Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

Dossier : 2007-4985(EI)

2007-4986(CPP)

ENTRE :

RIMON GENDI,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus le 7 mai 2009, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

Devant : L’honorable juge Brent Paris

 

Comparutions :

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimé :

Me Natasha Reid

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

       Les appels interjetés en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l’assurance‑emploi et de l’article 28 du Régime de pensions du Canada sont rejetés.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour d’octobre 2009.

 

 

« Brent Paris »

Juge Paris

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de novembre 2009.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 520

Date : 20091016

Dossiers : 2007-4985(EI)

2007-4986(CPP)

ENTRE :

RIMON GENDI,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Paris

[1]     L’appelant a interjeté appel des décisions que le ministre du Revenu national (le « ministre ») a rendues à son égard, selon lesquelles il n’a pas occupé chez ABC Profiles Inc. (« ABC ») un emploi assurable ou ouvrant droit à pension au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance‑emploi et du paragraphe 6(1) du Régime de pensions du Canada pendant la période allant du 1er septembre 2006 au 15 février 2007.

[2]     Les hypothèses sur lesquelles le ministre s’est fondé pour rendre ses décisions sont énoncées au paragraphe 5 des deux réponses aux avis d’appel. Ces hypothèses, identiques pour les deux appels, sont ainsi rédigées :

 

[traduction]

 

a)         ABC Profiles Inc. (« ABC ») a été constituée le 16 janvier 2003, ou vers cette date;

 

b)         pendant la période en cause, ABC fabriquait et distribuait des matériaux de couverture en acier et des matériaux de revêtement;

 

c)         ABC a acheté le logiciel Simple Comptable afin d’informatiser ses documents commerciaux;

 

d)         l’appelant offre des cours d’informatique sous le nom commercial de R.W.C. Computer School;

 

e)         ABC a retenu les services de l’appelant afin qu’il offre de la formation sur le nouveau logiciel comptable qu’elle avait acheté;

 

f)          le 27 janvier 2006, ou vers cette date, l’appelant a facturé 15 heures de formation à ABC pour un montant total de 450 $;

 

g)         de janvier à mai 2006, ou vers ces dates, l’appelant a donné des cours d’informatique à Billy DeVries dans les bureaux d’ABC;

 

h)         quand il a offert des services de formation à ABC, l’appelant a fourni une chaise d’ordinateur, une table de conférence ronde de 5 pieds de diamètre, un disque dur auxiliaire à mémoire flash, un téléphone sans fil et diverses fournitures de bureau;

 

i)          pendant la période en cause, l’appelant n’a pas été employé par ABC en vertu d’un contrat de louage de services;

 

j)          pendant la période en cause, ABC n’a pas donné d’instructions ou de directives à l’appelant et ne l’a pas non plus supervisé;

 

k)         en décembre 2006, ou vers cette date, ABC a versé 4 500 $ à l’appelant à titre de paiement pour la vente de matériaux de couverture à un client d’ABC;

 

1)         ABC a versé 1 400 $ à l’appelant à titre de remboursement des fournitures que ce dernier avait achetées pour le compte d’ABC;

 

m)        pendant la période en cause, au cours de laquelle il offrait de la formation à ABC, l’appelant a engagé des dépenses liées à un véhicule;

 

n)         pendant la période en cause, l’appelant a engagé des dépenses liées à un véhicule qu’ABC ne lui a pas remboursées;

 

o)         ABC n’a effectué aucune retenue aux fins de l’assurance‑emploi, du régime de pensions du Canada ou de taxes sur les montants qu’elle a payés à l’appelant;

 

p)         pendant la période en cause, l’appelant n’a pas accompli de tâches pour le compte d’ABC en vue de gagner un salaire;

 

q)         l’appelant n’a pas déposé de plainte pour salaire impayé auprès du British Columbia Labour Standards Branch (Bureau des normes du travail de la Colombie-Britannique);

 

r)          l’appelant a demandé un relevé d’emploi (le « RE ») à Ressources humaines et Développement des compétences Canada sous le numéro de compte d’ABC;

 

s)         l’appelant a rempli le RE pour la période en cause et a déclaré avoir accumulé 1140 heures de travail assurables et reçu une rémunération assurable de 17 500 $;

 

t)          l’appelant a présenté le RE à Elly DeVries pour qu’elle le signe;

 

u)         la signature d’Elly DeVries figure sur le RE, mais celle‑ci l’a signé par erreur.

