Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[traduction française officielle]

2004-3910(EI)                                                                       Le 12 juillet 2007

Marilyn Pickett c. M.R.N.

 

LE JUGE :

Q.        La question que la Cour doit trancher aujourd’hui est celle de savoir si l’appelante et l’employeur avaient un lien de dépendance au sens de l’alinéa 5(2)i) de la Loi sur l’assurance‑emploi. Les hypothèses du ministre formulées aux alinéas 7a) à 7o), 7r), 7s) et 7u) de la réponse sont fondamentalement admises et non contestées. Les seuls faits réellement contestés parmi les hypothèses avancées par le ministre figurent aux alinéas 7p), 7q) et 7t) de la réponse. Il revient à la Cour de trancher la question soulevée à l’alinéa 7v). 

 


            En l’espèce, je ne crois pas que la Cour doive nécessairement tirer une inférence défavorable de l’omission de comparaître de l’appelante. 

 

Le fardeau de la preuve, dans cette affaire, incombe clairement et sans équivoque à l’appelante. L’appelante a choisi de ne pas témoigner, peu importe ses raisons. Il s’agit de son choix. Si l’appelante ne peut s’acquitter du fardeau qui lui incombe et qu’elle ne témoigne pas, c’est parce qu’elle en aura décidé ainsi. De toute manière, je ne crois pas qu’il soit approprié de tirer une inférence défavorable à l’égard de l’appelante dans la présente affaire. J’ai examiné avec intérêt la décision Porter c. M.R.N., la source citée par le ministre en ce qui concerne l’analyse des affaires de cette nature. Je souscris aux commentaires de Mme la juge Campbell, qui approuve les observations que MM. les juges Bowie et Archambault ont formulées sur l’état actuel du droit en la matière. Au paragraphe 13 de sa décision, Mme la juge Campbell s’exprime ainsi : « En résumé, le rôle de la Cour consiste à vérifier l’existence et l’exactitude des faits sur lesquels le ministre se fonde, à examiner tous les faits mis en preuve devant elle, notamment tout nouveau fait, et à décider ensuite si la décision du ministre paraît toujours raisonnable à la lumière des conclusions de fait tirées par la Cour. Elle doit accorder une certaine déférence au ministre dans le cadre de cet exercice. »



