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Dossier : 2009-2053(IT)G

ENTRE :

PHILIPPE J. GABRINI,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 3 mars 2011 à Kingston (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Patrick Boyle

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

 

Avocate de l’intimée :

MMarie‑Eve Aubry

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2005 de l’appelant est rejeté avec dépens, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 25jour de mars 2011.

 

 

 

 

« Patrick Boyle »

Juge Boyle

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de juin 2011.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

 

Référence : 2011 CCI 188

Date : 20110325

Dossier : 2009-2053(IT)G

ENTRE :

PHILIPPE J. GABRINI,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Boyle

 

[1]              La question en litige est de savoir si le contribuable, M. Philippe Gabrini, a réalisé un gain en capital en 2005 au moment de la vente d’un appartement de vacances familial situé sur la Côte d’Azur et enregistré à son nom. Le contribuable soutient que, conformément à une convention verbale conclue avec son père, le contribuable était le propriétaire inscrit; toutefois, lui et son père détenaient chacun un droit de propriété sur le bien.

 

 

I. Les faits et les témoignages

 

[2]              Voici comment se présentent, en l’espèce, les faits clairement établis.

 

[3]              Pendant toutes les périodes en cause, le contribuable était résident du Canada et vivait au Québec. Ses parents résidaient en France, juste à l’extérieur de Paris. Le père du contribuable est âgé de 99 ans et vit confortablement en France. Toutefois, à ce stade de sa vie, il ne porte pas une attention particulière à ses propres affaires fiscales en France, encore moins à celles de son fils au Canada. Pour ces motifs, il n’a pas témoigné, et cela se comprend parfaitement dans les circonstances.

 

[4]              En 1981, le grand‑père du contribuable est décédé, et chacun de ses petits‑enfants, dont le contribuable, a hérité de 100 000 francs français (« FF »). À ce moment-là, le contrôle des changes en vigueur en France ne permettait pas au contribuable de sortir ses fonds de France. Le contribuable a ouvert un compte bancaire en France pour y déposer son legs, mais il ne se souvient plus de ces faits.

 

[5]              Les parents du contribuable passaient leurs vacances sur la Côte d’Azur depuis plusieurs années, ce qui était bénéfique pour la mère du contribuable qui était atteinte de la maladie de Parkinson. Compte tenu du contrôle des changes en France, de l’état de santé de sa mère et de l’habitude de ses parents qui consistait à s’installer sur la Côte d’Azur pour fuir les hivers parisiens, le contribuable a décidé d’utiliser son legs pour financer l’achat de l’appartement en question. En août 1983, le contribuable a donné à son père un mandat dûment notarié pour qu’il signe le contrat d’achat et les documents requis pour la clôture de la transaction. Le contrat d’achat a été signé en octobre 1983. À la fin de la construction de l’appartement en 1984, le bien a été enregistré au seul nom du contribuable.

 

[6]              Le contribuable avait auparavant ouvert le compte bancaire dans lequel son legs de 100 000 FF avait été déposé. Le contribuable ne sait toutefois pas à quoi ont servi ces fonds, à l’exception du fait qu’ils ont été utilisés pour financer en partie l’achat de l’appartement près de Cannes. Toutefois, des dépôts d’environ 400 000 FF ont aussi été effectués dans ce compte par d’autres parents et des amis de la famille pendant la période qui précédait l’achat de l’appartement. Le contribuable soutient qu’il n’était pas au courant de ces dépôts ou de tout retrait effectué de son compte et qu’il ne savait pas si ces montants avaient été utilisés pour acheter l’appartement Le Cannet (« Le Cannet ») avant la clôture du compte. Il déclare qu’il n’a que récemment eu connaissance des relevés bancaires tels qu’ils se présentent actuellement.

 

[7]              Le contribuable s’est rendu avec son père au Crédit Foncier pour demander un prêt hypothécaire de 200 000 FF relativement à Le Cannet, et il ressort des documents du prêt hypothécaire que le contribuable est l’unique emprunteur et propriétaire. Ces fonds ont également été utilisés pour acheter Le Cannet.

 

[8]              Le contribuable a fermé son compte bancaire en France en 1988 après le remboursement total du prêt hypothécaire de 200 000 FF.

