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Dossier : 2008-1019(IT)I

ENTRE :

LOUISE C. NORTON,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

____________________________________________________________________

 

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Gregory W. Norton (2008-1020(IT)I) les 27 et 29 mai, 1er juin et 1er et 2 décembre 2009, à Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

 Devant : L’honorable juge Wyman W. Webb

 

 Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Joseph M. J. Cooper

 

Avocat de l’intimée :

Me Toks C. Omisade

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          Les appels interjetés à l’égard des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2001, 2002, 2003 et 2004 de l’appelante sont accueillis, avec dépens, et l’affaire est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en tenant pour acquis que :

 

a)       pour les années visées par l’appel, les montants suivants sont déduits des revenus de la société de personnes constituée par l’appelante et Gregory Norton :

 

Description

2001

2002

2003

2004

Déductions accordées d’un commun accord :

2 434 $

1 588 $

6 006 $

1 888 $

Filets, pièges et autre matériel connexe :

2 768 $

5 521 $

12 082 $

11 376 $

Moulinets et autre matériel connexe :

3 600 $

7 578 $

4 386 $

3 855 $

Évaluation foncière et analyse de la qualité de l’eau :

8 $

8 $

8 $

8 $

Intérêts pour 2003 (dette liée au Ford Explorer 2000) – 25 % de 1 354 $ :

 

 

338 $

 

Véhicules tout‑terrain – réparation et nouveaux pneus :

 

 

267 $

 

Péages :

302 $

231 $

38 $

39 $

Location d’un rouleau à pierres :

 

80 $

 

 

Total :

9 112 $

15 006 $

23 125 $

17 166 $

 

et

 

b)      les 215,04 $ déboursés en 2002 par l’appelante et Gregory Norton pour acheter un récepteur à balayage permettant de capter les fréquences de la police doivent être ajoutés à la fraction non amortie du coût en capital des actifs de catégorie 8 de la société de personnes;

 

          La Cour ordonne aussi que le droit de dépôt de 100 $ payé par l’appelante lui soit remboursé.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de février 2010.

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de juillet 2010.

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


 

 

 

 

Dossier : 2008-1020(IT)I

ENTRE :

GREGORY W. NORTON,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

____________________________________________________________________

 

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de

Louise C. Norton (2008-1019(IT)I) les 27 et 29 mai, 1er juin et 1er et 2 décembre 2009, à Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

 Devant : L’honorable juge Wyman W. Webb

 

 Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me Joseph M. J. Cooper

 

Avocat de l’intimée :

Me Toks C. Omisade

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          Les appels interjetés à l’égard des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2001, 2002, 2003 et 2004 de l’appelant sont accueillis, avec dépens, et l’affaire est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en tenant pour acquis que :

 

a)       pour les années visées par l’appel, les montants suivants sont déduits des revenus de la société de personnes constituée par l’appelant et Louise Norton :

 

Description

2001

2002

2003

2004

Déductions accordées d’un commun accord :

2 434 $

1 588 $

6 006 $

1 888 $

Filets, pièges et autre matériel connexe :

2 768 $

5 521 $

12 082 $

11 376 $

Moulinets et autre matériel connexe :

3 600 $

7 578 $

4 386 $

3 855 $

Évaluation foncière et analyse de la qualité de l’eau :

8 $

8 $

8 $

8 $

Intérêts pour 2003 (dette liée au Ford Explorer 2000) – 25 % de 1 354 $ :

 

 

338 $

 

Véhicules tout‑terrain – réparation et nouveaux pneus :

 

 

267 $

 

Péages :

302 $

231 $

38 $

39 $

Location d’un rouleau à pierres :

 

80 $

 

 

Total :

9 112 $

15 006 $

23 125 $

17 166 $

 

b)      les 215,04 $ déboursés en 2002 par l’appelant et Louise Norton pour acheter un récepteur à balayage permettant de capter les fréquences de la police doivent être ajoutés à la fraction non amortie du coût en capital des actifs de catégorie 8 de la société de personnes;

 

c)       le produit de la vente par Gregory Norton de son permis de pêche au homard en 2002 était de 75 000 $ et non pas de 100 000 $.

 

          La Cour ordonne aussi que le droit de dépôt de 100 $ payé par l’appelant lui soit remboursé.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de février 2010.

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de juillet 2010.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


 

 

 

 

Référence : 2010 CCI 62

Date : 20100202

Dossier : 2008-1019(IT)I

ENTRE :

LOUISE C. NORTON,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2008-1020(IT)I

ET ENTRE :

 

GREGORY W. NORTON,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Webb

 

[1]     Les appelants, qui sont mariés ensemble, exploitaient une entreprise de pêche par l’entremise d’une société de personnes tout au long des années 2001, 2002, 2003 et 2004. Les parties ont convenu d’attribuer 50,5 % des bénéfices (ou des pertes) de la société de personnes à Gregory Norton et 49,5 % des bénéfices (ou des pertes) à Louise Norton. Après que l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») a mené une vérification très approfondie, de nouvelles cotisations ont été établies à l’égard des appelants. Par ces nouvelles cotisations :

 

a)                 certaines des déductions demandées au titre de dépenses ont été refusées en partant du principe que ces dépenses n’avaient pas été faites ou qu’il s’agissait de dépenses personnelles;

 

b)                d’autres dépenses ont été re‑catégorisées comme dépenses en capital;

 

c)                 le pourcentage d’utilisation à des fins commerciales des automobiles a été réduit (cela a entraîné une réduction de la déduction accordée au titre de frais d’automobile);

 

d)                le pourcentage d’utilisation du domicile pour le travail a été réduit (cela a entraîné une réduction de la déduction accordée au titre de frais d’utilisation du domicile pour le travail).

 

De plus, lorsque les déclarations de revenus des appelants avaient été établies et produites, il n’avait pas été tenu compte de l’acquisition et de la disposition de certaines immobilisations.

 

[2]     Les hypothèses de fait sur lesquelles le ministre du Revenu national (le « ministre ») s’est fondé pour déterminer l’impôt à payer des appelants pour 2001, 2002, 2003 et 2004 sont exposées au paragraphe 9 de la réponse à l’avis d’appel, qui compte 34 pages, dont 6 pages d’annexes. Le paragraphe 9 de la réponse comporte 81 alinéas (allant de a) à cccc)), dont plusieurs sont divisés en sous‑alinéas. Plusieurs de ces alinéas et sous‑alinéas incluent des tableaux où figurent diverses sommes. Il va sans dire que la durée de l’audience a dépassé l’unique journée d’audience qui avait été prévue.

 

[3]     Un long intervalle a séparé la conclusion des plaidoiries des appelants, le 1er juin 2009, et le début des plaidoiries de l’intimée, le 1er décembre 2009. Pendant cette période, les parties ont conclu et signé un exposé conjoint partiel des faits dans lequel figure une liste de déductions auxquelles les appelants ont renoncé et de déductions que l’intimée a accordées. Comme les déductions abandonnées par les appelants ne modifieraient pas les nouvelles cotisations en cause, il n’est pas nécessaire d’en dresser la liste.

 

[4]     Le tableau suivant présente les déductions que l’intimée a accepté d’inclure dans le calcul des revenus de la société de personnes :

 

Alinéa ou sous‑alinéa de la réponse :

Description :

Déduction accordée :

2001

2002

2003

2004

9h)

Parts de l’équipage

 

 

1 570,63 $

 

9j)

Carburant pour le bateau

442,06 $

 

 

 

9k)

Lignes

674,28 $

 

 

 

9k)

Corde

754,11 $

 

 

 

9l)

Lignes

 

440,54 $

 

 

9m)

Lignes

 

 

523,65 $

 

9m)

Corde

 

 

1 133,80 $

 

9m)

Sacs à appâts

 

 

265,00 $

 

9o)

Lignes

 

 

 

928,40 $

9o)

Corde

 

 

 

702,00 $

9y)(i)

Lampes, etc.

 

65,98 $

 

 

9y)(iii)

Lignes

 

325,15 $

 

 

9hh)(i)

Assurances

 

 

535,50 $

 

9oo)(ii)

Lignes

 

284,85 $

 

 

9pp)(iii)

Lignes

 

 

679,14 $

 

9tt)

Moteur hors‑bord

 

 

408,46 $

 

9ggg)(iii)

Impôts fonciers

493,42 $

 

 

 

9ggg)(iii)

Barbecue

69,99 $

 

 

 

9iii)

Impôts fonciers

 

471,12 $

 

 

9kkk)

Impôts fonciers

 

 

519,74 $

 

9kkk)

Munitions pour la chasse, ventilateur

 

 

230,53 $

 

9kkk)

Hôtel à Yarmouth

 

 

139,32 $

 

9lll)

Repas

 

 

 

16,35 $

9lll)

Motel Cape Cod Colony

 

 

 

50,00 $

9lll)

Impôts fonciers

 

 

 

131,30 $

9lll)

Notes de crédit

 

 

 

60,00 $

Total :

 

2 433,86 $

1 587,64 $

6 005,77 $

1 888,05 $

 

[5]     L’intimée a aussi reconnu que les 215,04 $ déboursés en 2002 par les appelants pour acheter un récepteur à balayage permettant de capter les fréquences de la police doivent être ajoutés à la fraction non amortie du coût en capital des actifs appartenant à la catégorie 8 de la société de personnes.

 

[6]     Lorsqu’il a établi des nouvelles cotisations à l’égard de Gregory Norton, le ministre s’est fondé sur l’hypothèse voulant que Gregory Norton avait vendu son permis de pêche au homard en 2002 pour 100 000 $. L’intimée a admis que ce permis avait été vendu pour 75 000 $ plutôt que pour 100 000 $, ce qui modifie le montant cumulatif des immobilisations admissibles de Gregory Norton en date de la fin de 2002.

 

[7]     Les parties n’ont pas su s’entendre sur un certain nombre de points en litige. Dans ses conclusions finales, l’avocat des appelants a énuméré les éléments que les appelants contestent encore. Je traiterai de ces éléments ci‑dessous, en faisant référence aux alinéas et aux sous‑alinéas de la réponse à l’avis d’appel.

 

9h) – Parts de l’équipage

 

[8]     Le ministre s’est fondé sur l’hypothèse voulant que les 8 071 $ dont les appelants avaient demandé la déduction en 2003 à titre de parts de l’équipage n’avaient pas été déboursés. Dans l’exposé conjoint partiel des faits, l’intimée a reconnu que 1 571 $ de cette déduction devaient être accordés aux appelants, laissant ainsi un solde de 6 500 $ en litige. Lors de ses conclusions finales, l’avocat des appelants a soutenu que ceux‑ci avaient droit à une déduction supplémentaire de 1 060 $ à cet égard, ce qui veut dire qu’ils ont renoncé au reste de la déduction demandée, c’est‑à‑dire 5 440 $[1].

 

[9]     Trois personnes ont témoigné pour les appelants : les appelants eux‑mêmes et leur commis comptable. La seule de ces personnes à savoir quoi que ce soit au sujet de cette déduction était la commis comptable. Pour 2003, la déduction totale demandée au titre des parts de l’équipage s’élevait à 13 571 $. Comme le ministre avait refusé une déduction de 8 071 $, il avait accordé une déduction de 5 500 $ lorsqu’il a établi les nouvelles cotisations en cause. La commis comptable a témoigné que la déduction de 5 500 $ qui avait été accordée avait trait au salaire ou aux parts versés pour la pêche au thon à Chance Norton, le fils des appelants. Les appelants soutiennent maintenant que Chance Norton a reçu des paiements supplémentaires de 1 060 $ en 2003, au moyen de deux chèques – le premier de 660 $ et daté du 3 juillet 2003, et le deuxième de 400 $ et daté du 19 décembre 2003. Par conséquent, en tout et pour tout, les appelants soutiennent avoir payé 6 560 $  à Chance Norton en 2003.

 

[10]    La vérificatrice de l’ARC a aussi témoigné à l’audience. Elle a affirmé avoir examiné la déclaration de revenus produite par Chance Norton pour 2003 et a dit qu’il avait seulement déclaré des revenus provenant de parts d’équipage totalisant 5 500 $ pour cette année‑là. Chance Norton n’a pas témoigné à l’audience. Le passage suivant est tiré de la deuxième édition de Law of Evidence in Canada (Le droit de la preuve au Canada), où, à la page 297, MM. Sopinka, Lederman et Bryant présentent l’explication suivante :

 

          [traduction]

 

Dans les affaires civiles, il est possible de tirer une inférence défavorable lorsque, en l’absence d’explication, une partie à un litige ne témoigne pas ou omet de fournir une preuve par affidavit dans le cadre d’une demande ou omet de convoquer un témoin qui aurait connaissance des faits en litige et dont on pourrait présumer qu’il serait prêt à aider cette partie.

