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Dossier : 2008-2863(IT)G

ENTRE :

TERRY PIERSANTI,

appelante,

                                                             et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________Appel entendu les 26, 27, 28, 29 et 30 novembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Valerie Miller

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me V. Ross Morrison

Avocat de l’intimée :

Me Laurent Bartleman

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 1995, 1996 et 1997 est rejeté.

          Les dépens sont adjugés à l’intimée.

 

        Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juillet 2013.

 

 

« V. A. Miller »

Juge V. A. Miller

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 13e jour de septembre 2013.

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

 

 

Référence : 2013CCI226

Date : 20130710

Dossier : 2008-2863(IT)G

ENTRE :

TERRY PIERSANTI,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge V. A. Miller

[1]             À l’ouverture de l’audience, l’appelante a demandé à la Cour, par voie de requête, d’ordonner l’exclusion de tous les documents sur lesquels le ministre du Revenu national (le « ministre ») s’est fondé pour établir de nouvelles cotisations à son égard. Selon elle, les documents utilisés pour augmenter le montant des nouvelles cotisations au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») ont été obtenus sans autorisation judiciaire au cours d’une enquête sur de possibles infractions criminelles liées à la TPS. Elle prétend qu’il y a eu atteinte aux droits qui lui sont conférés par les articles 7 et 8 de la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte »). L’appelante a également demandé la radiation des hypothèses énoncées dans la réponse à l’avis d’appel et l’annulation des avis de nouvelle cotisation.

[2]             À l’appui de sa requête, l’appelante entendait se servir de la transcription de l’interrogatoire préalable du représentant de l’intimée, John Di Rito, et d’interroger ce dernier lors de l’audition de la requête. Étant donné que cinq jours avaient été prévus au rôle pour l’audition de l’appel, et par souci d’éviter des répétitions dans la production de la preuve, les parties ont convenu de présenter l’ensemble des éléments de preuve durant la semaine tout en précisant que je devrais en premier lieu me prononcer au sujet de la requête. Ce n’est que dans l’éventualité du rejet intégral ou partiel de la requête que j’aurais à examiner le fond du litige.

[3]             L’appel concerne les années d’imposition 1995, 1996 et 1997, pour lesquelles l’appelante a reçu des avis de nouvelle cotisation, datés du 14 décembre 2001, majorant ses revenus de 108 512,49 $, de 680 392,51 $ et de 116 182,32 $, respectivement. Les nouvelles cotisations ont été établies après l’expiration de la période normalement prévue à cette fin, et des pénalités ont aussi été imposées au titre du paragraphe 163(2).

 

a) La requête

 

Les faits

[4]             John Di Rito est chef d’équipe à la Division des enquêtes criminelles de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). Il mène des enquêtes criminelles pour le compte de l’Agence depuis 16 ou 17 ans.

[5]             En 1999, M. Di Rito a obtenu de la division des vérifications de l’ARC des informations selon lesquelles diverses sociétés propriétaires de centres commerciaux ne déclaraient pas les sommes perçues au titre de la taxe sur les produits et services (TPS) auprès de leurs locataires commerciaux. Il a dressé un rapport préliminaire, mais, pour faire progresser le dossier, il devait mettre la main sur les documents financiers de ces sociétés. Le 30 juin 1999, il a demandé à un juge de paix de lui décerner un mandat de perquisition, mais celui‑ci a refusé. Il a alors adressé sa demande à un juge, qui y a accédé.

[6]             L’exécution du mandat de perquisition a eu lieu le 14 juillet 1999, dans les bureaux de la société d’avocats Piersanti & Co. Parmi les documents saisis se trouvaient les dossiers de diverses sociétés que M. Di Rito croyait être contrôlées par l’appelante et son conjoint.

[7]             Le conjoint de l’appelante a invoqué le secret professionnel de l’avocat à l’égard des documents saisis, et ceux-ci ont été mis sous scellés. Apparemment, ces documents ont donné lieu à de nombreuses audiences au fil des ans.

[8]             Pour faire avancer l’enquête après la revendication du secret professionnel, M. Di Rito s’est mis à recourir aux demandes péremptoires, conformément à l’article 289 de la Loi sur la taxe d’accise (la « LTA »). Il a affirmé qu’il n’avait pas cherché à obtenir d’informations dont il pensait qu’elles seraient visées par le secret professionnel de l’avocat. Il a signifié de telles demandes péremptoires à diverses banques, compagnies émettrices de cartes de crédit et sociétés immobilières, et il a eu des entretiens avec les locataires des centres commerciaux appartenant aux sociétés. Selon ses dires, M. Di Rito aurait signifié entre 50 et 60 demandes péremptoires d’octobre 1999 à juillet 2001. La plupart de ces demandes visaient des renseignements concernant les sociétés, mais certaines faisaient référence à l’appelante ou à son conjoint.