 

[9]              Le prix d’achat du bien était de 789 000 FF. Ce prix tenait compte du garage. Il n’y a aucune preuve quant à l’existence d’autres frais particuliers liés à l’achat, à part les honoraires du notaire en France.

 

[10]         Le père du contribuable a meublé l’appartement et les parents du contribuable y ont résidé chaque année pendant l’hiver jusqu’en 1998, lorsque la mère du contribuable est devenue trop malade pour effectuer le voyage. Jusqu’à ce moment‑là, les parents du contribuable payaient les services publics et les frais d’entretien. Le contribuable et sa famille immédiate résidaient rarement à l’appartement et s’y rendaient très peu souvent; ils n’y ont résidé qu’une seule fois et brièvement pendant les années où les parents du contribuable se servaient de l’appartement. D’autres enfants de monsieur Gabrini père et leurs familles résidaient plus régulièrement à l’appartement.

 

[11]         L’appelant a vendu le bien en 2005. Il n’a pas demandé l’avis de son père quant aux conditions et au choix du moment de la vente. C’est l’appelant et son épouse qui ont pris la décision de vendre. Au moment de la clôture, le produit de la vente a été remis à l’appelant. Il a investi cet argent au Canada. L’appelant n’a pas demandé l’avis de son père au sujet de l’investissement de ces fonds et ne lui en a pas non plus rendu compte.

 

[12]         Il n’y avait pas d’impôt à payer en France relativement au gain réalisé sur la vente. Aucune autorité française n’avait été informée du fait que le contribuable n’était pas le seul propriétaire de Le Cannet. Le contribuable sait qu’il n’a pas été imposé en France sur le gain réalisé parce qu’il a bénéficié d’une exonération qui, effectivement, fait en sorte que les gains réalisés sont exonérés si la vente porte sur un bien détenu depuis plus de 15 ans. L’exception s’appliquait apparemment au contribuable même s’il n’était pas résident de la France.

 

[13]         Le contribuable n’a pas déclaré les gains réalisés sur la vente du bien dans sa déclaration de revenus canadienne de 2005.

 

[14]         Les faits ci‑dessus sont les faits connus. Toutefois, d’après le contribuable, il y avait une convention verbale entre lui et son père selon laquelle ils acquéraient conjointement le bien, et la part du contribuable devait être proportionnelle à son investissement du legs de 100 000 FF. Le père du contribuable devait payer le solde, et l’appelant avait cru comprendre que son père avait utilisé le prêt hypothécaire de 200 000 $ pour financer sa part du prix d’achat.

 

[15]         Le contribuable se fonde sur ces faits pour faire valoir que la part qu’il détenait dans le bien n’était que d’environ 12 % et qu’il ne devrait être imposé que sur la partie du gain correspondant. Le contribuable a calculé le pourcentage de son droit sur le bien en fonction d’un prix d’achat total en quelque sorte plus élevé que les 789 000 FF, et s’est fondé sur une brève allusion à ce montant contenue dans un des documents de son père. Le contribuable n’a pas pu fournir une répartition de ce montant plus élevé ni réussi à le justifier, sauf pour les 2,5 % d’honoraires du notaire. Le contribuable a déclaré qu’il considérait sa part dans le bien comme un investissement et qu’il allait revoir sa position au moment de prendre sa retraite. Jusque-là, le contribuable avait convenu avec son père que ses parents résideraient à l’appartement à leur guise, et qu’ils devaient assumer les frais d’entretien du bien et payer les impôts, les services publics et d’autres frais similaires de fonctionnement. En outre, à la mort du père du contribuable, sa part devait être divisée en parts égales entre le contribuable et les autres enfants de monsieur Gabrini père. Cette convention était secrète et les autres enfants de monsieur Gabrini père n’en étaient même pas au courant, eux qui considéraient l’appartement comme propriété de leurs parents.

 

[16]         Le contribuable a déclaré qu’en 1998, ses parents ont cessé d’utiliser l’appartement et de payer les frais de fonctionnement en ce qui concerne l’entretien du bien, contrairement à ce qu’il croyait avoir convenu avec son père.

