Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Référence : 2009 CCI 396

Date : 20090820

Dossiers : 2004‑26(IT)G,

2004‑27(IT)G

ENTRE :

SHARAN GOLDEN,

ALLAN R. GOLDEN,

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le Juge Boyle

 

I. Introduction

 

[1]              M. et Mme Golden interjettent appel des nouvelles cotisations dites de valeur nette que l’Agence du revenu du Canada (« ARC ») a établies à l’égard de leurs années d’imposition respectives 1989, 1990 et 1991. L’ARC a procédé à une vérification de l’avoir net des contribuables à la suite de perquisitions et de saisies une fois qu’il a été établi que les pièces comptables n’avaient pas été tenues par les appelants ou leurs entreprises de sorte qu’une vérification traditionnelle de leurs déclarations puisse être effectuée.

 

[2]              Bien que le procès ait été long, ayant duré près de quatre semaines, il ne s’agissait pas d’un procès particulièrement complexe. Il était question des opérations financières et activités commerciales de deux contribuables et de leurs trois entreprises familiales, à savoir Transcona Country Club, Riverside Inn (initialement appelée St. Vital Hotel) et Provincial Vending. Les deux premières entreprises étaient toutes deux exploitées par deux sociétés, une société exploitante et une société de gestion immobilière. Provincial Vending Ltd. exploitait directement son entreprise de distributrices automatiques de cigarettes.

 

[3]              Une abondante preuve documentaire a été produite. Elle comprenait entre autres des informations financières personnelles des contribuables relative aux relevés Visa de M. Golden pour la période visée et aux fourgonnettes de Mme Golden.

 

[4]              La preuve produite portait également sur les diverses entreprises antérieures et les intérêts financiers de M. et Mme Golden avant l’année d’imposition 1989 qui ont contribué à leur valeur nette de clôture au 31 décembre 1988, point de départ utilisé par l’ARC pour déterminer l’augmentation de la valeur nette pendant les trois années en cause.

 

[5]              Je n’ai écarté aucun élément de preuve durant l’audience à la suite de mes ordonnances du 26 mars 2008 concernant les règles de préclusion pour même question en litige et de l’abus de procédure relativement à la remise en cause de certaines questions déjà tranchées.

 

[6]              M. Golden était conseiller municipal élu de la ville de Winnipeg au cours des années en cause. Aux dires de tous, il était un conseiller municipal fort populaire et apprécié. Pour les années d’imposition en cause, il a déclaré un revenu modeste et, pour l’année 1989, il n’a déclaré que son salaire annuel de 15 000 $ qui lui était versé à titre de conseiller municipal. Avant d’être élu conseiller municipal et tout au long de la période en cause, M. Golden était un entrepreneur ambitieux et dynamique dans des entreprises locales. Il ressort de tous les éléments de preuve, que M. Golden connaissait beaucoup de succès dans ses autres entreprises et activités immobilières. Cela n’était manifestement pas le cas en ce qui concerne Transcona Country Club, Riverside Inn et Provincial Vending.

 

[7]              Une bonne partie de la preuve et de l’argumentation du contribuable dans la présente affaire a été axée sur ce que M. Golden aurait dû ou pu faire si les registres, comptes ainsi que d’autres documents avaient été tenus de manière adéquate, ce qui, dans une large mesure, n’avait pas été le cas. Rares sont les déclarations de revenus de M. et Mme Golden et de leurs sociétés, s’il y en a, qui ont été produites pour les années d’imposition en cause sans que l’ARC ne les ait réclamées. Les déclarations de revenus produites par M. et Mme Golden ne l’ont été qu’à la suite de perquisitions et de saisies. Plusieurs n’ont pas encore été produites.

 

[8]              M. Golden a été déclaré pénalement coupable de fraude fiscale pour l’année d’imposition 1989; ce sont précisément les nouvelles cotisations de valeur nette le concernant ainsi que sa femme pour cette année‑là et sur lesquelles se penche la Cour en l’espèce qui ont donné lieu à ces poursuites. La déclaration de culpabilité prononcée par le jury et la sentence prononcée par le juge ont été confirmées par la Cour d’appel du Manitoba. Dans des ordonnances distinctes en date du 26 mars 2008, j’ai déclaré que l’affaire dans laquelle M. Golden a été reconnu coupable de fraude fiscale ne pouvait être remise en cause ni par M. Golden, en raison de l’application de la doctrine de la préclusion pour même question en litige, ni par Mme Golden, car il s’agirait d’un abus de procédure. Depuis l’instruction de la présente affaire, la Cour d’appel fédérale (Golden c. La Reine, 2009 CAF 86, 2009 DTC 5079) a confirmé mes ordonnances.

 

[9]              M. Golden et ses entreprises ont été reconnus coupables de fraude fiscale maintes fois avant les années d’imposition en cause. Il n’a plaidé coupable dans aucun des cas. Outre les déclarations de culpabilité au pénal découlant du manquement aux exigences en matière d’impôt sur le revenu, des condamnations de fraude fiscale ont été portées relativement au non‑paiement de taxes de vente au détail et de taxes sur le tabac par Provincial Vending. Un de ces montants n’a été payé que lorsque le juge du procès l’a, semble‑t‑il, condamné pour outrage au tribunal et condamné à cinq mois d’emprisonnement, décision qui a été infirmée en appel. M. Golden a aussi été déclaré coupable après avoir plaidé coupable à une infraction réprimé par la Loi sur l’immigration concernant un employé de l’une de ses entreprises. Bref, M. Golden est un sérieux récidiviste en matière fiscale. Son dossier fiscal ainsi que celui des sociétés qu’il exploite est peu reluisant, entaché, entre autres, de déclarations de culpabilité de fraude fiscale de même que d’omissions de produire des déclarations de revenus et de déclarer des attributions aux actionnaires. Sa femme et lui ont été avisés maintes fois par écrit chaque année par un de leurs comptables qu’ils ne respectaient pas les lois fiscales et qu’ils devaient modifier leur comportement s’ils ne voulaient pas se retrouver dans la situation malencontreuse dans laquelle ils se trouvent actuellement. M. Golden est en quelque sorte quelqu’un qui se moque de la loi et l’artisan de son propre malheur.

 

 

II. Cotisations fondées sur l’avoir net

 

[10]         En règle générale, selon la jurisprudence Duke of Westminster, les Canadiens peuvent organiser leurs affaires de façon à réduire au minimum leur fardeau fiscal. Cependant, le contribuable doit prendre des dispositions manifestement dignes de foi. Il ne suffit pas de déclarer, en ce qui concerne des sources de revenus qui n’ont aucunement été déclarées, qu’on aurait pu les déclarer, qu’on aurait dû les déclarer ou qu’on les aurait déclarées de telle ou telle façon. Ce n’est pas cela qu’on entend par « organiser ses affaires ».

 

[11]         Dans le cas de la cotisation fondée sur l’avoir net, le contribuable peut contester la nécessité de celle-ci ou faire valoir la méthode la plus appropriée pour calculer le revenu d’une source donnée. En l’espèce, ce n’est pas ce que fait le contribuable. Lorsqu’il conteste effectivement la nécessité d’une cotisation ou la méthode de calcul, il doit réussir à démontrer à la satisfaction de la Cour, documents, registraires et autres éléments de preuve crédibles à l’appui, quels sont ses revenus tirés de la source ou des sources en cause. En l’espèce, le contribuable n’a pas fait cette démonstration ni établi les fondements de sa preuve à cet égard.

 

[12]         Pour le contribuable, le seul autre choix est de contester des aspects précis des calculs de la cotisation fondée sur l’avoir net. En l’espèce, le contribuable a contesté les éléments suivants :

 

1)     Les prêts consentis à M. Golden par des tierces parties, telles que (i) M. Brock Cordes et ses sociétés, (ii) M. Alf Skowron et sa société Propensity Properties Ltd., (iii) M. Baranyk et sa société Pratt’s Wholesale Ltd. et (iv) M. Sam Katz;

 

2)     Les prêts consentis à M. Golden par des tierces parties financées par des prêts de la Banque Royale du Canada (« RBC »);

 

3)     Les prêts consentis à M. Salvaggio et par celui‑ci, prêts distincts du prêt financé par la RBC;

 

4)     Tout profit personnel provenant du financement de Counsel Trust servant au remboursement des découverts bancaires de l’un des comptes de M. Golden;

 

5)     La déductibilité des frais d’intérêts bancaires imputés sur ce même compte;

 

6)     La propriété ou l’utilisation des fourgonnettes de Transcona Country Club par Mme Golden;

 

7)     Le remboursement de la dette liée à l’autobus « Golden Retriever » ‑ Orion;

 

8)     Les frais figurant sur les relevés de la carte de crédit Visa de M. Golden considérés comme des dépenses personnelles;

 

9)     Plusieurs dépenses que l’ARC a considérées comme des dépenses personnelles, notamment du matériel audio et vidéo acheté chez Multi‑Tech.

 

[13]         En outre, M. Golden soutient que les pénalités n’auraient pas dû lui être imposées. Aucune pénalité n’a été imposée à Mme Golden.

 

[14]         Dans les avis d’appel, les contribuables ont allégué que l’ARC n’a pas tenu compte de sommes d’argent importantes dont ont bénéficié M. et Mme Golden en raison de l’expropriation de deux de leurs entreprises, soit Core Industries et Rubin’s Deli. La Couronne a produit en preuve deux états des rajustements sur lesdites propriétés préparés par le cabinet d’avocats avec lequel faisaient affaire M. et Mme Golden, qui indiquent clairement qu’il ne restait plus de fonds provenant de ces expropriations aux Golden après le paiement des hypothèques, des bailleurs de fonds, des honoraires des avocats, etc.

 

[15]         Les contribuables qui ne conservent pas leurs dossiers comme ils le doivent, ne dressent pas leurs états financiers, ne produisent pas de déclarations de revenus ou n’effectuent pas d’autres déclarations fiscales ne peuvent exiger que l’ARC ou la Cour reconstitue le scénario des transactions le plus favorable qui n’est pas incompatible avec les éléments de preuve au dossier, recueillis par la Couronne et produits devant la Cour par le contribuable, ce qui équivaudrait à une planification fiscale rétroactive.

 

[16]         Quoi qu’il en soit, en l’espèce, il est impossible de tirer des éléments de preuve et des observations du contribuable une explication ou une thèse cohérente et satisfaisante quant à la façon dont on effectuait ou comptabilisait les opérations financières, ou on voulait le faire, à ce moment‑là. Il est évident que peu d’attention, sinon aucune, n’a été accordée à ce moment‑là à l’établissement des états financiers, à la comptabilité ou aux déclarations fiscales. Manifestement, M. Golden a largement fait abstraction de la notion d’entité juridique distincte; il semble plutôt avoir considéré les liquidités de ses entreprises et sociétés comme de l’argent dont il pouvait disposer à sa guise par l’entremise de ses différents portefeuilles.

 

[17]         À maints égards, la preuve produite m’amène à douter de l’exactitude des calculs des valeurs nettes et, par conséquent, des cotisations, mais seuls quelques‑uns de ces doutes méritent d’être portés à l’attention du contribuable afin de lui permettre de s’acquitter de l’obligation qui lui incombe de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que les choses ne correspondaient pas aux hypothèses de l’ARC lorsque les cotisations ont été établies. La cotisation fondée sur l’avoir net constitue le dernier recours, fondamentalement imprécis en matière de calcul du revenu. Dans les situations compliquées comme celle‑ci, ce genre de cotisation peut même être moins précise que ce à quoi on peut normalement s’attendre.

 

[18]         En pratique, il peut s’avérer difficile de s’acquitter du fardeau de la preuve selon la prépondérance des probabilités lorsque le contribuable choisit d’exploiter au moins trois entreprises distinctes pour lesquelles les montants en jeu représentent des millions de dollars, et ce, sans se soucier de tenir ses comptes, de préparer des états financiers ou de produire des déclarations de revenus. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit d’entreprises qui enregistrent énormément de rentrées de fonds et qui traitent entre elles et avec des tierces parties, et qu’elles sont très entremêlées. En l’espèce, rien ne devrait être présumé avoir été fait de façon logique ou raisonnable et peu de choses devraient être exclues sur le fondement qu’aucun motif apparent ne justifierait de procéder de la sorte. Il n’est nullement nécessaire d’invoquer pourquoi une personne aurait dû ou n’aurait pas dû faire les choses d’une certaine façon lorsqu’il est clair qu’on s’est peu soucié au départ de la façon dont devraient être faites les choses. Chacun des différents aspects du présent litige réservait des surprises quant aux faits.

 

[19]         En ce qui concerne le solde d’ouverture des prêts d’actionnaires, le contribuable n’a produit aucun élément de preuve attestant le montant de ces prêts ou la capacité des sociétés de les rembourser bien que cela aurait sans doute été à propos. Les contribuables n’ont produit aucun élément de preuve attestant la valeur ou les coûts des capitaux propres de ces sociétés ni, plus important encore, indiqué si les mouvements de trésorerie des sociétés permettraient de justifier les cotisations sur cette base ou autrement.