[9]             M. Di Rito s’en est remis aux documents reçus en réponse aux demandes péremptoires pour déposer en tout 68 accusations contre l’appelante, son conjoint, Glenwoods Properties Inc., Hanlon Properties Inc. et Tottenham Properties Inc. devant la Cour supérieure de justice. Toutes les accusations ont été portées sous le régime de la LTA. Après avoir adhéré à un exposé conjoint des faits en date du 22 février 2005, l’appelante a plaidé coupable à 35 des accusations. Ces accusations se rapportaient à des infractions survenues entre 1995 et 1998. Les accusations portées contre le conjoint de l’appelante ont été abandonnées et celles visant les sociétés ont été suspendues.

[10]        M. Di Rito a utilisé les mêmes documents reçus en réponse aux demandes péremptoires pour établir les nouvelles cotisations d’impôts sur le revenu qui font l’objet du présent appel.

La thèse de l’appelante

[11]        L’appelante fait valoir que les documents utilisés pour établir les nouvelles cotisations en vertu de la LIR ont été obtenus sans autorisation judiciaire au cours d’une enquête sur de possibles infractions criminelles liées à la TPS et qu’il y a eu atteinte aux droits qui lui sont conférés par les articles 7 et 8 de la Charte.

[12]        L’avocat de l’appelante a déclaré que, depuis juillet 1999, M. Di Rito menait une enquête criminelle au sujet de l’appelante et qu’il était tenu, conformément à la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans R. c. Jarvis, 2002 CSC 73, d’obtenir des mandats de perquisition pour faire avancer l’enquête. Or, au lieu de cela, il a envoyé des demandes péremptoires à des tiers. Par conséquent, l’appelante n’a jamais reçu de mise en garde appropriée et ce n’est qu’en octobre 2001 qu’elle a appris que l’ARC était à reconsidérer sa dette fiscale. Pour appuyer sa thèse, l’avocat a cité les paragraphes suivants de l’arrêt Jarvis :

 

88                                  À notre avis, lorsqu’un examen dans un cas particulier a pour objet prédominant d’établir la responsabilité pénale du contribuable, les fonctionnaires de l’ADRC doivent renoncer à leur faculté d’utiliser les pouvoirs d’inspection et de demande péremptoire que leur confèrent les par. 231.1(1) et 231.2(1). Essentiellement, les fonctionnaires [traduction] « franchissent le Rubicon » lorsque l’examen crée la relation contradictoire entre le contribuable et l’État. […]

 

[…]

 

99             Voici, en résumé, les points qui se dégagent :

 

1.  Bien que la LIR soit une loi de nature réglementaire, il est possible d’établir une distinction entre les pouvoirs de vérification et les pouvoirs d’enquête conférés au ministre.

 

2.  Dans le cas où il est évident, à la lumière de toutes les circonstances pertinentes, que les fonctionnaires de l’ADRC ne procèdent plus à la vérification de l’obligation fiscale, mais essaient d’établir la responsabilité pénale du contribuable sous le régime de l’art. 239, il existe une relation de nature contradictoire entre l’État et le particulier. En conséquence, les protections garanties par la Charte s’appliquent.

 

3. Dans ce cas, les enquêteurs doivent donner une mise en garde appropriée au contribuable. Les pouvoirs de contrainte visés aux par. 231.1(1) et 231.2(1) ne peuvent plus être utilisés et il faut obtenir la délivrance de mandats de perquisition pour poursuivre l’enquête.

 

[13]        L’avocat de l’appelante a fait valoir que la preuve a été obtenue au moyen d’une perquisition et d’une saisie illégales, en violation des droits de l’appelante garantis par la Charte, et qu’elle devrait par conséquent être écartée en conformité avec l’article 24 de la Charte. Par ailleurs, selon lui, il y aurait lieu d’annuler les nouvelles cotisations qui reposent sur cette preuve : O’Neill Motors Limited v. R., [1996] 1 CTC 2714 (CCI); conf. par [1998] 3 CTC 385 (CAF).

La thèse de l’intimée

[14]        L’intimée soutient que le recours aux demandes péremptoires dans le cadre d’une vérification relevant du domaine civil ne constitue pas une atteinte aux droits de l’appelante garantis par la Charte. Il se peut que la preuve recueillie en l’espèce soit inadmissible dans un contexte pénal, mais elle peut être utilisée en matière civile. À titre subsidiaire, l’intimée ajoute que, même si la Cour conclut que l’ARC ne peut recourir à l’article 289 de la LTA lorsqu’une enquête criminelle est en cours, l’appelante n’a pas qualité pour alléguer qu’il y a eu atteinte à ses droits, puisque les demandes péremptoires n’ont pas été utilisées pour obtenir des documents à son sujet, mais bien au sujet des sociétés sous son contrôle : R. c. Edwards, [1996] 1 RCS 128. À titre plus subsidiaire encore, l’intimée soutient qu’à supposer qu’il y ait eu violation des droits de l’appelante, la preuve ne devrait pas être écartée à la lumière des critères de l’arrêt R. c. Grant, 2009 CSC 32.

