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Dossier : 2004-4083(IT)G

ENTRE :

JEANNETTE WALSH,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête entendue avec la requête présentée dans l'affaire Succession de David G. Walsh (2004‑4085(IT)G), le 5 mars 2009 à Toronto (Ontario).

 

Devant : L'honorable juge en chef Gerald J. Rip

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelante :

Me Michael Hunziker

Avocat de l'intimée :

Me Louis L'Heureux

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

 

          L'intimée ayant présenté, en vertu de l'article 116 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), une requête en vue d'obtenir des ordonnances enjoignant aux appelantes [traduction] « de donner des détails au sujet de chaque convention relative à une option d'achat d'actions conclue par [chacune d'elles] et par Bre‑X Minerals Ltd. (« Bre‑X »), Bresea Resources Ltd. (« Bresea ») et Bro‑X Minerals Ltd. (« Bro‑X ») au cours de la période allant de 1993 à 1996, et notamment de produire les conventions et de donner des détails au sujet du moment où les options ont été levées et du nombre d'options qui ont été levées, du nombre d'actions achetées et vendues, et du prix d'achat et de vente des actions acquises au moyen de la levée des options d'achat d'actions »;

 

 

 

          La Cour ordonne ce qui suit :

 

(1)     Les conventions relatives à une option d'achat d'actions conclues entre l'un ou l'autre de M. et de Mme Walsh ou entre M. et Mme Walsh, d'une part, et Bre‑X et Bresea, d'autre part, en 1993 et en 1994, qui ont fait l'objet d'une levée d'option de la part de M. et de Mme Walsh, laquelle a donné lieu à l'établissement des cotisations en cause, doivent être fournies à l'intimée;

 

(2)     Les conventions, s'il en est, relatives à une option d'achat d'actions conclues par M. et Mme Walsh avec Bre‑X ou Bresea, en 1995 et en 1996, doivent être produites;

 

(3)     Les renseignements demandés à l'alinéa b), sous‑alinéas i) à iv), et aux alinéas c) et d) des questions 20 et 21 des interrogatoires préalables de Jeannette Walsh doivent être fournis à l'égard des options d'achat d'actions qui ont été levées par M. et par Mme Walsh en vertu de telles conventions relatives à une option d'achat d'actions qui ont finalement donné lieu à des avantages qui ont été inclus dans l'établissement des cotisations visées par les appels;

 

(4)     Les conventions relatives à une option d'achat d'actions conclues entre Bro‑X et les appelantes, le cas échéant, et des renseignements relatifs à la levée de toute option conformément à ces conventions n'ont pas à être fournies à l'intimée.

 


          Les dépens suivront l'issue de la cause.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de juin 2009.

 

 

« Gerald J. Rip »

Juge en chef Rip

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour d'octobre 2009.

 

 

 

 

Erich Klein, réviseur


 

 

 

 

Dossier : 2004-4085(IT)G

ENTRE :

LA SUCCESSION DE DAVID G. WALSH,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Requête entendue avec la requête présentée dans l'affaire Jeannette Walsh (2004-4083(IT)G) le 5 mars 2009, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L'honorable juge en chef Gerald J. Rip

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelante :

Me Michael Hunziker

Avocat de l'intimée :

Me Louis L'Heureux

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

 

          L'intimée ayant présenté, en vertu de l'article 116 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), une requête en vue d'obtenir des ordonnances enjoignant aux appelantes [traduction] « de donner des détails au sujet de chaque convention relative à une option d'achat d'actions conclue par [chacune d'elles] et par Bre‑X Minerals Ltd. (« Bre‑X »), Bresea Resources Ltd. (« Bresea ») et Bro‑X Minerals Ltd. (« Bro‑X ») au cours de la période allant de 1993 à 1996, et notamment de produire les conventions et de donner des détails au sujet du moment où les options ont été levées et du nombre d'options qui ont été levées, du nombre d'actions achetées et vendues, et du prix d'achat et de vente des actions acquises au moyen de la levée des options d'achat d'actions »;

 

 

 

          La Cour ordonne ce qui suit :

 

(1)     Les conventions relatives à une option d'achat d'actions conclues entre l'un ou l'autre de M. et de Mme Walsh ou entre M. et Mme Walsh, d'une part, et Bre‑X et Bresea, d'autre part, en 1993 et en 1994, qui ont fait l'objet d'une levée d'option de la part de M. et de Mme Walsh, laquelle a donné lieu à l'établissement des cotisations en cause, doivent être fournies à l'intimée;