 

[17]         Le frère du contribuable, Michel, a également témoigné. Au début de 1986, il a reçu de son père une lettre d’une page concernant certaines questions financières à propos desquelles son père voulait le mettre au courant. Il était question, dans la lettre, de deux donations que le père avait faites en 1985 en faveur de Michel et de ses deux autres enfants, et de sa récente visite chez le notaire en vue de rendre ces donations authentiques[1]. Michel avait déjà été mis au courant de ces deux donations et comprenait le contenu des deux paragraphes de la lettre où elles étaient mentionnées. Il était également précisé dans la lettre les conditions d’un prêt que le père avait consenti à l’un de ses autres enfants. Michel en avait été mis au courant auparavant et comprenait les paragraphes de la lettre qui en faisaient état.

 

[18]         Toutefois, le père du contribuable a consigné par écrit certaines opérations financières auxquelles participait le contribuable, Philippe. Ce dernier soutient que, d’après ce qu’il avait compris, ces paragraphes corroboraient l’existence d’un investissement conjoint dans le bien par lui et son père. Ils ne font nullement mention de l’achat d’un quelconque bien. Il est seulement précisé dans ces paragraphes que le notaire considère que Philippe a reçu des autres enfants de son père un prêt qu’il doit rembourser autrement qu’au moyen de son legs provenant de la succession de son père. Michel n’a pas compris grand-chose du contenu de ces paragraphes. Il n’était pas au courant du fait que son père avait fait des arrangements financiers avec Philippe, et il ne comprenait pas comment on pouvait considérer que lui et les autres enfants de monsieur Gabrini père avaient prêté de l’argent à Philippe. Tout ce que savait Michel, c’est que son père essayait de l’informer au sujet des arrangements par ailleurs secrets qu’il avait faits avec Philippe. Lorsqu’il a rendu visite à son père plus tard dans la même année, Michel a eu une discussion avec lui au sujet de la lettre, mais il n’a pas été davantage éclairé sur la question. Il n’a obtenu aucune information détaillée de sorte qu’il ne comprenait toujours pas que la lettre avait un lien quelconque avec Le Cannet. Le père de Michel a dit à ce dernier de ne pas s’inquiéter, qu’il comprendrait le contenu de la lettre lorsqu’il irait finalement voir le notaire pour la succession de son père. Le père de Michel voulait simplement l’informer au moyen d’un document écrit et voulait par ailleurs qu’il reste secret.

 

[19]         Michel a déclaré qu’il avait supposé que telle était la manière dont son père avait choisi de faire la donation de Le Cannet. Il a supposé que son père avait procédé de la sorte pour des raisons liées à la « réduction d’impôts ».

 

[20]         Après avoir entendu la version de son frère Philippe à propos de ces arrangements, Michel a accepté que cette version constitue une explication correcte et conforme à la grande circonspection dont faisait preuve son père à l’égard de ses affaires financières.

 

[21]         Michel n’a pas prétendu connaître ou comprendre les dispositions prévues par son père pour sa succession.

 

 

II. La question en litige

 

[22]         En l’espèce, la seule question qu’il faut trancher est de savoir si le contribuable est capable de démontrer, selon la prépondérance d’une preuve crédible et corroborante, que lui et son père étaient copropriétaires de Le Cannet.

 

[23]         Dans les actes de procédure, il a été également soulevé un certain nombre de questions juridiques liées au conflit de lois, au droit international privé, à la Convention fiscale entre le Canada et la France et, dans la mesure où le droit canadien est applicable, au fait de savoir quelle loi est applicable : la loi du lieu de résidence du contribuable pendant la période en question, en l’occurrence la loi du Québec, ou celle du lieu de résidence du contribuable au moment de l’audition du présent appel, à savoir la loi de l’Ontario?

 

[24]         À la fin de l’audience, les parties se sont entendues sur le fait que l’unique question à trancher est la question factuelle de savoir si la preuve démontrait, selon une prépondérance des probabilités, qu’en dépit de la supposition du ministre selon laquelle le contribuable était l’unique propriétaire du bien en son nom propre, le contribuable et son père avaient acheté conjointement Le Cannet et en étaient tous les deux propriétaires.

 

 

III. Le droit, l’analyse et la conclusion

 

[25]         Le contribuable soutient que, même s’il était le seul propriétaire inscrit, il détenait un droit de 88 % sur le bien en sa qualité de prête‑nom pour le compte de son père et il détenait les 12 % restant en son nom propre. De même, le contribuable affirme qu’il agissait pleinement en sa qualité de prête‑nom pour le compte de son père relativement au prêt hypothécaire de 200 000 FF contracté auprès du Crédit Foncier.