 

[11]    Chance Norton sait quelles sommes lui ont été versées en 2003, et, comme il est le fils des appelants, on peut présumer qu’il aurait été prêt à aider les appelants si son témoignage avait pu leur être utile[2]. Comme Chance Norton n’a pas témoigné au sujet des sommes qu’il a véritablement reçues et pour expliquer pourquoi il avait seulement déclaré des parts d’équipage de 5 500 $ dans sa déclaration de revenus pour 2003 s’il avait, en fait, reçu 6 560 $, les appelants ne peuvent pas avoir gain de cause à cet égard. La somme supplémentaire de 1 060 $ prétendument payée à Chance Norton en 2003 – en plus de la somme de 5 500 $ pour laquelle une déduction a déjà été accordée – ne peut pas être déduite dans le calcul des revenus des appelants.

 

9k), l), m) et o) – Ancres, filets, pièges, moulinets et autre matériel connexe

 

[12]    Les appelants ont demandé la déduction des sommes suivantes à titre de dépenses, mais la vérificatrice de l’ARC les a re‑catégorisées comme des dépenses en capital (et les a ajoutées aux actifs de catégorie 8 de la société de personnes) :

 

 

2001

2002

2003

2004

Ancres, filets, pièges et autre matériel connexe

2 767,72 $

 

 

 

Filets, pièges et autre matériel connexe

 

5 520,83 $

12 081,78 $

11 376,10 $

Moulinets et autre matériel connexe

3 600,20 $

7 577,69 $

4 386,38 $

3 854,90 $

Total :

6 367,92 $

13 098,52 $

16 468,16 $

15 231,00 $

 

[13]    La commis comptable des appelants a témoigné que ces sommes avaient été incluses dans la somme relative au « matériel de pêche » dont la déduction à titre de dépenses avait été demandée dans le calcul des revenus des appelants pour ces années. Pour la période allant de 2001 à 2004, les déductions suivantes ont été demandées au titre de « matériel de pêche » dans le calcul des revenus de la société de personnes :

 

 

2001

2002

2003

2004

Matériel de pêche :

13 204,57 $

16 119,60 $

25 665,51 $

24 054,66 $

 

[14]    Il semble aussi que, dans certaines années antérieures aux années visées par les appels, les sommes dépensées à l’égard de pièges ont été traitées comme des dépenses en capital. Il semble aussi que Gregory Norton avait demandé des crédits d’impôt à l’investissement à l’égard des pièges. Le crédit d’impôt à l’investissement est calculé en multipliant le pourcentage applicable au coût en capital du bien admissible. En application de l’article 4600 du Règlement de l’impôt sur le revenu (le « Règlement »), les biens admissibles sont limités aux biens amortissables appartenant aux catégories prévues à cet article du Règlement. Ainsi, pour donner droit à un crédit d’impôt à l’investissement, les pièges doivent constituer des immobilisations.

 

[15]    En l’espèce, la question est de savoir si les sommes dépensées de 2001 à 2004 pour des pièges et des filets doivent être traitées comme des dépenses déductibles ou comme des dépenses en capital. Il s’agit non seulement d’une question qui s’est révélée complexe pour les appelants – pour certaines années, ils ont traité les sommes dépensées pour des pièges comme des dépenses en capital, et, pour les années visées par les appels, comme des dépenses déductibles –, mais il semble aussi que l’ARC n’ait pas décidé catégoriquement que ces sommes doivent être traitées comme des dépenses en capital.

 

[16]    Dans le guide sur les revenus de pêche publié par l’ARC (T4004), les explications suivantes sont données au sujet de la ligne 9137 – Filets et pièges :

 

Les filets et pièges comprennent les lignes, les hameçons, les bouées, les ancres et les réflecteurs de radar.

 

En général, vous ne pouvez pas déduire comme dépense le coût total des filets et des pièges que vous achetez pendant l’année. Vous pouvez cependant déduire ces coûts de votre revenu en choisissant l’une des méthodes suivantes :

 

Méthode 1 - Méthode de la déduction pour amortissement (DPA)

Capitalisez le coût des filets et des pièges et demandez une DPA. Vous trouverez les explications sur la DPA au chapitre 3.

 

Méthode 2 - Méthode de l’inventaire

Ajoutez le coût des filets et des pièges à l’inventaire et déduisez la perte de valeur comme l’illustre l’exemple suivant :

 

Exemple

Valeur des filets, pièges, ficelles, etc., en main à la fin

de votre exercice 2007 ................................................................................    750 $

 

Plus :      Coût des filets et des pièges achetés durant

               votre exercice 2008 .....................................................      200 $

              

               Coût de la ficelle et d’autres matériaux achetés

               durant votre exercice 2008 pour les filets et les

               pièges (n’incluez pas la valeur de votre propre travail)...       125 $      325 $*

 

Somme partielle ...........................................................................................    1 075 $

 

Moins :   Valeur des filets, pièges, ficelles, etc., en main

               à la fin de votre exercice 2008 ...................................        700 $**

 

               Produits de vente des filets, pièges, ficelles, etc. .......           150 $      850 $

 

Perte sur les filets et les pièges à déduire ....................................................       225 $

 

* Si vous utilisez la méthode de l’inventaire, ne déduisez pas ce montant comme dépense.

** La valeur des filets et des pièges en main est le montant que vous recevriez si vous les vendiez à un autre pêcheur qui n’a aucun lien de parenté avec vous.

 

Vous pouvez choisir l’une des deux méthodes si vous venez de commencer à exploiter votre entreprise de pêche. Si vous exploitez votre entreprise depuis plusieurs années et que vous avez déduit le coût de remplacement des filets et des pièges comme dépense chaque année, vous pouvez continuer à procéder ainsi ou adopter l’une des deux méthodes. Si vous changez de méthode en 2008, la valeur des filets et des pièges en main à la fin de 2007 sera égale à zéro, puisque ces éléments auront déjà été déduits comme dépenses dans les années passées.

 

Vous pouvez passer de la méthode d’inventaire à la méthode de la DPA, mais non l’inverse.

 

[17]    Le passage suivant est tiré du rapport de la vérificatrice de l’ARC, rapport dont une copie a été déposée en preuve :

 

          [traduction]

 

Capitalisation des actifs – L’une des pratiques les plus problématiques de cette représentante est la façon dont elle a comptabilisé les dépenses en capital. Comme elle considère les filets, les pièges, les lignes, les bouées et l’équipement de pêche comme du « matériel de pêche » (les pêcheurs ont l’habitude de qualifier leur équipement de matériel de pêche), elle déduit l’achat de tout ce « matériel de pêche » à titre de dépenses. Dans notre guide sur les revenus de pêche, le matériel de pêche est défini comme les vêtements et les outils à main, et on y explique que ces éléments peuvent être traités comme des dépenses.

 

Selon le guide, la catégorie des filets et des pièges comprend les filets, les pièges, les lignes, les hameçons, les bouées, les ancres et les réflecteurs de radar. Les filets et les pièges reçoivent un traitement spécial, mais ce traitement découle d’une politique plutôt que de la loi. En résumé, les pêcheurs qui utilisaient la méthode du coût de remplacement (qui traitaient 100 % du coût comme une dépense) pour leurs filets et leurs pièges avant 1988 et qui n’ont jamais cessé d’utiliser cette méthode peuvent continuer à le faire. En 1988, l’article 28 de la Loi a été édicté, et, depuis ce temps‑là, les nouveaux pêcheurs et ceux qui n’avaient jamais utilisé la méthode du coût de remplacement n’ont plus le droit de choisir cette méthode. Depuis ce moment‑là, les filets et les pièges sont considérés comme des immobilisations de catégorie 8, mais, suivant une politique, nous permettons aux pêcheurs d’avoir recours à la méthode de l’inventaire pour déduire les dépenses relatives aux filets et aux pièges. La méthode de l’inventaire et la méthode de la DPA sont les deux seules méthodes permises, et, dès qu’un pêcheur commence à utiliser la méthode de la DPA, il ne peut plus avoir recours à la méthode de l’inventaire.

 

[18]    À l’article 248 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), l’inventaire est défini de la façon suivante :

 

« inventaire » Description des biens dont le prix ou la valeur entre dans le calcul du revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise pour une année d’imposition ou serait ainsi entré si le revenu tiré de l’entreprise n’avait pas été calculé selon la méthode de comptabilité de caisse. S’il s’agit d’une entreprise agricole, le bétail détenu dans le cadre de l’exploitation de l’entreprise doit figurer dans cette description de biens.

 

[19]    La définition d’inventaire est très large – on y fait référence à la description des biens dont le prix ou la valeur entre dans le calcul du revenu. Si on devait donner une interprétation littérale au mot « inventaire », quel bien d’une entreprise ne serait pas inclus à titre de bien dont le prix entre dans le calcul du revenu? Il n’est pas dit que ce prix doit être déductible dans le calcul du revenu, mais seulement qu’il doit entrer dans ce calcul.

 

[20]    Dans La Reine c. Hypothèques Trustco Canada, 2005 CSC 54, 2005 DTC 5523 (Eng.), [2005] 5 C.T.C. 215, 340 N.R. 1, 259 D.L.R. (4th) 193, [2005] 2 R.C.S. 601, la Cour suprême du Canada s’est exprimée de la sorte :

 

[10]      Il est depuis longtemps établi en matière d’interprétation des lois qu’« il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » : voir 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 804, par. 50.  L’interprétation d’une disposition législative doit être fondée sur une analyse textuelle, contextuelle et téléologique destinée à dégager un sens qui s’harmonise avec la Loi dans son ensemble.  Lorsque le libellé d’une disposition est précis et non équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation.  Par contre, lorsque les mots utilisés peuvent avoir plus d’un sens raisonnable, leur sens ordinaire joue un rôle moins important.  L’incidence relative du sens ordinaire, du contexte et de l’objet sur le processus d’interprétation peut varier, mais les tribunaux doivent, dans tous les cas, chercher à interpréter les dispositions d’une loi comme formant un tout harmonieux.

 

[21]    À mon avis, les termes employés pour définir l’« inventaire » ne sont ni précis, ni non équivoques. Dans la quatrième édition de son ouvrage intitulé Canadian Income Taxation, Edwin C. Harris, c.r., présente l’explication suivante aux pages 443 à 445 :

 

          [traduction]

 

Toute entreprise qui, dans le cours normal de ses activités, vend des biens (qu’ils soient ou non fabriqués par elle) ou des biens‑fonds tiendra normalement un inventaire, c’est‑à‑dire une description des stocks détenus à des fins de vente. Les biens figurant à l’inventaire peuvent être des produits finis, des produits en cours de fabrication ou de transformation, ou encore des matières premières destinées à la fabrication ou à la transformation. Dans bien des cas, l’inventaire d’une telle entreprise comprend aussi des fournitures qui seront consommées au cours du processus de production […]

 

[…]

 

Dans la Loi de l’impôt sur le revenu, l’« inventaire » est défini comme la « [d]escription des biens dont le prix ou la valeur entre dans le calcul du revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise pour une année d’imposition […] ». Cette définition est trop large et trop vague pour être vraiment utile. Toutefois, il est intéressant de voir que cette définition fait référence à une description ou à une liste des biens, plutôt qu’aux biens eux‑mêmes. (En anglais, ces derniers correspondent habituellement au sens d’inventaire.) Sous réserve de cette distinction, qui ne semble avoir aucun effet important, le terme « inventaire » a généralement le même sens en fiscalité qu’en comptabilité. L’inventaire n’inclut pas seulement les éléments d’actifs dont le contribuable fait le commerce, mais aussi ceux dont il fait l’acquisition et dont il dispose, même dans des opérations isolées, dans le cadre d’un « projet comportant un risque » (voir l’alinéa 7.02(3)g)). En outre, l’inventaire comprend la plupart des fournitures consommables.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

(Les notes en bas de page de ce passage n’ont pas été reproduites. Elles peuvent être consultées aux pages 444 et 445 de l’ouvrage.)

 

[22]    Dans Friesen v. The Queen, [1995] 2 C.T.C. 369, 95 DTC 5551, le juge Major s’est exprimé de la sorte au nom de la majorité des juges de la Cour suprême ayant entendu l’affaire :

 

[31]      Pour pouvoir bénéficier de la méthode d’évaluation prévue au par. 10(1), le contribuable doit aussi établir que le bien‑fonds en question est un bien figurant dans un inventaire. La définition suivante du terme « inventaire » figure au par. 248(1) de la Loi :

 

« inventaire » signifie la description des biens dont le prix ou la valeur entre dans le calcul du revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise pour une année d’imposition;

 

[32]      Le premier élément à noter au sujet de cette définition du terme « inventaire » est qu’il n’est pas nécessaire que ces biens contribuent directement au revenu pour une année d’imposition pour pouvoir être considérés comme des biens figurant dans un inventaire. Il suffit que le coût ou la valeur d’un bien entre dans le calcul du revenu d’entreprise pour une année, pour que ce bien fasse partie des biens figurant dans un inventaire. En général, le coût ou la valeur d’un bien est comptabilisé comme une dépense (et le prix de vente comme un revenu) dans le calcul du revenu.

