre d’appelante dans cet appel.

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