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Dossier : 2009­1024(EI)

ENTRE :

WILCOM SYSTEMS LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel concernant le RPC interjeté par l'appelante (2009­1025(CPP)) le 8 octobre 2009,

à Ottawa, Canada.

 

Devant : L'honorable juge François Angers

 

Comparutions :

 

Avocate de l'appelante :

 

Me Caroline Richard

Avocate de l'intimé :

Me Sara Chaudhary

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

L'appel interjeté à l’encontre des évaluations établies au titre de la Loi sur l'assurance‑emploi pour la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2007 est accueilli et les évaluations sont annulées, conformément aux motifs de jugement ci‑joints.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de novembre 2009.

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de février 2010.

 

Christian Laroche, LL.B.

Réviseur

 

 


 

 

Dossier : 2009­1025(CPP)

ENTRE :

WILCOM SYSTEMS LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel concernant l'AE interjeté par l'appelante (2009­1024(EI)), le 8 octobre 2009,

à Ottawa, Canada.

 

Devant : L'honorable juge François Angers

 

Comparutions :

 

Avocate de l'appelante :

 

Me Caroline Richard

Avocate de l'intimé :

Me Sara Chaudhary

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

L'appel interjeté à l’encontre des évaluations établies au titre du Régime de pensions du Canada pour la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2007 est accueilli et les évaluations sont annulées, conformément aux motifs de jugement ci‑joints.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de novembre 2009.

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de février 2010.

 

Christian Laroche, LL.B.

Réviseur

 


 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 574

Date : 20091127

Dossiers : 2009­1024(EI)

2009­1025(CPP)

 

ENTRE :

WILCOM SYSTEMS LTD.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Angers

 

[1]              L'appelante a fait l'objet d'évaluations à l'égard de cotisations au Régime de pensions du Canada et à l'assurance‑emploi, pour les années 2005, 2006 et 2007, par suite d'une décision par laquelle le ministre du Revenu national (le « ministre ») avait conclu que, pour la période allant du 1er janvier 2004 au 14 juin 2006, un certain Danny Prince exerçait auprès de l'appelante un emploi assurable ouvrant droit à pension au sens de l'alinéa 5(1)a) de la Loi sur l'assurance‑emploi (la « LAE ») et de l'alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada (le « RPC »), étant donné qu'il y avait entre l'appelante et M. Prince une relation employeur‑employé.

 

[2]              L'appelante exploite une entreprise dans le cadre de laquelle elle fournit à ses clients des services de technologie de l'information, à savoir la planification, la mise en application et le soutien en matière informatique. Au mois de mars 2002, elle a conclu avec Sa Majesté la Reine, représentée par le ministre des Ressources naturelles du Canada (ci‑après appelé « RNCan »), un contrat en vue de fournir des services d'assistance de premier niveau (lorsque des défaillances et des problèmes techniques sont signalés) au Secteur des services intégrés de RNCan, à ses têtes dirigeantes et au Service canadien des forêts. La durée du contrat était de deux ans (du 1er avril 2002 au 31 mars 2004), RNCan pouvant à son gré renouveler le contrat pour trois périodes additionnelles d'un an.

 

[3]              Le service d'assistance de premier niveau devait être fourni par un superviseur et par trois agents. Le service d'assistance était situé dans les locaux de RNCan et RNCan fournissait tout le matériel nécessaire pour effectuer le travail. Les services devaient être offerts au cours des heures d'ouverture de RNCan ainsi que sur demande en dehors des heures d'ouverture.

 

[4]              Le contrat prévoyait une somme forfaitaire maximale à verser à l'entrepreneur, mais l'appelante facturait chaque mois à RNCan, sur une base quotidienne, les services de chaque agent, qui fournissait ses services chaque jour pendant 7,5 heures. Afin d'établir sa facture, l'appelante se fondait sur les factures soumises par ses sous‑traitants (les « agents »).