 

[33]      Réduit à sa plus simple expression, le revenu ou le bénéfice tiré de la vente d’un seul article d’inventaire par une entreprise commerciale est, selon la formule d’identification ordinaire, calculé en soustrayant le coût de son acquisition du produit de sa vente. C’est la formule de base qui s’applique au calcul du bénéfice avant que n’entre en ligne de compte la valeur des biens figurant dans un inventaire, comme l’a clairement affirmé le juge Abbott dans l’arrêt Ministre du Revenu national c. Irwin, [1964] R.C.S. 662, aux pp. 664 et 665 :

 

[traduction]

 

D’après la loi, il est donc clair qu’aux fins de l’impôt sur le revenu, dans le cas d’une entreprise consacrée à acquérir des biens et à les revendre, le bénéfice brut s’établit selon l’excédent du prix de vente sur le coût, sous réserve uniquement de toute modification due à la règle du « moindre du coût et de la valeur marchande ».

 

[34]      Par conséquent, pour tout article particulier :

 

            Revenu = bénéfice = prix de vente - coût d’acquisition.

 

[35]      Il ressort clairement de cette formule que le coût d’un bien vendu par une entreprise entre dans le calcul du revenu de l’entreprise pour l’année d’imposition au cours de laquelle il est vendu. Ainsi qu’il a été mentionné plus haut, un projet comportant un risque de caractère commercial constitue une entreprise au sens de la Loi. Par conséquent, un bien vendu dans le cadre d’un tel projet entre dans le calcul du revenu tiré d’une entreprise par un contribuable durant l’année d’imposition au cours de laquelle il est aliéné, de sorte qu’il fait partie des biens figurant dans un inventaire au sens ordinaire de la définition donnée au par. 248(1).

 

[…]

 

[37]      […] Le sens ordinaire de la définition du par. 248(1) est qu’il suffit qu’un bien entre dans le calcul du revenu d’entreprise au cours d’une seule année d’imposition pour pouvoir être considéré comme un bien figurant dans un inventaire :  « entre dans le calcul du revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise pour une année d’imposition ». À cet égard, la définition du mot « inventaire » donnée dans la Loi de l’impôt sur le revenu est conforme au sens ordinaire du terme. Pris dans leur sens normal, les biens figurant dans un inventaire sont des biens qu’une entreprise détient à des fins de vente, et ce terme s’applique à ces biens autant durant l’année de la vente que durant les années au cours desquelles le bien n’a pas encore été vendu par l’entreprise.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[23]    Par conséquent, je suis d’avis que, pour l’application de la Loi, l’inventaire comprend les biens décrits dans l’arrêt de la Cour suprême et dans le passage de l’ouvrage d’Edwin C. Harris, c.r., cités ci‑dessus, de même que les éléments précis ajoutés par la Loi. Pour l’application de la Loi, l’« inventaire » comprend donc les biens détenus à des fins de vente, les matières premières destinées à la production de ces biens, les fournitures consommées au cours du processus de production, le bétail détenu dans le cadre de l’exploitation d’une entreprise agricole et les biens décrits au paragraphe 10(5) de la Loi (en l’absence de cette disposition, les biens décrits à cette disposition ne feraient pas partie de l’inventaire)[3]. Les homards pêchés par les appelants font partie de leur inventaire jusqu’à ce qu’ils soient vendus à un acheteur. Toutefois, je suis d’avis que les pièges et les filets ne font pas partie de leur inventaire. Les appelants ne détenaient pas les pièges et les filets à des fins de vente, et, bien qu’ils étaient parfois endommagés ou détruits, ils n’étaient pas consommés au cours du processus de production. J’estime donc que la méthode de l’inventaire décrite dans le guide sur les revenus de pêche ne respecte pas les dispositions de la Loi.

 

[24]    Bien que, lors de son témoignage, la vérificatrice a clairement affirmé que l’ARC avait adopté une politique – expliquée dans le guide sur les revenus de pêche cité ci‑dessus – selon laquelle les filets et les pièges doivent être traités comme des éléments figurant à l’inventaire ou comme des immobilisations, ni l’avocat des appelants ni l’avocate de l’intimée n’ont présenté d’arguments voulant que les appelants devaient choisir entre la méthode de l’inventaire et la méthode de la déduction pour amortissement (DPA) décrites ci‑dessus. Leurs seuls arguments portaient sur la question de savoir si les sommes dépensées pendant chaque année visée par les appels (2001, 2002, 2003 et 2004) relativement aux filets et aux pièges doivent être traitées comme des dépenses en capital faites pendant l’année ou être déduites dans le calcul des revenus pour l’année.

 

[25]    Dans l’arrêt Johns‑Manville Canada c. La Reine, [1985] 85 DTC 5373, [1985] 2 R.C.S. 46, la Cour suprême du Canada s’est penchée sur la question de savoir si les montants ayant servi à acheter un terrain pour permettre de poursuivre l’exploitation d’une mine à ciel ouvert constituaient une dépense en capital ou une dépense courante. Au nom de la Cour suprême, le juge Estey s’est exprimé de la sorte :

 

[13]      Lorsqu’il s’agit d’examiner les principes de droit pertinents applicables à la caractérisation d’une somme déboursée comme dépense d’exploitation ou comme dépense de capital, l’observation formulée par le maître des rôles sir Wilfred Greene dans l’arrêt British Salmson Aero Engines, Ltd. v. Commissioner of Inland Revenue (1937), 22 T.C. 29, à la p. 43 constitue un point de départ déconcertant :

 

[traduction] […] il y a eu […] de nombreux cas où cette question de capital ou de revenu a été débattue. Il y a de nombreux cas qui se situent à la limite; en effet, dans de nombreux cas il est presque vrai de dire que tirer à pile ou face permettrait de trancher la question de façon presque aussi satisfaisante qu’essayer de trouver des raisons […]

 

[…]

 

[20]      À un moment donné, le critère appliqué par les tribunaux pour distinguer entre revenu et capital était le critère dit « une fois pour toutes ». Ce critère a été adopté par le vicomte Cave, lord Chancelier, dans l’arrêt British Insulated and Helsby Cables, Ltd. v. Atherton, [1926] A.C. 205, à la p. 213. Le vicomte Cave fait remarquer que la caractérisation comme revenu ou comme capital est une question de fait, mais il s’est intéressé à la réponse à la question à cause d’une conclusion imprécise des cours d’instance inférieure. Le critère qu’il adopte, à la p. 213, consiste à [traduction] « affirmer qu’une dépense de capital est une chose qui se produit une fois pour toutes et qu’une dépense d’exploitation est une chose qui se reproduit chaque année », bien qu’il reconnaisse que ce critère n’est pas [traduction] « décisif dans tous les cas ». Plus loin, aux pp. 213 et 214, le lord Chancelier explicite son idée :

 

[traduction] […] [L]orsqu’une dépense est faite non seulement une fois pour toutes, mais dans le but de créer un bien ou un avantage qui profite à une entreprise de façon durable, je crois que c’est un motif très valable (en l’absence de circonstances spéciales menant à une conclusion dans le sens opposé) pour considérer une telle dépense comme véritablement imputable non pas au revenu, mais au capital.

 

En cela, la Cour s’est fondée sur l’arrêt antérieur Vallambrosa Rubber Co. v. Farmer, [1910] S.C. 519, à la p. 525. Quelques années plus tard, dans l’arrêt Ounsworth v. Vickers, Ltd., [1915] 3 K.B. 267, à la p. 273, le juge Rowlatt a considéré que ce critère exigeait non pas que la dépense soit annuelle pour être déductible du revenu, mais que la dépense soit [traduction] « faite en vue de répondre à une demande continue ».

 

 [21]     Cette analyse de la jurisprudence nous ramène à l’idée première exprimée par lord Reid dans l’arrêt Regent Oil Co. v. Strick, [1966] A.C. 295, à la p. 313 :

 

[traduction] Il n’est donc pas surprenant qu’aucun critère, principe ou règle pratique ne soit déterminant. En définitive, il s’agit d’une question de droit que la cour doit trancher, mais c’est là une question à laquelle il faut répondre en fonction de toutes les circonstances dont il faut raisonnablement tenir compte; le poids qu’il faut accorder aux circonstances particulières d’un cas donné doit dépendre du bon sens plutôt que de l’application stricte d’un principe juridique quelconque.

 

[Souligné par le juge Estey.]

 

[22]      Avec égards il n’est pas très utile d’essayer de caractériser la dépense en fonction de son objet. […]

 

[…]

 

[30]      L’application du droit aux observations mentionnées ci‑dessus nous ramène à la déclaration de lord Wilberforce dans l’arrêt Tucker v. Granada Motorway Services Ltd., [1979] 2 All E.R. 801, où il affirme, à la p. 804 :

 

[traduction] Il arrive souvent dans les cas qui soulèvent la question de savoir si un paiement doit être considéré comme une dépense d’exploitation ou comme une dépense de capital que les indices soient contradictoires. En fin de compte, les tribunaux ne peuvent faire beaucoup mieux que de se former une opinion quant au côté où la balance penche. La jurisprudence mentionne un certain nombre de critères utiles à appliquer, mais nous avons été avertis plus d’une fois de ne pas chercher automatiquement à appliquer à un cas des termes ou formules jugés utiles dans un autre […] Cependant, la jurisprudence est le meilleur outil que nous ayons, même s’il est parfois rudimentaire.

 

[Souligné par le juge Estey.]

 

[31]      Il faut aussi se rappeler les paroles déjà citées de lord Pearce dans l’arrêt B.P. Australia Ltd., précité, à la p. 264 :

 

[traduction] C’est une appréciation saine de toutes les caractéristiques directrices qui doit apporter la réponse finale.

 

[32]      Si nous devons appliquer le critère à trois étapes adopté par la cour australienne dans l’arrêt Sun Newspapers Ltd., précité, ces dépenses seraient des dépenses d’exploitation plutôt que des dépenses de capital. La nature du bénéfice recherché s’identifie à celle d’un avantage dans les opérations courantes de la contribuable. L’opération était répétitive et l’objet de la dépense directement incorporé dans les opérations minières de la contribuable. Enfin, la contribuable se procurait cet avantage en déboursant périodiquement des fonds qui auraient été dans le passé caractérisés, selon le vocabulaire de l’époque, comme capital de roulement. Selon l’expression du juge Dixon, tel était alors son titre, dans l’arrêt Sun Newspapers Ltd., précité, à la p. 362, nous sommes en présence d’une dépense d’exploitation parce que :

 

[traduction] […] son objet la range dans la très grande catégorie des choses qui, dans l’ensemble, constituent la demande constante à laquelle il faut répondre à même les revenus d’une activité ou de son capital de roulement, mais il n’est pas nécessaire que la répétition de la chose se produise ou soit probable.

 

Le même juge nous rappelle, dans l’arrêt Hallstroms Pty. Ltd., précité, à la p. 648, que la caractérisation de ces dépenses [traduction] « […] dépend de l’effet envisagé de la dépense d’un point de vue pratique et commercial plutôt que de la classification juridique des droits […] » L’ancienne règle dite « une fois pour toutes », de même que le critère du « bon sens » déjà mentionné, nous amènent à conclure d’une manière favorable aux arguments de la contribuable.

 

[33]      La caractérisation, en droit fiscal, d’une dépense est, en dernière analyse (à moins que la loi ne soit claire, ce qui n’est pas le cas en l’espèce), une question de principe. […]

 

[26]    Dans ATCO Electric Limited c. La Reine, 2007 CCI 243, 2007 DTC 974, [2007] 4 C.T.C. 2297, la juge Sheridan a conclu que les coûts de remplacement de transformateurs pouvaient être déduits à titre de dépenses courantes. La juge Sheridan s’est exprimée de la sorte :

 

[60]      La jurisprudence permettant de déterminer si une dépense est une dépense courante ou une dépense en capital est bien établie. Dans Rainbow Pipe Line Co. c. Sa Majesté la Reine, le juge Mogan a exposé les considérations pertinentes :

 

1.         s’agissait‑il d’une dépense récurrente?

 

2.         s’agissait-il de réparations majeures?

 

3.         la dépense créait-elle un actif pour le bénéfice durable de l’entreprise de l’appelante?

 

4.         la dépense était-elle importante par rapport à la valeur comptable de l’ensemble du pipeline, aux autres dépenses et aux bénéfices annuels?