 

(2)     Les conventions, s'il en est, relatives à une option d'achat d'actions conclues par M. et Mme Walsh avec Bre‑X ou Bresea, en 1995 et en 1996, doivent être produites;

 

(3)     Les renseignements demandés à l'alinéa b), sous‑alinéas i) à iv), et aux alinéas c) et d) des questions 20 et 21 des interrogatoires préalables de Jeannette Walsh et de la succession de David G. Walsh doivent être fournis à l'égard des options d'achat d'actions qui ont été levées par M. et par Mme Walsh en vertu de telles conventions relatives à une option d'achat d'actions qui ont finalement donné lieu à des avantages qui ont été inclus dans l'établissement des cotisations visées par les appels;

 

(4)     Les conventions relatives à une option d'achat d'actions conclues entre Bro‑X et les appelantes, le cas échéant, et des renseignements relatifs à la levée de toute option conformément à ces conventions n'ont pas à être fournies à l'intimée.

 


          Les dépens suivront l'issue de la cause.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de juin 2009.

 

 

« Gerald J. Rip »

Juge en chef Rip

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour d’octobre 2009.

 

 

 

 

Erich Klein, réviseur


 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 301

Date : 20090605

Dossier : 2004-4083(IT)G

ENTRE :

JEANNETTE WALSH,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2004-4085(IT)G

ENTRE :

LA SUCCESSION DE DAVID G. WALSH,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

 

Le juge en chef Rip

 

[1]              Sa Majesté la Reine, l'intimée, a déposé des avis de requête dans le cadre des appels interjetés en matière d'impôt sur le revenu par Jeannette Walsh, pour l'année 1996, et par la succession de feu David Walsh, mari de Jeannette Walsh, pour les années 1995 et 1996, en vue d'obtenir, en vertu de l'article 116 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) (les « Règles »), des ordonnances enjoignant aux appelantes [traduction] « de donner des détails au sujet de chaque convention relative à une option d'achat d'actions conclue par [chacune d'elles] et par Bre‑X Minerals Ltd. (« Bre‑X »), Bresea Resources Ltd. (« Bresea ») et Bro‑X Minerals Ltd. (« Bro‑X ») au cours de la période allant de 1993 à 1996, et notamment de produire les conventions et de donner des détails au sujet du moment où les options ont été levées et du nombre d'options qui ont été levées, du nombre d'actions achetées et vendues, et du prix d'achat et de vente des actions acquises au moyen de la levée des options d'achat d'actions ». Les requêtes ont été entendues ensemble.

 

[2]              En établissant la cotisation concernant M. Walsh pour les années 1995 et 1996 et la cotisation concernant Mme Walsh pour l'année 1996, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a inclus dans le revenu, en application des articles 2 et 3 ainsi que de l'alinéa 7(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi »), des avantages résultant d'options d'achat d'actions de Bre‑X et de Bresea, pour le motif que chaque appelante résidait au Canada pendant les années d'imposition visées par les appels. Subsidiairement, l'intimée soutient que si M. et Mme Walsh ne résidaient pas au Canada au 18 septembre 1995, les montants correspondant à la valeur des avantages résultant des options d'achat d'actions doivent être inclus dans le calcul de leur revenu pour les années d'imposition pertinentes en vertu des articles 3 et 114, du paragraphe 2(3), de l'alinéa 7(1)a) ainsi que du sous‑alinéa 115(1)a)(i) de la Loi. Selon l'intimée, la valeur des avantages résultant des options d'achat d'actions constitue donc un revenu tiré des fonctions d'une charge et d'un emploi exercées par chacune des appelantes au Canada; les options d'achat d'actions ont été accordées à des moments où chacune des appelantes était une employée de Bre‑X et de Bresea.

 

[3]              L'intimée prétend que les appelantes ont refusé de répondre à une « question légitime » lors des interrogatoires préalables concernant les avantages résultant des options d'achat d'actions que chaque appelante avait reçus ou dont chaque appelante avait bénéficié en sa qualité d'employée de Bre‑X et de Bresea au cours des années d'imposition visées par les appels. Je suppose qu'en ce qui concerne les appels interjetés par la succession, les présumés avantages ont été reçus ou obtenus personnellement par M. Walsh en sa qualité d'employé de ces sociétés.

