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Dossier : 2010-2288(IT)I

 

ENTRE :

 

GERALD HANSEN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 28 février 2011 à Windsor (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Judith Woods

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me John Mill

 

Avocat de l’intimée :

Me Ryan Gellings

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel interjeté à l’encontre des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2006 et 2007 est accueilli, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et qu’il établisse de nouvelles cotisations en tenant compte du fait que les avantages relatifs à l’utilisation d’une automobile ne sont que de 2000 $ pour chaque année d’imposition. Chaque partie assumera ses propres dépens.

 

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 31jour de mars 2011.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 26e jour de mai 2011.

 

Espérance Mabushi, M.A.Trad. Jur.

 


 

 

 

 

Référence : 2011 CCI 194

Date : 20110331

Dossier : 2010-2288(IT)I

 

ENTRE :

 

 

GERALD HANSEN,

appelant,

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

 

La juge Woods

 

[1]              Gerald Hansen interjette appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour les années d’imposition 2006 et 2007.

 

[2]              L’appel porte sur des avantages qui auraient été accordés par une société liée à l’appelant, à savoir Oak Farms Ltd. (« Oak Farms »). Deux types d’avantages ont été relevés dans l’avis d’appel.

 

[3]              Une question litigieuse concernant l’usage personnel d’une automobile a été résolue par les parties avant l’audience. Il a été convenu que l’avantage ne devrait être que de 2000 $ pour chacune des années d’imposition 2006 et 2007. Le jugement formel mentionnera cette convention.

 

[4]              L’autre question en litige porte sur un certain nombre de dépenses effectuées par Oak Farms au profit de l’appelant. Ces sommes ont été enregistrées dans un compte de la société appelé « compte courant de Gerry ».

 

[5]              Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a assumé, aux fins de l’établissement des cotisations, que les dépenses enregistrées dans ce compte constituaient des prêts sans intérêt qu’Oak Farms avait consentis à l’appelant. Les prêts ont donné lieu à un avantage déterminé suivant l’article 80.4 de la Loi. Le montant de l’avantage inclus dans le revenu a été calculé en fonction du taux prescrit aux fins de l’application de la Loi.

 

[6]              La disposition pertinente est le paragraphe 80.4(2) de la Loi qui est ainsi libellé :

 

80.4(2) Lorsqu’une personne (autre qu’une société résidant au Canada) ou une société de personnes (autre qu’une société de personnes dont chacun des associés est une société résidant au Canada) était :

 

a)   soit un actionnaire d’une société;

 

b)   soit rattachée à un actionnaire d’une société;

 

c)   soit un associé d’une société de personnes, ou un bénéficiaire d’une fiducie, qui était actionnaire d’une société,

 

et que, à ce titre, la personne ou la société de personnes a reçu un prêt de la société, de toute autre société qui lui est liée ou d’une société de personnes dont la société ou toute autre société qui lui est liée est un associé, ou a par ailleurs contracté une dette en faveur de l’une d’elles, la personne ou la société de personnes est réputée avoir reçu, au cours d’une année d’imposition, un avantage égal à l’excédent éventuel du total visé à l’alinéa d) sur le montant visé à l’alinéa e) :

 

d)   le total des intérêts sur tous ces prêts et sur toutes ces dettes, calculés au taux prescrit sur chacun de ces prêts et chacune de ces dettes pour la période de l’année où le prêt ou la dette était impayé;

 

e)   le montant des intérêts pour l’année versés sur tous ces prêts ou toutes ces dettes au plus tard 30 jours après le dernier en date de la fin de l’année et du 31 décembre 1982.

[Non souligné dans l’original.]

 

[7]              Le solde dû dans le compte courant de Gerry fluctuait de temps à autre à mesure des dépenses effectuées par Oak Farms ou des paiements effectués par l’appelant à Oak Farms. Au début de la période de cotisation, le solde d’ouverture était de 146 009 $, une somme que l’appelant devait à Oak Farms.