 

[…]

 

[62]      Quelle est la place des transformateurs dans les activités de production d’électricité de l’appelante? L’électricité est produite par les centrales énergétiques de l’appelante et est distribuée aux consommateurs albertains par l’intermédiaire de toute une série de sous‑stations de conversion, de câbles, de poteaux et de transformateurs. Les transformateurs permettent de transférer l’électricité d’un circuit à un autre : la tension peut être augmentée ou diminuée en fonction des besoins de transmission à un point donné du réseau. Le système de l’appelante comporte environ 83 000 transformateurs, de capacité, de taille et de prix variables : cela va d’un transformateur à « 10 kVA » (10 000 volts) qui a, à peu de chose près, les dimensions d’une poubelle et coûte de 300 $ à 350 $ pièce, jusqu’aux transformateurs de « 3 MVA » (3 millions de volts), qui ont la taille d’une fourgonnette et qui coûtent environ 50 000 $ pièce.

 

[63]      Les petits transformateurs étant des appareils hermétiques, il est plus économique de les remplacer que de les réparer. J’accepte le témoignage de M. DeChamplain lorsqu’il estime qu’en 2000, l’appelante a remplacé 709 transformateurs, d’une capacité allant de 10 à 75 kMV, pour un coût moyen de 943,16 $ par appareil. Seulement 2 000 environ des 83 000 transformateurs de l’appelante étaient des transformateurs d’une capacité de 3 MVA. Contrairement aux transformateurs plus petits, ces gros transformateurs peuvent être ouverts et réparés en cas de panne; cependant, en 2000, cinq des transformateurs de 3 MVA ont dû tout simplement être remplacés. Étant donné leur plus grand coût et le fait qu’ils n’ont que rarement à être remplacés, l’appelante a comptabilisé les frais de remplacement de ces transformateurs comme des dépenses en capital; leur coût n’est donc pas compris dans les 622 990 $ en cause en l’espèce.

 

[64]      Passons maintenant aux facteurs dégagés dans Rainbow Pipe Line. Pour l’intimée, le remplacement des transformateurs constitue une dépense non récurrente puisqu’un transformateur dure en moyenne 33 ans. Cet argument pourrait être convaincant si tous les transformateurs duraient aussi longtemps. Le fait est cependant que, chaque année, de 500 à 1 000 des 83 000 transformateurs que compte le système de distribution de l’appelante tombent en panne soit parce qu’ils sont frappés par la foudre, soit en raison d’un court‑circuit soit en raison d’actes de vandalisme. Par leur nature même, il s’agit d’incidents appelés à se reproduire. Cela étant, il est probable que l’appelante sera constamment obligée, ce qui fut effectivement le cas en 2000, de remplacer un certain pourcentage de ses transformateurs. Les coûts qu’occasionne le remplacement régulier des transformateurs constituent, par conséquent, une dépense récurrente.

 

[65]      Il s’agit ensuite de déterminer si ces frais de remplacement constituent une dépense « majeure ». Or, cela est relatif, comme l’est l’hypothèse retenue par le ministre lorsqu’il classe les transformateurs parmi les équipements « lourds » et « coûteux ». Nul ne conteste en l’occurrence que les dépenses engagées par l’appelante ne concernaient que le remplacement de transformateurs endommagés. En effet, les nouveaux transformateurs achetés par l’appelante, ou la mise à niveau de transformateurs déjà en place, n’entrent pas en ligne de compte en l’espèce. Le nombre de transformateurs et leur coût unitaire sont relativement faibles au regard du réseau de distribution exploité par l’appelante puisque cela correspond à moins de 1 p. 100 de tous les transformateurs en service sur le réseau de l’appelante et leur coût de remplacement, moins de 1 p. 100 des revenus, des dépenses et des bénéfices de l’appelante pour l’année 2000.

 

[66]      Cela étant, le remplacement de quelques transformateurs ici et là dans le cadre d’un réseau électrique évalué à des millions de dollars est un peu comme le remplacement de quelques ampoules parmi celles qui éclairent un arbre de Noël. Un meilleur exemple serait celui des bougies d’allumage, question traitée dans le Bulletin d’interprétation IT‑128R :

 

            […]

 

d) Valeur relative – Il y aura peut‑être lieu d’évaluer le montant de la dépense par rapport à la valeur du bien entier ou par rapport à la moyenne des frais d’entretien et de réparation déjà engagés. Cela est particulièrement le cas lorsque le remplacement en soi peut être considéré comme étant un bien vendable distinct. Bien qu’une bougie dans un moteur puisse être un tel bien, personne ne considérerait son coût de remplacement autrement que comme une dépense; mais, si le moteur lui‑même est remplacé, la dépense ne vise pas seulement un bien vendable distinct, mais peut également être très importante par rapport à la valeur totale du bien dont le moteur fait partie; dans ce cas, la dépense serait vraisemblablement considérée comme une dépense en capital [...]

 

[67]      Dans les circonstances du présent appel, les petits transformateurs correspondent non pas au moteur, mais aux bougies d’allumage de l’automobile que représente le réseau de distribution d’électricité de l’appelante. Par rapport à la valeur comptable des avoirs, des autres dépenses et des profits annuels de l’entreprise, les dépenses engagées pour le remplacement des transformateurs n’étaient pas « majeures » selon les critères dégagés dans Rainbow Pipe Line.

 

[68]      Il reste à examiner si les transformateurs ont procuré à l’entreprise de l’appelante un « bénéfice durable ». Selon l’intimée, le remplacement des transformateurs constituait effectivement pour l’appelante un bénéfice durable, son avocat faisant valoir que les transformateurs font partie intégrante du système de distribution d’électricité. Le remplacement de chaque transformateur augmentait de 33 ans la durée d’utilisation de l’équipement et constituait donc une « amélioration » qui a sensiblement accru le fonctionnement du système de distribution par rapport à ce qu’il était au départ.

 

[69]      Je ne suis pas convaincue qu’il en soit ainsi. La question de la durée utile des transformateurs a été examinée plus haut. J’admets que les transformateurs faisaient « partie intégrante » du système exploité par l’appelante puisque sans ces transformateurs, l’électricité ne pourrait pas être transmise. Leur remplacement n’a cependant pas amélioré le système; il n’a fait que le remettre dans l’état qu’exige son fonctionnement normal. […]

 

[70]      S’il est vrai qu’un transformateur peut effectivement durer 33 ans, il y en aura à tout instant un autre, ailleurs sur le réseau, qui doit être remplacé. Cela étant, l’avantage ou bénéfice que procure le remplacement de transformateurs tombés en panne n’a rien de durable; au contraire, le remplacement des transformateurs n’a eu pour effet que de maintenir le réseau dans son état initial.

 


[71]      Pour tous ces motifs, j’estime que l’appelante peut à bon droit affirmer que les frais engagés pour remplacer les transformateurs sont analogues aux frais d’entretien régulier qui, selon la conclusion du juge Mogan dans Rainbow Pipe Line, doivent être considérés comme des dépenses courantes. Selon la preuve produite en l’espèce, je considère que le remplacement des transformateurs constituait une dépense courante.

 

[Les notes en bas de page n’ont pas été reproduites, mais on peut les trouver en consultant le texte original.]

 

[27]    Bien que la décision de la juge Sheridan ait été portée en appel devant la Cour d’appel fédérale – qui a rejeté l’appel –, la partie de la décision portant sur la déductibilité des montants déboursés pour remplacer des transformateurs n’était pas visée par l’appel.

 

[28]    En l’espèce, très peu d’éléments de preuve ont été présentés pour permettre de déterminer l’espérance de vie d’un piège à homard. Lors de son interrogatoire principal, Gregory Norton n’a pas parlé de cette question, et il a été évasif lorsqu’il a été contre‑interrogé à ce sujet :

 

          [traduction]

 

Q :       Et, combien longtemps – donc, vous utilisiez les filets et les pièges et ils duraient quelques années?

 

R :        Eh, bien, s’il y a une tempête, ils sont tous perdus.

 

Q :       Habituellement, quelle est leur espérance de vie?

 

R :        Il n’y a pas de durée fixe. Ça peut varier. Habituellement, les filets sont réparés chaque année et les pièges le sont aussi, mais ils sont tous deux fabriqués chaque année. On en fabrique de nouveaux chaque année.

 

Q :       Donc, vous les fabriquiez, les utilisiez puis les répariez, et ensuite – vous –

 

R :        Pendant toute l’année, s’ils sont légèrement endommagés, on les répare pour essayer d’arriver – de terminer l’année. Puis, pendant l’hiver, on en fabrique de nouveaux.

 

[29]    Rien ne permet de savoir combien de pièges les appelants détenaient au début ou à la fin des années en cause, ou encore combien de pièges étaient fabriqués chaque année. Une copie de la convention d’achat conclue le 29 décembre 1999 entre Gerald Norton (le père de Gregory Norton) et les appelants a été déposée en preuve[4]. Suivant cette convention, les appelants ont acheté 400 pièges à homard, des lignes et des bouées pour 25 000 $. Ainsi, chaque piège à homard aurait coûté moins de 62 $, car on peut présumer que le prix total incluait le coût des lignes et des bouées. Comme ces actifs ont été achetés du père de Gregory Norton, il est possible que le prix d’achat ne reflète pas pleinement leur juste valeur marchande. Aucun élément de preuve n’a été présenté pour établir dans quelle mesure le montant payé au père de Gregory Norton par les appelants correspondait à la juste valeur marchande des actifs en question.

 

[30]    Le 7 mars 2002, dans ce qui semble avoir été une opération entre parties sans lien de dépendance, Gregory Norton[5] a vendu à Glen Tassell, à Gary Tassell et à Delia Tassell un bateau (le « Bound to Be »), un permis de pêche au homard, 300 pièges à homard et de la corde, 120 bouées, un sondeur, un appareil GPS Raytheon, une radio et certains autres permis pour 200 000 $. Comme je l’ai déjà souligné, les parties ont convenu que le produit de la disposition du permis de pêche au homard s’élevait à 75 000 $. La vérificatrice de l’ARC a attribué 75 000 $ des 200 000 $ à la vente du bateau, ce qui n’a pas été contesté par les appelants. Par conséquent, le solde de 50 000 $ a été reçu en contrepartie des 300 pièges à homard, de la corde, des bouées, des appareils électroniques et des autres permis. Il semble que la vérificatrice de l’ARC a attribué la totalité du solde de 50 000 $ à la disposition d’actifs de catégorie 8. On peut donc présumer qu’elle n’avait attribué aucun montant aux autres permis (permis de pêche à la ligne à main – maquereau; permis de pêche à l’appât – gaspareau, hareng et maquereau). La vente d’actifs faite en 2002 donne à penser que la juste valeur marchande d’un piège à homard est inférieure à 167 $, car une partie des 50 000 $ doit être attribuée à la corde, aux bouées et aux appareils électroniques.

 

[31]    Comme le père de Gregory Norton possédait 400 pièges à homard (vendus en même temps que son permis de pêche au homard) et que les Tassell ont acheté 300 pièges à homard (de même qu’un permis de pêche au homard), il me semble logique de conclure, à la lumière des deux conventions d’achat, que la personne qui exploite une entreprise de pêche au homard a besoin d’un grand nombre de pièges à homard. On peut donc raisonnablement penser que, comme Gregory Norton détenait déjà un permis de pêche au homard avant d’acquérir celui de son père, il était déjà propriétaire de 300 à 400 pièges à homard avant que les appelants aient acheté ceux de son père. Louise Norton détenait elle aussi un permis de pêche au homard, mais aucun élément de preuve n’a été présenté au sujet du nombre de pièges à homard qu’elle possédait. Chaque année, les deux appelants posaient des pièges et pêchaient le homard pendant les deux mêmes mois (mai et juin). Comme ils étaient deux et détenaient chacun leur propre permis, il est logique de penser qu’ils utilisaient ensemble un plus grand nombre de pièges à homard que ne l’aurait fait une personne – ou un groupe de personnes – détenant un seul permis (par exemple, les Tassell). On peut donc s’attendre à ce que les appelants aient possédé au moins 400 pièges à homard après la vente des actifs aux Tassell, car les appelants détenaient chacun un permis de pêche au homard et ils continuaient à poser des pièges et à pêcher des homards après cette vente.

 

[32]    Aucun élément de preuve n’a été présenté à l’égard de la proportion entre le coût de la main‑d’œuvre relatif à la fabrication d’un piège à homard et le coût des matériaux. La seule preuve présentée au sujet de la fabrication des pièges à homard avait trait au coût des matériaux, car Gregory Norton fabriquait lui‑même les pièges à homard. Aucun élément de preuve n’a été présenté relativement au nombre de pièges à homard fabriqués chaque année. Compte tenu des déductions demandées pour le coût des matériaux et de la valeur des pièges à homard détenus par les appelants[6], il semble que les pièges n’étaient pas tous remplacés chaque année. Par conséquent, il est raisonnable de conclure que les pièges à homard duraient normalement au moins un an.