 

[3]     En l’espèce, la question en litige tourne autour des hypothèses 5i) et 5p), selon lesquelles l’appelant n’a pas été embauché par ABC en vertu d’un contrat de louage de services et n’a pas accompli de tâches pour ABC en vue de gagner un salaire. L’appelant soutient avoir été engagé à titre d’employé à temps plein d’ABC le 1er août 2006 et avoir été employé par la société jusqu’au 15 février 2007. Il prétend avoir reçu un salaire mensuel de 4 500 $, indépendamment du nombre d’heures travaillées.

 

[4]     Il incombe à l’appelant de démontrer que les hypothèses de fait énoncées par le ministre, sur lesquelles ce dernier s’est fondé pour rendre ses décisions, sont erronées, notamment les alinéas 5i) et 5p) des réponses aux avis d’appel susmentionnés.

 

[5]     Les parties conviennent du fait que l’appelant a montré à Mme DeVries comment utiliser un certain logiciel comptable au début de l’année 2006, agissant ainsi à titre d’entrepreneur indépendant. Les parties ne parviennent pas à s’entendre au sujet de ce qui s’est passé après que la formation eut été terminée. L’appelant soutient avoir été engagé comme employé à temps plein d’ABC afin d’accomplir un certain nombre de tâches, comme de la comptabilité et du travail de bureau, la prise en charge et la livraison, des rencontres avec des créanciers, des clients, des fournisseurs et des organismes gouvernementaux, des tâches de production à la chaîne et la surveillance des couvreurs chargés d’installer les matériaux de couverture d’ABC sur les lieux de travail.

 

[6]     Sur la foi de la preuve qui m’a été présentée à l’audience, je ne suis pas convaincu que l’appelant a démontré qu’il a été employé par ABC, ou que le relevé d’emploi (le « RE ») sur lequel il s’est fondé était exact et que Mme DeVries l’a signé délibérément.

 

[7]     Du fait d’un certain nombre d’incohérences et d’invraisemblances dans le témoignage de l’appelant ainsi que dans les documents qu’il a présentés à différents moments à Ressources humaines et Développement des compétences Canada (« RHDCC ») et à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »), je conclus que l’appelant n’était pas un témoin crédible. Premièrement, l’appelant a déclaré que son salaire mensuel était de 4 500 $, ce qui contredit la déclaration qu’il a faite à l’enquêteuse de RHDCC chargée du dossier, Mme Banwait, voulant que son salaire mensuel ait été compris entre 3 500 $ et 4 500 $. Son affirmation est également venue contredire l’information contenue dans sa demande de prestations d’assurance‑emploi, voulant que son salaire mensuel se soit élevé à 3 500 $. L’appelant admet également avoir rempli une partie du RE, y compris le montant de sa rémunération assurable, qu’il a fixée à 17 500 $. Mme Banwait a déclaré que l’appelant lui avait dit que le montant de 17 500 $ avait été établi en fonction d’un salaire mensuel de 3 500 $. Par ailleurs, dans la plainte pour salaire impayé qu’il a déposée à l’encontre d’ABC auprès du British Columbia Employment Standards Branch (Bureau des normes du travail de la Colombie‑Britannique), l’appelant a déclaré un salaire mensuel de 4 500 $.

 

[8]     Afin de prouver qu’il gagnait un salaire, l’appelant s’est appuyé sur certains documents, lesquels seraient des documents de paie d’ABC. Toutefois, aucun employé d’ABC n’a authentifié ces documents. M. et Mme DeVries n’ont pas déposé. Apparemment, ils sont repartis vivre en Hollande. Les prétendus documents de paie semblent montrer que ledit salaire a été versé sur le compte en banque de l’appelant, mais ce dernier n’a produit aucun relevé bancaire en vue de fonder son affirmation. Il n’a pas non plus présenté de relevé étayant son affirmation selon laquelle il aurait reçu des paiements additionnels d’ABC, sous forme d’argent comptant et de virements sur sa carte de crédit. En outre, les chiffres apparaissant sur les prétendus documents de paie ne correspondent pas aux montants que l’appelant a prétendu avoir reçus.