 

[8]               Les sommes qui ont été incluses dans le revenu par application de l’article 80.4 de la Loi sont de 5 981 $ et de 7 147 $ pour les années d’imposition 2006 et 2007, respectivement.

 

[9]              L’appelant soutient que le ministre n’a pas calculé correctement les avantages prévus au paragraphe 80.4(2) de la Loi parce qu’il n’a pas tenu compte d’un montant de 471 667 $ que l’appelant avait prêté à Oak Farms en 2004.

 

[10]         Il fait valoir que les dépenses enregistrées dans le compte courant de Gerry ne représentent pas une dette de l’appelant envers Oak Farms parce que ces montants sont plus que compensés par le prêt que l’appelant a accordé à Oak Farms en 2004.

 

[11]         Pour les motifs exposés ci‑dessous, j’estime que les avantages qui ont été pris en compte pour l’établissement d’une cotisation en vertu de l’article 80.4 de la Loi doivent être maintenus.

 

Analyse

 

[12]         Oak Farms exploite une serre et une boutique de fleurs à Leamington, en Ontario. Pendant la période en cause, la société était gérée par l’appelant qui l’avait reprise de son père.

 

[13]         En 1994, l’appelant a emprunté 975 000 $ à la Banque de Montréal (la « banque ») afin de financer l’achat de la société de son père.

 

[14]         En mars 2004, à un moment où le solde impayé du prêt était de 488 333 $, ce prêt a été remplacé par un nouveau prêt de 960 000 $ par la banque (le « prêt de 2004 »).

 

[15]         Le prêt de 2004 était constitué de deux parties. La première partie remplaçait le solde impayé par l’appelant sur le prêt de 1994 (488 333 $). La seconde partie (471 667 $) consistait en des fonds utilisés en totalité par Oak Farms. De ces fonds, une nouvelle avance de 240 000 $ avait été consentie à Oak Farms et le solde avait été utilisé pour rembourser les anciennes dettes de la société.

 

[16]         La question essentielle est de savoir si l’appelant avait une dette envers Oak Farms au cours des deux années d’imposition en cause.

 

[17]         L’appelant soutient qu’il n’avait pas de dette envers Oak Farms. Il prétend qu’il a prêté plus d’argent à Oak Farms que cette dernière ne lui en a avancé et que, par conséquent, il ne devait rien à Oak Farms.

 

[18]         La première question est de savoir si l’appelant a prêté de l’argent à Oak Farms.

 

[19]         L’appelant soutient qu’il a prêté de l’argent à Oak Farms lorsqu’il a emprunté 960 000 $ à la banque en 2004 et que, de ce montant, il a prêté 471 667 $ à Oak Farms.

 

[20]         Le problème qui se pose au sujet de cet argument en est un de preuve. Aucun document relatif au prêt n’a été présenté en preuve pour établir clairement que la banque avait prêté 960 000 $ à l’appelant.

 

[21]         L’intimée soutient que la partie du prêt remise à Oak Farms (471 667 $) a été prêtée directement par la banque à Oak Farms. En d’autres termes, l’intimée soutient que la banque a prêté des fonds à l’appelant et à Oak Farms en 2004. L’appelant soutient qu’il était l’unique emprunteur.

 

[22]         Les deux parties ont produit des éléments de preuve au soutien de leurs prétentions. Les éléments de preuve sont incertains et contradictoires.

 

[23]         À l’appui de la position de l’intimée se trouve une lettre que la banque a adressée aux avocats d’Oak Farms et envoyée pour préparer la clôture de l’opération de prêt en mars 2004. Le contenu de la lettre laisse entendre qu’il y avait plus d’un emprunteur. Voici un extrait de cette lettre datée du 24 février 2004 (pièce A‑3) :

 

 

          [traduction]

 

Étant donné que les fonds doivent être avancés par le truchement de votre société, nous devons obtenir une lettre de directives, dûment signée, scellée et attestée en bonne et due forme, des emprunteurs.

 

[24]         En réponse à la demande de la banque, Oak Farms a fait parvenir un document signé dans lequel elle demandait à la banque d’émettre un chèque à l’ordre des avocats d’Oak Farms (pièce R‑4).