 

[33]    À mon avis, la personne qui exploite une entreprise de pêche au homard doit posséder un bon nombre de pièges à homard, et, chaque année, elle devra réparer certains pièges et en remplacer d’autres. Si cette personne n’augmente pas le nombre de pièges qu’elle détient, mais cherche simplement à maintenir le même nombre de pièges (ou à le réduire), je crois que les sommes dépensées pour réparer les pièges endommagés ou remplacer les pièges détruits servent seulement à maintenir le nombre de pièges à homard, et donc à assurer le statu quo. Ces sommes sont dépensées en vue de répondre à une demande continue et pour maintenir ou rétablir le nombre de pièges à homard que la personne utilise pour pêcher. Par conséquent, je suis d’avis qu’en se fondant sur le bon sens, il faut conclure que ces sommes‑là peuvent être déduites à titre de dépenses courantes dans le calcul des revenus tirés par cette personne de son entreprise de pêche. Selon moi, les sommes dépensées simplement pour rétablir le nombre de pièges à homard à celui que la personne avait au début de la saison de pêche au homard précédente[7] (à cause de la dégradation, de la destruction ou de la perte de pièges) ne doivent pas être traitées comme des dépenses en capital. Cependant, si la personne augmentait le nombre de pièges à homard ou remplaçait des pièges qu’elle avait vendus, je crois que les sommes dépensées de la sorte constitueraient des dépenses en capital. Le fait de maintenir le nombre de pièges à homard en remplaçant les pièges détruits et perdus est analogue au remplacement de transformateurs dont il était question dans l’affaire ATCO Electric Limited.

 

[34]    Pour les années en cause, les sommes dépensées à l’égard de pièges et de filets sont les suivantes :

 

 

2001

2002

2003

2004

Ancres, filets, pièges et matériel connexe :

2 767,72 $

 

 

 

Filets, pièges et matériel connexe :

 

5 520,83 $

12 081,78 $

11 376,10 $

 

[35]    Les ancres mentionnées ci‑dessus servaient à maintenir les filets en place. Aucun élément de preuve ne donne à penser que l’ampleur des activités de pêche où des filets étaient utilisés a changé. Selon moi, les sommes dépensées chaque année à l’égard des ancres et des filets ont servi à réparer ou à remplacer des filets et des ancres endommagés, perdus ou détruits – ces sommes ont donc simplement été dépensées pour rétablir le nombre et la condition des ancres et des filets à ceux qui existaient au début d’une saison de pêche donnée (dans le cas des filets remplacés pendant une saison de pêche) ou au début de la saison de pêche précédente (pour les filets remplacés après la fin d’une saison de pêche). Donc, les sommes dépensées chaque année à l’égard d’ancres et de filets peuvent être déduites dans le calcul des revenus de la société de personnes.

 

[36]    Les sommes montrées ci‑dessus incluent des sommes dépensées pour des filets et des ancres (en 2001) et pour des filets (de 2002 à 2004). Les sommes dépensées en 2001 sont de beaucoup inférieures aux sommes dépensées en 2002, en 2003 et en 2004. Selon les renseignements indiqués dans les déclarations de revenus de Gregory Norton pour 1996, 1997 et 1998[8], les montants suivants ont été dépensés pour des matériaux pour les pièges pendant ces années‑là :

 

 

1996

1997

1998

Matériaux pour les pièges

4 168,95 $

3 494,72 $

4 937,25 $

 

[37]    Ces sommes n’incluent pas les sommes dépensées pour des filets pendant ces années‑là, alors les sommes dépensées pour des filets et des matériaux pour les pièges pendant ces années auraient été plus importantes, probablement semblables au montant dépensé en 2002 pour les filets et les pièges. À mon avis, comme les appelants ont acquis 400 pièges à homard du père de Gregory Norton en 1999 et qu’ils ont vendu 300 pièges à homard aux Tassell en 2002, ils ont obtenu 100 pièges supplémentaires. Ces pièges de plus peuvent expliquer la diminution des sommes consacrées à la réparation et au remplacement de pièges en 2001.

 

[38]    Comme je l’ai noté ci‑dessus, les sommes dépensées pour réparer et remplacer des pièges à homard endommagés, détruits ou perdus sont déductibles, car elles servent simplement à rétablir le nombre de pièges et leur condition à ceux qui existaient avant leur destruction ou leur perte. Si une personne vend des pièges à homard, les coûts de remplacement des pièges vendus constitueront une dépense en capital. Si cette personne accroît le nombre de pièges qu’elle possède, les sommes ainsi dépensées constitueront elles aussi une dépense en capital. Il en va de même pour la personne qui lance une entreprise de pêche au homard et qui achète des pièges à homard pour la première fois.

 

[39]    À mon avis, les appelants ont exploité leur entreprise de pêche au homard de façon constante pendant toutes les années visées par les appels. Selon moi, chaque année, les appelants réparaient et remplaçaient seulement les pièges à homard qui avaient été endommagés, détruits ou perdus pendant l’année ou lors de la saison précédente de pêche au homard. Par conséquent, les sommes dépensées en l’espèce pour réparer et remplacer des pièges à homard peuvent être déduites dans le calcul des revenus de la société de personnes.

 

[40]    Les déductions demandées au titre du « matériel de pêche » incluaient aussi des sommes à l’égard de moulinets et de matériel connexe. Cet équipement servait à la pêche au thon. Rien ne permet de croire que l’importance des activités de pêche au thon faite par les appelants pendant les années visées par les appels a varié, ou encore que les appelants ont vendu de l’équipement de pêche au thon pendant cette période‑là. Selon moi, comme dans le cas des pièges à homard, ces sommes ont dû être dépensées pour remplacer les moulinets et le matériel connexe qui ont été endommagés, détruits ou perdus. Ces dépenses servaient seulement à rétablir la quantité de moulinets et de matériel connexe ainsi que la condition de ceux‑ci à ceux qui existaient au début de la saison de pêche (pour les moulinets et le matériel remplacés pendant la saison de pêche) ou au début de la saison de pêche précédente (pour les moulinets et le matériel connexe remplacés après la fin de la saison de pêche), et ce, afin de permettre aux appelants de maintenir leurs activités de pêche. Ces dépenses ont été faites « en vue de répondre à une demande continue », et le bon sens veut que les coûts récurrents de remplacement des moulinets et du matériel connexe qui servaient seulement à rétablir leur nombre et leur condition soient déductibles et n’aient pas constitué des dépenses en capital. Ainsi, je suis d’avis que les dépenses faites à l’égard des moulinets et du matériel connexe peuvent être déduites dans le calcul des revenus de l’entreprise de pêche.

 

[41]    En 2003, une déduction avait été demandée, à titre de dépense courante, relativement à l’achat de grillage métallique. La vérificatrice de l’ARC a considéré cette dépense comme une dépense en capital. En 2004, une déduction avait été demandée, à titre de dépense courante, à l’égard d’un montant non identifié. La vérificatrice de l’ARC a traité ce montant comme une dépense en capital. Aucune preuve n’a été présentée au sujet du grillage métallique ou du montant non identifié. Par conséquent, aucun rajustement ne serait fait à l’égard de ces deux éléments‑là.

 

9n) – Déduction demandée deux fois pour des assemblages de rondelles à crochet et des roulements à billes pour des moulinets

 

[42]    Les appelants ont déposé en preuve deux factures relativement à l’acquisition de 20 assemblages de rondelles à crochet pour moulinets et de 5 roulements à billes pour moulinets. La première facture est datée du 18 février 2003, provient de Vernon D’Eon Lobster Plugs Ltd. et porte sur l’achat de 20 assemblages de rondelles à crochet #6‑130 pour moulinets et de 5 roulements à billes #55‑130 pour moulinets. La deuxième facture provient de Polar Foods International Inc. (qui a acheté au moins une partie des homards ou des thons pêchés par les appelants) et est datée du 22 février 2003. Cette deuxième facture porte sur l’achat de 20 assemblages de rondelles à crochet #6‑130 pour moulinets, de 5 roulements à billes #55‑130 pour moulinets et de deux autres articles qui ne figurent pas sur la facture de Vernon D’Eon Lobster Plugs Ltd. Les appelants soutiennent qu’il s’agit de deux opérations distinctes qui représentent chacune l’achat de 20 assemblages de rondelles à crochet pour moulinets et de 5 roulements à billes pour moulinets. (En tout, les appelants auraient donc acheté 40 assemblages de rondelles à crochet pour moulinets et 10 roulements à billes pour moulinets.)

 

[43]    Cependant, il me semble évident que les deux factures portent sur l’achat des mêmes 20 assemblages de rondelles à crochet pour moulinets et 5 roulements à billes pour moulinets. La facture provenant de Vernon D’Eon Lobster Plugs Ltd. indique que les 20 assemblages de rondelles à crochet pour moulinets et les 5 roulements à billes pour moulinets ont été vendus à Polar Foods International Inc. et livrés à Gregory Norton. Selon cette facture, les articles ont été [traduction] « ramassés chez Vernon D’Eon ». Le prix plus élevé indiqué sur la facture de Polar Foods International Inc. représente la majoration de prix exigée par Polar Foods International Inc. pour le traitement de l’opération. Il n’y a aucun doute que, même si Gregory Norton est passé prendre les articles chez Vernon D’Eon Lobster Plugs Ltd., les 20 assemblages de rondelles à crochet pour moulinets et les 5 roulements à billes pour moulinets ont d’abord été vendus par Vernon D’Eon Lobster Plugs Ltd. à Polar Foods International Inc. (qui les a portés au compte de Gregory Norton), pour être ensuite revendus par Polar Foods International Inc. à Gregory Norton.

 

[44]    Par conséquent, les appelants ont demandé deux déductions pour les mêmes 20 assemblages de rondelles à crochet pour moulinets et 5 roulements à billes pour moulinets, et aucun rajustement ne sera fait à l’égard de cet élément.

 

9r) – Frais d’assurance

 

[45]    La question relative aux frais d’assurance est celle de savoir si les appelants peuvent déduire des frais d’assurance de 846,67 $ déboursés relativement à un prêt consenti par une coopérative d’épargne et de crédit. L’alinéa 20(1)e.2) de la Loi est ainsi rédigé :

 

20(1) Malgré les alinéas 18(1)a), b) et h), sont déductibles dans le calcul du revenu tiré par un contribuable d’une entreprise ou d’un bien pour une année d’imposition celles des sommes suivantes qui se rapportent entièrement à cette source de revenus ou la partie des sommes suivantes qu’il est raisonnable de considérer comme s’y rapportant :

 

            […]

 

e.2) la partie du moins élevé des montants suivants qu’il est raisonnable de considérer comme liée au montant qu’un contribuable doit à une institution financière véritable au cours de l’année en raison d’un emprunt contracté auprès de l’institution :

 

(i) les primes payables par le contribuable pour l’année aux termes d’une police d’assurance-vie, sauf un contrat de rente, dans le cas où, à la fois :

 

(A) un intérêt dans la police est cédé à l’institution financière dans le cadre de l’emprunt,

 

(B) les intérêts payables sur l’emprunt sont déductibles dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année, ou le seraient sans les paragraphes 18(2) et (3.1) et les articles 21 et 28,

 

(C) la cession visée à la division (A) est exigée par l’institution financière à titre de garantie de l’emprunt,

 

(ii) le coût net de l’assurance pure pour l’année, déterminé en conformité avec les dispositions réglementaires, relativement à l’intérêt dans la police;

 

[46]    Les appelants soutiennent que le prêteur a exigé qu’ils contractent cette assurance, et, par conséquent, les frais d’assurance devraient donc être déductibles. Une copie du formulaire d’adhésion du membre à l’assurance-vie et l’assurance‑invalidité Credit à prime unique relatif au prêt a été déposée en preuve. Ce formulaire a été établi par CUIS (Credit Union Insurance Services, le [traduction] Service d’assurance de la coopérative d’épargne et de crédit). La [traduction] « Partie 3 – Déclaration du membre » est ainsi rédigée :

 

            [traduction]

 

JE CHOISIS DE SOUSCRIRE LES POLICES D’ASSURANCE DÉCRITES À LA PARTIE 2 ET J’ACCEPTE DE VERSER LES PRIMES D’ASSURANCE EXIGÉES. J’AI REÇU UN EXEMPLAIRE DU FORMULAIRE D’ADHÉSION ET DU CERTIFICAT D’ASSURANCE DÉCRIVANT LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DES POLICES.