 

[26]         Pour situer le litige dans un contexte juridique français et québécois, il importe de citer la décision de 1980 que la Cour suprême du Canada a rendue dans l’arrêt Victuni Aktiengesellschaft c. Le ministre du Revenu de la province de Québec, [1980] 1 R.C.S. 580, qui, selon les deux parties donne un résumé des règles de droit relatives aux prête‑noms et aux mandataires (agents et prête‑noms) en droit civil français et en droit civil québécois, quoique la décision ait été rendue il y a plus de trente ans et que le Québec ait remplacé son Code civil depuis lors. Voici le passage pertinent de cette décision :

 

En droit québécois, comme en droit français, le contrat de prête-nom est une forme licite du contrat du mandat. Dans le Code civil du Québec, cela ressort de l’art. 1716 qui dispose :

 

Art. 1716. Le mandataire qui agit en son propre nom est responsable envers les tiers avec qui il contracte, sans préjudice aux droits de ces derniers contre le mandant.

 

Au sujet de cet article, on lit au vol. 13 du Traité de droit civil du Québec, (à la p. 70) :

 

Quant au prête-nom, ce contrat est une forme de mandat parfaitement reconnu dans notre droit (Canuel c. Belzile, (1922), 33 B.R. 355). Le prête-nom n’est au fond qu’un mandataire,

 

Malgré l’absence d’une semblable disposition au Code Napoléon on lit dans le Traité de droit civil de Planiol et Ripert, tome 11, par. 1505 (aux pp. 956-957) :

 

1505. Validité du prête-nom. — Le prête-nom obéit aux règles générales des actes simulés (Traité, VII, nos 333 et s., 971 et s.) : il n’est donc pas illicite en soi. Rien n’oblige le mandant et le mandataire à rendre leurs rapports publics. Les tiers ne sauraient se plaindre de la simulation quand ils n’ont pas d’intérêt légitime lésé.

Mais la convention est nulle si elle cherche à faire, par prête-nom, un acte qui aurait été interdit au mandant par mandat ostensible (Baudry-Lacantinerie et Wahl, nos 883 et s.; Josserand, III, n° 1436). Elle vise alors à tourner la loi et constitue une fraude.

 

En vertu des principes généraux du mandat il est clair que l’obligation d’un mandataire envers son mandant n’est pas une dette. Celui qui a acheté un immeuble pour le compte d’un tiers qui veut rester inconnu, n’est pas plus débiteur du prix payé qu’il n’est propriétaire de l’immeuble. Le vrai propriétaire c’est le mandant et l’obligation du mandataire prête-nom c’est de rendre compte au mandant et de lui remettre ce qu’il perçoit pour lui (C.c., art. 1713). Ce qu’il reçoit, même si c’est de l’argent, ne lui appartient pas, il est obligé de le tenir à part de ses biens. C’est un crime pour lui que de s’en emparer de façon à se constituer débiteur au lieu de mandataire: R. c. Légaré [[1978] 1 R.C.S. 275]. Dans notre arrêt récent Canadian Pioneer Management Ltd. c. Conseil des relations du travail de la Saskatchewan [[1980] 1 R.C.S. 433], le juge Beetz a fait ressortir l’importance de cette distinction en citant notamment l’arrêt du Conseil privé sur les dépôts non réclamés: Attorney General for Canada v. Attorney General for the Province of Quebec [[1947] A.C. 33].

 

[27]         Plus précisément, il n’est pas contesté qu’en vertu du droit français, aussi bien que du droit québécois, un contrat de mandat n’a pas à être formé par écrit ou rendu public et il peut même s’agir, dans un cas de simulation, d’un contrat secret qui l’emporte sur un contrat apparent dont les modalités sont différentes. (Voir par exemple l’article 1451 du Code civil du Québec).

