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Référence : 2009 CCI 32

 

Dossier : 2008-161(IT)I

 

ENTRE :

 

JAMES BROAD,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

CERTIFICATION DE LA TRANSCRIPTION

DES MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Je requiers que soit déposée la transcription certifiée ci‑jointe des motifs du jugement rendus oralement à l'audience à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 26 novembre 2008.

 

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de janvier 2009.

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 28 jour de septembre 2009.

 

Hélène Tremblay, traductrice


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

COUR CANADIENNE DE L'IMPÔT

Dossier : 2008-161(IT)I

ENTRE :

JAMES BROAD,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu par Mme la juge Campbell, dans la salle d'audience no 602, 701, rue Georgia Ouest, 6e étage, Vancouver (C.‑B.), le mercredi 26 novembre 2008.

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COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                     L'appelant lui‑même

Avocate de l'intimée :                          Me C. Akey

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LE GREFFIER AUDIENCIER : J. Platt

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Allwest Reporting Ltd.

1125, rue Howe, bureau 1200

Vancouver (C.-B.)

V6Z 2K8

Par :  S. Leeburn


 

MOTIFS DU JUGEMENT

(rendus oralement à l'audience à Vancouver (C.‑B.),

le 26 novembre 2008)

 

LA JUGE : D'accord, qu’il soit consigné au dossier, je vous prie, que je rends oralement des motifs dans l'affaire James Broad, que j'ai entendue cette semaine. 

Il s'agit d'un appel se rapportant à l'année d'imposition 2005 de l'appelant. Dans le calcul de son revenu pour cette année d'imposition, l'appelant a déduit des montants s'élevant en tout à 9 000 $ au titre de la pension alimentaire. Le ministre a refusé la déduction de la totalité de ce montant. Il s'agit de savoir si l'appelant peut déduire la pension alimentaire à l'égard de son année d'imposition 2005.

En plus de l’appelant, j’ai entendu le témoignage de l’ancienne conjointe de fait de l’appelant, Laurie Randall, et de Greer Gibson, avocate qui a représenté Laurie Randall pendant un certain temps au cours des années 1990. L’appelant a cohabité avec Laurie Randall du 1er avril 1989 au 1er juillet 1990. Leur fils Matthew est né le 1er octobre 1989. Après la séparation, les conjoints ont signé un accord daté du 1er juillet 1990, quoique la preuve donne à entendre que l’accord a en fait été signé plus tard, en 1991.

Dans leurs témoignages, l'appelant et Laurie Randall donnaient deux versions différentes des circonstances dans lesquelles Laurie a signé l'accord. Laurie a reconnu avoir signé l'accord, mais elle a déclaré qu'elle n'avait pas eu la possibilité de l'examiner. L'appelant est avocat, mais il a fait rédiger l'accord par un ami, étant donné qu'il n'exerçait pas sa profession dans le domaine du droit de la famille. Les dispositions pertinentes de l'accord portaient sur la garde de Matthew et sur le droit de visite de l'appelant. Selon le paragraphe 3 de l'accord, l'appelant devait verser chaque mois une somme de 750 $ pour assurer l'entretien de Matthew. L'accord a été signé en 1991, mais l'appelant versait chaque mois cette pension alimentaire depuis le 1er juillet 1990, soit depuis la date de la séparation. Le 1er août 1993, les conjoints ont recommencé à cohabiter et ils ont vécu ensemble jusqu'au mois de février 1995; ils se sont alors séparés pour de bon.

Au cours de cette seconde période de cohabitation, l'appelant a cessé de verser chaque mois la pension alimentaire pour enfants. Lorsque les conjoints se sont séparés pour la seconde fois, l'appelant a recommencé à effectuer les paiements mensuels de 750 $ pour Matthew. Dans son témoignage, l'appelant a déclaré croire que l'accord de séparation de 1990 était encore valide, qu'il avait encore effet et qu'il avait force exécutoire. Au début de l'année 1995, l'appelant a demandé à un ami, un certain Fred Banning, qui pratiquait le droit dans le domaine du droit de la famille, d'écrire à l'avocate de Laurie, Greer Gibson. La première lettre adressée à Me Gibson est datée du 15 février 1995. La lettre est rédigée comme suit : 

[traduction] Vous trouverez ci‑joint un chèque de 750 $. À des fins fiscales, le chèque doit être établi aux termes d'un accord écrit. Je proposerais que l'accord prévoie tout simplement que M. Broad fera un paiement de 750 $ le 15e jour de chaque mois, sans préjudice des droits de chacune des parties à l'accord, et que celui‑ci puisse être annulé par l'une ou l'autre des parties après un préavis de 15 jours. De plus, je vous demanderais de bien vouloir signer la présente lettre à titre de représentant de votre cliente pour indiquer que vous acceptez les dispositions qui y sont énoncées et que vous reconnaissez que la présente lettre ainsi signée constituera l'accord écrit. Vous m'avez avisé qu'il pourrait être nécessaire de modifier les dates de paiement qui tombent au cours des 30 premiers jours suivant la date d'entrée en vigueur de l'accord en raison de dépenses telles que des frais de déménagement. Le cas échéant, veuillez me fournir des détails à ce sujet, et j'obtiendrai des instructions.