 

Je comprends que :

 

1.         La souscription d’une police d’assurance-vie CUMIS est volontaire et l’achat d’assurance de CUMIS ne joue aucun rôle dans l’évaluation de ma demande de prêt.

 

[47]    L’avocat des appelants a soutenu que ce formulaire avait été établi par la compagnie d’assurance, et non pas par le prêteur, et qu’il ne faut donc pas nécessairement conclure que le prêteur n’exigeait pas que les appelants souscrivent une assurance. Toutefois, je suis d’avis qu’il existait un lien direct entre le prêteur et la compagnie d’assurance, car la couverture d’assurance était organisée par la coopérative d’épargne et de crédit, et le formulaire avait été établi par le Service d’assurance de la coopérative d’épargne et de crédit. Ainsi, il me semble que la déclaration selon laquelle le membre n’était pas tenu de souscrire une assurance avait un lien avec les exigences du prêteur.

 

[48]    Lorsqu’ils ont témoigné, les appelants ont affirmé ce qui suit :

 

         


[traduction]

 

          Gregory Norton – Contre‑interrogatoire

 

Q :       Et le premier des éléments numérotés prévoit que :

 

            « La souscription d’une police d’assurance-vie CUMIS est volontaire et l’achat d’assurance de CUMIS ne joue aucun rôle dans l’évaluation de ma demande de prêt. »

 

R :        C’est ce qui est écrit, mais, dans les faits, CUMIS renonce à l’exigence d’assurance si le pêcheur a déjà une assurance‑vie suffisante pour couvrir la valeur du prêt. Dans ce cas‑là, il n’est pas nécessaire de souscrire l’assurance de CUMIS.

 

            Mais je n’avais pas d’assurance‑vie pour couvrir la valeur du prêt, alors il était toujours obligatoire de souscrire une assurance pour obtenir un prêt.

 

Q :       Mais, dans ce cas‑ci, cela n’était pas exigé pour le prêt?

 

R :        C’est ce qui est écrit dans le document de CUMIS. Ces documents prévoient toujours cela, ce qui permet d’y renoncer si le pêcheur est déjà assuré.

 

Q :       D’accord, mais, en lisant le texte de ce qui était – de ce que vous avez signé et avez accepté, ont voit qu’il ne s’agissait pas d’un facteur dans l’approbation de votre prêt.

 

R :        Je ne suis pas certain de ce qui est prévu dans le document, mais je sais que je devais être assuré, sans quoi je n’aurais pas pu obtenir de prêt. L’entreprise l’exige.

 

            Louise Norton – Interrogatoire principal

 

Q :       D’accord. Cette partie est rédigée de la façon suivante :

 

            « Partie 3 – Déclaration du membre […] Je choisis de souscrire les polices d’assurance décrites à la Partie 2 et j’accepte de verser les primes d’assurance exigées […] »

           

Je n’ai pas besoin de continuer à le lire. Le sens est clair – on y prévoit un choix. Lorsque vous avez négocié le prêt, dans quelle mesure pouviez‑vous choisir de souscrire une assurance‑vie à l’égard du prêt?

 

R :        Bien, je n’avais pas le choix – ou, plutôt, nous ne pensions pas avoir le choix, mais nous voulions être assurés à l’égard du prêt au cas où quelque chose me serait arrivé.

 

Q :       Qui voulait être assuré?

 

R :        Au cas où quelque chose arriverait.

 

Q :       Qui voulait être assuré à l’égard du prêt?

 

R :        Moi.

 

Q :       D’accord. Et quelle était l’approche de la coopérative d’épargne et de crédit?

 

R :        Elle conseillait aux emprunteurs d’être assurés.

 

            Louise Norton – Contre‑interrogatoire

 

Q :       Avez‑vous trouvé? Cela a trait à – ce document a trait au prêt que vous avez contracté pour acheter un Ford Explorer 2002, n’est‑ce pas?

 

            Donc, selon vous, la banque ou la compagnie d’assurance –

 

R :        La banque.

 

Q :       – ou la coopérative d’épargne et de crédit – la banque vous a informé des choix en matière d’assurance.

 

R :        Je n’ai jamais compris qu’il s’agissait d’un choix. J’ai toujours senti que nous étions obligés d’être assurés.

 

Q :       Vous avez toujours cru être obligés d’être assurés?

 

R :        Nous étions – oui, on m’a portée à croire que je devais être assurée.

 

[49]    Comme la Loi prévoit que la cession d’assurance doit être exigée par le prêteur, il est essentiel de savoir si la coopérative d’épargne et de crédit a simplement conseillé aux appelants de souscrire une assurance (comme l’a affirmé Louise Norton lors de son interrogatoire principal) ou si elle a exigé que les appelants souscrivent une assurance (comme l’ont affirmé Gregory Norton et Louise Norton lors de leurs contre‑interrogatoires respectifs). En l’espèce, compte tenu de la clarté du libellé du formulaire établi par le Service d’assurances de la coopérative d’épargne et de crédit et des témoignages contradictoires faits par Louise Norton lors de son interrogatoire principal et de son contre‑interrogatoire, pour réussir à démontrer que la coopérative d’épargne et de crédit exigeait qu’ils souscrivent une assurance – malgré le libellé du formulaire établi par le Service d’assurances de la coopérative d’épargne et de crédit –, il aurait fallu que les appelants fassent témoigner directement un représentant de la coopérative d’épargne et de crédit pour établir qu’ils devaient être assurés pour obtenir un prêt. En l’absence du témoignage d’un représentant de la coopérative d’épargne et de crédit à cet égard, les appelants ne peuvent pas démontrer que l’assurance était exigée par la coopérative d’épargne et de crédit, et ils n’ont donc droit à aucune déduction pour les frais d’assurance en cause.

 

9t) – Évaluation foncière et analyse de la qualité de l’eau

 

[50]    Les appelants ont demandé une déduction de 225 $ relativement à l’évaluation de la valeur de leur maison et une déduction de 100 $ relativement à une analyse de la qualité de l’eau dans leur maison. Ces deux dépenses ont été faites pour permettre aux appelants d’hypothéquer leur maison. J’admets le témoignage des appelants selon lequel ces dépenses étaient nécessaires à l’obtention de l’hypothèque. Selon la position révisée des appelants, ces frais devraient être inclus dans les frais d’utilisation de la résidence à des fins commerciales (dans une mesure correspondant au pourcentage de leur résidence consacré à des fins commerciales).

 

[51]    Selon moi, ces frais ont un lien avec l’obtention d’une l’hypothèque qui grèvera la maison des appelants pendant plusieurs années. Sans l’application de l’alinéa 20(1)e) de la Loi, les appelants ne pourraient pas déduire ces frais dans le calcul de leurs revenus. Comme ces frais ont été déboursés dans le cadre d’un emprunt d’argent utilisé par les appelants pour exploiter leur entreprise, une partie de ces frais est déductible en vertu de l’alinéa 20(1)e) de la Loi. La fraction des frais qui est déductible correspond au pourcentage de la résidence consacré à des fins commerciales. Étant donné que, comme je l’expliquerai ci‑dessous, j’ai conclu qu’aucun rajustement ne doit être apporté au pourcentage de la résidence consacré à des fins commerciales, 12,5 % de 20 % de ces frais (12,5 % x 20 % x 325 $) sont déductibles chaque année. Ainsi, les déductions suivantes sont accordées relativement à ces frais‑là :

 

 

2001

2002

2003

2004

Déduction accordée :

8 $

8 $

8 $

8 $

 

9u) et 9bb)(i) – Utilisation du Ford Explorer 2000 en 2003

 

[52]    Gregory Norton avait l’habitude d’acheter des véhicules endommagés (parfois déclarés « perte totale »), de les réparer, puis de les utiliser. Généralement, les véhicules ne pouvaient pas être conduits sur la route avant leur réparation. Une fois remis en état de rouler, les véhicules étaient immatriculés auprès de la province de l’Île‑du‑Prince‑Édouard et les taxes provinciales étaient payées. Un de ces véhicules était un Ford Explorer 2000, et l’une des questions relatives à ce véhicule est de savoir dans quelle mesure, le cas échéant, les intérêts payés en 2003 sur les sommes empruntées pour acheter ou réparer le véhicule peuvent être déduits dans le calcul des revenus des appelants pour 2003.

 

[53]    Le Ford Explorer 2000 était le véhicule de Louise Norton. Selon l’information fournie par la province de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, les taxes provinciales pour ce véhicule ont été payées le 3 janvier 2001, ce qui donne à penser que le véhicule était de nouveau en état de rouler à cette date. À l’automne 2002, un autre Ford Explorer (le Ford Explorer 2002) a été acheté. Les témoignages des appelants ont été vagues au sujet de la date où ce véhicule plus récent est redevenu utilisable et de la date où ils ont cessé d’utiliser le Ford Explorer 2000.

 

[54]    Louise Norton a témoigné de la sorte :

 

          [traduction]

 

Q :       On voit ensuite que vous étiez propriétaire du Ford Explorer 2000 de janvier 2001 à octobre 2003. Mais il y a aussi un chevauchement avec le Ford Explorer 2002 à partir d’octobre 2003 jusqu’à octobre – pardon, d’octobre 2002 à octobre 2003. C’est bien ça?

 

R :        Um-hmm.

 

Q :       Pouvez‑vous expliquer ce chevauchement?

 

R :        Eh bien, le Ford Explorer 2002 était endommagé quand nous l’avons acheté.

 

Q :       Oui.

 

R :        Il a fallu un certain temps pour le remettre en état de rouler. C’est pourquoi nous avons eu les deux véhicules en même temps. Puis, nous avons attendu d’obtenir le prix voulu avant de vendre le modèle 2002.

 

Q :       Vous avez conservé le –

 

R :        Le modèle 2000 –

 

Q :       – 2000.

 

R :        – jusqu’en octobre.

 

Q :       D’accord. Jusqu’en octobre, jusqu’à quel moment?

 

R :        Jusqu’à ce que nous le vendions.

 

Q :       OK. Selon vos souvenirs – vous souvenez‑vous – quand le modèle 20002 – quand avez‑vous commencé à utiliser le modèle 2002, à temps plein si vous le voulez, comme véhicule?

 

R :        Je ne suis pas complètement certaine de la date précise.

 

Q :       D’accord, c’est bien. Donc, le modèle 2002 a été acheté en octobre, puis il a été réparé.

 

R :        Oui.

 

[55]    Selon les dossiers fournis par la province de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, le Ford Explorer 2000 a été vendu le 4 novembre 2003, et la taxe de vente provinciale relative au Ford Explorer 2002 a été payée le 22 octobre 2002. Il semble donc que le modèle 2000 et le modèle 2002 ont été à la disposition des appelants en même temps pendant environ un an. Il semble aussi que Louise Norton a commencé à utiliser le Ford Explorer 2002 dès qu’il est devenu disponible. Louise Norton a aussi expliqué que le Ford Explorer 2002 avait été endommagé pendant l’ouragan Juan en septembre 2003, mais elle n’a pas dit pendant combien de temps elle avait alors recommencé à utiliser le Ford Explorer 2000. Je présume que, comme le Ford Explorer 2002 n’aurait pas pu être utilisé avant d’avoir été réparé, les pourcentages d’utilisation commerciale et d’utilisation personnelle du Ford Explorer 2000 pendant cette période ont été les mêmes que pour le Ford Explorer 2002.

 

[56]    À mon avis, à partir du moment où le Ford Explorer 2002 a été remis en état de rouler, le 22 octobre 2002, les appelants ont seulement conservé le Ford Explorer 2000 en attendant de le vendre et pour l’utiliser comme véhicule de remplacement lorsque le Ford Explorer 2002 a été endommagé par l’ouragan Juan. Le pourcentage d’utilisation commerciale du Ford Explorer 2000 n’a pas changé pendant la période où les appelants cherchaient à le vendre. Si la position de l’intimée était la bonne, les intérêts payés relativement aux sommes empruntées pour acheter un véhicule ou n’importe quel actif utilisé dans le cadre d’activités commerciales ne seraient pas déductibles pour la période où un tel actif était détenu pour être vendu après avoir été remplacé. Selon moi, en 2003, le pourcentage d’utilisation commerciale du Ford Explorer 2000 est resté le même jusqu’à ce qu’il soit vendu. Par conséquent, 25 % des intérêts payés relativement aux sommes empruntées pour acheter ou réparer le Ford Explorer 2000 sont déductibles pour 2003.

 

9y)(iii) – Baril de kérosène

 

[57]    Dans le cadre de sa vérification, la vérificatrice de l’ARC a ajouté une somme de 253,11 $ aux actifs de catégorie 8 de la société de personnes relativement à l’acquisition d’un baril de kérosène. Lors des conclusions finales, l’avocat des appelants a dit que les appelants ne contestaient plus cette question. Aucun rajustement ne sera donc fait relativement à cet élément.