 

[4]              Les interrogatoires préalables se sont déroulés sous la forme de questions et de réponses écrites conformément à l'article 92 des Règles. Les appelantes ont refusé de répondre à certaines questions pour le motif qu'elles n'étaient pas pertinentes en ce qui concerne les questions en litige. Plus précisément, les appelantes ont refusé de répondre aux questions 20 et 21 des questions écrites de l'interrogatoire préalable[1] :

 

[traduction]

 

20.       Donner tous les détails au sujet de chaque convention relative à une option d'achat d'actions conclue par M. Walsh avec Bre X, Bresea ou Bro X, de 1993 à 1996. Plus précisément :

 

a)        Fournir les conventions relatives à une option d'achat d'actions;

b)       Indiquer à quel moment les options ont été levées;

i)   Indiquer combien d'options ont été levées;

ii) Indiquer combien d'actions ont été acquises;

iii)   Indiquer le prix payé pour acquérir les options;

iv) Indiquer le prix payé pour acquérir les actions au moyen des options;

c)         Indiquer à quel moment les actions acquises au moyen des options ont été vendues;

d)       Indiquer le montant du produit de la disposition des actions.

 

L'intimée affirme que les questions sont pertinentes.

 

[5]              Des lettres ont été échangées entre les avocats, mais l'avocat des appelantes a affirmé catégoriquement que les questions n'étaient pas pertinentes en ce qui concerne les questions visées par les appels et ses clients refusaient de fournir des réponses. L'intimée a donc présenté les requêtes ici en cause.

 

[6]              Dans son affidavit, Sarah Stewart, adjointe juridique travaillant pour les avocats des appelantes, a déclaré que, dans la liste de documents de l'intimée qui avait été remise aux appelantes, il y avait une convention en date du 19 septembre 1995 relative à une option d'achat d'actions entre Bre‑X et M. Walsh.

 

La position des appelantes

 

[7]              Les appelantes soutiennent que le ministre n'a pas limité ses questions, en ce qui concerne les avantages résultant des options d'achat d'actions, aux options qui ont été levées au cours de la période pertinente. Le ministre a plutôt cherché à obtenir [traduction] « tous les détails » au sujet de [traduction] « chaque » convention relative à une option d'achat d'actions conclue par les appelantes de 1993 à 1996. Dans la demande, on mentionnait des conventions conclues avec une société, Bro‑X, dont les titres ne semblent être visés par aucune des nouvelles cotisations en litige.

 

[8]              Les appelantes prétendent que le ministre dépasse les bornes, étant donné que la demande est trop générale et englobe des documents et des renseignements qui n'aideront pas l'intimée dans sa propre cause ni ne lui permettront de nuire à celle des appelantes. Les appelantes veulent donc que les requêtes soient rejetées.

 

La position de l'intimée

 

[9]              L'avocat de l'intimée a fait valoir que les appelantes avaient refusé de répondre, au stade des interrogatoires préalables, à une question légitime concernant des avantages résultant d'options d'achat d'actions que David Walsh avait reçus ou dont il avait bénéficié en sa qualité d'employé au cours des années d'imposition 1995 et 1996 et que Jeannette Walsh avait reçus ou dont elle avait bénéficié au cours de l'année d'imposition 1996. L'avocat prétend que la question qui a été posée est une question légitime, étant donné qu'elle est pertinente en ce qui concerne les questions de fond soulevées par les appels.

 

Les Règles

 

[10]         L'intimée invoque l'article 116 des Règles. Les paragraphes (2) et (4) de l'article 116 sont libellés comme suit :

 

       (2) Si la personne interrogée refuse de répondre à une question légitime ou n'y répond pas ou que sa réponse à une question est incomplète, la Cour peut lui ordonner de répondre à la question, de compléter sa réponse ou de répondre à une autre question, au moyen d'une déclaration sous serment ou d'un interrogatoire oral.

[…]

       (2) Where the person being examined refuses or fails to answer a proper question or where the answer to a question is insufficient, the Court may direct the person to answer or give a further answer to the question or to answer any other question either by affidavit or on oral examination.

