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Dossier : 2009-593(IT)I

ENTRE :

HAROLD A. PAKARINEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 25 juin 2010, à Kenora (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge L.M. Little

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me Cameron G. Regehr

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu relativement à l’année d’imposition 2007 est rejeté, sans dépens.

 

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 10e jour de septembre 2010.

 

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour d’octobre 2010.

 

Marie-Christine Gervais


 

Référence : 2010 CCI 456

Date : 10 septembre 2010

Dossier : 2009-593(IT)I

ENTRE :

HAROLD A. PAKARINEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Little

A. FAITS

 

[1]              L’appelant réside à Wabigoon, en Ontario.

 

[2]              Il est victime de crises épileptiques depuis 2003.

 

[3]              Dans un rapport médical établi le 7 mai 2008, le Dr M.A. Cortens, médecin à Dryden, en Ontario, a formulé les observations suivantes au sujet des troubles médicaux de l’appelant :

 

[traduction]

 

[…] La plupart du temps, il est victime d’absences épileptiques, mais il souffre parfois également de crises épileptiques tonico‑cloniques. Il subi en moyenne trois absences épileptiques par jour.

 

[4]              Lorsque l’appelant a produit sa déclaration de revenus relative à l’année d’imposition 2007, il a demandé des crédits d’impôt non remboursables de 6 890 $.

 

[5]              Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a refusé l’ensemble des crédits d’impôt demandés par l’appelant.

 

[6]              L’appelant a déposé un avis d’opposition et, le 2 février 2009, le ministre a établi un avis de ratification.

 

[7]              Le 23 février 2009, l’appelant a déposé un avis d’appel à la Cour canadienne de l’impôt.

 

B. QUESTION EN LITIGE

 

[8]              Il s’agit de savoir si l’appelant a le droit de déduire la somme de 6 890 $ à titre de crédit d’impôt pour personnes handicapées en application de l’alinéa 118.4(1)b) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

 

C. ANALYSE ET DÉCISION

 

[9]              Le crédit d’impôt pour personnes handicapées prévu à l’article 118.3 de la Loi est un crédit d’impôt non remboursable dont peut se prévaloir le particulier qui a une ou plusieurs déficiences graves et prolongées des fonctions physiques ou mentales.

 

[10]         Les paragraphes 118.4(1) et (2) énoncent certaines règles qui précisent la portée des termes « déficience mentale ou physique ». Les paragraphes 118.4(1) et (2) sont ainsi rédigés :

 

(1) Déficience grave et prolongée. Pour l’application du paragraphe 6(16), des articles 118.2 et 118.3 et du présent paragraphe :

a) une déficience est prolongée si elle dure au moins 12 mois d’affilée ou s’il est raisonnable de s’attendre à ce qu’elle dure au moins 12 mois d’affilée;

b) la capacité d’un particulier d’accomplir une activité courante de la vie quotidienne est limitée de façon marquée seulement si, même avec des soins thérapeutiques et l’aide des appareils et des médicaments indiqués, il est toujours ou presque toujours aveugle ou incapable d’accomplir une activité courante de la vie quotidienne sans y consacrer un temps excessif;

b.1) un particulier n’est considéré comme ayant une limitation équivalant au fait d’être limité de façon marquée dans la capacité d’accomplir une activité courante de la vie quotidienne que si sa capacité d’accomplir plus d’une activité courante de la vie quotidienne (y compris, à cette fin, la capacité de voir) est toujours ou presque toujours limitée de façon importante malgré le fait qu’il reçoit des soins thérapeutiques et fait usage des instruments et médicaments indiqués, et que si les effets cumulatifs de ces limitations sont équivalents au fait d’être limité de façon marquée dans la capacité d’accomplir une activité courante de la vie quotidienne;

c) sont des activités courantes de la vie quotidienne pour un particulier :

(i) les fonctions mentales nécessaires aux activités de la vie courante,

(ii) le fait de s’alimenter ou de s’habiller,

(iii) le fait de parler de façon à se faire comprendre, dans un endroit calme, par une personne de sa connaissance,

(iv) le fait d’entendre de façon à comprendre, dans un endroit calme, une personne de sa connaissance,

(v) les fonctions d’évacuation intestinale ou vésicale,

(vi) le fait de marcher;

c.1) sont compris parmi les fonctions mentales nécessaires aux activités de la vie courante :

(i) la mémoire,

(ii) la résolution de problèmes, l’atteinte d’objectifs et le jugement (considérés dans leur ensemble),

(iii) l’apprentissage fonctionnel à l’indépendance;

d) il est entendu qu’aucune autre activité, y compris le travail, les travaux ménagers et les activités sociales ou récréatives, n’est considérée comme une activité courante de la vie quotidienne;

e) le fait de s’alimenter ne comprend pas :

(i) les activités qui consistent à identifier, à rechercher, à acheter ou à se procurer autrement des aliments,

(ii) l’activité qui consiste à préparer des aliments, dans la mesure où le temps associé à cette activité n’y aurait pas été consacré en l’absence d’une restriction ou d’un régime alimentaire;

f) le fait de s’habiller ne comprend pas les activités qui consistent à identifier, à rechercher, à acheter ou à se procurer autrement des vêtements.