Le 6 mars 1995, Me Gibson a répondu comme suit :

[traduction] Vous trouverez ci‑jointe la lettre du 15 février 1995, dûment signée; bien entendu, la somme supplémentaire de 375 $ se rattachant aux frais de déménagement est visée par la présente lettre.

La dernière lettre produite en preuve est cette même lettre du 15 février 1995, apparemment signée par Me Gibson.

Au mois de juin 1999, Laurie a décidé de s'installer à Victoria. Elle a témoigné avoir reçu une copie de la déclaration de 1998 de l'appelant ainsi que les lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires; des notes sur des autocollants étaient jointes à chacun de ces documents, informant Laurie que le revenu de l'appelant ne justifiait pas le paiement mensuel de 750 $ que celui‑ci avait effectué au titre de la pension alimentaire et que, selon les lignes directrices, le montant à payer chaque mois s'élevait à 343 $. Étant donné que l'appelant demandait que ses chèques mensuels postdatés, de 750 $ chacun, lui soient retournés, et parce que Laurie en avait assez de s'occuper de ces questions, les chèques ont été retournés à l'appelant et celui‑ci a commencé à verser chaque mois un montant de 343 $. Ces paiements ont continué à être effectués jusqu'à ce que Laurie reçoive un chèque de 2 442 $, avec une lettre d'envoi datée du 18 novembre 1999, de l'avocat de l'appelant, Richard Rhodes. Cette lettre était brève et renfermait simplement un chèque en fiducie au montant susmentionné; il y était indiqué que ce montant représentait les arriérés de la pension alimentaire.

La lettre faisait suite à une lettre datée du 9 novembre 1999, de Me Rhodes à Laurie, dans laquelle certaines dispositions étaient proposées pour les visites de l'appelant, en vue de tenir compte du fait que Matthew était à Victoria, la lettre confirmant par ailleurs que Me Rhodes détenait le chèque de 2 442 $ se rapportant aux arriérés de la pension alimentaire qui devait être versée aux termes de l'accord y afférent.

Laurie a alors retenu les services de Trudy Brown pour la représenter dans l'affaire. En fin de compte, au début de l'année 2000, l'appelant a intenté une action, au moyen d'une déclaration, en vue d'obtenir le droit de visite à l'égard de Matthew et de faire régler la question des visites. La question de la pension alimentaire était uniquement mentionnée au paragraphe 26, dans lequel l'appelant déclare avoir versé chaque mois un montant de 750 $ au titre de la pension alimentaire pour enfants, aux termes de l'accord de séparation.

L'appelant a témoigné avoir ramené les paiements mensuels à 343 $ parce qu'il faisait personnellement face à de graves problèmes financiers dans l'exercice de sa profession et dans ses entreprises commerciales privées et que, lorsqu'il avait retenu les services de Me Rhodes pour le représenter, ce dernier lui avait conseillé de recommencer à effectuer des paiements mensuels de 750 $. En 2006, la Cour a rendu un jugement portant que Laurie Randall n'était pas obligée d'inclure dans son revenu la pension alimentaire pour enfants versée par M. Broad, l'appelant dans le présent appel, à l'égard de l'année d'imposition 2003. Dans sa décision, le juge Beaubier a tiré certaines conclusions au sujet de l'accord de séparation de 1990. Toutefois, ces conclusions de fait ne me lient pas.

La question à trancher dépend de la question de savoir si les principaux paiements effectués par l'appelant en 2005 ont été effectués aux termes d’un accord écrit en vertu de l'alinéa 60b). L'intimée soutient que l'accord de séparation de 1990 a pris fin lorsque les conjoints se sont réconciliés en 1993, et que cet accord ne régit donc pas les paiements effectués par l'appelant après 1995. De plus, il n'y avait aucun accord écrit subséquent, étant donné que l'échange de lettres, en 1995, n'équivaut pas au maintien de l'accord de 1990 ou à un nouvel accord. La position prise par l'appelant est qu'il a conclu un accord de séparation valide ayant force exécutoire, l'accord de séparation de 1990, qui indique les paiements réguliers à effectuer au titre de la pension alimentaire. Tel était le principal point que l'appelant a invoqué, quoiqu'il ait également soutenu que les lettres de 1995 pouvaient être considérées comme un nouvel énoncé de l'accord initial de 1990, ou qu'elles pouvaient en fait être considérées comme constituant elles‑mêmes un accord. L'appelant a signalé que ces lettres pourraient être interprétées comme voulant dire que l'accord de 1990 recommençait à s'appliquer.

Il est certain que les conjoints se sont réconciliés entre le mois d'août 1993 et le mois de février 1995, soit pour une période d'environ 19 mois. Quel est donc l'effet de cette période de réconciliation sur l'accord de séparation de 1990? Cet accord contenait une clause dans laquelle il était fait mention de l'effet de la réconciliation. Il prévoyait ce qui suit au premier paragraphe :

[traduction] Si, dans l'avenir, James et Laurie cohabitent de gré à gré en tant que mari et femme, le présent accord et tous les engagements qui y sont énoncés continueront à avoir effet tant que James et Laurie ne consentiront pas mutuellement par écrit à résilier ou à modifier l'accord.