 

[5]              Afin de pourvoir aux postes d'agent, l'appelante disposait d'un groupe de personnes qui ont été désignées comme étant des entrepreneurs indépendants offrant leurs services. Selon la nature du contrat et les services à fournir, l'appelante affichait des avis; elle convoquait les entrepreneurs indépendants à des entrevues et elle négociait les conditions avec ceux‑ci. L'appelante décrit ces conditions comme étant des contrats de sous‑traitance conclus au niveau d'une entreprise. L'appelante préfère avoir recours à des entrepreneurs indépendants pour des raisons commerciales, en ce sens qu'elle n'a pas à faire preuve de loyauté envers eux, qu'elle n'a pas à faire appel à leurs services après la fin du contrat initial et que les entrepreneurs indépendants possèdent toutes les connaissances et les aptitudes requises pour fournir les services, de sorte que l'appelante n'a pas à assurer leur formation.

 

[6]              Danny Prince est un spécialiste de service d'assistance qui a suivi divers cours et qui a reçu une formation dans le domaine du service à la clientèle et du dépannage. En 2004, un ami lui a dit que RNCan avait recours à des agents de service d'assistance et qu'il y avait un poste vacant. M. Prince a communiqué avec le superviseur du service d'assistance, qui l'a renvoyé à l'appelante.

 

[7]              Des négociations ont eu lieu et l'appelante a offert d'embaucher Danny Prince à titre d'employé ou à titre de sous‑traitant. M. Prince a décidé de faire ce que faisaient les autres agents et d'agir à titre de sous‑traitant. Les négociations comportaient des offres et des contre‑offres, visant à maximiser la marge de profit de l'appelante. Les sous‑traitants n'étaient pas tous rémunérés au même taux, étant donné que l'appelante devait satisfaire à l'objectif visé. Danny Prince estimait qu'à titre de sous‑traitant, il agirait à sa guise et que la chose serait plus avantageuse pour lui, en ce sens qu'il s'occuperait de ses propres impôts et de la paie de vacances. En d'autres termes, et pour une raison ou une autre, la sous‑traitance était plus rémunératrice. M. Prince a été informé par un collègue qu'il devait s'inscrire aux fins de la taxe sur les produits et services (la « TPS ») et, d'une façon générale, M. Prince estimait agir à titre d'entrepreneur indépendant, comme les autres agents. Des contrats de sous‑traitance ont été signés; ces contrats étaient assujettis au contrat de RNCan. Il a été mis fin aux services de Danny Prince en même temps que les services que l'appelante fournissait à RNCan.

 

[8]              Le contrat de sous‑traitance prévoyait un taux quotidien, pour une journée de travail de 7,5 heures. La durée du contrat de sous‑traitance était fonction de la durée du contrat initial conclu avec RNCan, et si ce contrat était prorogé, le contrat de sous‑traitance était renégocié et une annexe indiquant les modifications y était jointe. Le contrat de sous‑traitance prévoit clairement que les parties ne veulent pas entretenir une relation employeur‑employé et que le sous‑traitant est engagé à titre d'entrepreneur indépendant aux seules fins de fournir un service.

 

[9]              Danny Prince a témoigné avoir fort peu eu affaire à l'appelante pendant la durée de son contrat de sous‑traitance. Il lui incombait de régler les problèmes qui survenaient dans le cadre de son travail. S'il n'arrivait pas à régler un problème, le problème était renvoyé au second niveau. M. Prince ne communiquait avec l'appelante qu'en ce qui concerne ses feuilles de présence. M. Prince enregistrait ses heures à l'ordinateur et il établissait une feuille de présence qui devait également être signée par RNCan et qui servait à établir la facture que M. Prince soumettait à l'appelante, et que l'appelante utilisait de son côté pour facturer le travail à RNCan. M. Prince facturait ses heures à l'appelante les 15e et 30e jours de chaque mois, et il ajoutait la TPS applicable au montant facturé.

 

[10]         Danny Prince ne faisait l'objet d'aucune supervision en tant que telle. Il était responsable de son propre travail, et, si sa compétence avait été mise en question, la question aurait été soulevée aux réunions régulières que l'appelante avait avec des représentants de RNCan. M. Prince n'était pas rémunéré si son rendement n'était pas satisfaisant, et bien qu'il ait pu se faire remplacer, à condition que la personne qu'il choisissait soit compétente et obtienne l'autorisation de sécurité nécessaire, c'était habituellement l'appelante qui choisissait le remplaçant, soit quelqu'un qui avait déjà accès au bâtiment, qui connaissait les codes de sécurité et qui était dûment autorisé.