 

[…]

 

       (4) Si une personne refuse ou omet de répondre à une question légitime posée dans un interrogatoire écrit ou de produire un document qu'elle est tenue de produire, la Cour peut, en plus d'imposer les sanctions prévues aux paragraphes (2) et (3) :

a) rejeter ou accueillir l'appel, selon le cas, si la personne interrogée est une partie ou une personne interrogée à la place ou au nom d'une partie;

b) radier, en totalité ou en partie, la déposition de la personne interrogée;

c) donner une autre directive appropriée.

       (4) Where a person refuses or fails to answer a proper question on a written examination or to produce a document which that person is required to produce, the Court may, in addition to imposing the sanctions provided in subsections (2) and (3),

(a) if the person is a party or a person examined on behalf of or in place of a party, dismiss the appeal or allow the appeal as the case may be,

(b) strike out all or part of the person's evidence, and

(c) give such other direction as is just.

 

[11]         L'article 95 des Règles s'applique à l'interrogatoire préalable qui est effectué au moyen de questions écrites, de la même façon qu'il s'applique aux interrogatoires oraux. La disposition pertinente de cet article prévoit ce qui suit :

 

95. (1) La personne interrogée au préalable répond, soit au mieux de sa connaissance directe, soit des renseignements qu’elle tient pour véridiques, aux questions pertinentes à une question en litige [...]

95. (1) A person examined for discovery shall answer, to the best of that person’s knowledge, information and belief, any proper question relevant to any matter in issue in the proceeding [...]

 

 

[12]         Dans leurs avis d'appel, les appelantes déclarent que M. et Mme Walsh ne résidaient pas au Canada depuis le 18 septembre 1995, date à laquelle ils ont rompu leurs relations personnelles avec le Canada et se sont installés en permanence aux Bahamas. Dans les avis d'appel, il n'est pas fait mention d'options d'achat d'actions, à l'égard de Bre‑X et de Bresea, qui correspondraient aux éléments du revenu additionnel. Il s'agit, d'ailleurs, de questions qui sont généralement soulevées au stade de l'opposition. Les allégations concernant les avantages résultant d'options d'achat d'actions à l'égard de Bre‑X et de Bresea sont énoncées dans les réponses modifiées aux avis d'appel que l'intimée a déposées.

 

[13]         La position prise par l'intimée dans les présents appels est simple : pendant la période pertinente, les appelantes résidaient au Canada et les montants correspondant à la valeur des avantages résultant d'options d'achat d'actions que chaque appelante a reçus ou dont chaque appelante a bénéficié doivent être inclus dans le revenu tel qu'il a été établi dans les cotisations. Les Walsh résidaient également au Canada en 1995 ou pendant une partie de l'année 1995. Selon la position subsidiaire prise par l'intimée, si les appelantes ne résidaient pas au Canada pendant la période pertinente, les montants correspondant à la valeur des avantages résultant des options d'achat d'actions doivent être inclus dans le revenu, tel qu'il a été établi dans les cotisations, étant donné, entre autres choses, que les appelantes étaient des employées ou des dirigeantes de Bre‑X et de Bresea. Dans leurs actes de procédure, les appelantes ne font pas mention de la position subsidiaire prise par l'intimée.

 

[14]         L'avocat de l'intimée soutient que les conventions relatives à une option d'achat d'actions se trouvent au cœur de l'affaire, étant donné que la question fondamentale dans les appels est celle des avantages résultant d'options d'achat d'actions qui n'ont pas été déclarés. L'avocat fait en outre valoir que les conventions demandées peuvent fort bien contenir un préambule, une clause, ou une déclaration indiquant ce que M. et Mme Walsh faisaient en 1995 ou en 1996. L'intimée ne sait pas trop quel est le contenu des conventions et c'est la raison pour laquelle elle cherche à les consulter.

 

[15]         De plus, l'avocat de l'intimée reconnaît qu'il doit établir, au cas où il serait conclu que les appelantes étaient des non-résidentes au cours des années visées par les appels, que les avantages résultant des options d'achat d'actions découlent de fonctions exercées au Canada. Par conséquent, les conventions sont pertinentes, étant donné qu'elles renferment peut‑être des clauses, des déclarations ou des préambules qui indiquent la raison pour laquelle M. et Mme Walsh se sont vu attribuer les options d'achat d'actions et qui disent si certaines tâches devaient être exécutées au Canada.