 

[25]         D’autres éléments de preuve appuient la position de l’appelant. Plus précisément, un comptable de chez Collins Barrow qui était le conseiller financier de l’appelant, Jeff Kelly, a déclaré que quelqu’un à la banque lui avait dit que l’appelant était l’unique emprunteur. Ces renseignements ont été confirmés par écrit aux comptables dans un formulaire préparé à cette fin (pièce A‑7).

 

[26]         C’est en fonction de ces renseignements que Collins Barrow a préparé les états financiers qui montrent que l’appelant avait emprunté 960 000 $ à la banque et que, de ce montant, il avait prêté 471 667 $ à Oak Farms. Il ressort également des documents comptables que le prêt consenti par l’appelant à Oak Farms (471 667 $) portait intérêt au même taux que celui appliqué par la banque sur le prêt consenti à l’appelant. Oak Farms a payé cet intérêt à la banque et l’a déduit aux fins de l’impôt sur le revenu. (Oak Farms a en réalité payé tout le principal et les intérêts dus sur le prêt de 960 000 $, mais la partie de l’appelant était inscrite dans le compte courant de Gerry.)

 

[27]         M. Kelly a déclaré qu’il avait plus tard essayé d’obtenir confirmation auprès de la banque pour savoir qui était l’emprunteur, mais que la banque n’avait pas voulu fournir ce renseignement parce l’appelant ne faisait plus affaire avec elle.

 

[28]         D’autres documents ont été produits en preuve, mais les documents ci‑dessus illustrent l’incertitude quant à la question de savoir s’il y avait un ou deux emprunteurs.

 

[29]         Au vu de la preuve contradictoire, j’ai conclu que l’appelant ne s’est pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait. Il semble que l’appelant n’ait pas tenu les documents nécessaires. Compte tenu de la preuve contradictoire, des mesures auraient dû être prises pour que la banque présente un témoin qui aurait pu dissiper la confusion. Tel n’a pas été le cas.

 

[30]         En outre, même si je devais accepter le fait que l’appelant avait prêté 471 667 $ à Oak Farms, cela ne serait pas suffisant pour que l’appelant ait gain de cause. Il ne s’ensuit pas nécessairement que la dette représentée par le compte dénommé « compte courant de Gerry » n’est plus due. Une compensation devrait être opérée entre les deux dettes pour éviter l’application de l’article 80.4 de la Loi.

 

[31]         En l’espèce, il ressort clairement de la preuve qu’aucune compensation n’a été envisagée. Le montant total de 471 667 $ reste dû à titre de dette d’Oak Farms et est sujet aux remboursements ordinaires du capital à la banque. Cette situation est sans équivoque parce qu’Oak Farms a payé des intérêts sur cette dette et les a déduits aux fins de l’impôt sur le revenu. De ce qui précède découle la conclusion inéluctable selon laquelle une compensation entre le compte courant de Gerry et la dette dont il est question n’a jamais été envisagée. La conclusion porte un coup fatal à la cause de l’appelant.

 

[32]         En conclusion, les cotisations sont maintenues en ce qui concerne le compte connu sous le nom de « compte courant de Gerry ». La seule réparation qui est accordée est celle qui a trait à la convention des parties pour ce qui est des avantages relatifs à l’utilisation d’une automobile.

 

[33]         Les deux parties ont eu partiellement gain de cause. Par conséquent, chaque partie assumera ses propres dépens.

 

 

      

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 31jour de mars 2011.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 26e jour de mai 2011.

 

Espérance Mabushi, M.A.Trad. Jur.


RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 194

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2010-2288(IT)I

 

INTITULÉ :                                       GERALD HANSEN

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Windsor (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 28 février 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge J. M. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 31 mars 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelant :

Me John Mill

 

Avocat de l’intimée :

Me Ryan Gellings

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                      Me John Mill

 

                          Cabinet :                  John Mill

                                                          Tecumseh (Ontario)

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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