 

[20]         Il ressort clairement de la preuve que les comptes de M. et Mme Golden et ceux de leurs entreprises et sociétés étaient pêle‑mêle. Ces comptes étaient parfois délibérement trompeurs; par exemple, la note de 300 $ correspondant à une somme versée à Sharan Golden et les chèques émis à Sharan Golden pour des paiements de loyer et des avances. D’autres fois, ils étaient trompeurs sans doute tout simplement en raison de ce qui peut être qualifié d’indifférence ou d’incompétence totale; par exemple, les états financiers de Provincial Vending n’indiquent pas les prêts de Provincial Vending à Transcona Country Club à titre d’actif. Je conclus que l’ARC n’avait vraiment pas d’autre choix que de recourir aux cotisations fondées sur l’avoir net.

 

[21]         Les contribuables ont sans contredit le droit de n’utiliser qu’un seul compte bancaire à des fins personnelles et commerciales. Comme il ressort clairement en l’espèce, cela peut donner lieu à des problèmes de preuve et de repérage si la tenue des comptes n’est pas adéquate et que les états financiers et les déclarations fiscales ne sont pas préparés en temps opportun et que l’ARC pose des questions.

 

[22]         Les contribuables ne doivent pas se placer dans une situation telle qu’ils se retrouvent coincés avec l’imprécision inhérente aux limites de la méthode de cotisation fondée sur l’avoir net. Le cas échéant, il convient d’établir ou d’estimer au mieux l’origine ou les origines du revenu non déclaré. Les éléments injustifiables évitables, identifiables et inappropriés ne devraient pas être retenus. Il faut procéder, en gardant cela à l’esprit, à l’examen des écritures concernant les fourgonnettes, peut‑être celles liées à l’autobus, ainsi que les prêts d’actionnaires.

 

[23]         La Cour reconnaît que la présente instance se déroule près de vingt ans après la période en cause. Bien sûr, les souvenirs s’estompent et sont moins clairs après une vingtaine d’années. Il se peut aussi que certains documents puissent avoir été perdus, égarés ou détruits. Cependant, les accusations criminelles ont été portées en 1998 et la saisie de documents effectuée par l’ARC et la GRC a eu lieu avant cela. On peut douter que des documents qui existaient à ce moment‑là aient été détruits ou égarés depuis. On s’attendrait plutôt à ce que les contribuables aient recherché minutieusement les documents les concernant et ceux concernant leurs associés dans les années qui ont suivi.

 

[24]         Il n’a été produit que très peu d’éléments de preuve pouvant servir à corroborer la manière dont les tierces parties ayant participé aux transactions ont rendu compte des transactions à des fins fiscales et comptables. Lorsque la transaction était effectuée entre M. et Mme Golden et une de leurs entreprises ou sociétés, bien souvent il n’existait pas d’éléments de preuve étant donné que, la plupart du temps, les états financiers n’étaient pas préparés et que les déclarations de revenus n’étaient pas produites.  

 

 

III. Les témoignages de M. et de Mme Golden

 

[25]         M.  Golden a tenté de tout expliquer. Il n’a pu le faire d’une manière crédible et convaincante, et son témoignage ainsi que les éléments de preuve à l’appui ont, à plusieurs égards, été largement insuffisants pour lui permettre de s’acquitter du fardeau lui incombant en tant que contribuable de démontrer que les nouvelles cotisations établies par le ministre étaient incorrectes. Le témoignage de M. Golden n’a été rien de moins qu’une tentative de tourner tout élément de preuve existant en une version possible, sinon plausible, d’événements qui expliquerait pratiquement tous les revenus établis selon la nouvelle cotisation.

 

[26]         Je dois faire des observations sur les contradictions dans le témoignage de M. Golden. La plus flagrante a été l’affirmation qu’il a répétée à plusieurs reprises selon laquelle sa femme et lui se sont assurés de bien disjoindre leurs affaires commerciales de leurs affaires personnelles. Cette affirmation est démentie par l’absence générale de conservation de quelque pièce que ce soit, par son incapacité à réfuter les éléments de preuve tendant à indiquer que des sommes ont été avancées à ses sociétés et non à lui personnellement comme étant attribuables à de la négligence dans les écritures, et par ses relevés de carte de crédit sur lesquels figurent des dépenses pour affaires et des dépenses personnelles.

 

[27]         Il est clair que M. Golden est intelligent et qu’il sait lire, écrire et compter. Je considère comme un affront sa tentative de se cacher derrière sa formation scolaire limité. Bien qu’il n’ait pas terminé ses études secondaires, il a étudié à temps partiel à l’université en tant qu’adulte.

 

[28]         Je ne retiens pas le témoignage de M. Golden au sujet de faits concrets qui ne sont pas clairement corroborés par des éléments de preuve écrits ou le témoignage verbal de personnes autres que sa femme, M. Cordes ou M. Skowron. Le témoignage verbal de M. Golden était orienté, et l’appelant m’a paru continuellement être quelqu’un qui, après tout ce qui s’est passé, continue à tout nier et essaie de tout expliquer principalement s’en prenant aux autres. A mon sens, il n’était pas raisonnable de sa part de continuer à se fier à son comptable externe, M. Storey, après qu’il eut été mis au courant des sérieux manquements attribuables à celui-ci dans ses déclarations de revenus personnelles et d’entreprise. M. Golden croit toujours que M. Storey était responsable d’au moins une de ses déclarations de culpabilité antérieures en matière fiscale et, fait paradoxal, il maintient qu’il était raisonnable de continuer à se fier à lui.

 

[29]         En ce qui a trait aux éléments à inclure dans le revenu de Mme Golden, sa thèse repose presque entièrement sur le témoignage de M. Golden et des éléments de preuve le concernant. Durant le procès, qui a duré quatre semaines, Mme Golden a témoigné seulement vingt minutes pendant l’interrogatoire principal et vingt‑cinq minutes en contre‑interrogatoire.

 

 

IV. Les prêts consentis par M. Brock Cordes

 

[30]         M. Brock Cordes a présenté un témoignage très réflechi. La plupart des sommes avancées par M. Cordes et ses sociétés n’ont pas été consenties à M. Golden, mais ont plutôt été avancées par chèque à l’une des sociétés de M. et Mme Golden associées au Transcona Country Club ou au Riverside Inn ou leurs divisions. Seulement quelques avances ont été faites par chèques émis à l’ordre de M. Golden.

 

[31]         M. Golden et M. Cordes ont tous deux indiqué que ce n’est pas ce qui s’était passé, mais peu d’éléments de preuve, sinon aucun, permettent de corroborer leurs dires. Selon eux, bien que les chèques aient été faits à l’ordre de ces sociétés, il s’agissait d’un raccourci pour M. Cordes qui avançait ces prêts à M. Golden personnellement pour ensuite les sous‑prêter aux sociétés exploitantes.

 

[32]         Je m’attendrais à voir une preuve corroborante facile à obtenir, comme des états financiers du prêteur, etc. Plusieurs documents clés ne concordaient pas avec les déclarations faites par les témoins des contribuables au sujet de ce qui s’était réellement passé. La preuve écrite concomitante présentée sous la forme du grand livre général et des déclarations de revenus de Provincial Drywall pour les années en cause ne concordent pas avec la déclaration du prêteur au sujet des prêts. En outre, les déclarations relatives à la valeur nette personnelle de M. Cordes déposées auprès des banques ne concordent pas avec le témoignage de M. Golden comme celui de M. Cordes. Au vu de celles-ci, les nouvelles cotisations semblent justifiées et indiquent que des prêts très modestes ont été consentis à M. Golden personnellement. Certains des chèques que M. Cordes a signés faisaient en fait renvoi à un [traduction] « prêt à la société ». Je suis également particulièrement conscient du fait que M. Cordes a dit plusieurs fois qu’il prenait toujours grand soin de mettre en œuvre des structures fiscales efficaces.

 

[33]         Je me serais également attendu à entendre des témoignages au sujet de qui a assumé les pertes aux fins comptables et fiscales étant donné que M. Golden et ses sociétés n’ont pas entièrement remboursé tous ces prêts. Je suis conscient du fait que pour les pertes fiscales, plus précisément les « pertes déductibles au titre d’un placement d’entreprise » ou « PDTPE »,  les questions et les éléments de preuve relatifs aux aspects comptables et bancaires peuvent affecter la manière dont de tels prêts sont comptabilisés. Je n’ai pas reçu de nombreux états financiers des sociétés de nature à corroborer les faits. Bien que M. Cordes ait effectivement mentionné n’avoir comptabilisé à aucun moment l’un des prêts comme une créance irrécouvrable, cela n’a été corroboré par aucune analyse de continuité des comptes, aucune autre élément depreuve à l’appui n’a été produit à cet égard, et il n’a pas dit s’il serait en mesure de le faire à un moment donné.

 

[34]         Vu que le témoignage de M. Cordes est incompatible avec les nouvelles cotisations et la preuve écrite, je ne retiens pas le témoignage de M. Cordes; il est insuffisant pour établir que les sommes avancées aux sociétés de M. et Mme Golden étaient en réalité des prêts consentis à M. Golden.

 

[35]         Mme Kellendonk exerçait les fonctions de gestionnaire de bureau et d’aide‑comptable pour M. Brock Cordes et ses sociétés, à l’exception de Provincial Drywall. Elle était entre autres chargée de la tenue à jour du grand livre pour Seabrook et ses sociétés. Lors de son témoignage, elle a déclaré que les fonds que les sociétés de M. Cordes ont avancés à M. Golden et à ses sociétés étaient comptabilisés par la société de M. Cordes à titre de réduction du prêt d’actionnaire dû à M. Cordes par sa société. Ce prêt faisait aussi l’objet d’un suivi à titre de prêt contracté par M. Golden et ses sociétés; il s’agirait sans doute d’une dette envers M. Cordes, mais, pour une raison quelconque, le suivi s’est fait au niveau de la société. Bien que Mme Kellendonk ait déclaré que le suivi a été effectué au niveau de la société de M. Cordes, peu de preuves documentaires, sinon aucune, n’ont été produites à l’appui. Il y avait des chèques de la société de M. Cordes émis à l’ordre de M. Golden et de ses sociétés, ainsi que des montants correspondants à plusieurs des chèques qui ont été transférés au compte de prêts d’actionnaires de M. Cordes. Mme Kellendonk a été loin d’être claire sur ce point; elle a décrit simultanément ou de façon interchangeable les montants transférés à un compte de prêts d’actionnaires et ceux transférés à partir du compte de M. Golden. A la conclusion de son interrogatoire principal, elle a dit ne pas se rappeler si elle avait déjà reçu des directives de M. Cordes au sujet des prêts consentis à M. Golden et à ses sociétés et au sujet du compte de prêts d’actionnaires de M. Cordes.

 

[36]         Mme Kellendonk a déclaré que ni elle ni d’autres membres du personnel ne sont intervenues dans les finances ou la comptabilité de Provincial Drywall. Ce travail était effectué à l’externe et l’information lui était fournie à des fins de synthèse dans la société de portefeuille de M. Cordes. Elle n’a rien dit et ne savait rien au sujet des avances consenties par Provincial Drywall à M. Golden ou à sa société.

 

[37]         Lors de son témoignage, Mme Kellendonk a aussi déclaré n’avoir jamais été au service de M. et Mme Golden ou de leurs entreprises. Toutefois, en contre‑interrogatoire, l’avocat de la Couronne lui a présenté une lettre que Riverside Inn/Comedy Oasis avait fait parvenir à la Banque Royale confirmant qu’elle était l’une des trois personnes autorisées à signer pour Riverside Inn. Sa signature figure sur cette lettre à côté de son nom. Mme Kellendonk a dit vaguement reconnaître la lettre.

 

[38]         Je n’estime pas utile le témoignage de Mme Kellendonk pour ce qui est d’établir si une avance en particulier consentie par M. Cordes ou l’une de ses sociétés à M. Golden ou à ses sociétés ou entreprises était une avance consentie à M. Golden personnellement ou au bénéficiaire dont le nom apparaît sur le chèque. Son témoignage semble bien confirmer que c’était M. Cordes qui avançait ces sommes personnellement, vu que les montants correspondants ont réduit le montant des prêts d’actionnaire consentis par M. Cordes à ces sociétés, mais cela n’est pas pertinent en ce qui concerne les nouvelles cotisations établies pour M. et Mme Golden.

 

[39]         Mme Elisabeth Silva était l’aide‑comptable chargée de la tenue de la comptabilité de Provincial Drywall Ltd. durant les années en cause. D’après son témoignage, elle relevait, à ce titre, de M. Ken Golden (un des frères de M. Golden) de même que de M. Brock Cordes. Toutes les directives concernant les questions financières qu’elle recevait provenaient de M. Cordes. Le grand livre de Provincial Drywall présenté par Mme Silva a montré que Provincial Drywall était financé en partie par des prêts d’actionnaire consentis à la société par M. Cordes et que la société a prêté, à plusieurs reprises en 1991, des fonds à M. Golden, Transcona Country Club, Riverside Inn et Comedy Oasis ainsi qu’à d’autres personnes et entreprises qui ne sont pas touchées par la présente instance. Le grand livre a également montré que M. Golden et ses entreprises n’avaient plus de dettes envers Provincial Drywall à la fin de 1991. Peut‑être qu’à la fin de l’exercice, les dettes ont été comptabilisées à nouveau comme des prêts consentis directement par M. Cordes à M. Golden et à ses entreprises, et que les prêts d’actionnaire de M. Cordes ont été réduits en conséquence, mais aucun des éléments de preuve produits ne tend, si faiblement que ce soit, à le confirmer. Quoi qu’il en soit, les prêts et les avances consentis par Provincial Drywall à M. Golden étaient très modestes comparativement à ceux faits à ses entreprises. Bien que les entreprises ne soient pas identifiées comme faisant nécessairement partie des sociétés exploitantes, on n’a nullement tenté de faire le lien entre le témoignage relatif à ces avances, ou entre les autres éléments de preuve documentaire tels que les chèques, avec le grand livre et des écritures similaires. Mme Silva a déclaré, lors de son témoignage, qu’elle ne se rappelait d’aucun détail au sujet des comptes de Provincial Drywall pour ses prêts consentis à Transcona Country Club, Riverside Inn ou Comedy Oasis, qui appartiennent à M. Golden.