 

[16]         L'avocat des appelantes déclare que, bien que le ministre ait signalé la possibilité que les conventions renferment des préambules ou des renseignements qui peuvent se rapporter à la question de la résidence ou à des questions concernant l'article 115 de la Loi, cela est également vrai pour d'autres documents que le ministre aurait pu demander dans lesquels étaient en cause soit les sociétés dont les titres étaient négociés, ou toute autre chose en litige. À son avis, le ministre ne s'est pas acquitté de l'obligation qui lui incombait de me convaincre qu'il existe une possibilité raisonnable que les documents en question aident l'intimée dans sa cause ou nuisent à celle des appelantes.

 

[17]         Comme il en a été fait mention dans l'arrêt SmithKline Beecham Animal Health c. Canada[2], la portée et l'application de l'article 95 des Règles, précité, dépendent des mots « pertinentes à une question en litige ». De plus, le sens des mots « qui sont pertinents à toute question en litige entre les parties à l'appel », au paragraphe 82(1)[3] des Règles, peut nous aider dans une certaine mesure lorsqu'il s'agit de déterminer la portée et l'application de l'article 95 des Règles. Au paragraphe 24 de l'arrêt SmithKline, la juge Sharlow a cité le lord juge Brett relativement au sens des mots [traduction] « un document qui a trait à tout point litigieux de l'action »[4] :

 

La portée et l'application des règles précitées dépendent du sens de ces mots : « qui portent sur toute question en litige entre les parties à l'appel » et « aux questions légitimes qui se rapportent à une question en litige ». Dans Compagnie Financière et Commerciale du Pacifique c. Peruvian Guano Company (1882), 11 Q.B.D. 55 (C.A.), à propos du sens des mots [traduction] « un document qui a trait à tout point litigieux de l'action » , à la page 63, le lord juge Brett dit ceci :

[traduction] À mon avis, un document a trait aux points litigieux de l'action non seulement lorsqu'il constitue une preuve à l'égard de ces points litigieux mais également lorsqu'on peut raisonnablement supposer qu'il contient des renseignements pouvant -- et non devant -- soit directement soit indirectement, permettre à la partie qui exige l'affidavit ou bien de plaider sa propre cause ou bien de nuire à celle de son adversaire. J'ai dit « soit directement soit indirectement » parce que, à mon avis, un document peut, à proprement parler, contenir des renseignements pouvant permettre à la partie qui exige l'affidavit soit de plaider sa propre cause soit de nuire à celle de son adversaire s'il s'agit d'un document susceptible de la lancer dans une enquête et d'entraîner l'une ou l'autre de ces conséquences...

 

 

[18]         L'avocat des appelantes a également invoqué l'arrêt SmithKline, paragraphes 26 et 29, à l'appui de la thèse selon laquelle la réponse à la question de savoir si un document a trait à une question visée par l'appel dépend d'une interprétation raisonnable des actes de procédure.

 

[19]         Les appelantes soutiennent qu'il incombe à la partie qui demande un document de démontrer que les renseignements qui y figurent pourront l'aider dans sa cause ou nuire à celle de son adversaire. La partie requérante doit démontrer que le document ou les renseignements demandés sont légitimement susceptibles de la lancer dans une enquête qui l'aiderait dans sa propre cause ou qui lui permettrait de nuire à celle de son adversaire. Par conséquent, le ministre doit démontrer que les renseignements et les documents demandés sont légitimement susceptibles de le lancer dans une enquête pouvant l'aider dans sa cause ou lui permettre de nuire à celle des appelantes. L'intimée doit démontrer que les documents et les renseignements demandés ont trait à la question de savoir si les appelantes résidaient au Canada au cours des années visées par les appels ou que les avantages résultant de la levée d'options d'achat d'actions au cours de la période pertinente se rapportent aux fonctions de charges et d'emplois exercées au Canada.