 

(2) Professionnels de la santé titulaires d’un permis d’exercice. Tout audiologiste, dentiste, ergothérapeute, infirmier, infirmière, médecin, médecin en titre, optométriste, orthophoniste, pharmacien, physiothérapeute ou psychologue visé aux articles 63, 64, 118.2, 118.3 et 118.6 doit être autorisé à exercer sa profession :

a) par la législation applicable là où il rend ses services, s’il est question de services;

b) s’il doit délivrer une attestation concernant un particulier, soit par la législation applicable là où le particulier réside, soit par la législation provinciale applicable;

c) s’il doit délivrer une ordonnance pour des biens à fournir à un particulier ou destinés à être utilisés par un particulier, soit par la législation applicable là où le particulier réside, soit par la législation provinciale applicable, soit enfin par la législation applicable là où les biens sont fournis.

 

[11]         L’appelant a affirmé qu’il souffre d’absences épileptiques, parfois une ou plusieurs par jour, et de crises épileptiques tonico‑cloniques, une ou deux fois par année.

 

[12]         À cause des crises épileptiques, la Province de l’Ontario a révoqué le permis de conduire de l’appelant. Ce dernier a toutefois déclaré qu’il ne s’agissait pas seulement de sa capacité de conduire un véhicule,

 

[traduction]

 

[…] c’est ma capacité à me concentrer et c’est ma mémoire, […]

 

(Transcription, page 21, ligne 14.)

 

[13]         Dans sa plaidoirie, l’appelant a mentionné que la façon dont l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») avait décrit sa déficience était soit trop restreinte, soit trop vague (transcription, page 34, lignes 7 et 8).

 

[14]         Pendant l’audience, l’avocat de l’intimée a produit une copie d’une lettre que J. Preston, de l’ARC, a adressée au Dr Cortens le 25 avril 2008 (pièce R‑1).

 

[15]         La lettre de M. Preston était accompagnée d’un questionnaire que ce dernier demandait au Dr Cortens de bien vouloir remplir. Voici les questions posées ainsi que les réponses données par le Dr Cortens :

 

[traduction]

 

Question :         Votre patient peut-il accomplir des activités de la vie quotidienne (par ex., des tâches simples, l’hygiène personnelle, sortir dans la collectivité, faire des achats simples) sans l’aide ou la supervision d’une autre personne?

 

Réponse :         OUI  X  NON  –

 

Question :         Veuillez indiquer si de l’aide ou de la supervision est nécessaire et, dans l’affirmative, préciser pourquoi.

 

Réponse :         Cependant, il n’est pas capable de conduire, il vit à la campagne et il a donc besoin de quelqu’un pour le conduire en ville afin d’accomplir des activités dans la collectivité.

 

Question :         Votre patient peut‑il prendre des décisions appropriées et faire preuve de jugement dans des situations courantes?

 

Réponse :         OUI  X  NON  –

 

Question :         Veuillez faire état de vos préoccupations sur le plan de la sécurité, le cas échéant.

 

Réponse :         Sa situation soulève toutefois certaines préoccupations sur le plan de la sécurité parce qu’il est victime de crises, au cours desquelles il n’est pas conscient de ce qui se passe. À ces occasions, il est incapable de prendre des décisions, quelles qu’elles soient, puisque, en définitive, il perd alors connaissance.

 

Question :         Votre patient a-t-il besoin de fréquents rappels ou fait-il un usage excessif d’aides‑mémoire tous les jours (par ex., des instructions étape par étape pour l’accomplissement d’activités courantes, ou des instructions écrites détaillées pour se rendre à des endroits bien connus)?

 

Réponse :         OUI  –  NON  X

 

Question :         Votre patient peut-il vivre de façon autonome (SANS la supervision quotidienne d’un membre de la famille ou de la collectivité)?

 

Réponse :         OUI  X  NON  –

 

Question :          Votre patient a-t-il besoin d’un « temps excessif » pour accomplir par lui‑même les fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne avec, au besoin, des soins thérapeutiques et l’aide des appareils et des médicaments indiqués?

                         

[Non souligné dans l’original.]

 

NOTE :            Pour satisfaire à l’exigence relative au « temps excessif », la personne handicapée doit devoir consacrer aux fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne beaucoup plus de temps que n’en aurait besoin une personne ordinaire n’ayant pas la déficience en cause.

 

Réponse :         OUI  –  NON  X

 

[Non souligné dans l’original.]

 

Question :         Veuillez préciser la fréquence, le genre et la durée des crises.

 

Réponse :         La plupart du temps, il est victime d’absences épileptiques, mais il souffre parfois également de crises épileptiques tonico‑cloniques. Il subi en moyenne trois absences épileptiques par jour.