 

[11]         Quant aux services fournis sur demande, les agents utilisaient à domicile leurs propres ordinateurs afin d'accéder à ceux de RNCan et la personne qui était de service avait à sa disposition un téléavertisseur fourni par l'appelante. Danny Prince déduisait les frais de bureau à domicile dans sa déclaration de revenus.

 

[12]         Le superviseur du service d'assistance était également un sous‑traitant de l'appelante. Il a témoigné n'avoir eu aucun pouvoir sur les agents qui agissaient à titre de sous‑traitants. Ses tâches consistaient notamment à veiller à ce qu'il soit satisfait aux exigences de l'appelante et, à cette fin, le superviseur traitait avec l'appelante et avec le représentant de RNCan, un certain André Arseneault. M. Arseneault approuvait et signait les feuilles de présence des agents. Le remplaçant de M. Arseneault croyait à un moment donné être directeur des agents et il a essayé d'effectuer certains changements, mais on lui a dit que les agents avaient été engagés en vertu d'un contrat conclu avec l'appelante, et non avec RNCan.

 

[13]         Le superviseur a confirmé que les agents établissaient leurs propres horaires. Il a également dit qu'il n'assurait pas la formation des agents, mais qu'il partageait sa connaissance du système avec eux. Il n'était pas autorisé à congédier qui que ce soit, et tout problème majeur devait être réglé avec l'appelante. RNCan exigeait que le superviseur soit présent afin de veiller à ce que les choses soient faites d'une façon ordonnée.

 

[14]         Il s'agit de savoir si Danny Prince travaillait à titre d'employé ou s'il travaillait à titre d'entrepreneur indépendant en sa qualité d'agent du service d'assistance de premier niveau.

 

[15]         La Cour suprême du Canada a examiné la question dans l'arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] A.C.S. 61 (QL), 2001 CSC 59. Le juge Major a dit ce qui suit aux paragraphes 46, 47 et 48 :

 

46                             À mon avis, aucun critère universel ne permet de déterminer, de façon concluante, si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant. Lord Denning a affirmé, dans l’arrêt Stevenson Jordan, précité, qu’il peut être impossible d’établir une définition précise de la distinction (p. 111) et, de la même façon, Fleming signale que [traduction] « devant les nombreuses variables des relations de travail en constante mutation, aucun critère ne semble permettre d’apporter une réponse toujours claire et acceptable » (p. 416). Je partage en outre l’opinion du juge MacGuigan lorsqu’il affirme — en citant Atiyah, op. cit., p. 38, dans l’arrêt Wiebe Door, p. 563 — qu’il faut toujours déterminer quelle relation globale les parties entretiennent entre elles :

 

 

       [traduction] [N]ous doutons fortement qu’il soit encore utile de chercher à établir un critère unique permettant d’identifier les contrats de louage de services [. . .]  La meilleure chose à faire est d’étudier tous les facteurs qui ont été considérés dans ces causes comme des facteurs influant sur la nature du lien unissant les parties. De toute évidence, ces facteurs ne s’appliquent pas dans tous les cas et n’ont pas toujours la même importance. De la même façon, il n’est pas possible de trouver une formule magique permettant de déterminer quels facteurs devraient être tenus pour déterminants dans une situation donnée.

 

47                             Bien qu’aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l’employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s’il engage lui-même ses assistants, quelle est l’étendue de ses risques financiers, jusqu’à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu’à quel point il peut tirer profit de l’exécution de ses tâches.

 

48                             Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n’y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l’affaire.