 

[20]         L'avocat de l'intimée a invoqué la décision Baxter c. La Reine[5] à l'appui de la thèse selon laquelle le seuil en ce qui concerne la pertinence est relativement peu élevé. Dans l'affaire Baxter, l'intimée sollicitait une ordonnance enjoignant à l'appelant de répondre à un certain nombre de questions auxquelles son avocat lui avait conseillé de ne pas répondre lors de l'interrogatoire préalable. L'objection était fondée sur ce que les questions et réponses n'étaient pas pertinentes. Le juge en chef adjoint Bowman (tel était alors son titre) a fait les remarques suivantes au sujet de la pertinence :

 

12        Les principes à appliquer lorsqu'il s'agit d'autoriser ou de rejeter des questions dans le cadre d'un interrogatoire préalable sont passablement bien établis. Le critère préliminaire applicable à la pertinence est peu rigoureux. L'avocat ne devrait pas être empêché de poser une question simplement parce que cette question peut, isolément, sembler non pertinente. Les tactiques employées dans le cadre d'un interrogatoire préalable varient d'un avocat à l'autre et le genre de questions posées peut simplement dépendre du style particulier de l'avocat. [...]

 

[21]         Le juge en chef adjoint Bowman a résumé, au paragraphe 13, les principes qu'il faut appliquer à l'égard de la pertinence, dans le cadre d'un interrogatoire préalable :

 

13        Compte tenu de ces jugements ainsi que des autres décisions faisant autorité mentionnées par l'avocat, je puis résumer les principes qui doivent s'appliquer :

a)      la question de la pertinence, dans le cadre de l'interrogatoire préalable, doit être interprétée d'une façon large et libérale et il faut accorder une grande latitude;

b)    le juge des requêtes ne doit pas remettre en question le pouvoir discrétionnaire en examinant minutieusement chaque question ou en demandant à l'avocat de la partie interrogée de justifier chaque question ou d'expliquer sa pertinence;

c)      le juge des requêtes ne devrait pas chercher à imposer son opinion au sujet de la pertinence au juge qui entend l'affaire en excluant des questions qu'il estime non pertinentes, mais que ce dernier, dans le contexte de la preuve dans son ensemble, pourrait considérer comme pertinentes;

d)    les questions manifestement non pertinentes ou abusives ou les questions destinées à embarrasser ou à harceler le témoin ou à retarder le procès ne doivent pas être autorisées.

 

 

[22]         L'avocat de l'intimée a donc déclaré que les conventions qui se rapportent à une option d'achat d'actions et dont il demande la production peuvent fort bien être pertinentes relativement à sa thèse, à savoir que les appelantes résidaient au Canada ou, si elles étaient non‑résidentes, que les avantages résultant des options d'achat d'actions découlaient de fonctions exercées au Canada. Les conventions peuvent aider l'intimée à établir la résidence ou le fait que les appelantes exerçaient des fonctions au Canada, étant donné que ces conventions contiennent peut‑être des préambules, des déclarations ou des assertions concernant ce que les appelantes faisaient en 1995 et en 1996 et concernant la raison pour laquelle les options d'achat d'actions avaient été accordées.

 

[23]         L'avocat des appelantes a fait valoir que la décision qui a été rendue dans l'affaire Baxter portait sur des interrogatoires préalables oraux. Il a déclaré que le critère énoncé dans la décision Baxter vise expressément les interrogatoires préalables oraux et les questions de tactique. L'avocat a fait remarquer que, même si la décision Baxter est postérieure à l'arrêt SmithKline, le juge en chef adjoint Bowman ne semble pas avoir eu à sa disposition les motifs rendus dans l'affaire SmithKline, étant donné que les parties n'avaient pas invoqué cet arrêt devant lui. Toutefois, l'avocat des appelantes estimait que le critère énoncé dans la décision Baxter ne différait pas vraiment beaucoup de celui qui avait été adopté dans l'arrêt SmithKline. L'avocat a affirmé que, bien que le juge en chef adjoint Bowman eût adopté un critère large dans la décision Baxter, il ne s'était pas montré aussi généreux lorsqu'il s'était agi de permettre les questions auxquelles on demandait des réponses.

 

[24]         Un interrogatoire préalable est un interrogatoire préalable, et ce, qu'il soit fait oralement ou par écrit. Je ne suis pas d'accord avec les appelantes lorsqu'elles affirment que les remarques du juge en chef adjoint Bowman s'appliquent uniquement à l'interrogatoire préalable oral. Les articles des Règles relatifs aux interrogatoires préalables, et notamment l'article 95, s'appliquent aux interrogatoires préalables effectués par écrit, sauf indication contraire; or, en l'espèce, il n'existe aucune indication contraire.

