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Dossier : 2007-1282(GST)G

 

ENTRE :

GESTION LOUMA INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

CERTIFICAT DE TAXATION

 

          JE CERTIFIE que j'ai taxé les dépens entre parties de l'appelante dans cette instance en vertu du paragraphe 153(1) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) et J'ACCORDE LA SOMME DE 85 617,71$.

 

          Signé à Toronto, Ontario, ce 1er jour de février 2010.

 

 

 

« Johanne Parent »

Officier taxateur

 

 


Référence : 2010 CCI 61

Date : 20100201

Dossier : 2007-1282(GST)G

ENTRE :

GESTION LOUMA INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION

 

 

L'Officier taxateur, Johanne Parent

 

[1]     Le 5 décembre 2008, la Cour (l’Honorable juge Alain Tardif) accueillait l’appel de l’avis de cotisation portant le numéro 22233, déférant la cotisation au Ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les termes du consentement à jugement intervenu entre les parties, le tout avec dépens en faveur de l’appelante. La taxation du mémoire de frais de la partie appelante a été entendue par conférence téléphonique le mercredi 6 janvier 2010. L'appelante était représentée par MDominic C. Belley et l’intimée, par Me Benoît Denis.

 

[2]     À l’audition, la partie intimée a concédé tous les dépens réclamés selon le Tarif B (catégorie C) des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale) pour un montant total de 8 750$ en plus des débours demandés pour les items suivants : frais judiciaires (550$), frais d’huissiers (225,50$), notes sténographiques (2 450,10$) ainsi que les frais de l’expert Jacques Binette (849$) et une fraction des frais pour le travail effectué sur deux autres rapports d’expertise (Bodycote Groupe d’essais : 3 500$ et KPMG LLP : 35 791,78$).

 

[3]     La question en litige concerne principalement l’adjudication des frais d’experts et photocopies encourus précédant le dépôt de l’avis d’appel.

 

[4]     L’argument soulevé par la partie intimée eut égard aux frais d’experts Bodycote et KPMG, consiste essentiellement au fait qu’une partie de la facturation soumise précède le dépôt de l’avis d’appel. S’appuyant des arrêts Gulliver’s Travels Motor Hotel Ltd c. Canada (ministre du Revenu national – M.R.N.), [1993] 1 C.T.C. 2236, Paquette c. Canada, [1999] T.C.J. No. 794, Veldman c. Canada (ministre du Revenu national – M.R.N.) 92 DTC 1334 et Taylor c. Canada, [2009] G.S.T.C. 144, le procureur soumet que tout ce qui est antérieur au dépôt de l’avis d’appel ne peut être taxé. Au sujet des frais réclamés pour les photocopies et télécopies, le procureur de l’intimée soulève le même argument de l’antériorité des dépenses. En s’appuyant sur l’arrêt Crompton c. Canada, [1998] 1 C.T.C. 2156, il soumet de plus que ces frais ne peuvent être réclamés en vertu d’un taux fixe, mais au coût réel. Quant au coût réclamé, le procureur de l’intimé indique que le tarif prévu aux Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) est de 0,20$ la page et non les 0,25$ réclamés au mémoire de frais.

 

[5]     Dans un bref historique du dossier établissant le contexte de l’appel et justifiant le nombre de pièces documentaires au dossier, l'avocat de l'appelante  fait valoir que la vérificatrice de l’intimée aurait ignoré les cotisations et livres du contribuable se basant uniquement sur les achats d’alcool. Selon l’argument de la partie appelante, la cotisation du contribuable aurait été établie selon deux hypothèses arbitraires qui se devaient d’être renversées : (1) tous les achats d’alcool se traduisent par une vente et (2) l’estimation présumée des volumes d’alcool par contenants.

 

[6]     L’avocat de l’appelante soutient que dès le dépôt de l’avis d’appel, il était en mesure de contester avec preuve à l’appui les hypothèses du Ministère. Selon l’appelante, les mandats des experts n’auraient pas été différents, réalisés avant ou après le dépôt de l’avis d’appel. Les gestes posés et dépenses engagées faisaient partie d’un continuum qui aurait été le même et ne faisaient de sens que dans le cadre de cet appel. Au soutien de l’argument de l’antériorité des frais engagés, le procureur réfère à deux arrêts : Scavuzzo c. Canada, 2006 TCC 90 et Carr c. Canada (ministre du Revenu national – M.R.N.), [1996] 2 C.T.C. 100.  Le procureur soutient de plus que le contribuable a toujours collaboré avec le Ministère, aurait même offert la consultation des rapports d’experts avant l’audition ainsi que deux offres de règlement. Il fait aussi valoir que le consentement à jugement, intervenu au deuxième jour d’un procès qui devait en compter cinq et visant l’entièreté des montants à l’avis d’appel en plus des dépens, devrait inférer en faveur de l’appelante dans l’évaluation des dépens.

 

[7]     Quant aux photocopies et télécopies, il est concédé qu’une partie de ces frais aurait été engagée avant le dépôt de l’avis d’appel, mais que ces dépenses faisaient partie d’un même continuum. Quant au coût réel des photocopies, il est soutenu que le laxisme de l’intimée dans cette affaire devrait supporter le remboursement intégral des coûts engagés par le client qui se chiffre à 0,25$ la copie et non 0,20$.

