Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

Dossier : 2008-855(IT)I

ENTRE :

JANET CHOBOTAR,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu les 14 et 15 mai 2009, à Winnipeg (Manitoba).

 

 Devant : L’honorable juge suppléant D.W. Beaubier

 

 Comparutions :

 

Représentante de l’appelante :

Mme Carmen Kardoes

 

Avocate de l’intimée :

Me Melissa Danish

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2005 est rejeté.

 

 

 

Signé à Saskatoon (Saskatchewan), ce 19e jour de mai 2009.

 

 

 

« D.W. Beaubier »

Juge suppléant Beaubier

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour de juillet 2009.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


 

 

 

Référence : 2009 CCI 260

Date : 20090519

Dossier : 2008-855(IT)I

ENTRE :

JANET CHOBOTAR,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Beaubier

 

[1]              Le présent appel, instruit sous le régime de la procédure informelle, a été entendu à Winnipeg, au Manitoba, les 14 et 15 mai 2009. L’appelante a fait témoigner son comptable, Patrick Peters (CMA), son époux, William Chobotar, et un agent immobilier, Ernie Hawrysh. M. Hawrysh a été reconnu à titre de témoin expert au sujet de la juste valeur marchande de la résidence de l’appelante, qui se trouve à Woodridge, au Manitoba. Woodridge, qui est situé à environ 60 miles au sud-ouest de Winnipeg, est un village non constitué en municipalité qui compte entre 100 et 200 habitants et où il n’y a pas de services de gaz naturel, d’approvisionnement d’eau et d’égout publics.

 

[2]              En l’espèce, le litige porte sur les frais médicaux dont l’appelante a demandé la déduction pour l’année d’imposition 2005, à savoir : 35 291,01 $ pour l’addition d’une pièce à la résidence de l’appelante et diverses sommes relatives à des primes d’assurance médicale et à divers frais engagés principalement pour se rendre à des rendez‑vous chez le médecin. Aucun élément de preuve n’a été présenté relativement à ces diverses sommes, et la partie de l’appel s’y rapportant est rejetée. Il reste donc à trancher la question de la déduction principale pour les frais liés à la construction de l’addition à la résidence de l’appelante.

 

[3]              Les paragraphes 17 et 18 de la réponse à l’avis d’appel sont ainsi rédigés :

 

[TRADUCTION]

 

17. Pour établir la cotisation à l’égard de l’appelante pour l’année d’imposition 2005 et pour modifier cette cotisation‑là, le ministre s’est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

 

            a) l’appelante a demandé une déduction de 38 254 $ à l’égard de frais médicaux engagés pour elle et pour son époux en 2005;

 

            b) une déduction de 2 065 $ à l’égard de frais médicaux a été accordée à l’appelante pour 2005;

 

            c) l’époux de l’appelante est atteint de sclérose en plaques;

 

            d) la résidence de l’appelante se trouve à Woodridge, au Manitoba;

 

            e) parmi les déductions demandées par l’appelante au titre de frais médicaux, une déduction de 35 291,01 $ avait été demandée à l’égard de l’addition à sa résidence d’une pièce mesurant 16 pieds par 20 pieds et comprenant une salle de bains;

 

            f) les rénovations et les transformations apportées par l’appelante à sa résidence sont d’un type dont on pourrait normalement s’attendre à ce qu’ils aient pour effet d’augmenter la valeur de l’habitation;

 

            g) les rénovations apportées par l’appelante à sa résidence sont d’un type que réaliserait normalement la personne jouissant d’un développement physique normal ou n’ayant pas un handicap moteur grave et prolongé;

 

            h) l’appelante a demandé la déduction, au titre de frais médicaux, des frais liés aux déplacements faits avec son véhicule personnel entre Woodridge, au Manitoba, et la pharmacie située à Steinbach, au Manitoba – un voyage aller‑retour de 56 kilomètres – pour aller acheter les médicaments prescrits à son époux;

 

            i) parmi les déductions demandées par l’appelante au titre de frais médicaux, une déduction de 318,92 $ a été demandée à l’égard de primes d’assurance médicale;

 

            j) les primes d’assurance médicale payées par l’appelante ne dépassaient pas la déduction qui lui a été accordée à cet égard.

 

B. QUESTION EN LITIGE

 

18. La question en litige est la suivante :

 

            a) savoir si, dans le calcul de ses crédits d’impôt non remboursables pour l’année d’imposition 2005, l’appelante a droit à une déduction pour frais médicaux supérieure au montant dont le ministre a permis la déduction à ce titre.

 

 

[4]              Les hypothèses de fait 17a) à 17f), 17h) et 17i) sont correctes. L’hypothèse 17j) n’a pas été réfutée. L’hypothèse 17g) est erronée. La porte de l’addition et la nouvelle salle de bains sont suffisamment larges pour laisser passer le fauteuil roulant électrique de M. Chobotar, et la toilette et les tablettes de la salle de bains sont spécialement conçues pour qu’il puisse les rejoindre à partir de son fauteuil roulant. M. Chobotar est un homme de forte taille qui, tout au long de la période pertinente, était confiné à son fauteuil roulant.