[15]        Dans l’arrêt Grant, la Cour suprême du Canada a expliqué que l’objet du paragraphe 24(2) était de préserver la considération dont jouit l’administration de la justice et que l’expression « déconsidérer l’administration de la justice » devait être prise dans l’optique du maintien à long terme de l’intégrité du système de justice et de la confiance du public à son égard. Par ailleurs, trois questions se posent lorsqu’il s’agit de déterminer si l’utilisation d’éléments de preuve obtenus par suite d’une violation est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice :

        la gravité de la conduite attentatoire de l’État;

        l’incidence de la violation sur les droits de l’accusé garantis par la Charte;

        l’intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée au fond.

Il appartient au juge de première instance de soupeser ces facteurs.

[16]        L’avocat de l’intimée a traité de ces trois questions et a conclu que, même en supposant qu’il y avait eu manquement à la Charte en l’espèce, la preuve ne devrait pas être écartée.

[17]        Avant de rendre ma décision sur la requête, j’ai demandé aux deux avocats de me faire part de leurs observations au vu d’un arrêt récent, Romanuk c. La Reine, 2013 CAF 133.

[18]        L’avocat de l’appelante a cité le paragraphe 6 de l’arrêt Romanuk en réitérant que l’« objet prédominant » de l’enquête de M. Di Rito avait un caractère criminel. Par conséquent, l’ensemble des informations et des documents obtenus l’ont été en l’absence d’un mandat de perquisition et en violation des droits de l’appelante garantis par les articles 7 et 8 de la Charte. Dans la présente affaire, l’ARC a obtenu des documents au moyen de demandes péremptoires, non pas aux fins de l’application de la LTA, mais bien dans le but de faire progresser une enquête criminelle sur des allégations de fraude fiscale relative à la TPS. L’avocat de l’appelante a répété que la décision rendue dans l’affaire O’Neill Motors (précitée) s’appliquait, au vu des circonstances de l’espèce.

[19]        L’avocat de l’intimée a écrit que la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Romanuk confirmait que l’ARC pouvait continuer de recourir à ses pouvoirs de vérification en matière civile, même après l’ouverture d’une enquête criminelle visant le contribuable. L’information obtenue grâce à l’exercice des pouvoirs de vérification au civil ne peut être utilisée dans le cadre de poursuites visant le contribuable, mais elle peut servir à établir une nouvelle cotisation à son égard.

 

Analyse

[20]        Depuis juillet 1999, l’enquête de M. Di Rito avait pour objet prédominant d’établir la responsabilité pénale de l’appelante sous le régime de la LTA. Les documents reçus par suite de la signification de demandes péremptoires devaient servir à faire progresser cette enquête. Les éléments de preuve ainsi obtenus peuvent être écartés de la poursuite à l’égard d’une infraction : R c. Ling, 2002 CSC 74, au paragraphe 5. Toutefois, la question dont la Cour est saisie est celle de la dette fiscale de l’appelante, et non celle de sa responsabilité pénale. La Cour doit déterminer s’il y a eu atteinte aux droits de l’appelante garantis par les articles 7 et 8 de la Charte, du fait que les documents obtenus au moyen des demandes péremptoires ont servi à établir de nouvelles cotisations en ce qui concerne l’impôt à payer par l’appelante.

[21]        L’ARC peut effectuer une vérification et une enquête en même temps. L’une et l’autre ne s’excluent pas mutuellement : Ling (précité), au paragraphe 30.

[22]        La Cour suprême du Canada a établi une distinction entre la procédure que les fonctionnaires de l’ARC doivent suivre lorsqu’ils mènent une enquête criminelle et celle qui s’applique à la vérification de la dette fiscale. Elle a conclu que, bien qu’il soit permis de procéder à une vérification et de faire enquête simultanément, les résultats de la vérification ne peuvent être utilisés pour les besoins d’une poursuite. Ils peuvent cependant servir à des fins administratives, comme une nouvelle cotisation : Romanuk c. La Reine, 2013 CAF 133, au paragraphe 7.

[23]        Je suis d’avis que l’usage de l’information provenant des demandes péremptoires pour l’établissement des nouvelles cotisations dont il est question en l’espèce ne porte pas atteinte aux droits de l’appelante garantis par les articles 7 et 8 de la Charte. En fait, les demandes péremptoires constituent l’un des moyens dont l’ARC dispose pour procéder à une vérification. Il se peut qu’il y ait eu atteinte aux droits de l’appelante garantis aux articles 7 et 8 du fait que l’on s’est servi de l’information provenant des demandes péremptoires pour engager des poursuites contre elle sous le régime de la LTA, mais c’est à la Cour supérieure de justice qu’il revenait de trancher cette question dans le cadre du procès de l’appelante pour fraude fiscale relative à la TPS : arrêt Romanuk, au paragraphe 8. Or, l’appelante a choisi de ne pas soulever ce moyen devant cette cour.