 

 

[16]         Ces facteurs ont été jugés fort utiles pour trancher la question. La relation globale des intéressés ainsi que leur intention doivent être prises en considération. La question de l'intention a fait l'objet d'un grand nombre de décisions de la part de la présente cour et, en particulier, de la Cour d'appel fédérale, qui a conclu que, si la nature du contrat est suffisamment claire, il se peut qu'il ne soit pas nécessaire d'avoir recours à l'arrêt Sagaz. Dans l'arrêt Wolf c. Canada, [2002] 4 C.F. 396, le juge Décary a suggéré une telle possibilité en déclarant ce qui suit au paragraphe 119 :

 

Les contribuables peuvent organiser leurs affaires de la façon légale qu’ils désirent. Personne n’a suggéré que M. Wolf ou Canadair ou Kirk-Mayer ne sont pas ce qu’ils disent être ou qu’ils ont arrangé leurs affaires de façon à tromper les autorités fiscales ou qui que ce soit. Lorsqu’un contrat est signé de bonne foi comme un contrat de service et qu’il est exécuté comme tel, l’intention commune des parties est claire et l’examen devrait s’arrêter là. Si ce n’était pas suffisant, il suffit d’ajouter qu’en l’espèce, les circonstances dans lesquelles le contrat a été formé, l’interprétation que lui ont donnée les parties et l’usage dans l’industrie aérospatiale conduisent tous à conclure que M. Wolf n’est pas dans une position de subordination et que Canadair n’est pas dans une position de contrôle. La « question centrale » a été définie par le juge Major dans l’affaire Sagaz comme étant : « si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte ». Il est clair, à mon avis, que M. Wolf a exécuté des services professionnels à titre de personne qui travaillait pour son propre compte.

 

 

[17]         Dans la même décision, le juge Noël a ajouté les remarques suivantes, aux paragraphes 122, 123 et 124 :

 

[122]      J’accueillerais aussi l’appel. À mon avis, il s’agit d’un cas où la qualification que les parties ont donnée à leur relation devrait se voir accorder un grand poids. Je reconnais que la façon dont les parties décident de décrire leur relation n’est pas habituellement déterminante, en particulier lorsque les critères juridiques applicables pointent dans l’autre direction. Mais, dans une issue serrée comme en l’espèce, si les facteurs pertinents pointent dans les deux directions avec autant de force, l’intention contractuelle des parties et en particulier leur compréhension mutuelle de la relation ne peuvent pas être laissées de côté.

 

[123]      Mon évaluation des critères juridiques applicables aux faits de l’espèce est essentiellement la même que celle de mes collègues. J’estime que leur évaluation du critère de contrôle, du critère d’intégration et de la propriété des outils n’est pas concluante, ni dans un sens ni dans l’autre. En ce qui concerne le risque financier, je conviens avec respect avec mes collègues que l’appelant, en contrepartie d’un salaire plus élevé, avait renoncé à bon nombre des prestations qui étaient habituellement dévolues à l’employé, y compris la sécurité d’emploi. Toutefois, je conviens avec la juge de la Cour de l’impôt que l’appelant était payé pour ses heures travaillées, quels que soient les résultats atteints, et qu’en ce sens, il ne supportait pas plus de risques qu’un employé ordinaire. Mon évaluation de l’ensemble de la relation entre les parties ne n’amène pas à une conclusion claire et c’est pourquoi, selon moi, il faut examiner la façon dont les parties voyaient leur relation.

 

[124]      Ce n’est pas un cas où les parties qualifiaient leur relation d’une façon telle que cela leur procure un avantage fiscal. Aucune manœuvre frauduleuse ou aucun maquillage de quelque sorte n’est allégué. Il s’ensuit que la manière dont les parties ont pu voir leur entente doit l’emporter à moins qu’elles ne se soient trompées sur la véritable nature de leur relation. À cet égard, la preuve, lorsqu’elle est évaluée à la lumière des critères juridiques pertinents, est pour le moins neutre. Comme les parties ont estimé qu’elles se trouvaient dans une relation d’entrepreneur indépendant et qu’elles ont agi d’une façon conforme à cette relation, je n’estime pas que la juge de la Cour de l’impôt avait le loisir de ne pas tenir compte de cette entente (à comparer avec l’affaire Montreal v. Montreal Locomotive Works Ltd., [1947] 1 D.L.R. 161, à la page 170).

 

 

[18]         La Cour d'appel fédérale a adopté cette approche dans les arrêts Combined Insurance Company of America v. Minister of National Revenue, 2007 CAF 60, et Le Livreur Plus Inc. c. Ministre du Revenu national, 2004 CAF 68.