 

[5]              Avant de devenir handicapé à cause de la sclérose en plaques, William Chobotar a été compagnon charpentier et compagnon ferronnier qualifié, puis agent de douane. Les Chobotar ont installé l’eau courante à partir des deux puits qui se trouvent sur leur terrain. Lorsqu’il est devenu impossible de se procurer du bois localement pour la fournaise, M. Chobotar a fait installer une fournaise géothermique qui tire la chaleur de l’eau provenant du premier puits et retourne l’eau refroidie dans le deuxième puits. Ce processus est inversé pour refroidir la résidence durant l’été. L’utilisation d’un système de chauffage de ce type est courante à Woodridge.

 

[6]              Au départ, la résidence des Chobotar mesurait 32 pieds par 24 pieds, comptait deux chambres à coucher, un sous‑sol doté d’une cage d’escalier de 5 pieds, et une salle de bains mesurant soit 5 pieds par 5 pieds, soit 8 pieds par 4 pieds. En tout, la résidence avait une superficie d’environ 800 pieds carrés. L’addition ajoutée à la résidence de l’appelante mesure 16 pieds par 20 pieds (soit une superficie d’environ 320 pieds carrés). L’addition, qui comprend des placards et une salle de bains, a été ajoutée au derrière de la résidence, ce qui a forcé la réduction des dimensions des chambres à coucher existantes – pour rajouter un couloir – et l’ajout d’une fenêtre à l’une des chambres à coucher (voir la pièce A‑4). La municipalité rurale de Piney a estimé la valeur de l’addition à 10 600 $, et a augmenté la valeur imposable de la résidence de 4 770 $ (voir la pièce A‑2).

 

[7]              La nouvelle salle de bains était nécessaire parce que la salle de bains existante était trop petite pour que M. Chobotar y entre avec son fauteuil roulant et pour qu’il puisse sortir de son fauteuil. La porte de la salle de bains existante ne pouvait pas être fermée. Les Chobotar avaient trois choix : faire une rénovation générale de la résidence et de son système de plomberie, placer M. Chobotar dans une maison de soins infirmiers à Steinbach ou à Winnipeg, ou construire une addition. Les Chobotar ont conclu que la solution la moins perturbatrice était la construction d’une addition, et que le coût de cette solution‑là était semblable à celui de la rénovation. Ainsi, la Cour tient pour avéré le fait que la construction de l’addition était une dépense raisonnable engagée à des fins médicales.

 

[8]              Les paragraphes 22 et 23 de la réponse à l’avis d’appel exposent les réserves de l’intimée par rapport à l’addition. Ces paragraphes sont ainsi rédigés :

 

[TRADUCTION]

 

22. Il soutient que les frais de rénovation en cause sont d’un type dont on pourrait normalement s’attendre à ce qu’ils aient pour effet d’augmenter la valeur de l’habitation, et que, par conséquent, ces frais ne peuvent pas être déduits à titre de frais médicaux en application de l’alinéa 118.2(2)l.2).

 

23. Il soutient aussi que les frais de rénovation en cause sont d’un type qu’engagerait normalement la personne jouissant d’un développement physique normal ou n’ayant pas un handicap moteur grave et prolongé, et que, par conséquent, ces frais ne peuvent pas être déduits à titre de frais médicaux en application de l’alinéa 118.2(2)l.2).

 

[9]              L’alinéa 118.2(2)l.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») est rédigé de la façon suivante :

 

118.2(2)l.2) pour les frais raisonnables afférents à des rénovations ou transformations apportées à l’habitation du particulier, de son époux ou conjoint de fait ou d’une personne à charge visée à l’alinéa a) – ne jouissant pas d’un développement physique normal ou ayant un handicap moteur grave et prolongé – pour lui permettre d’avoir accès à son habitation, de s’y déplacer ou d’y accomplir les tâches de la vie quotidienne, pourvu que ces frais, à la fois :

 

            (i) ne soient pas d’un type dont on pourrait normalement s’attendre à ce qu’ils aient pour effet d’augmenter la valeur de l’habitation,

 

            (ii) soient d’un type que n’engagerait pas normalement la personne jouissant d’un développement physique normal ou n’ayant pas un handicap moteur grave et prolongé;

 

[10]         M. Hawrysh a dit que la salle de bains originale mesurait 5 pieds par 5 pieds. Compte tenu de la forte taille de M. Chobotar et de son témoignage, fait à partir de son fauteuil roulant, portant que la salle de bains originale mesurait 5 pieds par 8 pieds, la Cour prête foi aux affirmations de l’appelante voulant que la nouvelle salle de bains et la nouvelle chambre à coucher étaient nécessaires et que la construction de l’addition était raisonnable. De plus, en ce qui a trait au sous‑alinéa 118.2(2)l.2)(ii) de la Loi, la forte taille de M. Chobotar n’est pas inhabituelle pour une personne qui, comme lui, est confinée à un fauteuil roulant depuis des années. De même, les portes plus larges que la normale et les placards et les appareils de salle de bains spéciaux n’auraient pas été installés par une personne n’ayant pas un handicap moteur grave et prolongé.