[24]        L’appelante s’est appuyée sur la décision rendue dans la décision O’Neill Motors pour faire valoir que les nouvelles cotisations devaient être annulées. Toutefois, il y a lieu d’établir une distinction entre la décision O’Neill Motors et le présent appel. Dans la décision O’Neill Motors, le tribunal de juridiction criminelle a conclu que les documents sur lesquels reposaient les accusations avaient été saisis lors d’une perquisition illégale, puisque l’article 231.3 de la LTA, en vertu duquel elle avait été effectuée, avait été jugé inconstitutionnel. Le tribunal a aussi conclu que la saisie subséquente de ces mêmes documents en vertu de l’article 487 du Code criminel constituait un abus de procédure et une violation des droits conférés à O’Neill Motors par les articles 7 et 8 de la Charte. Le tribunal n’est pas arrivé à de semblables conclusions dans l’affaire qui nous occupe. De plus, contrairement à ce qui s’est passé dans la décision O’Neill Motors, les documents en cause ici n’ont pas été saisis en vertu d’une disposition inconstitutionnelle de la LTA.

[25]        L’appelante soutient que l’ARC a eu recours à des moyens d’enquête irréguliers pour réunir l’information qui servirait à intenter une poursuite contre elle. À mon sens, il s’agit d’un argument qu’elle aurait dû avancer devant le tribunal de juridiction criminelle saisi de la question de sa responsabilité pénale. En l’espèce, la seule question que la Cour est appelée à trancher est celle de la dette fiscale de l’appelante. J’estime qu’il était légitime que l’ARC fasse usage des documents qu’elle avait reçus par suite des demandes péremptoires pour établir la responsabilité de l’appelante sur le plan fiscal. Dans le contexte particulier du régime fiscal d’autocotisation et d’autodéclaration, le droit d’un contribuable à la protection de sa vie privée à l’égard des documents qui peuvent être utiles à la production de sa déclaration de revenus est relativement faible : R. c. McKinlay Transport Ltd, [1990] 1 RCS 627, au paragraphe 38.

[26]        Dans l’arrêt Romanuk (précité), la contribuable alléguait que l’ARC s’était servi des pouvoirs de vérification prévus au paragraphe 231.1(1) de la LTA pour obtenir des documents après avoir entrepris une enquête criminelle. Elle soutenait que le recours à ces pouvoirs de vérification portait atteinte aux droits que lui garantissaient les articles 7 et 8 de la Charte. Le juge Webb s’est exprimé ainsi :

 

[8]        L’usage de tels renseignements ou documents pour les besoins de l’administration de la Loi et l’établissement des nouvelles cotisations de l’appelante ne porte pas atteinte à ses droits garantis par les articles 7 et 8 de la Charte, puisque l’ARC a le droit de continuer à utiliser ses pouvoirs de vérification, pour autant que les renseignements ou documents ainsi recueillis ne soient utilisés qu’aux fins d’administration de la Loi. S’ils doivent servir à une enquête ou à une poursuite au titre de l’article 239 de la Loi, le tribunal saisi de la poursuite devra alors déterminer si l’exercice de ces pouvoirs avait pour objet prédominant de recueillir des renseignements ou des documents aux fins d’une telle enquête ou poursuite.

[…]

[10]      […] Même si l'ARC envisageait d'enquêter sur l'appelante avant de lui adresser une demande de renseignements, cela n'a pas suspendu le droit de l'ARC de demander des renseignements aux fins d'administration de la Loi en vertu des pouvoirs d'examen et de vérification prévus aux paragraphes 231.1(1) et 231.2(1) de la Loi. Tout renseignement ou document obtenu en vertu de tels pouvoirs peut être utilisé pour établir une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelante (y compris les pénalités à imposer aux termes des paragraphes 162(1) et 163(2) de la Loi). Il ne revient pas à la Cour canadienne de l'impôt de déterminer si ces renseignements ou documents peuvent être employés aux fins d'une enquête ou d'une poursuite en vertu de l'article 239. La seule question soumise à l'examen de la Cour canadienne de l'impôt concerne la validité de la nouvelle cotisation, c'est‑à‑dire la question de savoir si la réclamation de l'appelante touchant les pertes de la société de personnes qui lui ont été attribuées et si les pénalités imposées aux termes des paragraphes 162(1) et 163(2) sont fondées.

 

[Non souligné dans l’original.]

[27]        Je suis d’avis que la décision rendue récemment par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Romanuk répond à la question soulevée par la requête. Par conséquent, la requête est rejetée.

 

b) Les nouvelles cotisations

[28]        Comme je l’ai indiqué précédemment, la question soulevée par le présent appel concerne les années d’imposition 1995, 1996 et 1997, pour lesquelles l’appelante a reçu des avis de nouvelles cotisations majorant ses revenus de 108 512,49 $, de 680 392,51 $ et de 116 182,32 $, respectivement. Les nouvelles cotisations ont été établies après l’expiration de la période normale prévue à cette fin et des pénalités ont aussi été imposées au titre du paragraphe 163(2).

[29]        Trois témoins ont été entendus à l’audience : l’appelante, M. David Fine, comptable agréé, et M. John Di Rito, chef d’équipe à la Division des enquêtes criminelles de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »).

