Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossier : 2009-2593(IT)I

ENTRE :

Annette D. Edwin,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 24 mars 2010, à Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

Devant : L’honorable juge Pierre Archambault

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

M. Augustine V. Edwin

 

Avocat de l’intimée :

Me Bruce Senkpiel

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté relativement à l’année d’imposition 2007 est accueilli, sans dépens, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse une nouvelle cotisation en partant du principe que seule la moitié de la somme de 6 604,32 $ doit être incluse dans le revenu de l’appelante.

 

 

 

Signé à Magog (Québec), ce 4e jour d’août 2010.

 

 

 

« Pierre Archambault »

Juge Archambault

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour de septembre 2010.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


 

 

 

 

Référence : 2010 CCI 362

Date : 20100804

Dossier : 2009-2593(IT)I

ENTRE :

Annette D. Edwin,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Archambault

 

[1]              Il y a un certain temps, la fiducie de revenu était une structure très populaire pour exploiter une entreprise au Canada. Si elle distribuait la totalité de ses revenus à ses porteurs de parts, une telle fiducie n’avait aucun impôt sur le revenu à payer. Si les porteurs de parts étaient exonérés d’impôt ou n’étaient pas autrement assujettis à l’impôt au Canada, aucun impôt n’était alors payé aux autorités fiscales canadiennes. Même les porteurs de parts qui étaient assujettis à l’impôt tiraient profit de la structure de la fiducie de revenu, car elle atténuait le problème fiscal posé par l’intégration partielle dans les cas où les bénéfices réalisés par des sociétés publiques sont payés aux actionnaires au moyen de dividendes. Ainsi, un nombre croissant de sociétés envisageait de se convertir en fiducies de revenu. Le phénomène étant devenu un enjeu politique majeur au Canada, un parti politique a profité d’une élection pour promettre de ne pas modifier le traitement fiscal favorable dont profitaient les fiducies de revenu. Une fois élus et tenant en mains les rênes du pouvoir, ceux qui avaient fait cette promesse ont compris qu’il leur faudrait modifier la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour éviter une chute considérable des revenus du trésor canadien[1]. On a donc demandé au Parlement d’adopter un projet de loi modifiant la Loi. À cause de ces modifications‑là, il est devenu moins intéressant d’employer la structure de la fiducie de revenu pour exploiter une entreprise au Canada. Selon M. Edwin, le représentant de Mme Edwin dans la présente affaire, bon nombre de ces fiducies de revenu devront être dissoutes d’ici la fin de l’année. M. Edwin a soutenu que ces modifications législatives ont entraîné une chute importante de la valeur des placements que lui et son épouse avaient faits dans des fiducies de revenu. En somme, M. Edwin est un contribuable très fâché et frustré.

 

[2]              De plus, l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC » ou le « ministre ») aurait dit à M. Edwin que lui et son épouse ne pourraient pas demander de déduction au titre de perte de placement relativement à leurs placements dans des fiducies de revenu avant d’avoir disposé de ces placements et qu'ils devaient inclure dans leurs revenus les sommes que leurs fiducies de revenu leur avaient versées à titre de distributions de revenus. M. Edwin s’était aussi fait dire que, pour que lui et son épouse puissent déduire une perte de placement sans devoir faire de disposition, il fallait modifier la Loi. On lui a dit que cela pouvait être fait [traduction] « par l’intermédiaire de son député ». Le 1er février 2009, M. Edwin a écrit à son député. Ensuite, un membre du personnel de son député lui a apparemment expliqué que son meilleur recours serait de s’adresser à la Cour canadienne de l’impôt.