Si la décision du ministre était fondée uniquement sur les hypothèses, et je présume qu’elle l’était, la décision serait certainement raisonnable. Elle ne serait cependant pas raisonnable si certaines hypothèses se révélaient erronées, et surtout certaines des hypothèses les plus importantes, ce qui dépend des conclusions de fait de la Cour. J’ai examiné l’ensemble de la preuve, et plus particulièrement le témoignage de M. Pickett, que j’estime être un homme honnête, droit et franc. Il était bien au fait des activités commerciales de son entreprise, dont il détenait d’ailleurs la responsabilité générale. Même s’il ne connaissait pas à fond les processus graduels que suivait l’appelante, son épouse, en l’occurrence, il avait une certaine connaissance du travail de bureau qui devait être accompli dans le cadre de l’exploitation de son entreprise, laquelle avait grossi au cours des dernières années. D’après la preuve dont je dispose, plus particulièrement l’alinéa 5(7)p), ou plutôt 7p) des hypothèses de fait, je conclus que l’appelante n’était pas tenue d’être au bureau huit heures par jour, comme il a été avancé ou signalé. Je crois que les tâches de l’appelante changeaient ou pouvaient changer en fonction du type de travail que l’entreprise avait à faire, de la nature et de la durée du travail ainsi que d’autres facteurs. J’ai examiné en détail, avec le témoin de l’appelante, les diverses tâches que celle‑ci exécutait dans le cadre de son emploi. Je tiens pour avéré, d’après la preuve, que l’appelante a travaillé 27 heures par semaine et reçu une rémunération de 10 $ l’heure du 30 juin au 31 octobre 2003, qu’elle a travaillé 14 heures par semaine et reçu une rémunération de 10 $ l’heure du 1er novembre au 1er décembre 2003, et qu’elle a travaillé huit heures par semaine et reçu une rémunération de 10 $ l’heure du 1er au 27 décembre 2003. J’ai tiré ces conclusions de fait de la déposition du témoin de l’appelante, M. Pickett, et de la nature de l’emploi que l’appelante exerçait, y compris les diverses tâches qui ont été décrites. Je considère que la description des tâches que le témoin de l’appelante a faite n’était pas exhaustive; en d’autres mots, il y avait vraisemblablement d’autres tâches que l’appelante n’accomplissait pas. Ces tâches n’étaient pas nécessairement liées directement aux contrats qui étaient en cours; elles pouvaient varier tout au long de l’année, compte tenu de la nature des responsabilités de la personne chargée de la paye et du travail de bureau relativement à la production de certaines déclarations et tout le reste. Je conclus que l’appelante s’occupait de ce qui suit : la paye, les retenues à la source et leur remise, les reports dans le grand livre des écritures passées dans les journaux, les reports dans le livre de paye, les certificats de cessation d’emploi des employés, le paiement de toutes les factures de l’entreprise, les discussions et les confirmations avec les créanciers relativement aux factures, les diverses opérations bancaires, y compris les dépôts et les rapprochements, les discussions avec les représentants des banques, la production des factures pour les travaux accomplis et pour ceux qui devaient l’être aux termes d’un contrat et la préparation annuelle des dossiers à l’intention du comptable en vue de la préparation des états financiers. En outre, l’appelante participait à la rédaction des soumissions, elle déposait les soumissions en s’assurant qu’elles étaient bien cautionnables, régulièrement, elle répondait au téléphone, elle traitait avec les banques, elle passait en revue les états financiers avec le comptable, elle produisait les différentes déclarations exigées par le gouvernement, y compris celles qui portaient sur les retenues à la source et les déclarations de TVH, elle préparait les états financiers trimestriels et elle s’occupait des cautions de soumission; elle utilisait l’ordinateur, le courriel et le télécopieur, elle s’occupait des programmes de sécurité (chose particulièrement importante pour l’employeur de l’appelante) et vérifiait aussi chaque jour les contrats offerts.

 

Je crois donc que l’ampleur des tâches de l’appelante variait en fonction de la période de l’année, mais que l’appelante avait néanmoins des tâches à accomplir durant les périodes pertinentes, parmi celles que je viens d’énumérer. Comme je l’ai indiqué, j’ai tiré ces conclusions de fait, lesquelles sont fondées sur les renseignements dont dispose la Cour. Les calculs, sommaires comme les renseignements dont nous disposons, sont principalement fondés sur le nombre d’employés et le temps prévu pour l’exécution de certaines tâches. C’était ce que la Cour pouvait faire de mieux dans les circonstances.

 


Par conséquent, compte tenu de ces conclusions de fait qui s’appliquent plus précisément aux alinéas 7p), r) et t) de la réponse, je conclus que la décision du ministre, eu égard à ces faits, n’était pas raisonnable. Le ministre aurait dû décider que l’employeur et l’employée n’avaient pas de lien de dépendance pendant les périodes en cause et que l’emploi était assurable en fonction des heures et des taux horaires que j’ai indiqués. L’affaire est renvoyée au ministre pour qu’il l’examine à nouveau et y mette un terme.

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour d’octobre 2007.

 

Johanne Brassard, trad. a.


 

RÉFÉRENCE :                  2007CCI518

NO DU DOSSIER DE LA COUR :   2004-3910(EI)

INTITULÉ :                   Marilyn Pickett c.

                        Le ministre du Revenu                           national

 

LIEU DE L’AUDIENCE :         Gander (Terre-Neuve)

 

DATE DE L’AUDIENCE :         Le 12 juillet 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :         L’honorable                                     juge E.P. Rossiter

 

DATE DU JUGEMENT ORAL :      Le 12 juillet 2007

 

COMPARUTIONS :         

 

Représentant

de l’appelante :             M. Wayne Budgell

 

Avocate de l’intimé :        Me Lindsay Holland 

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

   Pour l’appelant :   

 

     Nom :

 

     Cabinet :

 

   Pour l’intimé :      John H. Sims, c.r.

                        Sous-procureur général                          du Canada

                        Ottawa, Canada

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.