 

9bb), ee), hh) et ii) – Pourcentage d’utilisation commerciale des véhicules

 

[58]    Gregory Norton possédait des camionnettes et Louise Norton possédait les Ford Explorer. Les deux appelants ont affirmé que les véhicules qui leur appartenaient servaient tous entièrement à l’exploitation de leur entreprise. Cependant, il n’y a aucun doute que Louise Norton utilisait souvent ses véhicules à des fins personnelles. Elle conduisait les enfants à leurs matchs et à leurs entraînements de hockey. Elle suivait aussi des cours universitaires à Charlottetown. Les appelants devaient conduire pour faire leurs courses, car ils vivent à Annandale, à l’Île‑du‑Prince‑Édouard, un petit village de pêcheurs qui ne compte aucun magasin ou autre service.

 

[59]    Ni l’un ni l’autre des appelants n’a tenu de carnet de route. Dans deux écritures de journal déposées en preuve, seulement 25 % des frais relatifs aux véhicules de Louise Norton étaient traités comme des dépenses d’entreprise. Comme Louise Norton a utilisé ses véhicules à des fins personnelles de façon considérable et que les deux écritures de journal constituent dans les faits une admission que l’utilisation commerciale des véhicules s’élevait à 25 %, les appelants n’ont pas réussi à réfuter l’hypothèse de fait du ministre selon laquelle l’utilisation à des fins commerciales des véhicules de Louise Norton était seulement de 25 %.

 

[60]    Gregory Norton a insisté pour dire que ses camionnettes avaient uniquement été utilisées à des fins commerciales. Lorsqu’il a témoigné, il s’est contenté de faire une déclaration générale selon laquelle les camionnettes servaient seulement à des fins commerciales. Pour déterminer le nombre moyen de kilomètres parcourus annuellement par les véhicules, la vérificatrice de l’ARC a comparé les relevés d’odomètres pris au moment où les véhicules ont été remis en état de rouler et au moment où ils ont été vendus. Elle a aussi fait une estimation du nombre de kilomètres parcourus par Gregory Norton avec ses camionnettes dans l’exploitation de l’entreprise de pêche. L’analyse de la vérificatrice n’appuie pas la conclusion selon laquelle les camionnettes servaient uniquement à des fins commerciales. La vérificatrice a plutôt conclu que cette utilisation commerciale s’élevait à 75 %. L’avocat des appelants n’a pas contesté cette analyse – que ce soit lors du contre‑interrogatoire ou à un autre moment –, et je conclus donc que l’utilisation commerciale des camionnettes était de 75 %. Par conséquent, aucun rajustement ne sera fait à l’égard du pourcentage d’utilisation commerciale des camionnettes de Gregory Norton

 

9bb)(ii), hh)(2e (iv)) et ii)(i) – Véhicules tout‑terrain

 

[61]    Les montants en litige relativement aux véhicules tout‑terrain (« VTT ») ont trait à deux déductions distinctes :

 

-        pour 2003, une déduction de 533,77 $ a été demandée au titre de dépense pour la réparation d’un VTT et l’achat de nouveaux pneus;

 

-        pour 2004, une déduction de 1 077,99 $ a été demandée au titre de dépense pour la réparation d’un VTT.

 

[62]    Ces deux déductions ont été refusées par la vérificatrice de l’ARC. Il semble que les appelants étaient propriétaires de deux VTT de 2001 à 2003, et de trois VTT en 2004. Gregory Norton a témoigné de la sorte au sujet des VTT :

 

         


[traduction]

 

R :        Oui, j’utilise un tracteur que j’ai chez moi. Et j’utilise aussi un quatre‑roues.

 

Q :       D’accord. Quel est le quatre‑roues?

 

R :        C’est un VTT, et je l’utilise pour –

 

Q :       Non, je sais ce que c’est.

 

R :        Oh.

 

Q :       Mais, de quelle marque et de quel modèle s’agit‑il?

 

R :        Oh, un Honda 2001.

 

Q :       Honda 2001. Combien de véhicules à quatre roues – de VTT – aviez‑vous pendant cette période?

 

R :        J’en avais trois, mais un seul faisait partie de l’entreprise. Je n’y avais pas envoyé le 2004 pour l’entreprise.

 

Q :       Donc, vous en aviez trois; la famille avait trois véhicules pendant cette période? Vous dites que vous aviez acheté un modèle 2004?

 

R :        Oui.

 

Q :       Faisait‑il partie des trois, où s’agissait‑il d’un véhicule supplémentaire?

 

R :        C’est bien ça. Non, il faisait partie des trois.

 

Q :       D’accord, mais vous en utilisiez un seul pour l’entreprise?

 

R :        Deux VTT servaient à l’entreprise, mais j’en avais envoyé un seul à mon comptable.

 

Q :       O.K. Quand vous dites que vous l’aviez envoyé à votre comptable, que voulez‑vous dire?

 

R :        Bien, que j’ai demandé une déduction pour dépense d’entreprise pour le véhicule.

 

Q :       Bon, quel genre de travail faisiez‑vous avec le VTT?

 

R :        Je m’en servais pour déplacer de l’équipement dans la cour, entre l’abri à bateau et l’atelier

 

Q :       Oui.

 

R :        Je déplaçais des bouées, de la corde ou des matériaux pour les pièges. J’avais fixé une petite remorque à l’arrière du VTT. Je m’en servais pour déplacer mes filets et pour les étendre sur la pelouse. Les filets sont lourds, donc – je travaille surtout seul.

 

            Souvent, je me sers d’un véhicule à moteur. Je l’utilise pour aller au bois. C’est à peu près tout.

 

Q :       D’accord. Dans quelle mesure vous serviez‑vous du VTT pour vos activités de pêche commerciale?

 

R :        Environ la moitié du temps.

 

Q :       Qui d’autre s’en servait?

 

R :        Mes deux fils.

 

Q :       L’autre Honda et les autres véhicules que vous aviez – vous avez dit que vous aviez trois VTT en tout et pour tout pendant la période? L’un des VTT était un modèle 2004 acheté en 2004.

 

            Vous aviez aussi un autre véhicule en 2001?

 

R :        Oui.

 

Q :       De quel type?

 

R :        Un Arctic Cat.

 

Q :       Bien. Et qui s’en servait?

 

R :        Il était un peu utilisé, mais surtout par les enfants. Il était – je m’en servais très peu.

 

Q :       D’accord. Et vous êtes certain que les seuls comptes de frais envoyés ou les seuls relevés de dépenses que vous avez envoyés à votre comptable avaient trait au VTT que vous utilisiez pour votre entreprise?

 

R :        Oui.

 

Et pendant son contre‑interrogatoire :

 

Q :       D’accord. Donc, vous avez dit – dans votre interrogatoire principal – que l’un des VTT était utilisé à des fins commerciales, est‑ce bien cela?

 

R :        Environ la moitié du temps, oui.

 

Q :       Donc la moitié, 50 % du temps.

 

R :        C’est ça.

 

Q :       Et les deux autres étaient utilisés à des fins personnelles?

 

R :        Non. Le modèle 2004 n’a jamais été inscrit comme dépense dans les livres comptables.

 

Q :       Oh, il n’a jamais été traité comme une dépense?

 

R :        Non. Le Honda 2001 était utilisé à 50 % pour l’entreprise et à 50 % à des fins personnelles. Et l’autre, à moins que je ne confonde les modèles, un des modèles 2001 était utilisé à 50 % à des fins commerciales, et l’autre était principalement utilisé à des fins personnelles.

 

[63]    Il semble que, de 2001 à 2003, les appelants possédaient deux VTT, un Honda 2001 et un Arctic Cat. Le troisième VTT (le Honda 2004) a été acheté en 2004. Il semble aussi que le véhicule Arctic Cat était principalement utilisé par les deux fils des appelants. Le pourcentage d’utilisation commerciale de 50 % déclaré par Gregory Norton pour la période allant de 2001 à 2003 avait trait au VTT Honda 2001. Gregory Norton a affirmé que la déduction demandée pour 2003 relativement à la réparation d’un VTT et à l’achat de nouveaux pneus avait trait au Honda 2001. J’admets que le pourcentage d’utilisation commerciale du VTT Honda 2001 était de 50 %. Par conséquent, la moitié de la déduction demandée pour la réparation et l’achat de nouveaux pneus est accordée, ce qui donne droit aux appelants à une déduction supplémentaire de 267 $[9].

 

[64]    Toutefois, on n’a pas précisé quel VTT avait été réparé en 2004. Comme l’un des VTT (l’Arctic Cat) était utilisé à des fins personnelles par les fils des appelants, et comme aucun élément de preuve n’a été déposé pour démontrer que les réparations avaient été faites sur le VTT Honda 2001 qui était utilisé pour l’entreprise (ou sur le Honda 2004, après son acquisition), aucune déduction n’est accordée pour 2004 relativement aux réparations.

 

9ee)(iii), gg)(i), hh)(v) et ii)(ii) – Péages

 

[65]    Les déductions demandées (et refusées) relativement à des frais de stationnement et à des péages sont les suivantes :

 

 

2001

2002

2003

2004

Déduction demandée

302 $

231 $

38 $

39 $

 

[66]    Les déductions demandées pour 2003 et pour 2004 correspondent chacune aux péages pour une traversée du Pont de la Confédération. Gregory Norton a affirmé qu’il pêchait le thon sur la côte sud de la Nouvelle‑Écosse et qu’il se rendait en camionnette à Shelburne, en Nouvelle‑Écosse. De plus, le comptable des appelants était établi à Darmouth, en Nouvelle‑Écosse. J’admets que ces sommes ont été dépensées pour produire un revenu, et elles peuvent être déduites dans le calcul des revenus de la société de personnes.

 

9gg)(ii) et hh)(iii) – Coûts de remise en état de rouler des véhicules

 

[67]    Comme je l’ai noté précédemment, Gregory Norton achetait des véhicules endommagés, y compris des véhicules déclarés « perte totale » à des fins d’assurance. Ces véhicules n’étaient pas en état de rouler au moment de leur acquisition. Gregory Norton réparait les véhicules, puis il les immatriculait pour pouvoir les utiliser sur la route. Le passage suivant est tiré de ma décision dans LeCaine c. La Reine, 2009 CCI 382, 2009 DTC 1246 :

 

[22]      Le coût en capital d’un bien amortissable est inclus dans le calcul de la fraction non amortie du coût en capital de ce bien. Le « coût en capital » n’est pas défini dans la Loi. Dans l’ouvrage intitulé Principles of Financial Accounting : A Conceptual Approach, 1968, les auteurs Finney et Miller expliquent ce qui suit, à la page 245 :

 

[traduction]

 

Coûts accessoires. Le coût d’un bien comprend non seulement le prix de base, ou prix d’achat, mais également les coûts accessoires connexes tels que les frais liés à la recherche des titres et les frais juridiques payés pour acquérir un bien immobilier, les frais de transport, d’installation et de rodage accessoires à l’acquisition de la machinerie, les frais d’entreposage, les taxes et les autres frais payés relativement à la maturation de certains types de stocks, tels que le vin, et les dépenses faites en vue de remettre en état une usine achetée en état délabré.

 

Et à la page 198, ils mentionnent ce qui suit :

 

[traduction]

 

Détermination du coût. Comme énoncé général, on peut dire que le coût d’un bien s’évalue par la valeur en espèces de la contrepartie remise pour l’acquérir et qu’il est égal à cette valeur. En ce qui a trait aux acquisitions d’immobilisations, le coût comprend toutes les dépenses faites pour acquérir ce bien et le mettre en place et en l’état requis pour qu’il soit utilisé de la manière prévue dans les activités d’exploitation de l’entreprise. Par conséquent, le coût de la machinerie inclut des éléments tels que les frais de transport et d’installation, en plus du prix facturé pour celle‑ci.

 

[23]      Dans leur ouvrage intitulé Normes comptables : Analyse et concepts, 2003, les auteurs Milburn et Skinner mentionnent ce qui suit, à la page 256 :

 

La majorité des immobilisations corporelles proviennent de sources extérieures. Le principal élément de coût est alors le prix facturé, moins les escomptes au comptant ou les rabais de gros consentis. La principale difficulté consiste à faire en sorte que les coûts qui sont accessoires à l’acquisition de l’actif de même que ceux qui sont nécessaires à sa mise en service soient capitalisés. [...] En ce qui a trait au matériel et à l’outillage, ils incluent les droits de douane et les taxes, les frais de transport à l’entrée, l’assurance transport, les coûts d’installation, de même que les frais relatifs à la mise à l’essai et à la préparation.