 

[8]     En réponse, le procureur de l’intimée affirme que l’évaluation des contenants par la vérificatrice aurait été faite de façon arbitraire et de manière non-adéquate et qu’à la lecture des rapports d’experts, pouvait être déterminée que la cotisation tel qu’établie ne tiendrait pas la route. Cependant à la conférence préparatoire, lesdits rapports n’étaient pas encore finalisés et disponibles afin que son client puisse les analyser et accepter l’offre de règlement proposée. Les rapports d’experts étaient essentiels, mais n’était pas nécessaire qu’ils soient préparés avant le dépôt de l’avis d’appel. La décision dans l’affaire Scavuzzo ne s’appliquerait pas, car la malveillance ou malice de l’intimée n’a jamais été mise en preuve.

 

[9]     La jurisprudence soulevée par la partie intimée démontre sans ambiguïté qu’une partie ne peut recouvrer les frais engagés pour un litige avant le dépôt de l’avis d’appel. Les arrêts soulevés par la partie appelante signalent par ailleurs deux affaires dans lesquelles la Cour a accordé le remboursement de débours à une partie pour des frais engagés antérieurement au dépôt de l’avis d’appel. Dans l’arrêt Scavuzzo et la jurisprudence y mentionnée, est examiné l’exercice de la discrétion de la Cour dans l’allocation de débours engagés avant le début des procédures dans le cadre de la conduite répréhensible d’une partie. Cet arrêt est difficilement applicable à l’affaire qui nous occupe, car la Cour, dont je ne suis pas, n’a pas eu l’opportunité de se pencher sur le sujet de la conduite des parties; le jugement étant intervenu après entente des parties au second jour du procès.

 

[10]    Plus pertinente est la décision de l’Honorable juge Stone dans l’affaire Carr. Au paragraphe 5, la Cour indique :

 

Tout comme le juge Kempo de la Cour canadienne de l'impôt, nous n'interprétons pas le paragraphe 8(3) des Règles comme signifiant nécessairement que les débours doivent être faits après que l'appel a été institué en Cour de l'impôt pour être considérés comme "essentiels à la tenue de l'appel". Il est vrai que ces mots peuvent généralement être considérés comme visant les débours faits dans le cadre de l'appel, mais ils n'excluent pas les débours faits avant le commencement de l'appel s'il est prouvé qu'ils sont néanmoins "essentiels à la tenue de l'appel".

 

[11]    Cette décision de la Cour d’appel intervenait alors que l’alinéa 8(3) des Règles de Pratique et Procédure de la Cour canadienne de l’impôt se lisait comme suit :

 

Les débours essentiels à la tenue de l'appel, notamment les indemnités des témoins prévues aux paragraphes (4) et (5), peuvent être adjugés.

 

[12]    L’objet de cet article se retrouve aujourd’hui à l’article 157(3) des Règles de Pratique et Procédure de la Cour canadienne de l’impôt(2008) :

 

Les débours, à l’exception des droits versés au greffe, ne sont ni taxés ni accordés à moins qu’il ne soit établi qu’ils ont été faits ou que la partie est tenue de les payer.

 

[13]    Tel que mentionné à la règle 157(3), les rapports d’experts pour lesquels des frais sont réclamés ont été produits au dossier de la Cour avec factures à l’appui. Tout comme l’était le Juge Stone dans l’affaire Carr, je suis d’avis que les débours engagés avant le début de l’avis d’appel ne sont pas nécessairement tous exclus. Dans la présente affaire, il est concédé par les parties que les rapports d’experts tels que déposés au dossier de la Cour étaient nécessaires, voire essentiels. Leur éventuelle utilisation lors de l’audition ne fait aucun doute. Tenant compte du caractère exceptionnel de la situation, je considère que les modalités et circonstances dans lesquelles lesdits rapports ont été préparés ne sauraient avoir d’incidence sur le remboursement des frais engagés. Les frais pour les rapports d’experts Bodycote Groupe d’essais (factures des 29 novembre 2006, 29 décembre 2006 et 5 février 2007) et KPMG LLP  (factures des 21 novembre 2006, 8 janvier 2007 et 19 février 2007) sont alloués tel que présentés.

 

[14]    Quant aux frais de photocopies et télécopies, un principe demeure : les frais engagés doivent être liés aux procédures  associées au litige devant la Cour. En l’occurrence et au vu des documents produits au dossier de la Cour, la justification fournie au soutien du mémoire de frais pour les photocopies et télécopies ne correspond pas. Comme en font foi les listes soumises au soutien du mémoire de la partie appelante, des frais de 4 247,75$ auraient été facturés au client pour les photocopies et 698,30$ pour les télécopies. Le détail des dites listes nous apprend que les services facturés auraient été fournis à compter du mois de janvier 2006 alors que l’avis d’appel fut produit le 7 mars 2007. À l’exception du nombre de copies effectuées, aucune autre spécification ne permet de confirmer quels furent les documents copiés, s’ils étaient tous essentiels à la conduite de l’affaire et si les frais facturés représentent les coûts actuels de la firme d’avocats.

 

[15]    En conséquence de ce qui précède et comme il est manifeste que des frais de photocopies et télécopies furent engagés, j’ai effectué une évaluation sommaire des documents au dossier de la Cour et des pièces justificatives produites au soutien du mémoire de frais à compter du dépôt de l’avis d’appel, multiplié par le nombre de copies nécessaires à la conduite d’une affaire semblable devant la Cour au tarif de 0,20$ la page selon le Tarif B des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale). Les frais de photocopies et télécopies sont  évalués et alloués au montant de 580,30$.

 

[16]    Le mémoire de frais de la partie appelante est taxé et alloué au montant de 85 617,71$.

 

 

       Signé à Toronto, Ontario, ce 1er jour de février 2010.

 

 

 

« Johanne Parent »

Officier taxateur

 

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