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Référence : 2010 CCI 76

Date : 20100219

Dossier : 2009-2399(IT)I

ENTRE :

KENNETH I. RENAUD,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Révisés à partir de la transcription des motifs du jugement rendus oralement le 4 décembre 2009, à Windsor (Ontario))

 

 

La juge Campbell

 

[1]     Le présent appel concerne l’année d’imposition 2007 de l’appelant. La plupart des faits ne sont pas contestés. L’appelant détenait un bien situé au 518, rue Arquette, à McGregor, en Ontario, qui lui a servi de résidence principale jusqu’à ce qu’il obtienne un nouveau poste auprès de son employeur, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, en 2007.

 

[2]     L’appelant a commencé à travailler au nouvel endroit en avril 2007 et a fait construire une nouvelle résidence au 47, rue Anderson, à Cache Bay, en Ontario.

 

[3]     En juillet 2007, l’appelant a loué son ancienne résidence principale située sur la rue Arquette, à McGregor. Par conséquent, au cours de l’année d’imposition 2007, bien que l’appelant ait commencé à utiliser la résidence de la rue Arquette pour en tirer un revenu, dans les faits, il ne l’a pas pour autant vendue. Dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition 2007, l’appelant a déduit des montants relativement à des frais de déménagement.

 

[4]     La question à trancher est de savoir si l’appelant a le droit de déduire des frais de déménagement supérieurs au montant accordé par le ministre du Revenu national (le « ministre »). Le ministre a refusé les déductions de 583 $ et de 1 897,13 $ demandées au titre de frais juridiques et de droits de cession immobilière, respectivement, pour l’achat d’une nouvelle maison, compte tenu du fait qu’il ne s’agissait pas de montants déductibles au sens de l’alinéa 62(3)f).

 

[5]     L’appelant soutient qu’il a le droit de déduire ces montants au titre de l’alinéa 62(3)f) parce qu’il a bel et bien vendu son ancienne résidence principale située sur la rue Arquette au sens de l’alinéa 45(1)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), étant donné qu’en 2007, la résidence principale a été affectée à un autre usage et est devenue un bien de location et qu’il y a donc eu disposition réputée du bien situé sur la rue Arquette. Il soutient que les montants sont des frais relatifs à la vente de la résidence sur la rue Arquette au sens de l’alinéa 62(3)f). Selon la définition du dictionnaire, le mot « sold » (« vendu » en français, et « vend » dans la version française de la Loi) renvoie au temps passé du verbe « sell » (« vendre » en français) ainsi qu’à l’expression « to dispose of » (« céder » en français), ce qui, de l’avis de l’appelant, comprend une disposition réputée.

 

[6]     Le représentant de l’appelant a fait référence aux premiers mots du paragraphe 45(1), qui sont les suivants :

 

Les règles suivantes s’appliquent dans le cadre de la présente sous-section :

 

pour affirmer que, vu que l’alinéa 62(3)f) fait partie de la même section de la Loi, le paragraphe 45(1) devrait aussi s’appliquer dans le cas où l’alinéa 62(3)f) n’exclut pas expressément le paragraphe 45(1).

 

[7]     Le ministre fait valoir qu’étant donné que la résidence de la rue Arquette n’a jamais été vendue en 2007, les déductions demandées par l’appelant ne peuvent pas être accordées en application du libellé de l’alinéa 62(3)f), qui fait référence à une « vente », mais dont la portée exclut les dispositions réputées.