 

[40]         Certaines pages du grand livre mensuel ont été produites à titre d’éléments de preuve corroborant les témoignages de M. Cordes, de Mme Kellendonk et de Mme Silva. Au mieux, ces pages prêtent énormément à confusion et sont trompeuses. Il manque des étapes, et les pages imprimées du grand livre ne sont pas préparées de manière uniforme, de sorte que l’on compare sans doute des pommes avec des oranges. Par exemple, il est indiqué dans le grand livre un certain nombre de prêts consentis à M. Golden et ses sociétés en date du 30 novembre. Le grand livre a clairement été préparé selon une base totalement différente pour le mois de décembre; on y indique des soldes d’ouverture de zéro pour ces comptes. Soit quelque chose de tout à fait inexplicable est survenu à minuit, soit ces documents ne sont pas les véritables documents, soit ils n’ont pas été préparés lorsqu’ils étaient censés l’être, ou encore l’un ou plusieurs de ces documents sont manifestement incorrects.

 

[41]         En ce qui a trait aux fonds avancés par M. Cordes ou ses sociétés directement aux sociétés ou entreprises de M. et Mme Golden, je ne peux conclure qu’il s’agissait de prêts multiples consentis par l’entremise de M. Golden. Toutefois, les nouvelles cotisations doivent être révisées de sorte que soient reconnues ces avances, qui ont en réalité été consenties par M. Cordes ou ses sociétés à M. Golden personnellement, comme des éléments de passif additionnels de M. Golden et, lorsqu’elles sont utilisées dans les entreprises de M. et Mme Golden, comme des éléments d’actif additionnels.

 

 

V. M. Alf Skowron et les montants reçus de Propensity Properties Ltd.

 

[42]         M. Golden était conseiller municipal à Winnipeg. Un de ses principaux témoins, M. Alf Skowron, qui lui aurait prêté de l’argent, était lui aussi conseiller municipal à Winnipeg à l’époque.

 

[43]         M. Skowron a maintenant 75 ans. Il a témoigné de manière franche et directe. Toutefois, le souvenir de M. Skowron des événements d’il y a vingt ans s’est dans une large mesure estompé. Il a fréquemment répété le même refrain aux questions des deux avocats : [traduction] « je ne sais pas » et [traduction] « je ne me souviens pas ». Son témoignage ne m’a pas permis de conclure qu’il a déjà prêté de l’argent à M. Golden personnellement.

 

[44]         Je ne retiens pas l’idée que les montants versés directement ou indirectement par la société Propensity Properties de M. Skowron étaient des prêts consentis à M. Golden, y compris ceux versés à M. Golden. Les dossiers bancaires, financiers et fiscaux de Propensity Properties produits en preuve ne sauraient corroborer une telle affirmation.

 

[45]         La majorité des avances consenties par M. Skowron n’étaient pas destinées à M. Golden, mais plutôt aux sociétés exploitantes. Ces montants et les montants versés par chèque de M. Skowron à M. Golden ne semblent pas être des transactions de prêt. Il n’y avait aucune stipulation concernant le paiement d’intérêts et aucun intérêt n’a été payé; il n’y avait aucune stipulation concernant le remboursement du principal; et, chose étonnante, M. Skowron n’a jamais demandé d’être remboursé.

 

[46]         Selon le témoignage de M. Skowron, M. Golden était la seule personne à qui il prêtait de l’argent à de telles conditions. M. Skowron n’avait, à l’égard d’aucun de ces chèques, de souvenir de la fin à laquelle il devait servir. Selon le témoin, il suffisait simplement que M. Golden lui demande un chèque. La plupart du temps, M. Golden lui disait à quelle fin; parfois, il lui demandait seulement de lui laisser un chèque. Il ne pouvait expliquer pourquoi certains des chèques étaient censés être destinés au paiement d’intérêts sur un prêt ou le remboursement partiel ou total d’un prêt.

 

[47]         J’ai cessé de compter le nombre de fois que, en réponse à la question pourquoi des gens lui avaient prêté de l’argent, M. Golden a répondu [traduction] « parce que je lui ai demandé ». M. Cordes a également affirmé avoir donné des chèques à M. Golden [traduction] « parce qu’il me l’a demandé ». M. Skowron a ajouté dans la même veine [traduction] « il en avait besoin et je le lui ai donné ». M. Skowron a indiqué qu’il ne savait pas et n’avait pas besoin de savoir à quelle fin M. Golden allait utiliser ces sommes.

 

[48]         Durant son témoignage, M. Skowron a affirmé à plusieurs reprises qu’il avait effectué ces prêts parce qu’il avait apprécié le travail que M. Golden avait accompli pour lui relativement à la propriété sur Tenth Avenue qui appartenait à Propensity Properties qui, à son tour, appartenait à M. Skowron.

 

[49]         Ce qui est arrivé à l’édifice de M. Skowron sur Tenth Avenue n’est pas clair. Selon son témoignage, il a [traduction] « cédé l’édifice » à un moment donné, s’est désintéressé de cette propriété et n’a jamais pensé à demander à M. Golden de le rembourser. Le projet de réaménagement sur Tenth Avenue semble avoir été la seule activité de Propensity Properties.

 

[50]         Bien que je doive uniquement rechercher si les montants constituaient ou non des prêts, il est possible qu’il s’agissait de frais de services ou de participations aux profits. De toute manière, je ne suis pas parvenu à comprendre la nature de ces montants puisque M. Skowron avait payé 450 000 dollars pour la propriété sur Tenth Avenue et avait apparemment effectué d’importantes rénovations dont les coûts n’ont pas été produits en preuve. Quoi qu’il en soit, en clair, il est tout simplement impossible de croire que M. Skowron ait versé à M. Golden des paiements se chiffrant dans les centaines de milliers de dollars au moyen de ce qu’on pourrait qualifier au mieux de prêts non remboursables vu l’absence d’éléments de corroboration et de témoignages cohérents de la part de M. Golden et de M. Skowron concernant les montants relatifs à Propensity Properties.

 

[51]         Propensity Properties a aussi chargé M. Storey de la comptabilité durant les années en cause. M. Skowron a changé de comptable lorsque les manquements de M. Storey sur le plan de la conformité sont devenus une source de contrariétés. Les déclarations de revenus de Propensity Properties signalent un prêt de plus de 200 000 dollars à une certaine société Golden Hospitality and Convention, mais pas à M. Golden. En contre‑interrogatoire, M. Skowron a reconnu que les renseignements et documents utilisés par M. Storey pour la préparation des déclarations de revenus provenaient de M. Skowron, soit des renseignements qu’il conservait à son bureau chez lui. Selon M. Skowron, il ne savait rien de la société Golden Hospitality signalée dans les notes relatives aux états financiers jointes à la déclaration de revenus dont il avait confirmé l’exactitude.

 

[52]         M. Storey, comptable agréé à la retraite, avait également préparé les pièces comptables de la société Propensity Properties de M. Skowron durant les années en cause. Il a qualifié Propensity Properties de société dont les dossiers étaient tenus de manière méticuleuse. Selon les états financiers de Propensity Properties, la société avait accordé un prêt à la Golden Hospitality and Convention. Il s’agit de la même raison sociale que celle de la société à laquelle M. Storey croyait que sa société Vortex Management Ltd. avait prêté l’argent qu’elle avait emprunté de la RBC. Propensity Properties a inscrit le prêt comme consenti prêt à une des sociétés de M. Golden, celle qui exploitait Transcona Country Club. Propensity Properties ne l’a pas inscrit comme prêt consenti à M. Golden.

 

[53]         En ce qui a trait aux montants avancés par Propensity Properties, vu la preuve, je ne suis pas du tout convaincu qu’il s’agissait d’un prêt. De toute manière, s’il s’agissait d’un prêt, la preuve est maigre et insuffisante pour confirmer qu’il s’agissait d’un prêt consenti à M. Golden et non à une des sociétés de M. et Mme Golden qui exploitaient leurs entreprises. Quoi qu’il en soit, ces montants ne constituent pas un prêt consenti à M. Golden ou à Mme Golden.

 

 

VI. Les transactions financières avec M. Baranyk et Pratt’s Wholesale

 

[54]         Je ne sais pas vraiment pourquoi M. Baranyk, propriétaire et exploitant de Pratt’s Wholesale, a témoigné. Selon le témoignage de M. Golden, Pratt’s Wholesale avait également prêté de l’argent au Transcona Country Club. Pratt’s Wholesale était un des principaux fournisseurs de produits du tabac et de confiserie de Provincial Vending. L’entreprise appartenait à M. Baranyk, qui est comptable. D’après le témoignage de M. Golden, il se peut que M. Baranyk ait pris les titres de certains terrains du Transcona Country Club et les ait hypothéqués; toutefois, il n’a fourni aucun autre renseignement et n’a pas produit de document hypothécaire. Le témoignage de M. Golden et certains documents semblent aussi indiquer que Pratt’s Wholesale – je présume qu’il s’agit d’une société – était peut‑être une des sources de fonds ayant permis l’achat du St. Vital Hotel. Il semble que cela ait été effectué par l’entremise de Provincial Vending, qui a prêté l’argent au Transcona Recreation Centre, qui a pris le titre de l’hôtel; cependant, la situation n’était vraiment pas claire.

 

[55]         Quoi qu’il en soit, M. Baranyk a déclaré avoir avancé, durant la période de 1992 à 1994, 100 000 dollars à M. Golden pour l’achat de cent acres de terrain à Transcona, peut‑être adjacents au terrain de golf qui lui était adjacent au Transcona Country Club. Il a affirmé avoir obtenu un cautionnement de 150 000 dollars pour couvrir ce prêt de 100 000 dollars, ainsi que les sommes à recevoir de Provincial Vending.

 

[56]         Ni les documents liés au prêt ni les documents liés au cautionnement n’ont été produits en preuve, si bien que la Cour ne sait pas si le prêt a été consenti par M. Baranyk ou par Pratt’s Wholesale, si l’emprunteur était M. Golden, Provincial Vending ou une autre des sociétés de M. et Mme Golden associées au Transcona Country Club, ni si le cautionnement a été accordé par Provincial Vending ou une des sociétés du Transcona Country Club et/ou M. et Mme Golden à titre personnel.

 

[57]         Compte tenu du manque d’éléments de preuve se rapportant au prêt consenti par M. Baranyk ou Pratt’s Wholesale et au remboursement de ce prêt, notamment le manque d’éléments de corroboration écrits, je ne peux conclure que les contribuables se soient acquittés du fardeau de démontrer à la Cour, selon la prépondérance des probabilités, que les transactions avec M. Baranyk ou Pratt’s Wholesale sont incorrectement reflétées dans les nouvelles cotisations, dans la mesure où elles sont mêmes pertinentes.

 

 

VII. Les prêts multiples provenant de la Banque Royale

 

[58]         M. Gustal était directeur de la succursale de la RBC où M. Golden et ses sociétés avaient leurs comptes bancaires au moment où les prêts indirects destinés à M. Golden ont été effectués. Lorsque M. Gustal est entré en fonction à titre de directeur de succursale, M. Golden devait déjà plus de 400 000 dollars à celle-ci. M. Gustal a accordé un prêt-relais de 50 000 dollars  à M. Golden en attendant que ce dernier conclue une entente de refinancement auprès d’une autre institution financière.

 

[59]         Le témoignage de M. Gustal n’indique pas qu’il a approuvé d’autres prêts à M. Golden. Il a plutôt parlé des prêts accordés à d’autres personnes qui, M. Gustal le savait, prêteraient ensuite la somme à M. Golden. Il s’agissait d’amis, de parents et d’associés de M. Golden.

 

[60]         M. Gustal connaissait très bien M. Golden et ses entreprises. Il le rencontrait trois ou quatre fois par semaine à sa succursale, surtout parce que M. Golden avait toujours besoin d’argent. M. Gustal a également témoigné que les prêts déjà avancés à M. Golden étaient [traduction] « risqués » et que, bien que la succursale les aient été approuvés, la direction au centre‑ville ne les avait pas autorisés. Les prêts indirects étaient nécessaires parce que M. Gustal ne pouvait plus obtenir l’autorisation de la direction au centre‑ville pour consentir de nouveaux prêts à M. Golden ou à ses entreprises.

 

[61]         Pour faciliter ces transactions, M. Gustal accordait au nom de la RBC des prêts à des personnes solvables que M. Golden envoyait ou accompagnait à la succursale. Il a reconnu que cette façon de procéder n’était pas toute à fait correcte. Il a conféré avec chacun des emprunteurs et a accepté leurs déclarations d’état financier personnelles ainsi que leur demande de prêt. Il leur a dit qu’ils seraient entièrement responsables des prêts et que la banque prendrait des mesures contre eux si M. Golden ne remboursait pas la banque. Les prêts étaient uniquement productifs d’intérêts. Tous ces prêts ont été dûment autorisés conformément aux politiques de la RBC et les emprunteurs ont rempli des billets à ordre.