 

Question :         Ces épisodes sont-ils contrôlés à l’aide de médicaments?

 

Réponse :         OUI  –  NON  X

 

Question :         Veuillez préciser.

 

Réponse :         Le patient a pris de nombreux médicaments au fil des ans, y compris du Tegretol, du Lamictal, de l’Epival, du Topamax et du Lamotrigine, mais nous n’avons malgré cela pas réussi à maîtriser ses crises. Il a récemment commencé à prendre du Keppra.

 

Question :         Pour autant que vous sachiez, les limitations mentionnées dans les questions précédentes sont‑elles toujours ou presque toujours présentes?

 

Le Dr Cortens n’a pas coché la case « OUI » ou « NON », mais il a fourni les précisions suivantes :

 

[traduction]

 

Comme il est mentionné plus haut, lorsqu’il est victime de crises, il perd connaissance et il est incapable de faire quoi que ce soit qui fait appel à une fonction cognitive. À d’autres moments, il est capable de prendre des décisions.

 

Question :         Dans l’affirmative, veuillez indiquer les années ou les périodes pendant lesquelles c’était le cas.

 

Réponse :         2003.

 

Question :         Veuillez ajouter n’importe quelle observation susceptible de clarifier en quoi la déficience de votre patient restreint ses fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne.

 

Réponse :         Le patient est victime de fréquents épisodes de crises pendant lesquels il est totalement incapable.

 

Question :         Veuillez préciser l’année approximative où votre patient a commencé à subir des limitations fonctionnelles graves.

 

Réponse :         2003.

 

Question :         La capacité de votre patient d’accomplir les fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne devrait‑elle vraisemblablement s’améliorer?

 

Réponse :         OUI  –  NON  X

 

Question :         Quelle est la nature de la déficience dont votre patient souffre?

 

Réponse :         Troubles épileptiques prolongés.

 

Question :         La déficience de votre patient a‑t‑elle duré, ou s’attend‑t‑on à ce qu’elle dure, au moins 12 mois d’affilée?

 

Réponse :         OUI  X  NON  –

 

 

J’estime nécessaire de faire des observations au sujet de certaines des réponses données par le Dr Cortens dans le questionnaire. Je renvoie à ce qui suit :

 

          1. Question

Votre patient peut-il accomplir des activités de la vie quotidienne (par ex., des tâches simples, l’hygiène personnelle, sortir dans la collectivité, faire des achats simples) sans l’aide ou la supervision d’une autre personne?

 

Le Dr Cortens a répondu OUI.

 

2. Question

Votre patient a-t-il besoin de fréquents rappels ou fait-il un usage excessif d’aides‑mémoire tous les jours (par ex., des instructions étape par étape pour l’accomplissement d’activités courantes, ou des instructions écrites détaillées pour se rendre à des endroits bien connus)?

 

Le Dr Cortens a répondu NON.

 

3. Question

Votre patient peut-il vivre de façon autonome (SANS la supervision quotidienne d’un membre de la famille ou de la collectivité)?

 

Le Dr Cortens a répondu OUI.

 

4. Question

Votre patient a-t-il besoin d’un « temps excessif » pour accomplir par lui‑même les fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne avec, au besoin, des soins thérapeutiques et l’aide des appareils et des médicaments indiqués?

 

Le Dr Cortens a répondu NON.

 

À la lumière de mon analyse des réponses susmentionnées, j’arrive à la conclusion que l’appelant est capable d’accomplir les fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne sans y consacrer un temps excessif (peut-être avec des soins thérapeutiques et l’aide des appareils et des médicaments indiqués).

 

[16]         L’avocat de l’intimée a renvoyé à l’arrêt A.G. of Canada v. MacIsaac et al., 2000 D.T.C. 6020, de la Cour d’appel fédérale, où le juge Sexton, tient les propos suivants au paragraphe 5 :

 

[5] […] Le paragraphe 118.3(1)a.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu n’est pas simplement indicatif. Il s’agit d’une disposition impérative. Dit simplement, selon le libellé de ces dispositions, il doit y avoir une attestation faite par un médecin qui indique que l’individu souffre de déficiences. […]

 

[17]         Compte tenu des réponses fournies par le Dr Cortens dans le questionnaire, je conclus que les exigences relatives au crédit d’impôt pour personnes handicapées prévues au paragraphe 118.1(1) ne sont pas remplies en l’espèce. À mon avis, l’appelant n’a pas le droit de se prévaloir d’un crédit d’impôt pour personnes handicapées pour l’année d’imposition 2007.

 

[18]         L’appel est rejeté sans dépens.

 

 

 

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 10e jour de septembre 2010.

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour d’octobre 2010.

 

Marie-Christine Gervais

 


RÉFÉRENCE :                                  2010 CCI 456

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2009-593(IT)I

 

INTITULÉ :                                       Harold A. Pakarinen c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Kenora (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 25 juin 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge L.M. Little

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 10 septembre 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimée :

Me Cameron G. Regehr

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                     

 

                          Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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