 

[19]         Si j'applique maintenant les principes susmentionnés, je juge que la preuve en l'espèce ne permet pas de conclure que l'appelante et Danny Prince n'avaient pas vraiment et délibérément conclu un contrat d'entreprise ou qu'ils avaient établi leurs relations sur la base d'un tel contrat afin d'obtenir un avantage dont ils n'auraient pas pu par ailleurs se prévaloir. À coup sûr, l'appelante estimait qu'il était avantageux de sous‑traiter son travail, mais à mon avis, cela fait partie d'une décision commerciale facilitant le calcul de coût des affaires et permettant de cesser d'avoir recours aux membres du personnel à la fin de leurs contrats, ou encore d'une décision fondée sur d'autres considérations commerciales valables.

 

[20]         Quant à Danny Prince, on lui a clairement donné le choix et il a décidé de fournir ses services à titre d'entrepreneur indépendant, plutôt que dans le cadre d'une relation employeur‑employé. M. Prince a peut‑être bien simplement suivi l'exemple des autres agents du service d'assistance, mais le fait qu'il allait gagner plus d'argent était pour lui une considération importante. Le contrat de sous‑traitance conclu entre l'appelante et Danny Prince est un contrat valide ayant force exécutoire qui a été conclu d'une façon délibérée et consensuelle. Pour intervenir dans pareille opération commerciale, la Cour devrait décider que les facteurs mentionnés dans l'arrêt Sagaz militent fortement en faveur d'une relation employeur‑employé.

 

[21]         À mon avis, il n'est pas nécessaire d'analyser ces facteurs dans ce cas‑ci, étant donné que la preuve indique clairement que l'affaire se situe dans ce qu’on appelle la zone grise, où les facteurs jouent dans les deux sens. Les postes ici en cause devaient être occupés par des experts ayant déjà une formation complète, étant donné qu'aucun contrôle réel n'était exercé sur le travail : une fois le travail assigné, le travailleur devait exercer lui‑même un contrôle sur son travail. Les instruments de travail et le matériel appartenaient à RNCan, et ce, même si Danny Prince devait posséder son propre ordinateur chez lui. La possibilité de profit ou le risque de perte ne constituent pas un facteur déterminant dans ce cas‑ci, et ce, même si Danny Prince pouvait déduire des frais de bureau à domicile ou perdre parfois de l'argent s'il s'absentait de son travail. Le fait que Danny Prince ne pouvait pas embaucher un remplaçant était en partie lié à des raisons de sécurité, mais le fait que tout remplaçant devait avoir la formation requise justifiait l'intervention de l'appelante, lorsqu'il s'agissait de veiller à ce que le contrat soit exécuté.

 

[22]         En fait, si certains facteurs étaient pris en considération, ces facteurs pourraient facilement militer en faveur de l'existence d'une relation employeur‑employé entre Danny Prince et RNCan. M. Prince était bien intégré aux activités quotidiennes de RNCan. RNCan fournissait les instruments de travail et le travail était exécuté dans les locaux de RNCan. Un certain degré de contrôle était exercé par M. Arsenault sur une base quotidienne. Toutefois, cette relation n'est pas ici en cause.

 

[23]         Je conclus donc que Danny Prince n'exerçait pas auprès de l'appelante un emploi assurable ouvrant droit à pension. L'appel est accueilli et les évaluations sont annulées dans les deux appels.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de novembre 2009.

 

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de février 2010.

 

Christian Laroche, LL.B.

Réviseur

 


RÉFÉRENCE :                                  2009 CCI 574

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR : 2009­1024(EI), 2009­1025(CPP)

 

INTITULÉ :                                       Wilcom Systems Ltd.

                                                          c.

                                                          M.R.N.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Ottawa, Canada

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 8 octobre 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge François Angers

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 27 novembre 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Avocate de l'appelante :

Me Caroline Richard

Avocate de l’intimé :

Me Sara Chaudhary

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                             Caroline Richard

                   Cabinet :                         Bird Richard

                                                          Ottawa (Ontario)

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 

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