 

[25]         Dans la décision AstraZeneca Canada Inc. c. Apotex Inc.[6], le juge Hughes, de la Cour fédérale, a examiné le système de la communication préalable qui existe dans les tribunaux canadiens. Le juge a cité un exposé[7] de James Farley, c.r., auparavant juge à la Cour supérieure de justice de l'Ontario, Rôle commercial, qui a critiqué fortement le type de communication préalable qui « elle‑même devient l'objectif – en vue d'obtenir de l'autre partie le plus de renseignements possible même s'ils sont peu pertinents ». Le danger que présente ce type de communication préalable – qui a été appelé « la communication préalable sous forme d'"autopsie" » – est qu'on risque de perdre la perspective et de s'empêtrer dans la communication préalable plutôt que de « se concentrer sur l'obtention de ce qui est seulement nécessaire et pertinent pour le procès quant aux questions décrites dans les actes de procédure ».

 

[26]         L'avocat des appelantes fait valoir que les questions dans les actes de procédure sont axées sur la résidence des appelantes et sur la question de savoir si les appelantes exerçaient des fonctions au Canada pendant la période pertinente. Il soutient que le ministre doit convaincre la Cour que les conventions [traduction] « qui ont été conclues » sont pertinentes quant à ces questions et qu'il existe un motif raisonnable de demander pareils renseignements. Selon lui, le ministre ne peut pas s'acquitter de cette obligation, puisqu'il n'y a aucun motif raisonnable de supposer que les conventions relatives à une option d'achat d'actions, plus que tout autre genre de convention ou de document, lui permettront de se lancer dans une enquête qui pourrait être utile à sa cause.

 

[27]         Les questions en litige concernent les actes de procédure. Comme il en a ci‑dessus été fait mention, les faits énoncés dans les avis d'appel des appelantes se rapportent exclusivement à la question de la résidence des appelantes au cours des années visées par les appels. Les appelantes prétendent essentiellement qu'elles ne résidaient pas au Canada à ce moment‑là et qu'elles ne sont pas assujetties à l'impôt sur le revenu en vertu de la Loi. C'est l'intimée qui, dans ses réponses modifiées aux avis d'appel, indique les montants des avantages résultant des options d'achat d'actions de Bre‑X et de Bresea et la façon dont les montants ont été déterminés et calculés. Les appelantes n'ont pas déposé de réplique, de sorte que, conformément au paragraphe 50(2) des Règles, elles sont réputées avoir nié les allégations de fait contenues dans les réponses modifiées.

 

[28]         Les conventions relatives à une option d'achat d'actions, l'acquisition des options, l'acquisition des actions par suite de la levée des options, et les prix payés et reçus sont tous des éléments qui se rapportent à des questions en litige dans les appels, étant donné, entre autres choses, que les nouvelles cotisations sont fondées sur des conventions relatives à une option d'achat d'actions, sur la levée des options, sur l'acquisition d'actions et sur leur coût, et sur la réponse à la question de savoir si les appelantes résidaient au Canada. Les appelantes sont réputées avoir nié les montants indiqués au titre des avantages dans les réponses modifiées. Les conventions relatives à une option d'achat d'actions contiennent peut‑être des renseignements qui aideraient l'intimée dans sa propre cause ou lui permettraient de nuire à celle des appelantes. Ces questions ne sont pas non pertinentes ou abusives et elles ne visent pas à embarrasser les appelantes ou à retarder les appels.

 

[29]         L'intimée a le droit de poser aux appelantes des questions se rapportant aux montants établis dans les cotisations qui étaient tirés d'options d'achat d'actions qu'elles peuvent avoir reçues de Bre‑X et de Bresea. Toutefois, cela s'applique uniquement à la production des conventions relatives à une option d'achat d'actions dont la levée a donné lieu aux avantages inclus dans le revenu des appelantes aux fins de l'impôt pour chacune des années visées par les nouvelles cotisations. Il faudrait également répondre à la question de savoir combien d'options ont été acquises en vertu de ces conventions et combien d'options ont finalement été levées et indiquer le prix payé pour les options et le prix auquel les actions de ces sociétés ont été acquises.