 

[24]      Le coût d’une immobilisation devrait être déterminé, pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu, de la même manière qu’il l’est à des fins comptables. Le calcul du coût en capital d’un bien, pour l’application de la Loi, vise à déterminer le montant qui devrait être ajouté à la fraction non amortie du coût en capital et ensuite amorti avec le temps par une déduction pour amortissement (« DPA ») conformément au Règlement de l’impôt sur le revenu. Rien n’explique pourquoi les coûts accessoires (tels que les frais de transport) ne seraient pas inclus dans le calcul du coût en capital du bien pour l’application de la Loi, alors qu’ils sont ajoutés au coût d’une immobilisation à des fins comptables. Dans chaque cas, l’objectif consiste à déterminer le coût en capital total du bien.

 

[68]    Les frais de réparation des véhicules étaient simplement déboursés pour rendre les véhicules utilisables. Ces frais font tout bonnement partie du coût en capital déboursé par les appelants pour acquérir des véhicules en état de rouler. Ces frais de réparation doivent être ajoutés au coût en capital des véhicules, et aucun rajustement ne sera fait pour ces frais.

 

9kk) – Réduction de 2 946,62 $ à la déduction accordée pour les salaires pour 2001

 

[69]    Pour le calcul des revenus de la société de personnes en 2001, les appelants ont demandé des déductions de 18 778,57 $ au titre des parts de l’équipage et de 22 992,83 $ au titre de salaires. La vérificatrice de l’ARC a conclu que les salaires correspondaient aux montants suivants :

 

 

Montant

Robert Jamieson

4 994,99 $

Roger Dingwall

4 886,64 $

Glenda Livingston

3 002,49 $

Retenues à la source

5 486,59 $

Darren Victor

1 675,50 $

Total :

20 046,21 $

 

[70]    La différence entre le total déterminé par la vérificatrice (20 046,21 $) et la déduction demandée par les appelants au titre de salaires (22 992,83 $) est de 2 946,62 $. C’est le refus de la déduction de ce montant‑là qui est en litige. La déduction des sommes versées à Glenda Livingston, la gardienne des enfants des appelants, a aussi été refusée, mais les appelants ne contestent pas le refus de cette déduction.

 

[71]    Pour appuyer la demande de déduction du montant supplémentaire de 2 946,62 $ au titre de salaires, les appelants ont déposé en preuve des relevés de Polar Foods International, lesquels font état des montants suivants :

 

 

Montant

Part de Jeff Palmer

995,50 $

Part de Jeff Palmer

675,00 $

Part du pêcheur

1 475,80 $

Part de Jeff Palmer

540,00 $

Part de Jeff Palmer

633,94 $

Part de Jeff Palmer

301,88 $

Total :

4 622,12 $

 

[72]    Le total de ces montants est considérablement inférieur à la déduction de 18 778,57 $ demandée par les appelants au titre de parts de l’équipage. D’ailleurs, cette déduction a été accordée, en plus de la déduction demandée au titre de salaires. Aucune combinaison de ces montants ne permet d’arriver à une somme de 2 946,62 $. Si les appelants avaient raison, une portion des montants versés à Jeff Palmer aurait été déduite au titre de part d’équipage et une portion aurait été déduite au titre de salaires. Les appelants n’ont pas expliqué pourquoi les montants payés à M. Palmer avaient été répartis entre deux catégories et ils n’ont pas démontré que ces montants‑là n’avaient pas déjà été inclus dans les déductions demandées et accordées au titre de parts d’équipage. Par conséquent, aucun rajustement ne sera fait relativement à la déduction accordée pour les salaires.

 

9ss) – Amélioration d’un moteur de bateau

 

[73]    La seule preuve à cet égard a été fournie par la vérificatrice de l’ARC. Bien que plusieurs questions lui ont été posées à ce sujet, Gregory Norton n’a pas réussi à se souvenir de la raison ou de la nature de cette dépense. Par conséquent, aucun rajustement ne sera fait pour cet élément.

 

9iii) – Location d’un rouleau à pierres

 

[74]    Gregory Norton a dit avoir loué un rouleau à pierres pour écraser dans le sol les pierres et les débris qui jonchaient le sol avant d’y étendre ses filets. J’admets son témoignage à ce sujet, et j’accorde la déduction des 79,70 $ dépensés pour louer un rouleau à pierres au titre de dépense dans le calcul des revenus de la société de personnes pour 2002.

 


9www) – cccc) – Utilisation de la résidence à des fins commerciales

 

[75]    Les appelants soutiennent que 60 % de leur résidence servait à l’exploitation de leur entreprise de pêche pendant chacune des années visées par les appels (2001, 2002, 2003 et 2004). L’intimée a accordé des déductions en partant du principe que 12,5 % de la résidence servait à l’exploitation de l’entreprise de pêche pendant chacune des années en cause.

 

[76]    Gregory Norton a affirmé que la résidence mesure environ 34 pieds sur 36 pieds. Il s’agit d’un immeuble de deux étages qui compte aussi un sous‑sol complet. Selon ces dimensions, la superficie totale des trois étages serait de 3 672 pieds carrés. Un bureau de 100 pieds carrés avait été aménagé au rez‑de‑chaussée, et l’intimée a admis que le bureau servait à l’exploitation de l’entreprise. Certaines parties du sous‑sol servaient aussi à l’entreposage ou à la fabrication de sacs à appâts. Le sous‑sol était aussi utilisé à des fins personnelles. D’autres pièces du rez‑de‑chaussée étaient à la fois utilisées à des fins commerciales et à des fins personnelles.

 

[77]    Pour que le pourcentage d’utilisation commerciale de la résidence avancé par les appelants – 60 % – soit correct, il faudrait que 2 203 pieds carrés de la résidence aient été utilisés pour produire des revenus. Comme rien n’indique que le deuxième étage de la résidence servait à produire des revenus, il aurait fallu que 2 203 des 2 448 pieds carrés du rez-de-chaussée et du sous‑sol – c’est‑à‑dire 90 % de la superficie totale de ces deux étages – aient été utilisés à cette fin. Je n’admets pas que 90 % du rez‑de‑chaussée et du sous‑sol aient été exclusivement consacrés à des fins commerciales.

 

[78]    Les appelants ont aussi voulu inclure le garage et la remise dans ce calcul. Bien que le garage ait pu servir à entreposer des pièges à homard, il semble qu’il ait aussi été utilisé à des fins personnelles. La remise a seulement été construite en 2003.

 

[79]    Selon l’hypothèse de l’intimée voulant que le pourcentage d’utilisation commerciale de la résidence fût de 12,5 %, 459 pieds carrés de la résidence auraient été utilisés à des fins commerciales. Les appelants n’ont pas présenté d’éléments de preuve suffisants pour réfuter cette hypothèse. Par conséquent, aucun rajustement ne sera fait relativement à l’utilisation commerciale de la résidence.

 

Conclusion

 

[80]    Par conséquent, les appels sont accueillis, avec dépens, et la question est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en tenant pour acquis que :

 

a)       pour les années visées par les appels, les montants suivants sont déduits des revenus de la société de personnes constituée par les appelants :

 

 

Description

2001

2002

2003

2004

Déductions accordées d’un commun accord :

2 434 $

1 588 $

6 006 $

1 888 $

Filets, pièges et autre matériel connexe :

2 768 $

5 521 $

12 082 $

11 376 $

Moulinets et autre matériel connexe :

3 600 $

7 578 $

4 386 $

3 855 $

Évaluation foncière et analyse de la qualité de l’eau :

8 $

8 $

8 $

8 $

Intérêts pour 2003 (Ford Explorer 2000) – 25 % de 1 354 $ :

 

 

338 $

 

Véhicules tout‑terrain – réparation et nouveaux pneus :

 

 

267 $

 

Péages :

302 $

231 $

38 $

39 $

Location d’un rouleau à pierres :

 

80 $

 

 

Total :

9 112 $

15 006 $

23 125 $

17 166 $

 

b)      les 215,04 $ déboursés en 2002 par les appelants pour acheter un récepteur à balayage permettant de capter les fréquences de la police doivent être ajoutés à la fraction non amortie du coût en capital des actifs de catégorie 8 de la société de personnes;

 

c)       le produit de la vente par Gregory Norton de son permis de pêche au homard en 2002 était de 75 000 $ et non pas de 100 000 $.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de février 2010.

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de juillet 2010.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste



RÉFÉRENCE :

2010 CCI 62

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

2008-1019(IT)I; 2008-1020(IT)I

 

INTITULÉ :

Louise C. Norton c. Sa Majesté la Reine et Gergory W. Norton c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 27 et 29 mai, le 1er juin et les 1er et 2 décembre 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Wyman W. Webb

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 2 février 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelants :

Me Joseph M. J. Cooper

 

Avocat de l’intimée :

Me Toks C. Omisade

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour les appelants :

 

Nom :

Joseph M. J. Cooper

 

Cabinet :

Blackburn, English

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] 6 500 $ - 1 060 $.

[2] Selon certains éléments de preuve, Chance Norton était occupé à pêcher en décembre, mais rien ne permet de croire qu’il n’aurait pas pu témoigner à la fin mai.

[3] En application de l’article 34 de la Loi, si le contribuable en fait le choix, aucun montant n’est inclus pour le travail en cours dans le calcul du revenu tiré d’une entreprise qui consiste en l’exercice d’une des professions énumérées à cet article. Suivant le paragraphe 10(14) de la Loi, pour l’application des paragraphes 10(12) et 10(13) de la Loi, l’inventaire comprend ces biens.

[4] La convention d’achat incluait aussi un permis de pêche au homard, et il semble que ce permis ait été acquis par Gregory Norton. Comme il détenait déjà un permis de pêche au homard, Gregory Norton a détenu deux permis de pêche au homard jusqu’au moment où il a vendu un des permis à Glen Tassell, à Gary Tassell et à Delia Tassell en 2002. Louise Norton détenait aussi son propre permis de pêche au homard.

[5] Il n’a pas été expliqué pourquoi seul Gregory Norton avait signé cette convention d’achat et on ignore si les 300 pièges à homard vendus faisaient partie des 400 pièges que les appelants avaient auparavant achetés du père de Gregory Norton.

[6] Bien que la preuve ne permette pas de déterminer la valeur exacte des pièges à homards appartenant aux appelants, il semble que le coût des matériaux était de beaucoup inférieur à la valeur de ces pièges.

[7] Gregory Norton fabriquait les pièges de remplacement pendant l’hiver, entre deux saisons de pêche au homard.

[8] Bien que les déclarations de revenus de Gregory Norton pour 1999 et 2000 ont aussi été déposées en preuve, les sommes dépensées pour des pièges et des filets ne constituaient pas un élément distinct dans ces déclarations. Il semble que, pour 1999 et 2000, ces sommes ont été incluses dans le « matériel de pêche ». Les déductions demandées au titre du « matériel de pêche » s’élevaient à 6 567,13 $ pour 1999 et à 7 836 $ pour 2000. L’ARC n’a pas mené de vérification à l’égard des années d’imposition 1999 et 2000, et, comme je l’ai souligné précédemment, les sommes dépensées à l’égard de filets et de pièges n’étaient pas les seules incluses dans le « matériel de pêche » pour les années qui ont fait l’objet d’une vérification. Pour 2001, une déduction de 13 205 $ a été demandée à l’égard du « matériel de pêche », dont 2 768 $ avaient trait aux filets et aux pièges. Pour 2002, une déduction de 16 120 $ a été demandée à l’égard du « matériel de pêche », dont 5 521 $ avaient trait aux filets et aux pièges. Pour 2003, une déduction de 25 666 $ a été demandée à l’égard du « matériel de pêche », dont 12 082 $ avaient trait aux filets et aux pièges. Pour 2004, une déduction de 24 055 $ a été demandée à l’égard du « matériel de pêche », dont 11 376 $ avaient trait aux filets et aux pièges. Il est donc impossible de savoir quelles sommes ont été dépensées pour des filets et des pièges en 1999 et en 2000.

[9] Il n’est pas tout à fait clair si le montant dépensé pour la réparation et les nouveaux pneus était 533,77 $ ou 2 x 533,77 $ (1 067,54 $). Cependant, comme Gregory Norton a déclaré en avoir [traduction] « envoyé un seul à [leur] comptable », je suis d’avis qu’il n’avait pas demandé une déduction équivalant à 50 % de la dépense dans le calcul des revenus de la société de personnes, et que le véritable coût de la réparation et des nouveaux pneus était de 533,77 $. Si cela était faux, c’est aux appelants qu’incombait le fardeau de prouver quel montant avait véritablement été dépensé. Comme aucun élément de preuve n’a été présenté à cet égard, les appelants n’ont pas su démontrer qu’ils avaient seulement demandé la déduction de 50 % du montant dépensé.

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