Les faits

[30]        L’appelante et son conjoint contrôlaient un grand nombre de sociétés, dont les suivantes : Gold Financial Corporation (« Gold Corp. »), Pier Properties Inc. (« Pier Inc. »), Polar Property Management Inc. (« Polar Inc. »), 789533 Ontario Limited (« 789 Ltd. »), Yonge Davis Center Inc. (« Yonge Inc. »), Glenwoods Properties Inc. (« Glenwoods Inc. »), Hanlon Properties Inc. (« Hanlon Inc. »), Tottenham Properties Inc. (« Tottenham Inc. ») et Justin Properties Inc. Je désignerai l’ensemble formé par ces sociétés par le terme « groupe de sociétés ».

[31]        Yonge Inc., Glenwoods Inc., Hanlon Inc. et Tottenham Inc. étaient propriétaires de centres commerciaux et percevaient des loyers dans le cadre de leurs activités. Je désignerai l’ensemble de ces activités par le terme « exploitation de locaux commerciaux ». Ni Gold Corp. ni 789 Ltd. n’exploitaient d’entreprise ou n’exerçaient quelque activité commerciale. Elles n’avaient ni revenus ni dépenses et n’ont produit aucune déclaration de revenus pour les années en cause. En fait, Pier Inc. n’a pas produit de déclarations de revenus depuis 1993.

[32]        En procédant à l’analyse des relevés bancaires reçus, M. Di Rito a constaté que de nombreux décaissements de nature personnelle avaient été effectués dans les comptes détenus par Gold Corp., 789 Ltd., Pier Inc., Polar Inc. et Yonge Inc. (les « décaissements »). Il s’est employé à déterminer la provenance des fonds des comptes de banque détenus par Gold Corp., 789 Ltd., Pier Inc. et Polar Inc. Il a pu découvrir que les loyers et la TPS non versée perçus dans le cadre de l’exploitation de locaux commerciaux avaient été transférés dans les comptes de banque détenus par Gold Corp., 789 Ltd., Pier Inc. et Polar Inc.

[33]        Les décaissements étaient utilisés pour payer, par exemple, les frais de scolarité relatifs aux écoles privées fréquentées par les enfants de l’appelante, les frais condominiaux d’une résidence de vacances, les frais d’adhésion au club équestre King, les honoraires de l’orthodontiste des enfants de l’appelante, les paiements hypothécaires de la résidence familiale, le solde des cartes de crédit personnelles de l’appelante, les dépôts en liquidités faits dans les comptes de banque de l’appelante et de son conjoint, les frais liés aux voitures conduites par l’appelante et son conjoint, les versements sur les prêts à demande contractés à titre personnel par l’appelante et son conjoint, les primes d’assurance-vie et les impôts fonciers de la résidence familiale. Une liste de ces décaissements figure en annexe des présents motifs.

[34]        L’appelante était l’un des dirigeants du groupe de sociétés et occupait le poste de gérante des immeubles à l’égard de l’exploitation de locaux commerciaux. Elle était l’unique titulaire du pouvoir de signature à l’égard de tous les comptes de banque du groupe de sociétés. Elle a reconnu que tous les décaissements avaient été faits selon ses instructions ou avec son accord. Toutefois, elle maintenait que ces décaissements visaient tous à rembourser un prêt qu’elle avait consenti à Gold Financial Trust (« Gold Trust ») en 1995.

[35]        L’appelante a expliqué que Gold Trust était une fiducie familiale créée au bénéfice de ses enfants. Son conjoint et elle en sont les fiduciaires. Elle a déclaré que les revenus et dépenses de l’exploitation des locaux commerciaux étaient déclarés au fisc par Gold Trust.

[36]        L’appelante a notamment produit comme pièces les déclarations de revenus et les états financiers de Gold Trust pour les années 1995, 1996 et 1997. Elle a déclaré que le compte portant la mention [traduction] « Dû à une personne liée » dans les états financiers de 1995 et le compte désigné [traduction] « Avances faites par une personne liée » dans ceux de 1996 et 1997 faisaient référence au prêt qu’elle avait consenti à Gold Trust.

[37]        L’appelante a décrit les circonstances qui l’ont amenée à faire ce prêt à Gold Trust. Vers le milieu des années 1990, elle était propriétaire, avec son conjoint et deux autres associés, d’une société appelée Map Properties Inc. (« Map Inc. »). Map Inc. devait environ 11 millions de dollars à la Banque Royale. L’appelante, son conjoint, les sociétés propriétaires des centres commerciaux et d’autres parties s’étaient portés garants de la dette de Map Inc. Or, le 7 décembre 1994, la Banque Royale a exigé le remboursement du prêt. Elle s’est abstenue de procéder à l’exécution de sa sûreté jusqu’au 28 février 1995. Selon le témoignage de l’appelante, il avait été possible de refinancer le prêt à hauteur de 10,5 millions de dollars, mais, au tout dernier jour, il manquait encore environ un million de dollars. Elle s’est alors rendue à la CIBC où elle a négocié un prêt pour le solde nécessaire au remboursement de la créance de la Banque Royale. Selon elle, ce serait cette somme d’un million de dollars qu’elle aurait prêtée à Gold Trust.