 

[9]     Pour compliquer les choses encore davantage, les prétendus documents de paie d’ABC montrent que l’appelant a reçu un salaire de 2 433,60 $ par mois pendant trois mois et un salaire de 3 071,12 $ pendant un mois. Ces documents indiquent également que M. DeVries a touché un salaire de 9 540 $, alors que la déclaration de revenu d’ABC pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 décembre 2006 montre qu’au titre des salaires, la société n’a payé qu’un montant total de 8 437 $ pour 2006.

 

[10]    L’appelant a produit en preuve deux chèques annulés d’ABC, le premier de 4 500 $, daté du 18 décembre 2006, et le deuxième de 1 400 $, daté du 8 mars 2007.

 

[11]    Une note manuscrite accompagnait le chèque daté du 18 décembre, précisant que ce chèque avait été établi aux fins de la paie. Toutefois, un des prétendus documents de paie d’ABC faisait référence à un chèque de paie de 3 345,12 $ qui aurait été émis au nom de l’appelant le 15 décembre 2006, indiquant un salaire brut de 3 500 $. L’appelant a déclaré que Mme DeVries n’avait probablement enregistré qu’une partie des 4 500 $ qu’il avait reçus afin d’éviter de payer de l’impôt sur la totalité de la somme. Cette explication est bancale, dans la mesure où c’est l’appelant qui aurait dû payer de l’impôt sur ladite somme, non ABC. Je remarque aussi que les mêmes prétendus documents de paie montrent qu’au 15 décembre 2006, depuis le début de l’exercice, l’appelant avait touché un salaire brut de 3 500 $ sous forme de chèque. Quoi qu’il en soit, comme je l’ai déjà souligné, l’identité de la personne qui a rédigé ces documents est incertaine.

 

[12]    Le chèque daté du 8 mars portait la mention [traduction] « dernier paiement à l’ordre de Rimon Gendi, Visa et Mastercard ». L’appelant a déclaré qu’il s’agissait du remboursement de montants qu’il avait payés avec sa carte de crédit pour le compte d’ABC.

 

[13]    Dans la plainte qu’il a déposée auprès du Bureau des normes du travail, l’appelant a prétendu qu’ABC lui devait un salaire de 35 254,99 $. Il s’agit d’un montant plus élevé que celui qu’il aurait touché si, comme il le prétend, il avait gagné un salaire mensuel de 4 500 $ et avait travaillé du 1er août 2006 au 15 février 2007. Cette prétention laisserait également entendre que l’appelant, aux fins de sa plainte tout du moins, avait pris le parti de dire qu’ABC ne l’avait pas payé du tout.

 

[14]    Les informations que l’appelant a fournies relativement aux dates de son prétendu emploi étaient elles aussi incohérentes. À l’audience, l’appelant a déclaré être devenu un employé à temps plein d’ABC le 1er août 2006. C’est également ce qu’il a affirmé à Mme Banwait. Toutefois, dans sa demande de prestations d’assurance‑emploi, l’appelant a déclaré que son premier jour de travail avait été le 1er septembre 2006. À l’audience, il a déclaré que Mme DeVries avait indiqué sur le relevé d’emploi que le premier jour de travail de l’appelant avait été le 1er septembre 2006, de manière à ce que la société n’ait pas à payer de retenues à la source à l’égard de l’appelant pour le mois d’août. Celui‑ci a prétendu que, par conséquent, il s’est senti forcé d’avoir recours à cette date quand il a demandé ses prestations d’assurance‑emploi, par souci de cohérence avec son RE. Toutefois, lors du contre‑interrogatoire, l’appelant s’est contredit, reconnaissant qu’il avait lui‑même rempli la partie du RE faisant état du premier jour de travail. Il y a une autre contradiction dans sa demande de prestations, dans laquelle l’appelant a indiqué qu’au moment de remplir sa demande, il n’avait toujours pas reçu le RE d’ABC.