 

[62]         M. Gustal avait clairement compris que ce serait M. Golden qui rembourserait les prêts. Toutefois, il a constamment évité de répondre lorsqu’il lui a été demandé si, à sa connaissance, les emprunteurs le savaient, bien qu’il semble raisonnable de conclure qu’ils le savaient. Il ne pouvait se souvenir si M. Golden lui avait jamais dit pourquoi ses entreprises ou lui avaient besoin des sommes qui lui étaient prêtées par l’entremise de ces autres personnes. Il avait déjà conclu que les prêts de la RBC à M. Golden et à ses entreprises étaient risqués et qu’il ne serait pas possible d’obtenir l’autorisation de les majorer.

 

[63]         M. Gustal n’avait aucun souvenir au sujet des paiements effectués ou manqués se rapportant au remboursement de ces prêts, sauf que les intérêts étaient en général acquittés à temps sinon les prêts auraient été en souffrance.

 

[64]         Dans les circonstances, j’accorde peu de crédibilité au témoignage de M. Gustal pour ce qui est de savoir si les emprunteurs de la RBC ont par la suite prêté l’argent à M. Golden ou à une des entreprises de M. et Mme Golden. Aucun dossier bancaire n’a été produit en preuve par son entremise et aucun autre employé de la RBC n’a été appelé à témoigner à cette fin. M. Gustal a paru faire preuve d’une grande prudence dans son témoignage concernant les prêts indirects et M. Golden. Il a reconnu ne pas avoir procédé correctement. Il y avait des incohérences dans son témoignage et beaucoup d’imprécision. Certaines de ces incohérences étaient trompeuses. Il se souvenait peu de ces prêts, mais était certain qu’ils avaient été accordés de manière entièrement conforme aux exigences de la banque, bien qu’il ait reconnu avoir procédé de manière incorrecte.

 

[65]         M. Gustal a quitté la banque et a pris une [traduction] « retraite anticipée » de la RBC peu après l’approbation des prêts, bien qu’il ait continué de travailler pendant encore quinze années. Il a pris sa retraite en décembre 1989, mais les négociations se rapportant à son départ se sont prolongées jusqu’en avril 1990. Entre 1952 et sa retraite, il avait été à l’emploi de la banque pendant la majeure partie du temps.

 

[66]         Tous les prêts en cause consentis par la RBC ont fait l’objet d’un règlement à l’amiable entre la RBC, les emprunteurs et M. et Mme Golden et certaines de leurs sociétés. M. Gustal n’était aucunement au courant du règlement à l’amiable de la RBC étant donné que ce règlement est survenu après son départ. Il y a eu peu d’éléments de preuve concernant le règlement à l’amiable de la RBC. On a laissé entendre que les sommes due à la RBC avaient été remboursées avec des sommes empruntées. Aucun élément de preuve n’a été produit quant à la source de cet emprunt.

 

[67]         Je conclus qu’il manque beaucoup d’éléments de preuve concernant les prêts de la RBC. Il convient de signaler que le contribuable n’a appelé aucun autre témoin de la RBC à part M. Gustal et, à l’exception d’un document, il n’a produit aucune demande de prêt ou autre document de la RBC. Bien que M. Gustal ait témoigné, il est clair que celui‑ci accordait des prêts de manière peu conventionnelle, voire non autorisée, au nom de la RBC. Il l’a d’ailleurs reconnu dans son témoignage. Par conséquent, je me retrouve sans éléments de corroboration de la part du prêteur, la RBC, pour ce qui est de ses dossiers liés à la relation emprunteur‑prêteur ou de l’utilisation prévue des fonds empruntés. Aucun employé de la RBC n’a été appelé pour attester que la RBC ne détenait plus de tels dossiers.

 

[68]         Au mieux, ces prêts sont exactement ce qu’ils sont censés être : des prêts consentis par la RBC à des particuliers ou des sociétés autres que M. et Mme Golden ou une de leurs sociétés. Il reste à vérifier si ces associés et collègues de M. Golden ont ensuite prêté des sommes à M. Golden ou aux sociétés de M. et Mme Golden. M. Gustal ne savait pas si les prêts consentis aux tiers avaient bel et bien été avancés par la suite, à qui ils auraient été avancés ni s’ils avaient été remboursés.

 

[69]         Bien que les prêts accordés par la RBC avaient en commun les caractéristiques signalées ci‑dessus, il faut les examiner un par un. Une différence importante est que certains de ces prêts ont été consentis par des personnes qui n’avaient aucun lien financier avec M. Golden et ses entreprises tandis que d’autres, tels que M. Salvaggio et M. Katz, effectuaient depuis longtemps et continuaient d’effectuer des transactions financières, y compris des avances de fonds, avec M. Golden et ses entreprises. En ce qui a trait à ce deuxième groupe, il m’est plus difficile de conclure que les sommes échangées entre ces personnes et M. Golden et ses sociétés provenaient des prêts de la RBC ou constituaient des avances de fonds à M. Golden ou à ses sociétés puisées dans les prêts de la RBC.

 

[70]         Il y a manifestement des éléments de preuve tendantt à indiquer que des tiers ont accordé un certain nombre de prêts soit à M. Golden soit à ses sociétés durant la période en cause. Il semble également qu’au moins une partie de ces fonds ait été avancée à M. Golden et qu’elle ait ensuite été acheminée de M. Golden à ses entreprises. Selon l’explication et les éléments de preuve produits par le contribuable, bien que la plupart des fonds aient été avancés directement des tiers aux entreprises, cela s’est fait à la demande non écrite de M. Golden, chacun sachant que c’était M. Golden qui empruntait les fonds et qui le prêtait à son tour à ses sociétés. Si tel est le cas, les prêts de ces tiers se sont ajoutés au passif de M. Golden et de Mme Golden et, dans la mesure où ces sommes étaient la source de ce que l’ARC a ajouté à leur actif à cause des prêts d’actionnaires qui leur étaient dus selon les livres, dossiers et états financiers de leurs sociétés, ces prêts constituent une compensation réduisant d’une somme rigoureusement équivalente l’actif des prêts d’actionnaires.

 

[71]         Une autre interprétation de la preuve serait que les fonds empruntés de la RBC et avancés directement par les tiers aux entreprises de M. Golden étaient en fait des prêts à ses sociétés et entreprises, et que ces fonds ne leur ont pas été acheminés dans le cadre de prêts multiples dont M. Golden aurait été l’intermédiaire. Dans ce cas, cela nous mène à douter sérieusement de l’exactitude de la valeur de l’actif inscrite au tableau de l’ARC pour les prêts d’actionnaires puisque, dans une telle situation, il serait inapproprié d’attribuer une charge décaissée à M. Golden relativement à une somme à recevoir de l’actionnaire si, en fait, il n’a pas avancé les fonds. Par exemple, en ce qui concerne Provincial Vending, le comptable de la société, avec le consentement de M. Golden, a inscrit tous les montants ne se rapportant pas aux activités de Provincial Vending à titre d’avances provenant de M. Golden, quelle qu’ait été leur source, ou à titre de remboursements de ces avances, quels qu’aient été leurs destinataires.

 

[72]         D’une manière ou d’une autre, dans la mesure où je retiens l’idée que les montants ont été prêtés directement ou indirectement aux entreprises de M. Golden par des tiers, ou bien l’évaluation de son actif est trop élevée, ou bien l’évaluation de son passif n’est pas assez élevée.

 

[73]         Je ne retiens pas la thèse que tous les fonds empruntés de la RBC aient été soit des prêts à M. Golden devant être acheminés à ses entreprises, soit des prêts directs à ses entreprises. Plus précisément, je ne peux conclure selon la prépondérance des probabilités qu’on m’a produit des explications satisfaisantes concernant les sommes liées à M. Katz ou à M. Salvaggio. Ces personnes effectuaient d’autres transactions importantes avec M. Golden et ses entreprises, et les pièces qui auraient été convaincantes n’existent tout simplement pas ou n’ont pas été produites en preuve.

 

[74]         En ce qui concerne les fonds empruntés à la RBC et avancés par la société Vortex Management de M. Storey, par M. Alegro, par M. Nyborg et par la société à numéro au nom des enfants de M. et Mme Golden, c’est‑à‑dire les situations où ces avances de fonds étaient les seules transactions financières importantes avec M. Golden, je conclus que s’imposant des rajustements en faveur du contribuable afin qu’il soit tenu compte des montants prêtés initialement par la RBC à ces personnes, mais seulement lorsqu’il y a des preuves documentaires corroborant que le même montant a par la suite été prêté à M. Golden ou à ses sociétés.

 

[75]         Bien qu’il soit possible que, dans certaines circonstances, la création d’un compte de prêts d’actionnaires contenant un montant supérieur aux avances de fonds provenant des actionnaires sera un événement imposable, en l’espèce il ne serait pas approprié de le traiter comme un actif de valeur à son montant nominal aux fins d’une cotisation de valeur nette des actionnaires. La somme en question, si la dette ne découle pas de prêts multiples dont M. Golden était l’intermédiaire, n’a jamais été acheminée par leur entremise et ne leur était pas destinée. Cette somme est passée de la RBC au tiers qui l’a ensuite prêtée à la société, et elle a servi aux activités de l’entreprise. Par conséquent, lorsque le ministre soutient que les prêts provenant de la RBC constituaient des prêts directs aux sociétés de M. et Mme Golden, il faut y mettre un bémol, car il n’y avait pas d’actif de valeur d’un montant équivalent appartenant aux actionnaires. Les actionnaires n’ont pas financé ces avances de fonds et il n’y a pas de raison de penser qu’elles valaient leur montant nominal. Il faudra apporter de tels rajustements aux calculs de la valeur nette sur lesquels reposent les cotisations. Ils seront importants et seront favorables aux contribuables. Il faudra apporter un rajustement similaire relativement aux prêts consentis par M. Cordes et ses sociétés directement aux sociétés ou entreprises de M. et Mme Golden.

 

[76]         La jurisprudence invoquée par la Couronne relativement aux prêts d’actionnaires n’est pas entièrement pertinente. Elle ne portait pas toujours sur des cotisations de valeur nette ou des sociétés ayant des problèmes financiers; elle avait plutôt trait au moment de la comptabilisation. Surtout, dans les deux affaires qui avaient trait à des cotisations de valeur nette, les fonds avancés à la société à titre de prêts d’actionnaires étaient des fonds de la société elle‑même. Dans le cas de M. et Mme Golden, selon la thèse de la Couronne, il n’y a pas eu d’avances de fonds ou de paiements relativement aux comptes de prêts d’actionnaires. Il s’agissait seulement d’inscriptions qui n’ont rien coûté à M. et Mme Golden, et il semble que ces sommes aient servi aux activités des entreprises et qu’elles n’aient pas été retirées ou utilisées à des fins personnelles.

 

 

VIII. Les transactions financières effectuées avec M. Salvaggio

 

[77]         M. Salvaggio a collaboré avec M. et Mme Golden au Transcona Country Club et au Riverside Inn après son acquisition à titre de gérant. Il a par la suite acheté des parts de la société qui est propriétaire du Riverside Inn de Mme Golden, pour une somme symbolique.

 

[78]         M. Salvaggio a emprunté des fonds de la RBC afin de les [traduction] « prêter à M. Golden pour le Transcona Country Club ». Il a par la suite qualifié une dette de 28 000 dollars à la RBC de [traduction] « prêt destiné au Transcona Country Club ». J’ai noté que M. Salvaggio avait rattaché le prêt au Transcona Country Club bien que, dans la question posée, l’avocate des contribuables ait indiqué que le prêt était destiné à M. Golden.

 

[79]         Le seul élément de preuve écrit se rapportant à ce prêt est le billet à ordre payable sur demande de M. Salvaggio à la RBC, qui ne précise pas l’emploi, par M. Salvaggio, des fonds empruntés.

 

[80]         En ce qui concerne le prêt de la RBC, M. Salvaggio a indiqué qu’il n’avait été qu’un simple « prête-nom ». M. Salvaggio n’avait aucune intention de le rembourser lui‑même. Il était prévu que M. Golden le rembourserait et lorsque M. Golden n’a pas effectué les paiements, des employés de la banque ont téléphoné à M. Salvaggio pour exiger ces paiements. M. Salvaggio n’a effectué aucun paiement.

 

[81]         Le témoignage de M. Salvaggio, ajouté aux autres témoignages et éléments de preuve, ne suffit pas à établir que ses prêts avaient été consentis à M. Golden personnellement, qui devait ensuite prêter l’argent aux sociétés du Transcona Country Club.

 

[82]         Les appelants ont soulevé une question distincte de celle du prêt de M. Salvaggio provenant de la RBC, au sujet d’une créance de 108 000 dollars de M. Salvaggio que l’ARC a assimilé à un actif de M. Golden. M. Salvaggio a reconnu en partie – et cela était clair à mon esprit – qu’il comprenait mal et ne savait expliquer comment son compte personnel avait servi aux mouvements de la trésorerie du Riverside Inn. M. Salvaggio était le propriétaire de l’hôtel, l’ayant acquis de Mme Golden en achetant des parts pour une somme symbolique, mais M. Golden en demeurait le cerveau dirigeant et, même si son épouse et lui n’avaient plus de capitaux propres ou d’intérêts débiteurs se rapportant à l’hôtel, il a continué d’y travailler très fort. Il semble que M. Salvaggio ait continué de travailler à titre de gérant de bar même après son acquisition de l’hôtel.