[38]        L’appelante n’a pas tenté d’expliquer la relation entre Map Inc. et Gold Trust. Cependant, l’examen des registres comptables partiels de Gold Corp. et de Gold Trust qui ont été produits en preuve révèle que l’appelante et son conjoint avaient créé une structure complexe pour leurs biens. Chacun des biens importants leur appartenant, y compris la résidence familiale, était détenu par une société différente. Toutes les écritures comptables du groupe de sociétés étaient consignées dans les livres de Gold Corp. et les résultats de ces inscriptions ont été déclarés au fisc par Gold Trust.

[39]        L’appelante a été incapable de répondre à quelque question que ce soit relativement à ces registres comptables. Elle a déclaré que son comptable se chargeait d’organiser les livres de cette façon et qu’il avait indiqué à l’aide‑comptable comment procéder aux diverses écritures. Ni le comptable ni l’aide‑comptable n’ont été appelés à la barre des témoins, et j’en ai déduit que leur témoignage n’aurait pas corroboré les dires de l’appelante. Je comprends, comme l’a signalé l’avocat de l’appelante, que ce comptable a pris sa retraite, mais, pour autant, cela ne l’empêchait pas de venir témoigner.

[40]        M. David Fine a été appelé à témoigner au sujet des registres comptables. Ce n’est pas lui qui a établi ces registres et il n’a vu aucune des pièces justificatives ayant servi à leur préparation. Toutes les conversations qu’il a eues avec l’auteur des registres comptables constituent du ouï-dire. Je n’ai accordé aucun poids à son témoignage pour ce qui a trait aux registres comptables.

[41]        En ce qui concerne les décaissements qui lui ont été versés directement, l’appelante a fait l’objet d’une cotisation au titre de l’alinéa 6(1)a) de la LIR, au motif qu’elle avait reçu un avantage ou joui d’un avantage dans l’occupation ou en vertu de la charge ou de l’emploi qu’elle avait exercé auprès du groupe de sociétés.

[42]        En ce qui concerne les décaissements qui ont été versés à d’autres qu’elle, l’appelante a fait l’objet d’une cotisation au titre du paragraphe 56(2) de la LIR, au motif qu’il s’agissait d’avantages qu’elle désirait voir accordés à son conjoint ou à ses enfants.

Analyse

[43]        J’ai conclu, en me fondant sur la preuve, que l’appelante n’avait consenti de prêt ni à Gold Trust, ni à aucune autre société qu’elle contrôlait. Ma conclusion repose sur les motifs exposés ci-dessous.

[44]        D’abord, dans son témoignage, elle a affirmé avoir garanti le prêt accordé par la CIBC en février 1995. Elle a dit avoir négocié le prêt, ajoutant qu’il n’aurait pas été consenti si elle n’avait pas donné une [traduction] « garantie personnelle ». La preuve présentée par l’appelante ne permet pas d’étayer son assertion, à savoir qu’elle avait consenti un prêt à Gold Trust. Elle a également indiqué que les biens avaient été grevés pour garantir le prêt de la CIBC. Le témoignage de l’appelante et les états financiers de Gold Trust m’ont amenée à conclure que le prêt de la CIBC a été contracté par Glenwoods Inc., Hanlon Inc. et Tottenham Inc. et que ces dernières ont grevé leurs biens pour garantir l’emprunt. L’appelante a garanti personnellement le prêt et a affirmé que la CIBC n’en avait pas exigé le paiement. Autrement dit, elle n’a jamais été appelée à honorer cette garantie.

[45]        Ensuite, selon les déclarations de revenus qu’elle a préparées et produites, l’appelante ne disposait pas de ressources suffisantes pour consentir personnellement un prêt à Gold Trust. Elle a en effet déclaré les revenus suivants :

 

Année

Revenu déclaré

Source

1989

13 000 $

Revenu, feuillet T4

1990

22 790 $

1 199 $

Dividendes

Allocation familiale

1991

10 422 $

1 221 $

Revenu tiré d’un REER

Allocation familiale

1992

1 255 $

Allocation familiale

1993

14 400 $

Revenu, feuillet T4

1994

15 600 $

Revenu, feuillet T4

1995

12 600 $

Revenu déclaré dans le feuillet T4 produit par la société d’avocats de son conjoint, Piersanti & Co.

1996

0 $

 

1997

0 $

 

 

[46]        Enfin, si l’appelante avait consenti un prêt à Gold Corp., Gold Trust ou une autre des sociétés qu’elle contrôlait, elle aurait dû être en mesure de fournir une preuve documentaire de ce qu’elle avançait. Je ne puis admettre que les inscriptions [traduction] « Dû à une personne liée » et [traduction] « Avances faites par une personne liée » figurant dans les états financiers de Gold Trust font référence à l’appelante. On ne m’a présenté aucune preuve me permettant de conclure que l’appelante a consenti un prêt à Gold Trust. En fait, aucune preuve ne corrobore le fait que les inscriptions [traduction] « Dû à une personne liée » et [traduction] « Avances faites par une personne liée » sont exactes. Je constate que, dans ses déclarations de revenus de 1996 et 1997, Gold Trust a déclaré ne pas avoir contracté d’emprunt ou de dette dans une opération entre parties ayant un lien de dépendance depuis le 18 juin 1971. En 1995, Gold Trust n’a pas produit de déclarations.