La règle générale de common law veut qu'une réconciliation, telle que celle qui s'est produite en l'espèce, mette fin à un accord de séparation antérieur conclu entre les conjoints.

Indépendamment des questions soulevées par la preuve soumise par Laurie au sujet de la question de savoir si elle a signé l'accord de son plein gré, si elle l'a lu avant de le signer, si on lui a donné la possibilité de demander conseil à un avocat ou si elle a agi par contrainte en signant l'accord, je ne crois pas que cette clause soit suffisante pour protéger l'accord de 1990. Je ne crois pas que les conjoints ait expressément songé à l'effet d'une réconciliation éventuelle et on ne m'a présenté aucune preuve en ce sens. Les conjoints ont commencé à cohabiter, avec leur fils, et l'appelant a cessé de verser chaque mois la pension alimentaire de 750 $ pendant environ 19 mois. La position selon laquelle les conjoints voulaient que l'accord continue à s'appliquer après une réconciliation n'est tout simplement pas logique, puisqu'ils sont revenus à la situation qui existait avant la cohabitation.

La preuve ne donne aucunement à entendre que les conjoints voulaient clairement et expressément que l'accord soit un accord continu les liant quant aux droits de visite et à la pension alimentaire. Si je concluais que l'accord s'appliquait encore après la réconciliation, ce que je ne conclus pas, il me faudrait rationaliser les actions de l'appelant, après la seconde rupture, en 1995 : 1) Pourquoi les conjoints ont‑ils retenu les services d'avocats en 1995 et pourquoi ont‑ils demandé des conseils juridiques s'ils estimaient que les dispositions de l'accord de 1990 continueraient à s'appliquer et qu'ils pouvaient se fonder sur ces dispositions? 2) Pourquoi ni l'un ni l'autre avocat, en 1995, n'a‑t‑il pas mentionné les dispositions de l'accord de 1990 s'ils croyaient que l'accord s'appliquait encore? 3) Pourquoi l'appelant, qui est lui‑même avocat, risquerait‑il de subir les conséquences juridiques que comporte une réduction unilatérale de la pension alimentaire de 750 à 343 $, si l'accord de 1990 était valide?

Toutes ces actions donnent plutôt à entendre le contraire. Elles donnent à entendre que l'appelant n'estimait plus que l'accord de 1990 régissait la situation telle qu'elle existait après l'année 1995 et elles sont compatibles avec les conclusions que j'ai tirées sur ce point. De plus, les avocats ne semblent pas considérer cet accord de 1990 comme un accord existant, valide et exécutoire. L'accord n'est pas mentionné dans les lettres échangées en 1995. De fait, dans ces lettres, il est uniquement fait mention d'un montant de 750 $, sans que ce montant soit qualifié de pension alimentaire. Selon certaines décisions, pareil échange de lettres peut être considéré comme un accord lorsque les circonstances s'y prêtent, mais il en est uniquement ainsi lorsque les dispositions sont suffisamment précises pour étayer pareille conclusion. Or, ce n'est tout simplement pas ici le cas.

Les lettres de 1995 sont fort générales et vagues, et elles ne donnent pas de précisions au sujet des conditions et dispositions applicables. Elles n'indiquent aucunement qu'il y avait accord des volontés en ce qui concerne ce à quoi se rapporte ce paiement de 750 $. Cela étant, je ne puis conclure à l'existence d'un accord par suite des lettres échangées en 1995. Dans sa lettre, Me Rhodes mentionne un accord concernant la pension alimentaire lorsqu'il traite des arriérés, mais cette simple mention ne constitue pas un fait. Compte tenu de la preuve mise à ma disposition, j'ai conclu le contraire. Il n'y avait pas d'accord écrit aux termes duquel l'appelant versait la pension alimentaire en 2005. 

Enfin, en ce qui concerne l'argument de l'appelant fondé sur la préclusion, bien que cet argument n'ait pas été mentionné dans les actes de procédure, il ne s'applique pas dans ce cas‑ci, où il est question d'une cotisation d'impôt, et on ne m'a soumis aucun élément de preuve donnant à entendre que le ministre est de quelque façon préclus d'établir une cotisation à l'égard de l'appelant.

Pour ces motifs, l'appel est rejeté, sans qu'aucuns dépens soient adjugés.

 

Traduction certifiée conforme

ce 28 jour de septembre 2009.

 

 

Hélène Tremblay, traductrice


 

 

RÉFÉRENCE :                                  2009 CCI 32

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2008‑161(IT)I

 

INTITULÉ :                                       James Broad

                                                          c.

                                                          Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 24 novembre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable Diane Campbell

 

DATE DU JUGEMENT 

RENDU ORALEMENT :                   Le 26 novembre 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

 

Avocate de l’intimée :

 

Me Christa Akey

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                   Nom :

 

                   Cabinet :                        

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                                   Sous-procureur général du Canada

                                                                   Ottawa, Canada

 

 

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