 

[83]         Même si des sommes considérables ont été sorties du compte de M. Salvaggio au profit du Riverside Inn, la preuve ne me convainc pas qu’il s’agissait probablement du remboursement de sommes versées dans son compte provenant de l’hôtel. De plus, à l’inverse, la preuve ne me convainc pas que les fonds étaient versés dans son compte à titre de remboursements des sommes qu’il avait avancées à l’hôtel.

 

[84]         Bien qu’il soit possible que les cotisations soient erronées à cet égard, le fait que M. Golden et M. Salvaggio n’aient pas été en mesure de me convaincre que leur version est plus probable que les suppositions de l’ARC est le fruit direct de facteurs découlant de leurs propres choix, notamment l’utilisation d’un compte personnel dans la gestion d’une entreprise où les mouvements de trésorerie sont considérables et l’omission de tenir des dossiers adéquats. Les déclarations non étayées et non documentées de M. Salvaggio sont insuffisantes.

 

[85]         Je ne sais pas vraiment à quoi correspondaient ces montants importants qui étaient versés dans le compte bancaire de M. Salvaggio et qui étaient ensuite versés du compte de ce dernier au compte de l’hôtel. Il y a un grand nombre d’explications possibles qui seraient compatibles avec le peu d’éléments de preuve limités dont nous disposons à cet égard. Étonnamment, M. Golden avait peu à dire durant son témoignage concernant les transactions du Riverside Inn mettant en jeu le compte bancaire personnel de M. Salvaggio. Rien n’indique que M. Salvaggio avait d’autres sources de revenus qui expliqueraient ces dépôts.

 

[86]         M. Bailey de l’ARC a conclu qu’il ne pouvait établir la source des dépôts versés au compte de M. Salvaggio, et il a exclu que le Riverside Inn ait pu être une source de fonds. À ce moment‑là, l’ARC disposait des dossiers commerciaux et bancaires du Riverside Inn, du Comedy Oasis, du Transcona Country Club, de M. et Mme Golden et d’autres personnes, dont M. Salvaggio.

 

[87]         Les 108 000 dollars ne reflétaient que les montants en espèces déposés dans le compte de M. Salvaggio. Ces dépôts incluaient un dépôt de 1 600 dollars effectué par Ken Golden, qui s’occupait de l’entreprise Provincial Vending, dont 500 dollars en monnaie. Un autre dépôt était constitué de cent billets de 100 dollars; M. Salvaggio a reconnu que le Riverside Inn n’aurait pas accumulé cent billets de 100 dollars depuis très longtemps. D’une manière ou d’une autre, des fonds provenant de M. et Mme Golden et de leurs entreprises ont été déposés en espèces dans le compte de M. Salvaggio. La cotisation de valeur nette de l’ARC a assimilé la somme à un prêt ou une avance de M. Golden à M. Salvaggio. À l’époque, M. Golden avait signé l’entente d’achat visant l’hôtel, mais l’hôtel n’a pas fermé et M. Golden ou sa société exploitait l’hôtel avant sa fermeture aux termes d’une entente provisoire avec le vendeur. Cette entente n’a pas été produite en preuve. Si M. Golden l’exploitait directement, il est la personne ayant droit aux recettes des activités du Riverside Inn et il serait tout à fait raisonnable de supposer que les transactions liées à M. Salvaggio étaient des prêts ou des avances de fonds de M. Golden directement à M. Salvaggio. Même si une des sociétés de M. Golden, constituée en personne morale à peu près à la même époque pour l’acquisition de l’hôtel, exploitait celui-ci en vertu de l’entente provisoire, rien n’empêchait le ministre de supposer que les transactions liées à M. Salvaggio constituaient des distributions à M. Golden ou des attributions par ce dernier des fonds de la société que M. Golden a, à son tour, prêtés ou avancés à M. Salvaggio.

 

[88]         Selon le témoignage de M. Salvaggio, il était courant que son compte serve aux activités du Riverside Inn avant et après la période visée par le tableau de l’ARC, qui portait sur une période de quatre mois de dépôts en espèces importants constatés par l’ARC. Le contribuable n’a présenté aucun élément de corroboration à l’appui de cette affirmation. Par contre, M. Bailey a indiqué que son tableau ne rendait compte que de ces quatre mois parce que, à la suite de son examen des dossiers bancaires de M. Salvaggio, il s’agissait de la seule période comportant d’importantes transactions financières.

 

[89]         Le contribuable ne s’est pas acquitté de son fardeau, compte tenu du peu d’éléments de preuve qu’il a présentés, soit principalement le témoignage de M. Salvaggio dont l’aptitude à décrire les facettes financières de son apport à la gestion des bars et de l’auberge qu’il gérait était très limitée. J’ai pris en considération le fait que des montants plus élevés avaient été retirés du compte de M. Salvaggio au moyen de chèques ou de transferts au Riverside Inn. À la lumière des éléments de preuve, je ne peux raisonnablement conclure, selon la prépondérance des probabilités, que ces montants constituaient le remboursement ou le retour de fonds reçus par M. Salvaggio. Je ne suis pas certain que le chiffre de 108 000 dollars associé aux transactions avec M. Salvaggio soit exact, et il pourrait être raisonnable à mon avis de penser que certaines des transactions transférant des fonds du compte de M. Salvaggio au Riverside Inn devraient réduire ce chiffre d’une manière ou d’une autre, mais on ne m’a tout simplement pas donné les outils qui m’auraient permis d’estimer ce qui constituerait un montant approprié.

 

[90]         Je m’attendais à ce qu’on me présente des éléments de preuve dignes de foi au sujet des fonds avancés à M. Salvaggio, pour que je conclue que ces fonds n’avaient pas été prêtés par M. Golden ou que les montants transférés du compte de M. Salvaggio au Riverside Inn étaient des remboursements d’un prêt consenti par M. et Mme Golden ou une de leurs sociétés. Le témoignage de M. Salvaggio à lui seul était tout simplement insuffisant, d’autant plus que M. Golden est demeuré muet à ce sujet dans son témoignage.

 

[91]         Il se peut très bien qu’il y ait une explication générale susceptible de me faire comprendre ces transactions et qui aiderait les contribuables à s’acquitter de leur fardeau, mais ils ont choisi de ne pas m’en faire part. Compte tenu des témoignages contradictoires, de l’absence d’éléments de corroboration et de l’insuffisance du témoignage de M. Salvaggio, les contribuables ne se sont pas acquittés de ce fardeau. Je ne suis pas en mesure de conclure que la description ou l’évaluation quantitative de l’ARC est inexacte.

 

[92]         Aucune modification n’est exigée aux nouvelles cotisations en ce qui concerne les avances de fonds de M. Salvaggio provenant de la RBC ou la créance de 108 000 dollars découlant des dépôts dans son compte.

 

 

IX. M. Storey et Vortex Management Ltd.

 

[93]         M. Storey est comptable agréé; à divers moments, il été au service de M. Golden à titre de comptable ou de conseiller en comptabilité. Il avait pris sa retraite avant les années en cause et, par conséquent, il n’a joué qu’un rôle mineur relativement au Transcona Country Club, à Provincial Vending et à Rubin’s Deli.

 

[94]         D’après les dires de M. Storey, le Transcona Country Club était une entreprise où l’argent venait et partait, et il n’était pas évident de savoir d’où cet argent venait et où il s’en allait, si bien qu’il devait conférer avec quelqu’un pour tenter de tout décortiquer. Il a indiqué que ce n’était pas un problème épouvantable, mais qu’il fallait y revenir régulièrement avec M. et Mme Golden. Il avait donné des conseils à cet effet au comptable du Transcona Country Club qui lui a succédé, M. Simpson, notamment en ce qui concerne ce qu’il a qualifié de comptes d’attente, où l’on plaçait les sommes reçues et paiements non identifiables en attendant d’être en mesure de les ordonner. M. Storey a confirmé que le Transcona Country Club était sous‑capitalisé et avait des problèmes de liquidités, comme bon nombre des autres entreprises de M. Golden.

 

[95]         M. Storey a décrit la mise en ordre des inscriptions aux comptes d’attente pour ce qui est des avances de fonds aux entreprises. En théorie, elles devaient figurer à titre de dette de la société à quiconque a prêté ou avancé les fonds. Toutefois, il pensait que [traduction] « l’esprit » de la démarche était que M. Golden empruntait l’argent, puis le prêtait à la société, si bien que c’est ainsi que cela devait paraître. La pertinence du témoignage de M. Storey est très faible puisqu’il avait très peu travaillé pour les sociétés de M. et Mme Golden durant les années en cause.

 

[96]         M. Storey a produit des renseignements sur le prêt consenti à Vortex Management par la RBC par l’entremise de M. Gustal. Apparemment, la RBC a prêté environ 80 000 dollars à Vortex même si cette dernière disposait d’une marge de crédit de seulement cinq à dix mille dollars à la banque. C’est M. Gustal, et non M. Golden, qui a demandé à M. Storey d’emprunter des fonds pour aider M. Golden à faire face à sa crise financière, laquelle devait donner lieu à un refinancement peu après. M. Storey a, semble‑t‑il, pris des mesures pour que Vortex emprunte les fonds et accorde le prêt sans jamais en parler à M. Golden. D’après les états financiers de valeur nette de Vortex, l’emprunt à la RBC constituait la presque totalité de ses dettes et le prêt consenti à Golden Hospitality and Convention Services Limited constituait pour ainsi dire son unique actif. Vortex a inscrit le prêt comme ayant été accordé à une des sociétés de M. Golden. En fait, il n’existe pas de société ainsi dénommée. Toutefois, à la lumière du témoignage et des documents de M. Storey, je conclus qu’il s’agissait d’un prêt destiné à une des sociétés chargées des activités du Transcona Country Club ou à l’entreprise hôtelière, et non un prêt destiné à M. Golden personnellement.

 

[97]         Étant donné que le prêt de Vortex Management n’était pas destiné à M. Golden personnellement, cela n’appelle aucun rajustement des calculs de la valeur nette se rapportant à ce prêt, sauf dans la mesure où l’ARC a augmenté l’actif de M. Golden d’une somme équivalente.

 

 

X. Le maire Sam Katz

 

[98]         M. Sam Katz est présentement le maire de la ville de Winnipeg. Il a rencontré M. Golden au milieu des années 1970 et a emprunté des fonds pour une ou plusieurs des entreprises de M. Golden à la fin des années 1980; selon M. Katz, ces prêts avaient été « arrangés » par la RBC. M. Golden a demandé à M. Katz d’emprunter à la RBC pour lui avancer les fonds nécessaires à l’achat d’une réserve de bière pour le Riverside Inn avant que le fournisseur ne hausse ses prix. M. Katz a affirmé que ces fonds ont été transmis au Riverside Inn et qu’il avait compris qu’ils seraient remboursés par cette entreprise. Il n’avait fait que se rendre à la banque et signer la documentation se rapportant au prêt qu’on lui avait accordé. Selon M. Katz, aux termes du règlement à l’amiable, il avait remboursé la somme à la RBC. M. Katz a clairement témoigné qu’il avait avancé les 75 000 dollars qu’il avait empruntés de la RBC au Riverside Inn. Il n’a pas précisé ce qu’il entendait par « Riverside Inn », mais il n’a non plus produit aucun élément de preuve indiquant qu’il avait avancé les fonds à M. Golden pour que ce dernier les avance à son tour à la société qui exploitait le Riverside Inn. Aucun rajustement n’est requis en ce qui concerne les calculs de la valeur nette de l’ARC se rapportant à l’avance de fonds par le maire Katz financée par la RBC.

 

[99]         Outre l’avance de fonds financée par la RBC, le maire Katz a avancé plus de 122 000 dollars. Le contribuable soutient qu’à la lumière du peu d’éléments de preuve se rapportant à l’avance de fonds de 122 000 dollars faite par le maire Katz, à distinguer de l’avance de fonds provenant de la RBC, il est tout aussi possible que cette avance de fonds ait eu lieu en 1989 qu’en 1988. Étant donné qu’il est clair que M. Katz pensait que ces fonds devaient servir en partie à la rénovation de l’hôtel, et que la rénovation de l’hôtel a commencé lorsque M. Golden a acquis les droits d’exploitation de l’hôtel en 1988, je ne saurais conclure que le montant n’a pas été avancé en 1988 ou même avant. De plus, je ne suis pas convaincu que l’ensemble de la somme a nécessairement été consacré à l’hôtel. Je suis loin d’être certain que le montant a même été aussi élevé qu’on l’indique et qu’il n’y a pas eu de double comptabilisation avec le prêt de M. Katz financé par la RBC. Quoi qu’il en soit, cela n’a aucune conséquence. Étant donné que le prêt de 122 000 dollars était une dette à la fin de 1988 et demeurait une dette en 1989, 1990 et 1991, soit les trois années d’imposition en cause, cela n’aura aucune incidence sur les cotisations de valeur nette.