 

[28]         L’intimée a établi une nouvelle cotisation à l’égard du contribuable en se fondant sur le fait que ce dernier était l’unique propriétaire du bien en son nom propre. À part le témoignage même du contribuable, tous les éléments de preuve sont compatibles avec cet état de fait. Les documents officiels ne font pas état de renseignements contraires et le contribuable n’a pas avisé autrement son notaire lorsqu’il a donné l’autorisation à son père d’acheter l’appartement pour son compte, et il n’a pas non plus avisé son notaire en France lorsqu’il a vendu le bien. Aucun autre document, y compris la lettre que le père de Michel avait écrite à ce dernier ou le témoignage de Michel, n’est nécessairement incompatible avec le fait que le contribuable est l’unique propriétaire de Le Cannet. Par exemple, la plupart des éléments de preuve présentés sont tous aussi compatibles avec le fait que le père et la mère du contribuable étaient autorisés à occuper l’appartement dont le contribuable était propriétaire, à condition qu’ils payent les frais de fonctionnement annuels de l’appartement, même s’il avait été acheté et payé par le contribuable.

 

[29]         Selon le contribuable, lui et son père étaient copropriétaires de l’appartement comme cela est décrit ci‑dessus, malgré le fait que le contribuable était le seul propriétaire inscrit. Cette situation ne semble pas constituer un obstacle à la validité d’un tel accord et au fait qu’il produise des effets juridiques. Aucune preuve écrite ne mentionne l’existence d’un tel arrangement. Toutefois, aucun élément de preuve n’est nécessairement incompatible avec la conclusion d’un tel accord.

 

[30]         En pareilles circonstances, et compte tenu de l’ensemble de la preuve, le contribuable n’a tout simplement pas réussi à convaincre la Cour, selon la prépondérance des probabilités, que lui et son père étaient copropriétaires de Le Cannet. Pour arriver à cette conclusion, il a été tenu compte des observations suivantes :

 

                                      i.      L’arrangement n’a jamais fait l’objet d’une mention écrite ou officielle avant la naissance du présent litige portant sur les impôts au Canada;

 

                                    ii.      Le contribuable n’a pas produit sa déclaration de revenus canadienne en tenant compte du fait qu’il était propriétaire à hauteur de 12 %;

 

                                  iii.      Le frère du contribuable, Michel, n’a pas cru comprendre que tel était le cas après avoir reçu la lettre de son père et en avoir discuté avec lui;

 

                                 iv.      Le contribuable a déclaré que son père ne s’était pas conformé à l’accord connu d’eux seuls, lorsqu’en 1998, ses parents ont cessé d’occuper la propriété et que son père a arrêté d’assumer les frais de fonctionnement de Le Cannet;

 

                                   v.      Michel avait supposé que l’attitude de son père avait quelque chose à voir avec Le Cannet et Philippe pour des raisons liées à la réduction d’impôts;

 

                                 vi.      Le contribuable n’a pas demandé l’avis de son père relativement à la vente du bien;

 

                               vii.      Le contribuable n’a pas demandé l’avis de son père au sujet de l’investissement au Canada des fonds provenant de la vente de l’appartement et ne lui en a pas non plus rendu compte. Le contribuable continue de détenir les fonds en son nom propre.

 

[31]         Dans l’ensemble, la preuve ne m’amène simplement pas à conclure qu’il est probable que le contribuable et son père avaient chacun un droit de propriété sur Le Cannet. Toutefois, aucun élément de preuve n’est totalement incompatible avec ce qui précède et je n’ai pas conclu que le contribuable n’était pas crédible, j’ai simplement conclu qu’en l’espèce, il n’avait pas réussi à s’acquitter du fardeau de la preuve qui lui incombait. Pour ce motif, l’appel est rejeté avec dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de mars 2011.

 

 

 

 

« Patrick Boyle »

Juge Boyle

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de juin 2011.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 188

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2009-2053(IT)G

 

INTITULÉ :                                       Philippe J. Gabrini

                                                          c.

                                                          Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Kingston (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 3 mars 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Patrick Boyle

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 25 mars 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

 

Avocate de l’intimée :

Me Marie‑Eve Aubry

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                     

 

                          Cabinet :                 

 

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] Il semble que le Code civil français, tout comme le Code civil du Québec, prévoit que les donations doivent être notariées sous peine de nullité. Au Québec tout au moins, il est prévu dans le Code civil des dispositions qui rendent nulles les donations indirectes ou déguisées. Voir aussi l’article 1824 du Code civil du Québec.

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