 

[15]    L’appelant s’est également fondé sur trois relevés de compte relatifs aux retenues à la source d’ABC afin de prouver que celle‑ci a effectué des versements au titre de l’impôt sur le revenu et des cotisations d’assurance‑emploi ainsi que des contributions au régime de pensions du Canada en son nom, mais c’est l’appelant qui a rempli les formulaires, y compris les références au mois pour lequel les paiements ont été prétendument effectués. Il est difficile de dire si les paiements correspondaient aux montants déclarés sur le formulaire, et il n’est pas possible de dire qui a effectué les paiements, ou s’ils ont été effectués relativement au prétendu emploi de l’appelant. Dans l’affidavit qu’il a présenté à l’enquêteuse du Bureau des normes du travail, l’appelant a déclaré avoir lui‑même payé les montants au titre des déductions à la source. Lors de l’audition des présents appels, l’appelant a déclaré que ce n’était pas ces montants qu’il avait payés, mais d’autres retenues à la source pour son propre compte, parce qu’ABC n’avait pas les fonds nécessaires. Il n’a toutefois produit aucun document prouvant qu’il a effectué de tels paiements.

 

[16]    Le témoignage de l’appelant concernant son départ d’ABC contredit également les informations antérieurement fournies à RHDCC. À l’audience, il a déclaré avoir été renvoyé parce qu’il avait menacé la société de révéler qu’elle avait reçu des remboursements de TPS auxquels elle n’avait pas droit. Dans le questionnaire qu’il a rempli pour Mme Banwait concernant son prétendu emploi chez ABC, l’appelant a déclaré avoir été mis à pied en raison d’un manque de travail. L’appelant a ajouté que, le 6 février 2007, soit neuf jours avant la date de sa prétendue mise à pied, il avait demandé à l’ARC de lui envoyer un RE vierge au nom d’ABC. Il me semble incongru que l’appelant ait su qu’il lui faudrait demander un RE avant d’avoir été renvoyé.

 

[17]    Je constate la présence d’une autre invraisemblance inexpliquée dans les déclarations faites par l’appelant à l’agente des appels de l’ARC, Mme Sausa‑Gaufredo, au sujet de la question de savoir si ABC et lui étaient liés par un contrat de louage de services. Dans le questionnaire qu’elle lui a demandé de remplir relativement à sa plainte, l’appelant a déclaré avoir travaillé pour ABC en vertu d’un contrat écrit, mais que [traduction]  « au moment de sa mise à pied ou avant, le propriétaire » avait retiré son exemplaire du contrat de son porte‑documents. Or, par la suite, l’appelant a fourni à Mme Sausa-Gaufredo le contrat de louage de services qu’il avait prétendument conclu avec ABC, document dont il était seul signataire.

 

[18]    L’appelant n’a cité aucun témoin afin de corroborer son affirmation voulant qu’il ait été un employé à temps plein d’ABC pendant plus de six mois, période pendant laquelle il a déclaré avoir personnellement traité avec les clients, fournisseurs, créanciers et entrepreneurs d’ABC. Je conclus que les témoignages de ces personnes n’auraient pas été favorables à l’appelant.

 

[19]    À la lumière des nombreuses incohérences et contradictions ressortant de la preuve présentée par l’appelant, et en l’absence de toute autre preuve étayant son allégation voulant qu’il ait été employé par ABC, je conclus qu’il n’est pas parvenu à prouver que les hypothèses sur lesquelles le ministre s’est fondé pour tirer ses conclusions étaient erronées. L’appelant n’a pas démontré qu’il a été employé par ABC en vertu d’un contrat de louage de services pendant la période en cause, et  je me dois par conséquent de rejeter les appels.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour d’octobre 2009.

 

 

« Brent Paris »

Juge Paris

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de novembre 2009.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


 

RÉFÉRENCE :                                  2009 CCI 520

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :          2007-4985(EI) et 2007-4986(CPP)

 

INTITULÉ :                                       Rimon Gendi et Le ministre du Revenu national

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 7 mai 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Brent Paris

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 16 octobre 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimé :

Me Natasha Reid

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                      Nom :                           s.o.

      

                  Cabinet :                          s.o.

 

         Pour l’intimé :                           John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.