 

 

XI. M. Gino Alegro

 

[100]     M. Alegro a témoigné au sujet du prêt indirect de 100 000 dollars qu’il avait obtenu de la RBC à la demande de M. Golden. Dans la lettre remise à M. Alegro par M. et Mme Golden garantissant le remboursement du prêt effectué grâce au prêt accordé par la RBC, il est clairement indiqué que M. Alegro utilisait ces fonds comme un placement par emprunt, qu’il pourrait convertir en capitaux propres de la société Transcona Recreation Centre Limited, qui était la propriétaire des biens réels du Transcona Country Club. Cette lettre a été préparée à l’époque à la demande de M. Alegro, qui voulait s’assurer qu’il serait remboursé. Elle comporte les garanties personnelles de M. et Mme Golden visant le remboursement de la dette.

 

[101]     Tout en reconnaissant que les avances de fonds ont eu lieu il y a près de vingt ans, je conclus néanmoins que, dans son témoignage et son souvenir des événements, je me serais attendu, de la part de M. Alegro, à un témoignage plus éloquent. On s’attendrait normalement à ce que la réception d’une demande de remboursement de plus de 100 000 dollars provenant d’un important cabinet d’avocats au service d’une banque majeure ferait partie d’une saga dont une personne se souviendrait. Durant son interrogatoire principal, M. Alegro a affirmé que, en ce qui concerne ses rapports avec la RBC, relativement à ce prêt, il s’était bonné à prendre des dispositions à cet égard, à recevoir les appels de la RBC lui signalant le retard dans les remboursements (M. Alegro a alors téléphoné à M. Golden qui a directement effectué les remboursements en souffrance), puis de signer le règlement à l’amiable (il n’avait pas participé à la négociation de ce règlement). En contre‑interrogatoire, lorsqu’on lui a présenté un chèque d’environ 4 000 dollars du Transcona Country Club, il a indiqué qu’à son avis il s’agissait probablement du remboursement de sommes qu’il avait payées à la banque relativement au prêt en souffrance. De plus, en contre‑interrogatoire, il a confirmé n’avoir eu aucune autre communication avec la banque concernant le prêt, à part les appels téléphoniques concernant les paiements en retard. Lorsque l’avocat de la Couronne lui a montré la demande de remboursement que lui avait adressée les avocats de la banque, exigeant le remboursement de 105 000 dollars plus les intérêts à échoir dans un délai de 30 jours, M. Alegro s’est soudainement rappelé avoir reçu cette lettre et s’est clairement souvenu d’avoir immédiatement téléphoné à M. Golden.

 

[102]     Bien que dans son témoignage M. Alegro ait affirmé que les fonds empruntés de la RBC ont été immédiatement transférés au compte de M. Golden, je conclus que cette affirmation est inexacte et que M. Alegro a en fait prêté les fonds à une des sociétés qui possédait ou exploitait le Transcona Country Club. Il convient de noter que le Transcona Country Club Limited, auquel on renvoie dans la lettre attestant du prêt, n’existe pas. Il y avait le Transcona Recreation Centre Ltd. et les Golden Sports Recreation et Convention Services Ltd. J’interprète le renvoi au Transcona Country Club Ltd. comme étant un renvoi à une de ces deux sociétés.

 

[103]     Les calculs de la valeur nette ayant servi à l’établissement des cotisations ne devraient pas considérer, malgré ce que soutiennent les contribuables, que M. Alegro a effectué un prêt à M. Golden personnellement. Toutefois, ils ne devraient pas non plus inclure à titre d’actif de l’un ou de l’autre des contribuables un prêt d’actionnaire connexe accordé à une des sociétés de M. et Mme Golden, étant donné que le prêt était une dette devant être remboursée à M. Alegro.

 

 

XII. M. Eric Nyborg

 

[104]     M. Nyborg était le directeur du Transcona Country Club. En ce qui concerne son avance de fonds financée par la RBC, je conclus, selon la prépondérance des probabilités, qu’il a emprunté les fonds de la RBC et qu’il les a ensuite prêtés à M. Golden ou à ses sociétés. Toutefois, étant donné que cette somme a servi au refinancement d’autres prêts accordés par des tiers, elle n’aura aucune incidence sur le montant des nouvelles cotisations.

 

 

XIII. 71839 Manitoba Ltd.

 

[105]     Cette société à numéro a été créée au profit des enfants mineurs de M. et Mme Golden. Elle a emprunté des fonds de la RBC en tirant parti de son découvert autorisé. Les fonds empruntés ont servi à une des entreprises de M. et Mme Golden et ont été remboursés dans le cadre d’un des refinancements. Toutefois, je ne dispose pas d’éléments de preuve suffisants pour conclure, selon la prépondérance des probabilités, que les cotisations de valeur nette préparées par l’ARC ne tiennent pas compte correctement des transactions financières de M. et Mme Golden avec cette société.

 

XIV. Le financement au moyen de l’hypothèque du Counsel Trust

 

[106]     Tous les fonds obtenus au moyen de l’hypothèque d’un million de dollars consentie par Counsel Trust sur le Transcona Country Club qui ont été avancés, soit quelque 850 000 dollars, ont été déposés dans le compte bancaire de M. Golden. Ils n’ont pas été déposés dans le compte bancaire du Transcona Country Club. Faits plus importants encore, ces fonds n’ont jamais été inscrits aux états financiers du Transcona Country Club ni été versés dans son compte bancaire. Bien qu’une grande partie de ces fonds semble avoir été investie dans les entreprises ou utilisée pour le refinancement de la dette des entreprises existantes, même après la reconstitution des événements par les enquêteurs de l’ARC qui a pris des années, M. et Mme Golden et leurs conseillers, certains montants semblent avoir « collé » à M. et Mme Golden.

 

[107]     Effectué au moyen de l’hypothèque du Counsel Trust, le remboursement du découvert de 30 000 dollars au compte personnel de M. Golden, qui a servi tout au long à des fins commerciales et personnelles, ne semble pas avoir été comptabilisé correctement dans les nouvelles cotisations.

 

[108]     La majeure partie de la somme tirée de cette hypothèque a en fait été déposée dans ce même compte. L’ARC a établi à sa satisfaction que la totalité de la somme déposée dans ce compte, à l’exception de 30 000 dollars, a servi à des fins commerciales, au moyen de chèques écrits après le dépôt de la somme. Après l’encaissement de ces chèques, le compte avait un solde nul. Avant le dépôt des fonds obtenus grâce à l’hypothèque, le compte avait un découvert de 30 000 dollars. Selon le calcul de la valeur nette effectué par l’ARC, les fonds avaient été utilisés à des fins personnelles puisque le compte était au nom de M. Golden. Toutefois, étant donné que ce dernier se servait du compte à des fins personnelles et commerciales, s’il est possible de retracer ou d’assigner les dépenses qui ont entraîné le découvert durant la brève période avant le dépôt des fonds obtenus grâce à l’hypothèque, il faudrait le faire. En principe, il n’y a aucune raison de traiter une dépense à des fins commerciales tirée de ce compte et ayant contribué au découvert d’une manière différente que tout autre chèque tiré sur ce compte après le dépôt de l’hypothèque. Les mêmes principes doivent sûrement être suivis. Les fonds obtenus de l’hypothèque du Counsel Trust ont servi au financement des deux, bien que toute dépense initialement financée au moyen du découvert était financée par la RBC (étant donné qu’il s’agissait d’un compte de la RBC) et peu après refinancée au moyen de l’hypothèque du Counsel Trust. L’ARC n’a pas pris cette mesure additionnelle pour tenter de vérifier si les dépenses ayant entraîné le découvert étaient personnelles ou commerciales. Après examen des dossiers bancaires mis à la disposition de l’ARC et produits en preuve par les contribuables, je conclus qu’une partie de ce découvert résultait directement de dépenses commerciales effectuées au moyen du compte de la RBC. Il faut réviser les calculs et tableaux de la valeur nette de l’ARC de manière à ce qu’il soit tenu compte de ces dépenses.

 

[109]     Selon les documents produits en preuve, il est possible de retracer, parmi les dépenses qui ont donné lieu au découvert de 30 000 dollars, au moins quelques‑unes des dépenses engagées pour les entreprises de M. et Mme Golden et non à des fins personnelles. Cela inclut les chèques à la ville de Winnipeg et à l’institution financière. Toutefois, je ne suis pas convaincu à la lumière de la preuve que les chèques au Transcona Country Club et au Riverside Inn, qui constituent une partie importante du découvert, visaient des fins commerciales même si M. Golden les a faits à l’ordre du Transcona Country Club et du Riverside Inn. Rien n’est inscrit à la ligne de renvoi, bien que sur certains de ses chèques à ces entreprises, il a inscrit sur la ligne de renvoi qu’il s’agissait de prêts. De plus, il y a beaucoup trop de doutes suscités par la circulation constante de fonds entre les entités de M. et Mme Golden pour que je puisse conclure qu’il faille supposer que l’argent versé par M. Golden à ses sociétés ou entreprises a servi à des fins commerciales. Le contribuable n’a pas produit d’éléments de preuve ne serait‑ce que pour tenter de rattacher ces montants au paiement de dépenses d’affaires par le Transcona Country Club et le Riverside Inn.

 

[110]     Il faudra revoir sur le même fondement les calculs de la valeur nette se rapportant à la déductibilité de l’intérêt sur le découvert.

 

 

XV. Les achats chez Multi‑Tech

 

[111]     Les montants attestés par les reçus de ventes de Multi‑Tech doivent être acceptés à titre de dépenses d’entreprise. M. Golden a expliqué de manière satisfaisante l’utilisation d’une quantité importante de matériel audio et vidéo haut de gamme au Transcona Country Club, au Riverside Inn et, en particulier, au Comedy Oasis à l’intérieur du Riverside Inn.

 

 

XVI. Les fourgonnettes de Mme Golden

 

[112]     En ce qui concerne les fourgonnettes, dont la valeur a été incluse dans les revenus à titre d’attributions, je ne peux conclure, à la lumière des témoignages de M. et Mme Golden, qu’elles servaient uniquement aux fins de leurs entreprises. Toutefois, un certain rajustement s’impose pour qu’il soit tenu compte du financement d’un de ces véhicules.

 

[113]     Les deux fourgonnettes en question étaient immatriculées au nom de Mme Golden, et non à celui du Transcona Country Club. Elles étaient assurées au nom de Mme Golden, mais il n’y aucun élément de preuve indiquant qu’elle ait divulgué qu’elles devaient servir à des fins commerciales. Il n’y a aucune preuve que le nom du Transcona Country Club ou de toute autre entreprise ait été apposé sur ces fourgonnettes. Les deux figuraient dans les inscriptions comptables sous le titre de [traduction] « Fourgonnette de Mme Golden ».

 

[114]     Je retiens la version des événements avancée par M. et Mme Golden selon laquelle celle-ci se servait souvent des fourgonnettes pour transporter plusieurs centaines de nappes et d’articles connexes entre le Country Club et son domicile, pour les laver et les raccommoder elle‑même. Il y avait peu d’indices indiquant que d’autres personnes aient utilisé les fourgonnettes pendant la journée, lorsqu’elles se trouvaient au Transcona Country Club. Les fourgonnettes étaient ramenées par Mme Golden chez elle à la fin de chaque journée et elles passaient chaque nuit dans l’entrée de cour des Golden.

 

[115]     La preuve se rapportant aux autres véhicules de M. et Mme Golden, une Lincoln 1979 et une Dodge 1950, ne me fait pas changer d’idée. Selon le témoignage de M. Golden, Mme Golden conduisait la Lincoln et il conduisait souvent la Dodge. Selon Mme Golden, M. Golden se servait de la Lincoln pour se rendre au Transcona Country Club et ailleurs, tandis qu’elle prenait la fourgonnette. Je retiens la version de Mme Golden et conclus que celle de M. Golden était tendancieuse.

 

[116]     En ce qui a trait aux fourgonnettes, M. Golden a reconnu qu’on lui avait conseillé depuis d’inclure des frais pour droit d’usage dans leurs revenus pour tenir compte de la disponibilité et de leur utilisation des véhicules.

 

[117]     D’autres véhicules étaient immatriculés au nom du Transcona Country Club. Le Transcona Country Club avait acheté et financé les fourgonnettes de Sharan Golden, qui avaient été immatriculées ou réimmatriculées au nom de cette dernière. Selon les états financiers de valeur nette de M. et Mme Golden préparés pour leurs prêteurs, une fourgonnette faisait partie de leurs actifs personnels. On ne m’a produit aucun élément de preuve crédible, cohérent ou solide en sens contraire.

 

[118]     La créance du Transcona Country Club se rapportant à la fourgonnette Voyager 1987 a été remboursée durant la période en cause. Selon les calculs de l’ARC, cela a augmenté la valeur nette de M. Golden puisqu’il était le débiteur. Il n’est pas clair si les fonds ayant servi aux paiements provenaient de M. Golden ou étaient acheminés par ce dernier, mais le contribuable n’a pas produit d’élément de preuve crédible en sens contraire.

 

[119]     Je conclus que la Dodge Caravan 1989 est comptabilisée de manière inappropriée dans les cotisations de valeur nette de l’ARC. Je ne retiens pas la thèse des contribuables selon laquelle il y a suffisamment de preuves pour réfuter la supposition que Sharan Golden était la propriétaire de ce véhicule. Par conséquent, il est approprié de l’inclure à titre d’actif à son coût dans les tableaux de valeur nette. Toutefois, la fourgonnette a été presque entièrement payée au moment de son acquisition et, bien qu’il était raisonnable de la part de l’ARC de faire valoir qu’elle avait pris la fourgonnette tout en laissant la créance à la société, en fin de compte, je conclus qu’il faut inscrire la dette compensatoire au passif de M. et Mme Golden. De plus, le véhicule a été vendu l’année suivante à un tiers qui a assumé le reste des paiements. Il faut également en tenir compte dans les états financiers de valeur nette.