[47]        L’alinéa 6(1)a) de la LIR est ainsi libellé :

 

6. (1) Doivent être inclus dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, ceux des éléments appropriés suivants :

a) la valeur de la pension, du logement et autres avantages de quelque nature que ce soit (sauf les avantages résultant des contributions de son employeur à une caisse ou régime enregistré de pension, un régime d’assurance collective contre la maladie ou les accidents, un régime de service de santé privé, un régime de prestations supplémentaires de chômage, un régime de participation différée aux bénéfices ou une police collective d’assurance temporaire sur la vie) qu’il a reçus ou dont il a joui dans l’année au titre, dans l’occupation ou en vertu de la charge ou de l’emploi;

 

[Non souligné dans l’original.]

[48]        L’examen de la preuve présentée par M. Di Rito révèle que l’appelante utilisait les comptes de banque du groupe de sociétés comme s’il s’agissait de son propre banquier. Au cours de la période en cause, elle a reçu du groupe de sociétés une somme nette de 7 591,37 $ en argent. Cette somme a été enlevée au groupe de sociétés et déposée dans son compte de banque personnel. Il est facile de conclure que ces 7 591,37 $ constituaient un avantage reçu par l’appelante au titre, dans l’occupation ou en vertu d’une charge ou d’un emploi exercé au sein du groupe de sociétés : R. c. Savage, [1983] 2 RCS 428.

[49]        Le paragraphe 56(2) de la LIR prévoit ce qui suit :

 

 56. [...]

(2) Tout paiement ou transfert de biens fait, suivant les instructions ou avec l’accord d’un contribuable, à une autre personne au profit du contribuable ou à titre d’avantage que le contribuable désirait voir accorder à l’autre personne […] dit être inclus dans le calcul du revenu du contribuable dans la mesure où il le serait si ce paiement ou transfert avait été fait au contribuable.

 

[50]        Quatre conditions préalables sont donc énoncées au paragraphe 56(2) :

(1)   le décaissement (paiement) doit être fait à une autre personne que l’appelante;

(2)   le décaissement doit être fait suivant les instructions ou avec l’accord de l’appelante;

(3)   le décaissement doit être fait au profit de l’appelante ou à titre d’avantage que l’appelante désire voir accorder à une autre personne;

(4)   le décaissement serait inclus dans le revenu de l’appelante si elle l’avait elle‑même reçu.

[51]        En l’espèce, tous les décaissements versés à d’autres personnes que l’appelante remplissent les conditions du paragraphe 56(2).

[52]        Hormis l’argent pris par l’appelante à titre personnel, tous les décaissements ont été versés à des tiers. L’appelante a reconnu qu’ils avaient été faits suivant ses instructions ou avec son accord. Ils l’ont été au profit de ses enfants et de son conjoint. Ils ont servi à financer les dépenses du ménage. Pour son seul conjoint, les décaissements s’élevaient à 94 354,76 $. Il ne fait aucun doute que le montant des décaissements aurait été inclus dans le revenu de l’appelante si elle les avait reçus directement.

[53]        Je me propose de traiter des décaissements faits en faveur de Justin Properties Inc., parce que l’appelante prétend que leur montant, soit 470 550 $, représentait un prêt consenti à la société.

[54]        Le seul actif appartenant à Justin Properties Inc. était la résidence familiale située au 110, Greenbrooke.

[55]        Les documents déposés en cour ne corroboraient pas les assertions de l’appelante. Les relevés bancaires montraient qu’en 1995, en 1996 et en 1997, les paiements hypothécaires relatifs à la résidence du 110, Greenbrooke avaient été effectués par Gold Corp. et Pier Inc. La preuve ne permettait pas de savoir quelle société avait véritablement enregistré ces gains, et rien dans la preuve documentaire n’appuyait la proposition selon laquelle les paiements hypothécaires correspondaient à un prêt. En 1997, un montant global de 417 000 $ a été déposé au compte de banque de Justin Properties Inc. afin de lui permettre de rembourser le prêt hypothécaire à la Banque Royale. Les traces écrites ont révélé que le dépôt de 417 000 $ avait été fait par chèque libellé à l’ordre de Yonge Inc. et tiré sur le compte de Petstuff. La somme correspondait apparemment au rachat par Petstuff du bail contracté avec Yonge Inc. Le grand livre de Gold Corp. ne mentionne pas le paiement reçu par Yonge Inc. ni le prêt de cette somme à Justin Properties Inc.

