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Dossier : 2009-3308(IT)I

 

ENTRE :

PATRICIA COUTURE,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de Sylvie Grenier (2009‑2986(IT)I), le 10 mars 2010, à Sherbrooke (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Robert J. Hogan

 

Comparutions :

 

Avocate de l'appelante :

Me Francine Morin

 

 

Avocate de l'intimée :

Me Marjolaine Breton

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JUGEMENT

 

          L’appel des nouvelles déterminations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années de base 2006 et 2007 est rejeté, sans frais, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour de mai 2010.

 

 

 

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan


 

 

Référence : 2010 CCI 233

Date : 20100503

Dossier : 2009-3308(IT)I

 

ENTRE :

PATRICIA COUTURE,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Hogan

 

INTRODUCTION

 

[1]              L’appelante interjette appel des nouvelles déterminations faites par le ministre du Revenu national (le « ministre ») selon lesquelles, pour la période de juin à novembre 2008, elle n’était pas le « particulier admissible » au sens de l’article 122.6 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») et, par conséquent, elle n’avait pas droit à la prestation fiscale canadienne pour enfants (la « PFCE ») à l’égard de l’enfant P., car elle n’était pas la mère de P. Le ministre a également déterminé que la mère de P., Sylvie Grenier, n’avait pas droit à la PFCE pour son fils puisqu’elle ne résidait pas avec lui pendant la période en litige. Mme Grenier, la mère de P., a porté la décision du ministre en appel et les deux appels ont été entendus sur preuve commune.

 

[2]              La preuve démontre que le ministre a reçu une demande de PFCE à l’égard de P. de la part de l’appelante pour la période débutant le 29 mai 2008. Le service à la clientèle de la PFCE a accordé les prestations à partir de juin 2008. Ensuite, Mme Grenier a reçu un avis de détermination lui indiquant qu’elle n’avait plus droit à la PFCE relativement à son fils puisque les prestations avaient été accordées à l’appelante. Mme Grenier a fait opposition à la décision du ministre selon laquelle P. vivait chez l’appelante en juillet 2008 pendant que cette dernière travaillait à temps partiel le soir. Mme Grenier prétend que l’appelante a offert d’héberger son fils pendant l’année scolaire 2008-2009 afin de permettre à P. de compléter la quatrième année du secondaire à l’École secondaire de l’Escale, à Asbestos. Selon Mme Grenier, son fils P. a eu des difficultés scolaires à l’ancienne école qu’il fréquentait, à Sherbrooke. Selon elle, P. voulait faire un nouveau départ dans une polyvalente située dans la région où son père habitait.

 

[3]              Mme Grenier a témoigné qu’elle a continué à subvenir aux besoins de son fils pendant qu’il habitait chez l’appelante. Elle a témoigné qu’elle a acheté des vêtements et du matériel scolaire pour P. pour la rentrée scolaire. Elle s’est occupée d’inscrire P. à la nouvelle polyvalente à Asbestos et elle était considérée comme la personne responsable avec laquelle il fallait communiquer selon les dossiers de la polyvalente. M. Turcotte, le père de P., a corroboré le témoignage de son ex‑conjointe, Mme Grenier. De plus, il a précisé que son fils et lui mangeaient souvent ensemble le midi au casse-croûte local situé près de la maison de l’appelante. Il a témoigné qu’il a fourni de l’argent de poche à P. pour ses menues dépenses. Il a confirmé que Mme Grenier et lui ont fait au moins deux courses à l’épicerie pour leur fils lorsque ce dernier vivait chez l’appelante. M. Turcotte a prétendu qu’il avait donné 80 $ à l’appelante et lui rendait de menus services en échange de l’hébergement de son fils. Il a mentionné qu’il a installé un ventilateur pour la cuisinière de l’appelante et qu’il a fait des réparations à la laveuse de l’appelante. Finalement, il a témoigné que lorsque la mère de P. n’avait pas pu rencontrer les employés de la polyvalente lorsqu’ils en avaient fait la demande, M. Turcotte avait pris des dispositions pour la remplacer. Les documents provenant de l’École secondaire de l’Escale produits sous la cote A‑1-G indiquent que l’autorité parentale à l’égard de P. était exercée par sa mère. Le bulletin scolaire 2008-2009 indique aussi que la personne responsable de P. est sa mère.

 

[4]              P. a corroboré le témoignage de ses parents relativement à l’aide et au soutien que ces derniers lui ont donnés pendant la période en litige.

 

[5]              L’appelante a témoigné qu’elle a déménagé à Asbestos en mai 2008. Elle a trouvé un emploi à temps partiel dans un club social. Elle a fait des démarches pour trouver une gardienne pour son fils de 12 ans. Elle a rencontré le père de P. en mai 2008 et celui-ci a indiqué que son fils P. pourrait souhaiter garder le fils de l’appelante. Selon cette dernière, P. a d’abord gardé son fils chez elle les fins de semaine au début juin. Au cours de ses visites, il a indiqué à l’appelante qu’il ne voulait pas retourner vivre chez sa mère pendant l’année scolaire. L’appelante a perdu son emploi vers la fin juin. P. a continué à habiter chez l’appelante pendant l’été. Vers la mi-août 2008, l’appelante a confirmé à P. qu’il pouvait rester chez elle pendant l’année scolaire 2008-2009. P. a déménagé ses effets personnels chez l’appelante vers la mi-août 2008 et est resté chez l’appelante jusqu’au 29 novembre 2008, date à laquelle P. est retourné vivre chez sa mère.