 

[30]         La demande de l'intimée, de donner [traduction] « tous les détails au sujet de chaque convention relative à une option d'achat d'actions conclue par [les appelantes] [...] de 1993 à 1996 », est trop générale. Il se peut qu'au cours de ces années, des conventions n'ayant rien à voir avec les nouvelles cotisations ici en cause aient été conclues. Le fait que M. ou Mme Walsh peut être décrit comme un résident du Canada dans une convention conclue en 1993 ou en 1994 ne veut pas dire que M. Walsh résidait au Canada en 1995 ou en 1996 ou que Mme Walsh résidait au Canada en 1996. Seules doivent être fournies à l'intimée les conventions conclues entre l’un ou l’autre de M. et de Mme Walsh ou entre M. et Mme Walsh, d'une part, et Bre‑X ou Bresea, d'autre part, en 1993 et en 1994, qui ont fait l'objet de levées d'option de la part de M. et de Mme Walsh, et qui se rapportent aux nouvelles cotisations ici en cause. Les conventions, s'il en est, relatives à une option d'achat d'actions qui ont été conclues par M. et Mme Walsh avec Bre‑X ou Bresea en 1995 et en 1996 doivent également être produites. Les renseignements demandés à alinéa b), sous‑alinéas i) à iv) et aux alinéas c) et d) de la question 20 doivent être fournis à l'égard des conventions relatives à une option d'achat d'actions dont la levée par M. et Mme Walsh a finalement donné lieu à des avantages qui ont été inclus dans l'établissement des nouvelles cotisations visées par les appels.

 

[31]         Les conventions, s'il en est, relatives à une option d'achat d'actions de Bro‑X et toute levée d'une telle option ne sont pas visées, selon les actes de procédure, par les nouvelles cotisations en cause, et elles ne semblent pas pertinentes. Elles n'ont pas à être fournies à l'intimée.


 

[32]         Les dépens suivront l'issue de la cause.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de juin 2009.

 

 

« Gerald J. Rip »

Juge en chef Rip

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour d’octobre 2009.

 

 

 

 

Erich Klein, réviseur


 

 

RÉFÉRENCE :                                  2009 CCI 301

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2004-4083(IT)G et 2004-4085(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              JEANNETTE WALSH c. SA MAJESTÉ LA REINE et LA SUCCESSION DE DAVID G. WALSH c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 5 mars 2009

 

MOTIFS DE

L'ORDONNANCE PAR :                  L’honorable juge en chef Gerald J. Rip

 

DATE DE L'ORDONNANCE :          Le 5 juin 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelantes :

Me Michael Hunziker

Avocat de l’intimée :

Me Louis L'Heureux

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                             Michael Hunziker

 

                   Cabinet :                         Lenczner Slaght Royce Smith Griffin LLP

                                                          Toronto (Ontario)

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1]           Les questions 20 et 21 sont identiques. La question 20 se rapporte aux questions écrites de l'interrogatoire préalable de M. David Walsh et la question 21 se rapporte aux questions écrites de l'interrogatoire préalable de Mme Jeannette Walsh.

[2]           [2002] A.C.F. no 837 (C.A.F.) (QL).

[3]              Le paragraphe 82(1) des Règles prévoit ce qui suit :

82.(1) Les parties peuvent convenir ou, en l’absence d’entente, demander à la Cour d’émettre une ordonnance obligeant chaque partie à déposer et à signifier à l’autre partie une liste de tous les documents qui sont ou ont été en la possession, sous le contrôle ou sous la garde de cette partie et qui sont pertinents à toute question en litige entre les parties à l’appel.

82. (1) The parties may agree or, in the absence of agreement, either party may apply to the Court for an order directing that each party shall file and serve on each other party a list of all the documents that are or have been in that party’s possession, control or power relevant to any matter in question between or among them in the appeal.

 

[4]           Compagnie Financière et Commerciale du Pacifique v. Peruvian Guano Company (1882), 11 Q.B.D. 55 (C.A.), page 63.

[5]           Cour canadienne de l'impôt, 2002-4030(IT)G, 6 octobre 2004, 2004 CCI 636, [2005] 1 C.T.C. 2001 (C.C.I.).

[6]               [2008] A.C.F. 1696 (QL), 2008 CF 1301.

[7]           Efficient Court Administration and Commercial Court Litigation and Dispute Resolution, exposé présenté à Nassau, aux Bahamas, le 1er décembre 2006.

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