[56]        L’appelante s’est employée à se distancier des renseignements figurant dans les registres comptables en déclarant qu’elle ne les comprenait pas et qu’ils avaient été établis sous la direction du comptable, lequel indiquait à l’aide-comptable comment procéder aux diverses écritures dans le grand livre. Or, dans l’avis au lecteur accompagnant les états financiers de Gold Trust, le comptable a écrit que ceux-ci avaient été dressés à l’aide des renseignements fournis par la direction. Il n’a procédé à aucune vérification des renseignements.

[57]        L’appelante a tenté de blâmer son comptable et son aide‑comptable pour l’état des registres du groupe de sociétés, mais je n’accepte pas cette thèse.

[58]        Je suis arrivée à la conclusion que le ministre avait établi que l’appelante avait fait une présentation erronée des faits dans ses déclarations de revenus de 1995, 1996 et 1997, et ce, par omission volontaire. L’appelante savait qu’elle ne déclarait aucun revenu pour le travail qu’elle effectuait pour le compte du groupe de sociétés. Elle a admis qu’elle dirigeait ces sociétés afin de payer les dépenses du ménage, y compris le remboursement du prêt hypothécaire de la résidence familiale. Pourtant, elle déclarait qu’elle n’en tirait aucun revenu. Elle savait aussi qu’elle n’avait pas consenti de prêt à Gold Trust. Elle a reconnu qu’elle avait garanti le prêt accordé par la CIBC, et je doute qu’elle ne sache pas faire la différence entre l’obtention d’un prêt et le fait de s’en porter garant.

[59]        L’appelante a tenté de justifier son incompréhension des registres comptables par le fait qu’elle n’avait fait que des études secondaires. Pourtant, elle m’a fait l’impression d’une femme d’affaires intelligente et habile. Elle était l’âme dirigeante d’une grande exploitation de locaux commerciaux comptant un actif dont la valeur dépassait 17 millions de dollars en 1995 et 19 millions de dollars en 1997. Elle négociait les baux des immeubles ainsi que les prêts contractés par le groupe de sociétés et elle percevait les loyers auprès des locataires. Elle veillait au bon entretien des biens immobiliers.

[60]        L’appelante a pris des sommes importantes au groupe de sociétés et elle n’a déclaré pour tout revenu au cours de cette période qu’une somme de 12 600 $ reçue de la société d’avocats de son conjoint en 1995. Je suis d’avis que le ministre s’est acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait sous le régime des paragraphes 152(4) et 163(2). J’ai conclu que l’appelante avait sciemment pris des fonds appartenant au groupe de sociétés et qu’elle avait sciemment omis de déclarer ces fonds.

 

[61]        L’appel est rejeté, avec dépens en faveur de l’intimée.

 

         Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juillet 2013.

 

 

« V. A. Miller »

Juge V. A. Miller

 

Traduction certifiée conforme

ce 13e jour de septembre 2013.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


Annexe

 

Bénéficiaires des paiements

1995

1996

1997

American Express

 16 000,00 $

   1 000,00 $

 

Collège Appleby

 14 320,00 $

 24 846,18 $

 17 330,00 $

Argent liquide, appelante et conjoint

 12 532,02 $

 88 344,74 $

   1 069,37 $

Dr Neil Shapero

   2 850,00 $

   2 250,00 $

     500,00 $

Banque Laurentienne : prêt personnel de 50 000 $ contracté par l’appelante et son conjoint

   6 600,00 $

 12 100,00 $

  5 500,00 $

MasterCard, Visa TD/GM, Visa Royal,  Visa CIBC

 10 009,97 $

 74 047,17 $

 43 734,42 $

École privée Mississauga

   6 440,00 $

 12 660,00 $

  6 000,00 $

Assurance Roger James (assurance auto)

   7 344,00 $

   8 622,95 $

 

Agence de voyages Victor

   2 761,20 $

 

 

Justin Properties

 29 655,30 $

436 900,23 $

  3 995,00 $

Contribuables de Greenbrooke Drive

 

   1 600,00 $

 

Club équestre King

 

   4 000,00 $

 

London Life, assurance-vie

 

   2 727,30 $

  2 454,57 $

Blue Mountain Resorts

 

   2 205,00 $

 

Trustco Canada (paiements auto)

 

   1 201,74 $

  5 207,54 $

Maranello Motors

 

   2 639,06 $

 

Mercedez Benz

 

   5 248,14 $

 10 496,28 $

Ville de Vaughan

 

 

 10 063,47 $

Prochilo Bros. (pièces d’auto)

 

 

   1 200,00 $

Prêt personnel SPL

 

 

   5 156,22 $

West Assurance (assurance auto)

 

 

   3 475,45 $

TOTAL

108 512,49 $

680 392,51 $

116 182,32 $


RÉFÉRENCE :                                 2013CCI226

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :    2008-2863(IT)G

 

INTITULÉ :                                      TERRY PIERSANTI c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 26 novembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge Valerie Miller

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 11 juillet 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me V. Ross Morrison

Avocat de l’intimée :

Me Laurent Bartleman

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                     V. Ross Morrison

                            Cabinet :               Morrison Brown Sosnovitch s.r.l.

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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