 

 

XVII. L’autobus Golden Retriever ‑ Orion

 

[120]     M. Golden a contesté l’impact du financement de l’autobus sur le calcul de sa valeur nette par l’ARC. Le fait que l’autobus figure parmi ses actifs n’a pas d’incidence sur le résultat de la cotisation parce que sa valeur (son coût) ne change pas après l’acquisition de celui-ci et que cette valeur a été entièrement compensée au cours de l’année de l’acquisition par l’inscription d’un montant correspondant à la dette de M. Golden.

 

[121]     Le montant de la dette est réduit durant la période, ce qui a un impact défavorable à l’endroit du contribuable puisqu’on présume qu’il a reçu les fonds d’une de ses entreprises. Bien que certains éléments de preuve tendent à indiquer que l’autobus devait être transféré à une société de transport à but non lucratif, le contribuable n’a pas produit de preuve convaincante que c’est cette société, et non M. Golden, qui a remboursé la dette. D’ailleurs, le contribuable n’a produit pratiquement aucun élément de preuve se rapportant aux activités, aux recettes et aux décaissements de cette société.

 

[122]     Bien que j’aie des doutes, il s’agit d’un autre exemple d’une justice parfois un peu impitoyable ou brutale inhérente aux cotisations de valeur nette. En l’espèce, cela découle aussi directement du fait que le contribuable doit s’acquitter du fardeau de la preuve – du point de vue juridique, en ce qui concerne les hypothèses du ministre, et du point de vue pratique eu égard aux circonstances.

 

[123]     Pour ce qui est de l’autobus Golden Retriever, je conclus que M. Golden l’a acheté, de la façon décrite dans l’entente d’achat, pour une société qu’il prévoyait constituer, ce qu’il a fait. Il a dénommé cette société Golden Retriever Services Ltd. Celle‑ci a établi qu’elle avait ratifié cet achat conformément à la Manitoba Companies Act. Ainsi, l’autobus ne doit pas figurer parmi les actifs de M. et Mme Golden dans les cotisations de valeur nette de l’ARC.

 

[124]     Bien qu’il soit raisonnable de conclure que Golden Retriever a également assumé la dette non remboursée à l’époque, et donc que cette dette ne doit pas figurer parmi les dettes de M. et Mme Golden durant la période, je ne saurais conclure à la lumière de la preuve que ce ne sont pas ces derniers, plutôt que le service d’autobus à but non lucratif, qui ont effectué les paiements liés à cette dette durant la période. On ne m’a produit aucun élément de preuve à cet égard. En fait, Golden Retriever et deux de ses membres originaux, soit M. Golden et le maire Katz, ont interjeté un autre appel devant notre Cour portant sur les impôts de Golden Retriever. Étant donné qu’aucun élément de preuve ne m’a été produit indiquant que Golden Retriever avait remboursé la dette et que Golden Retriever a interjeté un appel devant notre Cour qui est pendant, je ne suis pas disposé à me prononcer – et la preuve ne me permet pas de le faire – sur les transactions financières effectuées, ou non, par Golden Retriever.

 

[125]     M. Golden a acheté l’autobus pour des motifs politiques. Il a déclaré qu’il s’était engagé auprès de ses électeurs à améliorer les services de transports destinés aux aînés à St. Vital. Par conséquent, il est possible qu’il ait eu des motifs personnels de contribuer au financement de l’autobus qui appartenait à Golden Retriever.

 

[126]     Ainsi, aucun rajustement n’est requis relativement à la dette concernant l’autobus Orion.

 

 

XVIII. Les achats effectués avec la carte Visa de M. Golden

 

[127]     Vu la preuve présentée par les contribuables, je ne suis pas, dans l’ensemble, en mesure de conclure que, dans les nouvelles cotisations, le ministre a erronément assimilé certains montants inscrits au relevé de la carte de crédit Visa de M. Golden à des dépenses personnelles aux fins de la vérification et de l’évaluation de la valeur nette. Aucun élément de preuve crédible n’a été présenté relativement aux avances de fonds signalées dans ces relevés. Il y a manifestement eu un certain nombre d’achats personnels (Neiman Marcus, magasin de jouets, magasins de vêtements), si bien que je ne peux retenir l’idée que M. Golden s’est servi de sa carte uniquement pour acquitter des dépenses d’affaires. Voici les seuls achats qui, à mon avis, constituent des dépenses d’entreprise et qui, par conséquent, doivent réduire les cotisations de valeur nette :

 

(i)                une partie des dépenses se rapportant à l’utilisation et à l’entretien des véhicules. Bien que M. Golden ait affirmé que seules les dépenses de véhicule engagées aux fins de ses entreprises ont été payées au moyen de la carte de crédit, je ne retiens pas cette affirmation et, compte tenu du nombre de véhicules appartenant à M. et Mme Golden et au Transcona Country Club, je suis disposé à accepter seulement 20 pour cent de ces dépenses à titre de dépenses d’entreprise applicables aux cotisations de valeur nette;

 

(ii)              50 pour cent des dépenses associées aux voyages à Toronto et à Montréal pour visiter les clubs et rencontrer des humoristes, etc. À mon avis, le voyage à Vancouver n’est pas suffisamment lié aux entreprises des contribuables. Les éléments de preuve concernant les voyages à Las Vegas et ailleurs aux États‑Unis ne m’ont pas convaincu que les motifs d’affaires, s’il y en avait, étaient autres qu’accessoires.

 

 

XIX. Les rajustements concédés par l’ARC

 

[128]     De plus, l’ARC a accordé plusieurs concessions mineures qui ont été précisées à l’audience et qui devront être incorporées aux cotisations de valeur nette révisées.

 

 

XX. Les pénalités imposées à M. Golden

 

[129]     Le témoignage de M. Hogberg, comptable agréé retenu par M. Golden pour préparer les états financiers de Provincial Vending, est particulièrement défavorable en ce qui concerne les pénalités.

 

[130]     M. Hogberg a témoigné d’une manière très professionnelle, franche et crédible. Il semble être un comptable honnête, fiable et minutieux. Il a communiqué à Provincial Vending et à M. et Mme Golden, par écrit, des conseils cohérents, compréhensibles et très judicieux qui, si les Golden les avaient suivis dans l’exploitation de leurs entreprises, leur auraient permis d’éviter les problèmes auxquels ils font face à l’heure actuelle. M. Hogberg a formulé ses observations de manière professionnelle et polie. Il a même accordé à M. et Mme Golden le bénéfice du doute en ce qui concerne les éléments suspects en indiquant qu’ils étaient peut‑être trop distraits ou qu’ils ne comprenaient pas l’importance de tenir de meilleurs dossiers comptables.

 

[131]     Au regard de nombreuses lettres de M. Hogberg, il est facile de comprendre pourquoi il ne m’a pas été produit d’éléments de preuve ayant un minimum de cohérence.

 

[132]     À la lumière de la preuve se rapportant au Transcona Country Club et au Riverside Inn, je n’ai aucun doute que, si on avait engagé un comptable de la trempe de M. Hogberg pour préparer les états financiers, des réserves similaires auraient certainement été signalées.

 

[133]     M. Golden a retenu les services de M. Hogberg pour la préparation des états financiers révisés, mais non vérifiés, de Provincial Vending pour l’exercice financier se terminant en 1982. Dans le cadre de cette mission, il a convenu d’examiner le système des dossiers de comptabilité et, au besoin, de recommander des améliorations. Peu après, il a de nouveau écrit à M. Golden pour l’informer qu’il ne serait pas en mesure de préparer des états financiers révisés en raison de la mauvaise qualité des dossiers. Il pourrait uniquement préparer des états financiers accompagnés d’un avis au lecteur. Dans cette lettre, il a conclu en ces termes :

 

[traduction]

J’espère que, suite à notre conversation, vous avez compris l’ampleur des problèmes que j’ai éprouvés dans l’exécution de ce travail et, surtout, j’espère que vous avez compris la nécessité d’améliorer la tenue de vos dossiers. Bien que nous ayons fait de notre mieux dans les circonstances, comme je vous l’ai signalé à plusieurs reprises, il ne fait aucun doute que le ministère du Revenu contesterait bon nombre de vos descriptions des activités financières et reverrait probablement votre dette fiscale à la hausse. Il y a trois principales difficultés :

1. l’absence de documents justificatifs se rapportant aux dépenses; 2. l’appropriation personnelle de biens des sociétés (argent); 3. le mélange de sommes versées à des particuliers ou à des entreprises, ou provenant de particuliers ou d’entreprises, sans tenir de dossiers appropriés [...].

 

 

[134]     En 1985, M. Hogberg a écrit une lettre à M. et Mme Golden dont voici l’introduction :

 

[traduction]

1.      Comme pour les exercices précédents, les documents comptables sont de très mauvaise qualité ou inexistants. Par conséquent, et du fait qu’une part importante de l’activité financière s’effectue en liquide, nous avons encore eu recours à vos estimations des renseignements manquants pour établir les chiffres nécessaires. Bien que nous ayons fondé bon nombre de nos calculs sur ce que vous croyez être des facteurs raisonnables, je dois vous rappeler encore une fois que Revenu Canada (Impôts) peut exiger et exigera des éléments de corroboration sous forme de documents écrits. Par exemple, il est possible d’estimer les frais engagés pour le ravitaillement en essence des véhicules, mais seulement une faible partie de ces frais est confirmée par des factures. De plus, bon nombre de vos commissions de vendeur sont versées en espèces, sans que le moindre dossier ne soit tenu.

 

Comme je vous l’ai déjà signalé, vous vous trouvez dans une situation très vulnérable relativement à Revenu Canada.

 

2.      Bien qu’il soit évident que les trois familles engagées dans l’entreprise, la vôtre et celles de vos deux frères, soutirent des fonds pour leur subsistance, les dossiers ne comportent aucun autre retrait qu’un faible montant au terme de l’exercice financier se rapportant à l’élimination de l’encaisse. Encore une fois, je dois vous mettre en garde que Revenu Canada pourrait conclure que toutes ces personnes ont touché des revenus de la société sans les déclarer; dans ce cas, il y aurait des conséquences sérieuses, y compris d’importantes pénalités. Je ne saurais exagérer mes craintes à cet égard et vous recommande fortement d’instaurer des contrôles plus rigoureux sur les encaissements pour vous assurer qu’ils sont tous acheminés intégralement à la banque. Il faudrait que tous les intéressés encaissent leurs salaires au moyen de chèques ayant fait l’objet des retenues requises aux fins de l’impôt, du R.P.C. et de l’assurance‑chômage. Il faudrait également calculer les frais se rapportant aux indemnisations pour les accidents du travail.

 

3.      Le mélange de fonds provenant de diverses sources dans le compte bancaire de la société, sans la moindre identification de ces sources, donne toujours lieu à la confusion; je ne peux que vous suggérer de commencer à indiquer la nature de tous les dépôts [...].

 

 

[135]     Sa lettre conclut ainsi :

 

[traduction]

En conclusion, je vous recommanderais de commencer à documenter vos activités financières et de convertir vos transactions en espèces en transactions par chèques dans la mesure du possible. Faute de documents justificatifs se rapportant à vos dépenses et de dossiers appropriés faisant état des revenus touchés par les actionnaires et les employés de la société, vous aurez inévitablement des problèmes sérieux avec le ministère du Revenu [...].

 

 

[136]     La lettre adressée à M. et Mme Golden rédigée par M. Hogberg en 1986 est beaucoup plus brève, mais va droit au but. En voici un extrait :

 

[traduction]

J’avais l’intention de vous écrire, comme j’en ai l’habitude, une autre lettre détaillée dans laquelle je vous aurais exposé les problèmes et les solutions possibles se rapportant aux activités et aux dossiers financiers de la société, mais en relisant la lettre que je vous ai adressée le 23 juillet 1985, dans laquelle je vous ai fait part des mêmes points en rapport avec l’exercice financier de 1984, je me suis rendu compte que toutes mes observations demeurent valides, si bien qu’il serait inutile que je me répète.

 

Bref, je vous demanderais de lire la copie de cette lettre, que j’ai jointe à la présente, et de réfléchir sérieusement aux conséquences auxquelles vous vous exposez si vous continuer à ignorer mes recommandations concernant la tenue de pièces comptables correctes [...].

 

 

[137]     Les feuilles de travail de M. Hogberg se rapportant à l’année d’imposition 1986 de Provincial Vending comportent les notes suivantes :

 

[traduction]

Les salaires! Il est ridicule de continuer à passer outre au fait que personne ne tire un salaire. Allan est pleinement conscient que tous se gardent de l’argent, sans la moindre comptabilisation de ces sommes. Que veut‑il faire à ce sujet?

 

Après tout, le fait que les états financiers continuent de signaler des pertes considérables est ridicule [...].