 

[3]              Tout au long du témoignage qu’il a fait devant moi, M. Edwin visait par‑dessus tout à convaincre la Cour de modifier la Loi pour régler certains des problèmes qu’il avait décrits dans la lettre envoyée à son député. Par exemple, outre les problèmes déjà mentionnés, il s’agit des problèmes entraînés par la perte du crédit d’impôt pour les dividendes et de l’exonération d’impôt d’une partie des gains en capital réalisés lorsque des gains en capital sont reçus ou réalisés par l’entremise d’un compte à l’abri de l’impôt, notamment un régime enregistré d’épargne‑retraite. J’ai expliqué à M. Edwin que le système fiscal peut seulement être modifié par le Parlement et que la Cour (ou tout autre tribunal) ne peut pas faire les modifications qu’il désire. Je lui ai dit qu’il lui faudrait donc réécrire à son député ou écrire au ministre des Finances. Évidemment, cela a rendu M. Edwin encore plus frustré, pour ne pas dire furieux, et il a quitté l’audience avant la fin.

 

[4]              Lorsqu’il a produit sa propre déclaration de revenu pour 2007, M. Edwin y avait joint une lettre, signée par lui et son épouse, pour informer le ministre qu’ils n’avaient pas inclus dans leurs revenus une somme de 6 604 $ qu’ils avaient reçue de leurs fiducies de revenu, et ce, parce qu’ils considéraient qu’il s’agissait d’un remboursement de capital. L’examen de la déclaration de revenu de Mme Edwin semble montrer qu’on n’y avait pas joint de lettre semblable. Au moyen d’une nouvelle cotisation établie à l’égard de Mme Edwin, le ministre a inclus une somme de 6 604,32 $ dans le revenu de celle‑ci et lui a imposé une pénalité de 102 $. De plus, en application de l’article 145 de la Loi sur l’assurance‑emploi, le ministre a calculé un remboursement de prestations sociales de 697 $ parce que Mme Edwin avait reçu des prestations d’assurance‑emploi pendant l’année et que son revenu net pour 2007 s’élevait à au moins 55 918 $. M. Edwin a reconnu que son épouse avait aussi reçu des prestations d’assurance‑emploi pendant plus d’une semaine pour chacune des années d’imposition allant de 1997 à 2006.

 

[5]              Le ministre a annulé la pénalité après que Mme Edwin a déposé un avis d’opposition. Lorsque Mme Edwin a comparu devant la Cour, seul son époux a témoigné. Il a alors affirmé que le revenu reçu des fiducies de revenu était payable conjointement à M. et à Mme Edwin. De plus, comme on l’a affirmé dans la réponse à l’avis d’appel, lorsqu’il a établi la cotisation à l’égard de l’appelante, le ministre a présumé que Mme Edwin et son époux avaient reçu conjointement la somme de 6 604,32 $. Pendant l’audience, l’avocat de l’intimée a reconnu que l’appel de Mme Edwin devait être accueilli et que, par conséquent, seule la moitié de la somme de 6 604,32 $ devait être incluse dans le revenu de Mme Edwin.

 

[6]              Pour tous ces motifs, l’appel interjeté par Mme Edwin relativement à l’année d’imposition 2007 est accueilli, sans dépens, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse une nouvelle cotisation en partant du principe que seule la moitié de la somme de 6 604,32 $ doit être incluse dans le revenu de l’appelante.

 

 

 

Signé à Magog (Québec), ce 4e jour d’août 2010.

 

 

 

« Pierre Archambault »

Juge Archambault

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour de septembre 2010.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.



RÉFÉRENCE :

2010 CCI 362

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2009-2593(IT)I

 

INTITULÉ :

Annette D. Edwin c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 24 mars 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Pierre Archambault

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 4 août 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

M. Augustine V. Edwin

 

Avocat de l’intimée :

Me Bruce Senkpiel

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] Communiqué de presse no 2006‑061 du ministère des Finances, daté du 31 octobre 2006 : « À défaut de mesures appropriées, ces décisions corporatives [de se convertir en fiducies de revenu] se solderaient par des milliards de dollars de pertes de revenus [pour] le gouvernement fédéral […] ».

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