 

[11]         Ainsi, il reste à trancher la question de savoir si, pour l’application du sous‑alinéa 118.2(2)l.2)(i) de la Loi, les frais de rénovations engagés par l’appelante sont « d’un type dont on pourrait normalement s’attendre à ce qu’ils aient pour effet d’augmenter la valeur de l’habitation ». Il n’est donc pas question d’une habitation, mais de l’habitation des Chobotar située à Woodridge – « l’habitation ».

 

[12]         Woodridge n’est pas constitué en municipalité. Le village est gouverné et imposé par la municipalité rurale dont il fait partie (voir la pièce A‑2). Il n’y a pas de services de gaz naturel, d’approvisionnement d’eau et d’égout publics. Chaque propriétaire doit s’occuper de ces services lui‑même. Pour obtenir les produits et les services dont ils ont besoin, les 100 à 200 habitants de Woodridge doivent aller à Steinbach, une ville qui se trouve à environ 28 kilomètres. Le village est situé à l’extérieur de la région métropolitaine de Winnipeg. Le marché immobilier de Woodridge est donc assez limité.

 

[13]         M. Hawrysh a travaillé pendant 27 ans pour l’administration provinciale du Manitoba en tant qu’évaluateur accrédité au Manitoba. Dans cet emploi, il était responsable des évaluations dans le secteur délimité par le quadrilatère formé par la limite est de Winnipeg, la rivière Rouge, la frontière américaine et la frontière ontarienne. Après cela, M. Hawrysh a passé les 14 dernières années à travailler comme courtier immobilier pour Century 21 pour le secteur de Steinbach, au Manitoba. Ces deux secteurs comprennent le village de Woodridge. Pendant les 14 dernières années, M. Hawrysh a fait environ 45 évaluations par année pour des banques, des coopératives d’épargne et de crédit, et dans le cadre de litiges matrimoniaux judiciaires.

 

[14]         Le 18 juillet 2006, M. Hawrysh a évalué la résidence des Chobotar pour la coopérative d’épargne et de crédit de Steinbach (voir la pièce A‑5).

 

[15]         Lorsqu’il a témoigné devant la Cour, M. Hawrysh a estimé que la valeur rajoutée à la résidence des Chobotar par l’addition correspondait à 60 % des frais engagés pour la construction de l’addition, c’est‑à‑dire :

 

60 % x 35 000 $ (approximativement) = 21 000 $

 

De plus, M. Hawrysh a confirmé que l’augmentation de la valeur de la résidence des Chobotar était normale pour une résidence comparable située à Woodridge. Ce témoignage n’a pas été contredit.

 

[16]         La représentante de l’appelante a soutenu que le résultat final a été de faire subir une perte à l’appelante relativement à la somme de 35 291,01 $ qu’elle avait investie, comme elle l’avait indiqué dans sa déclaration de revenus. Autrement dit, une partie du coût de l’addition a été perdu, car les rénovations ont seulement ajouté 60 % de leur coût à la valeur de la résidence.

 

[17]         Toutefois, l’application de la Loi à la présente affaire fait que la déduction demandée par l’appelante ne peut lui être accordée que si les frais de rénovation ne sont pas d’un type dont on pourrait normalement s’attendre à ce qu’ils aient pour effet d’augmenter la valeur de l’habitation située à Woodridge, au Manitoba. La preuve a montré qu’on pourrait normalement s’attendre à ce que les frais engagés par les Chobotar haussent la valeur de leur résidence d’environ 21 000 $.

 

[18]         Pour ces raisons, l’appelante n’a pas réussi à satisfaire aux exigences du sous‑alinéa 118.2(2)l.2)(i) de la Loi.

 

[19]         Par conséquent, l’appel est entièrement rejeté.

 

 

 

Signé à Saskatoon (Saskatchewan), ce 19e jour de mai 2009.

 

 

 

« D.W. Beaubier »

Juge suppléant Beaubier

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour de juillet 2009.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.



RÉFÉRENCE :

2009 CCI 260

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2008-855(IT)I

 

INTITULÉ :

Janet Chobotar et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Winnipeg (Manitoba)

 

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 14 et 15 mai 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge suppléant D.W. Beaubier

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 19 mai 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Représentante de l’appelante :

Mme Carmen Kardoes

 

Avocate de l’intimée :

Me Melissa Danish

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.