 

[6]              Selon l’appelante, c’est Marie-Renée Ruel, travailleuse sociale au Centre de jeunesse de Plessisville, qui lui a suggéré de faire une demande de PFCE à l’égard de P. L’appelante dit ne pas comprendre pourquoi elle a droit à de l’aide du gouvernement provincial, mais non du gouvernement fédéral, relativement à l’hébergement de P. Selon elle, elle a subvenu seule aux besoins de P. Il vivait chez elle pendant la période en litige. P. avait un horaire et suivait des heures de rentrée et de coucher. L’appelante fournissait à P. des repas le midi. Selon l’appelante, P. a très peu fréquenté ses parents pendant la période en litige.

 

ANALYSE

 

[7]              La seule question en litige dans la présente cause est de savoir si l’appelante doit la somme de 1 583,25 $ que le ministre lui réclame relativement aux années de base 2006 et 2007.

 

[8]              Les dispositions législatives pertinentes sont les articles 122.5, 122.6 et 122.61 de la LIR, ainsi que les paragraphes 252(1) et (2).

 

[9]              Pour être un « particulier admissible » à recevoir la PFCE, il faut satisfaire aux trois conditions suivantes :

 

a)    résider avec la personne à charge,

b)    être le père ou la mère de la personne à charge,

c)    assumer principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de la « personne à charge admissible ».

 

L’article 6302 du Règlement de l’impôt sur le revenu énumère les critères qui servent à déterminer en quoi consistent le soin et l’éducation d’une personne à charge.

 

[10]         La LIR élargit le sens du terme « enfant » et celui des termes « père » et « mère ».

 

[11]         Le paragraphe 252(1) de la LIR veut que la personne qui est entièrement à la charge d’un contribuable en termes de garde et de surveillance, en droit ou de fait, est considérée comme un enfant dudit contribuable. Ce dernier est considéré comme la mère ou le père de cet enfant dans ces circonstances.

 

[12]         Il est admis que l’appelante n’est pas la mère de P. Par conséquent, pour que l’appelante soit considérée comme mère, il faut que P. soit entièrement à sa charge et qu’elle en ait eu la garde et la surveillance de fait. Le Nouveau Petit Robert[1] définit le mot « entièrement » comme suit :

 

adv. fin XIIe; de entier D’une manière entière. Þ 1. complètement, totalement, tout (cf. En entier*, tout à fait*). Objet entièrement fait à la main. Détruire entièrement (cf. De fond en comble*). Capital entièrement versé. Þ intégralement. Elle est entièrement responsable. Ils sont entièrement d’accord. Þ parfaitement (cf. À cent* pour cent). « Ni le réel n’est entièrement rationnel, ni le rationnel tout à fait réel » (Camus).  à CONTR. Imparfaitement, incomplètement, partiellement.

 

[13]         La version anglaise du paragraphe 252(1) utilise le mot « wholly », qui est défini comme suit dans le Canadian Oxford Dictionary[2] : « adverb 1 entirely, completely; without limitation 2 solely, exclusively ».

 

[14]         L’avocate de l’appelante prétend que le mot « entièrement » doit être interprété plus librement que son sens littéral. Elle prétend que ce mot doit signifier « considérablement ». Elle prétend aussi que le contexte exige une interprétation plus libérale, à défaut de quoi, dans les circonstances de la présente cause, aucune partie n’aurait droit à la PFCE. Selon l’appelante, la mère de P. n’aurait pas droit à la PFCE puisque ce dernier ne résidait pas avec sa mère pendant la période en litige.

 

[15]         Je ne suis pas d’accord avec l’interprétation avancée par l’avocate de l’appelante. Le législateur utilise le mot « principalement » lorsque la proportion nécessaire est de plus de 50 %. Ici, le mot « entièrement » signifie totalement ou complètement. La preuve démontre que les parents de P. ont continué à apporter de l’aide à leur fils sous la forme d’achats de vêtements, de matériel scolaire et de nourriture. Cette aide était moins importante que celle offerte par l’appelante. Toutefois, l’appelante n’a pas démontré que P. était entièrement à sa charge.

 

CONCLUSION

 

[16]         Pour ces motifs, je rejette l’appel.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour de mai 2010.

 

 

 

 

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

 


RÉFÉRENCE :                                  2010 CCI 233

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2009-3308(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              PATRICIA COUTURE c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Sherbrooke (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 10 mars 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Robert J. Hogan

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 3 mai 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Avocate de l'appelante :

Me Francine Morin

 

 

Avocate de l'intimée :

Me Marjolaine Breton

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelante :

 

                     Nom :                            Me Francine Morin

 

                 Cabinet :                           Dontigny & Morin

                                                          Cowansville (Québec)

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1] Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Dictionnaires Le Robert, Paris, 2008.

[2] Oxford University Press Canada, edited by Katherine Barber, second edition, 2004.

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