 

[8]     L’alinéa 62(3)f) de la Loi prévoit, et je verserai ceci au dossier :

 

62(3) Pour l’application du paragraphe (1), sont comprises dans les frais de déménagement toutes dépenses engagées au titre :

 

[…]

 

f) lorsque le contribuable ou son époux ou conjoint de fait vend l’ancienne résidence par suite du déménagement, des frais, pour le contribuable, à l’égard des services juridiques relatifs à l’achat de la nouvelle résidence et des impôts, frais, droits et taxes (sauf toute taxe sur les produits et services ou taxe à la valeur ajoutée) applicables au transfert ou à l’enregistrement du droit de propriété de cette résidence;

 

[…]

 

[9]     Le libellé de l’alinéa 62(3)f) est clair et non équivoque. Il fait clairement référence à la vente d’une résidence, et le Shorter Oxford English Dictionary donne au terme « sold » (« vendu » en français, et « vend » dans la version française de la Loi) le sens de [traduction] « céder par vente ». Le seul terme employé dans cette disposition est le terme « vend », et, si l’on interprète l’alinéa 62(3)f) en fonction de son sens ordinaire, il serait inapproprié d’étendre le sens au-delà de l’objet clair de la disposition et de l’intention du législateur. Divers autres termes auraient pu être utilisés à l’alinéa 62(3)f) pour élargir le sens à donner à cette disposition, mais, vu que ce n’est pas le cas, il n’est pas approprié d’élargir le sens du terme « vend » de façon à inclure une disposition réputée, comme me le demande l’appelant. Le libellé de chacune des deux dispositions est totalement différent, et aucune de ces dispositions ne comporte d’intention ou de mention expresse qui renvoie le lecteur à l’autre disposition d’une quelconque façon ou qui incorpore celle‑ci.

 

[10]   L’avocat de l’intimée m’a renvoyée à la décision Havlik Enterprises Ltd. v. M.N.R., 89 D.T.C. 159, dans laquelle le juge Rip, tel était alors son titre, dans son analyse des termes « réputée avoir versé », a cité les propos tenus par le juge Beetz dans l’arrêt La Reine c. Verrette, [1978] 2 R.C.S. 838, à la page 845 :

 

Une disposition déterminative est une fiction légale; elle reconnaît implicitement qu’une chose n’est pas ce qu’elle est censée être, mais décrète qu’à des fins particulières, elle sera considérée comme étant ce qu’elle n’est pas ou ne semble pas être. Par cet artifice, une disposition déterminative donne à un mot ou à une expression un sens autre que celui qu’on leur reconnaît habituellement et qu’il conserve là où on l’utilise […]

 

[11]   Selon le paragraphe 45(1), lorsque la résidence de la rue Arquette, qui était une résidence principale, a commencé à être utilisée pour gagner un revenu, alors que l’appelant en conservait le droit de propriété, il ne s’agissait pas d’une vente aux termes de l’alinéa 62(3)f), sauf si le paragraphe 45(1) faisait en sorte qu’il y ait eu disposition réputée du bien, ce qui donnerait lieu à des attributs fiscaux qui n’existeraient pas autrement. Cependant, le libellé de l’alinéa 62(3)f) est clair : le terme employé est « vend », et, selon les faits convenus, l’appelant n’a pas vendu la résidence située sur la rue Arquette en 2007 lorsqu’il a fait l’acquisition de sa nouvelle résidence à Cache Bay. Par conséquent, les montants déduits ne peuvent pas être des frais relatifs à la vente de la résidence située sur la rue Arquette au sens de l’alinéa 62(3)f) et ne sont donc pas déductibles.

 

[12]   Pour ces motifs, l’appel est rejeté sans frais.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de février 2010.

 

 

 

 

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

Traduction certifiée conforme

ce 13e jour de février 2014.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice

 


 

 

 

RÉFÉRENCE :                                 2010 CCI 76

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :   2009-2399(IT)I

 

INTITULÉ :                                      Kenneth I. Renaud c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Windsor (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 3 décembre 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge Diane Campbell

 

DATE DU JUGEMENT

RENDU ORALEMENT :                 Le 4 décembre 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelant :

M. Richard J. Masse

Avocat de l’intimée :

Me Jack Warren

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                    

 

                          Cabinet :                

 

       Pour l’intimée :                          John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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