 

 

[138]     Au sujet de cette année d’imposition 1986, M. Hogberg a signalé ce qui suit dans sa lettre à M. et Mme Golden en date de 1987 :

 

[traduction]

[...] J’aimerais porter quelques points à votre attention :

 

-         À mon avis, les agents de Revenu Canada (Impôts) n’accepteraient pas bon nombre des volets de votre état des revenus et des dépenses, si jamais ils effectuaient une vérification. En particulier, vos estimations visant les dépenses en argent comptant pour lesquelles vous n’avez aucune facture, par exemple l’essence pour vos véhicules, seraient rejetées.

 

-         Les frais de location des véhicules et du bureau à domicile que vous facturez à la société devraient être ajoutés à vos revenus personnels, desquels vous pourriez ensuite soustraire des dépenses d’entreprise précises qui, à mon avis, pourraient difficilement servir à compenser les revenus puisque les documents justificatifs ne pourraient être produits.

 

-         À mon avis, le plus gros problème est que personne n’a jamais déclaré plus qu’un revenu symbolique de Provincial Vending Ltd. et qu’il est évident que les gens ne peuvent pas travailler pendant des années sans toucher de revenus. La société n’a jamais tenu de feuilles de paye et je prévois des difficultés à cet égard. La seule solution est de mettre en place une feuille de paye appropriée et de payer les employés au moyen de chèques au lieu de tolérer qu’on prenne des sommes des encaissements.

 

-         Les entrées et sorties de fonds non identifiées se rapportant aux activités personnelles d’Allan vont tôt ou tard attirer l’attention et peut‑être mener les agents de Revenu Canada à conclure que certaines de ces entrées de fonds constituent des revenus. Il s’agit d’un problème important qui n’est toujours pas réglé, et il faudrait le rectifier. Je ne suis pas en mesure d’identifier ces entrées et sorties de fonds, mais vous l’êtes.

 

-         Les chiffres de l’inventaire sont peut‑être, ou peut‑être pas, raisonnables, mais il n’existe pas de documentation se rapportant à ce poste. Cela laisse aux agents de Revenu Canada la possibilité d’effectuer leur propre interprétation d’un chiffre et vous pouvez être certains que tout changement ne sera pas en votre faveur. Veuillez vous assurer de disposer d’une forme de calcul écrit de l’inventaire au terme de la présente année financière. P. ex., le nombre d’appareils en service x le nombre moyen d’emballages dans une machine x le prix coûtant au 31 octobre 1987, plus les produits comptés dans les camions ou l’entrepôt.

 

-         Les états financiers signalant des pertes continuelles susciteront l’attention et le scepticisme de vos banques, de votre fournisseur principal et de Revenu Canada, d’autant plus que ces états financiers ne signalent le versement d’aucun salaire. Si l’entreprise ne génère de revenus pour personne, pourquoi existe‑t‑elle encore? Si elle existe, quels éléments ne sont pas déclarés de manière appropriée?

 

Comme je le précise tous les ans, je ne peux que recueillir les documents et renseignements qu’on me fournit, mais les états financiers qui en découlent ne semblent pas raisonnables. Tôt ou tard, il faudra faire face à ces problèmes et les corriger. Veuillez réfléchir à mes observations et faire votre possible pour améliorer vos documents de comptabilité [...].

 

[139]     Enfin, dans sa lettre à l’attention d’Allan Golden en date de 1990, M. Hogberg fait les observations suivantes :

 

[traduction]

Nous avons déjà discuté des nombreux problèmes se rapportant à la comptabilité de votre société et il serait inutile que je les réitère de manière détaillée, mais je me sens obligé, à tout le moins, d’en rappeler les grandes lignes et de signaler les problèmes nouveaux. J’attire votre attention sure les éléments suivants :

 

1.      Comme je l’ai signalé par le passé, je ne prends aucun engagement en ce qui a trait à l’exactitude, à l’intégralité ou à la vraisemblance des états financiers et déclarations fiscales de la société. J’ai recueilli les renseignements qui m’ont été communiqués et j’ai suivi vos directives pour effectuer des estimations lorsque les documents requis étaient manquants. Comme je l’ai mentionné, il a fallu avoir recours à des estimations parce que, compte tenu des délais imposés par Revenu Canada, il n’y avait plus de temps à perdre à attendre les documents.

 

2.      Le journal des ventes pour 1988 et pour l’ensemble de 1989 n’indique plus les commissions versées aux vendeurs. Ce journal était le document de référence pour le remboursement de vos dépenses. J’ai dû recourir à des approximations des dépenses. Veuillez vous assurer que le journal des ventes soit rempli correctement dorénavant.

 

3.      Dans le journal des ventes pour 1989, il manquait les pages de deux mois, si bien que j’ai dû estimer les ventes de ces deux mois en me fondant sur la moyenne des autres mois.

 

4.      J’ai demandé à Pratt’s Ltd. de m’envoyer par courrier leurs états financiers, car il me manquait environ la moitié de la documentation. Si je n’avais pas agi ainsi, je n’aurais pas su que vous aviez effectué un paiement direct de 150 000 dollars à Pratt’s Ltd. en 1989. Veuillez vous assurer de conserver tous les états financiers de Pratt’s Ltd.

 

5.      Les relevés bancaires et chèques oblitérés manquants m’ont obligé à faire d’autres suppositions à l’aide de copies de relevés bancaires obtenues auprès de la banque.

 

6.      Les montants transférés à Sharan et à Ken du compte bancaire de la société ou retirés pour eux au moyen de chèques, ainsi que les montants payés en leur nom, se chiffrent à environ 100 000 dollars de 1987 à 1989. Étant donné qu’il n’y a aucune indication qu’ils aient déclaré ces sommes à titre de revenus, j’ai imputé tous ces montants au solde que vous doit la société. Vous devriez assimiler ces sommes à des prêts personnels.

 

7.      Vos ventes continuent de diminuer et je vous recommanderais de vérifier l’exactitude de votre mécanisme de déclaration des ventes. Il est probable qu’une partie des ventes n’est pas déclarée : il se peut que cela soit le résultat du vol de marchandises ou d’argent liquide, de distributeurs automatiques défaillants ou d’erreurs de comptabilité. Il ne fait aucun doute que les agents de Revenu Canada se pencheront sur cette question s’ils en ont l’occasion. [...]

 

 

[140]     Vers la fin de sa lettre, il fait les observations suivantes :

 

[traduction]

Provincial Vending Limited n’a pas besoin de tenir des dossiers complexes, mais seulement d’améliorer sa tenue de dossiers d’une qualité acceptable; ils sont pires que jamais. Mes efforts se sont avérés inutiles. Il vous faut un journal des ventes adéquat, faisant état des commissions versées. Il vous faut tous vos relevés bancaires, chèques oblitérés et bordereaux de dépôt. Il vous faut toutes les factures payées par la société et tous les états financiers (y compris Pratts). Il vous faut une liste des dépenses effectuées en argent liquide. Il vous faut un inventaire écrit. Il vous faut une feuille de paye appropriée.

 

 

[141]     Enfin, M. Hogberg a joint à cette lettre sa facture pour la préparation des déclarations fiscales et des états financiers. En fin de compte, il n’a jamais été payé. Toutefois, je ne crois pas que cela ait eu une incidence sur son témoignage et, de toute manière, ses lettres précédentes en disent long.

 

[142]     En ce qui concerne les pénalités prévues au paragraphe 163(2), la Couronne doit convaincre la Cour que M. Golden a, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait de faux énoncés ou des omissions dans ses déclarations. Selon la jurisprudence, cela signifie une action intentionnelle ou un degré élevé de négligence équivalant à une action intentionnelle, une indifférence envers le respect ou non de la loi. Dans certaines circonstances, cela peut inclure l’aveuglement volontaire.

 

[143]     M. Golden satisfait manifestement au critère de l’indifférence. On pourrait qualifier son niveau d’indifférence de total. Une réflexion plus poussée serait peut‑être nécessaire pour décider s’il répond au critère du caractère intentionnel, mais cela n’est pas nécessaire en l’espèce. Je suis déçu qu’un contrevenant récidiviste sur le plan fiscal qui a de nombreux antécédents en matière de non‑production et a qui été reconnu coupable d’évasion fiscale relativement à la cotisation de 1989 mise à ma disposition ait l’audace, compte tenu de la preuve qu’il a produite au cours des trois semaines précédant les plaidoyers, de soutenir sérieusement que les pénalités n’étaient pas appropriées. 

 

[144]     Selon M. Golden, il a fait preuve de diligence en se fiant à ses comptables. En ce qui a trait à M. Hogberg, il est très clair que M. Golden ne s’est pas fié à ses conseils : il n’en a jamais tenu compte. En ce qui concerne M. Storey, M. Golden était au courant de ses lacunes personnelles et de ses manquements professionnels, et il était tout simplement déraisonnable de la part de M. Golden de supposer que M. Storey avait été en mesure de produire des déclarations appropriées en se fondant sur les documents que M. Golden lui avait remis. M. Golden savait que, relativement aux années financières précédentes pour lesquelles des déclarations avaient été produites (mais peut‑être pas dans les délais requis), M. Storey inscrivait un nombre important de transactions dans un [traduction] « compte d’attente » qui avait la même fonction que le compte de prêts d’actionnaires de M. Hogberg : M. Golden devait par la suite expliquer si ces montants avaient trait ou non à ses entreprises. M. Golden savait qu’il n’avait pas eu de réunion à cette fin, qu’il n’avait pas signé de déclaration fiscale et que M. Storey ne lui avait pas demandé de chèque pour acquitter les impôts dus ni avisé qu’il toucherait un remboursement, et il n’a pas reçu de remboursement. En fait, je me demande même si M. Golden a jamais remis de la documentation à M. Storey puisqu’il semble que la plupart des documents ont été saisis par l’ARC et la GRC dans des lieux autres que les bureaux de M. Storey.

 

[145]     Comme je l’ai signalé plus haut, M. Golden a affirmé dans son avis d’appel que les expropriations de Rubin’s Deli et de Core Industries avaient eu pour effet de mettre des fonds à sa disposition au début de la période visée par les vérifications de la valeur nette, mais que l’ARC n’en avait pas tenu compte et que cela expliquait certains des mouvements de trésorerie. Toutefois, au sujet des pénalités, l’avocat de M. Golden soutient que ce dernier était conscient des pertes associées à Core Industries et/ou à Rubin’s Deli, si bien qu’il ne s’attendait pas à payer des impôts et à fournir à son comptable un chèque pour le paiement de tels impôts au moment de la production de sa déclaration. Il semble bizarre que M. Golden ait cru qu’il avait perdu de l’argent au moment où il devait produire sa déclaration de revenus, qu’il ait pensé qu’il avait des fonds à sa disposition grâce à la vente de ces entreprises au moment de la rédaction de son argumentation et puis, après avoir été confronté à un état des rajustements attestant que les deux expropriations n’ont entraîné aucun produit net, qu’il se soit souvenu de la perte et s’en serve pour faire valoir qu’on ne peut lui reprocher d’avoir été indifférent en ce qui concerne la production de ses déclarations de revenus et le paiement de ses impôts.

 

[146]     Je garde également à l’esprit que, dans sa déclaration de revenus, M. Golden n’a déclaré qu’un revenu de 15 000 dollars à titre de conseiller municipal. Dans son témoignage, il a affirmé : [traduction] « Mes dépenses ne correspondent pas aux montants que je gagnais. Nous vivons de manière relativement modeste et, en fait, pour une personne qui gagnait le genre de revenus que nous gagnions à l’époque, nous vivions de manière très modeste. » Je dois dire qu’aucun élément de preuve n’indique que les Golden vivaient très modestement comparativement aux Canadiens qui touchaient 15 000 dollars par année en 1989. Il suffit que je signale les achats par chèques et carte de crédit Visa chez Neiman Marcus, la Lincoln dans son entrée de cour et la voiture de collection dans son garage.

 

[147]     Vu la preuve, je n’ai aucun doute que les pénalités imposées étaient appropriées.

 

 

XXI. Conclusion

 

[148]     Les appels sont accueillis en partie seulement, selon les motifs exposés ci‑dessus. Il n’y a rien d’autre que la Cour puisse faire. M. Golden est l’auteur de son propre malheur et de celui de son épouse.

 

[149]     La Couronne a droit à un seul mémoire de dépens.

 


[150]     Je reporterai la signature du présent jugement pendant 60 jours après la date de signature des présents motifs afin de permettre aux parties de convenir de la formulation de l’ordonnance requise.

 

Signé à Toronto (Ontario), ce 20e jour d’août 2009.

 

 

 

« Patrick Boyle »

Juge Boyle

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de mars 2010.

 

 

 

 

François Brunet, réviseur

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2009 CCI 396

 

Nos DU DOSSIER DE LA COUR :     2004‑26(IT)G, 2004‑27(IT)G

 

INTITULÉ :                                       SHARAN GOLDEN c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE,

                                                          ALLAN R. GOLDEN c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Winnipeg (Manitoba)

 

DATES DE L’AUDIENCE :               Du 31 mars au 4 avril 2008, les 7, 8 et 10 avril 2008, du 21 au 24 et du 28 au 31 octobre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Patrick Boyle

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 20 août 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Avocates des appelants :

Me Barbara M. Shields

Me Melissa N. Burkett

Me Allison Kindle

 

Avocats de l’intimée :

Me David G. Frayer

Me Ainslie Schroeder

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                                 Nom :                Me Barbara M. Shields

 

                             Cabinet :                Aikins, MacAulay & Thorvaldson s.r.l.

                                                          Winnipeg (Manitoba)

 

                   Pour l’intimée :                John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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